Une prière pour débloquer le processus de paix

Le pape François reçoit, dimanche 8 juin, au Vatican, Shimon Peres et Mahmoud Abbas qu’il a invités à prier pour la paix.

5/6/14 - 17 H 36

À forte portée symbolique, la rencontre des présidents israélien et palestinien pourrait être accompagnée d’un entretien politique.

Ce fut l’annonce surprise du pèlerinage du pape François en Terre sainte : une invitation aux présidents israélien, Shimon Peres, et palestinien, Mahmoud Abbas, à venir au Vatican prier pour la paix avec lui. Deux semaines plus tard, la rencontre prend forme. Le Saint-Siège doit en donner les détails aujourd’hui, mais il apparaît déjà certain que la prière, qui sera retransmise par télévision, se tiendra dimanche à 19 heures dans les jardins du Vatican, à proximité de la Casina Pie‑IV, élégant édifice abritant les académies pontificales des sciences.

Selon l’agence de presse spécialisée I. media, le pape devrait au préalable recevoir les deux présidents à la résidence vaticane Sainte-Marthe. Comme il l’a dit depuis Bethléem selon une formule à la fois forte et humble : « J’offre ma maison. »

Un lieu à la fois neutre – ce n’est pas une église – et personnel, puisque le pape argentin y vit. « Recevoir chez lui permet au pape de dire davantage ce qu’il veut que lorsqu’il était en Terre sainte, d’avoir un entretien plus politique et de taper du poing sur la table si besoin », estime une source diplomatique à Jérusalem.

« POUR PRIER, C’EST TOUT »
Si un échange direct entre les présidents palestinien et israélien est attendu, la rencontre se veut dévolue d’abord à la prière, comme l’a lui-même souligné le pape François à la presse, à son retour de Terre sainte : « Nous nous réunissons pour prier, c’est tout. Et après, chacun reviendra chez soi », avait-il insisté, précisant que ce « ne sera pas pour une médiation ou pour chercher des solutions ».

« Le pape organise une rencontre à hauteur de sa fonction », analyse la même source diplomatique, reconnaissant que cette invitation à prier peut « laisser perplexe et même faire sourire » ceux qui savent que Mahmoud Abbas et Shimon Peres ne sont pas réputés pour être des croyants pratiquants, leur parcours prouvant plutôt le contraire. Mais le premier a saisi la visibilité internationale qu’offre une telle rencontre à l’Autorité palestinienne. Quant au président israélien, il engage, à deux jours de la fin officielle de son mandat, son successeur à ne pas persister dans la même voie radicale que l’actuel premier ministre Benyamin Netanyahou, qui poursuit la construction de colonies.

Au-delà d’arrière-pensées politiques, « cette rencontre permet de montrer que le conflit israélo-palestinien n’est pas religieux », relève une autre source diplomatique : « Elle dégage le conflit des aspects religieux qui y sont instrumentalisés. » Et remet l’apport spirituel à sa place, avec deux dirigeants au pouvoir fragile, affaibli ou finissant.

« Nous espérons que, là où actuellement les forces humaines ont échoué, le Seigneur donne à tous sagesse et force, pour construire une véritable paix », a résumé le cardinal Pietro Parolin, sur Radio Vatican, le 30 mai. Le secrétaire d’État du Saint-Siège veut croire à la « portée symbolique très forte » de cette prière et souhaite qu’elle « ravive l’espérance » .

« ASPIRATION ARDENTE À LA PAIX »
« Prier ensemble sans faire aucune discussion, cela peut aider », a fait valoir à la presse le pape François, qui, selon maints observateurs, est intimement confiant dans l’apport décisif de la prière. Son initiative pour le 8 juin rappelle ainsi la veillée de prière qu’il avait présidée le 7 septembre dernier pour la Syrie, alors menacée d’une intervention armée occidentale.

« Tous – spécialement ceux qui sont placés au service de leur peuple – nous avons le devoir de nous faire instruments et artisans de paix, avant tout dans la prière », a-t-il expliqué le 25 mai, en lançant publiquement son invitation à cette rencontre, poursuivant : « Tous les hommes et toutes les femmes de cette Terre et du monde entier nous demandent de porter devant Dieu leur aspiration ardente à la paix. »

Pour que la prière porte, le pape ne veut pas la limiter à ses seuls invités du 8 juin. « S’il vous plaît, je vous demande de ne pas nous laisser seuls : priez, priez beaucoup », a-t-il demandé à la foule, place Saint-Pierre, lors de son audience générale du 28 mai, ajoutant : « Je compte sur vos prières. Priez fort, en cette période. »

Le pape François sait déjà qu’il aura l’appui du patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomeos, avec qui il était en Terre sainte et qui est attendu le 8 juin au Vatican. Le patriarche latin de Jérusalem sera aussi présent à Rome et a demandé que la messe du dimanche, ce jour-là, dans les paroisses de la Ville sainte, soit célébrée aux intentions de cette rencontre. De leur côté, les présidents palestinien et israélien devraient être accompagnés de rabbins et d’imams. Des moments de prière sont aussi annoncés en Italie et en Argentine, tout comme en France.

Sébastien Maillard
5/6/14 - 17 H 36

http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Une-priere-pour-debloquer-le-processus-de-paix-2014-06-05-1161474