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| La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange | |
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Miséricorde de Dieu
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| Sujet: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Ven 27 Déc - 18:27 | |
| Rappel du premier message :DEUXIÈME PARTIE LES PERFECTIONS DE DIEU QUE SA PROVIDENCE SUPPOSE
CHAPITRE II L'INFINITÉ DE DIEU
La preuve à priori de l'infinité divineSi donc Dieu existe par soi, s'il est l'Être même, l'existence même, conclut saint Thomas, il est infini, d'une infinité non pas quantitative, mais qualitative et de perfection. Si le lis idéal est indépendant de toute limite matérielle individuelle, l'Être même subsistant dépasse non seulement toute limite spatiale et matérielle, mais même toute limite d'essence. Tandis qu'un ange, si parfait soit-il, a une existence finie selon les limites de son essence spirituelle, en Dieu, l'existence n'est pas reçue dans une essence, susceptible d'exister, il est l'Existence même, irreçue, éternellement subsistante. Dieu est ainsi souverainement déterminé, parfait, complet, rien ne peut lui être ajouté, et il est en même temps infini; c'est-à-dire d'une perfection sans limites, incompréhensible, « l'océan infini de l'être », dit saint Jean Damascène, mais un océan spirituel, sans bornes, ni rivages, très au-dessus de l'espace, du point, et infiniment supérieur dans sa spiritualité à ce que serait un monde matériel quantitativement infini, ou sans limites. C'est en même temps l'infinité de l'Être, de l'esprit pur, de la sagesse, de la bonté, de l'amour et de la puissance, car l'infinité est un mode de tous les attributs divins. Telle est la preuve à priori qu'en donne saint Thomas, elle est tirée de ce principe : Toute forme non encore reçue dans la matière a une certaine infinité de perfection, comme par exemple la forme du lis. Or l'existence est en toutes choses ce qu'il y a de plus formel, l'ultime actualité. Et donc Dieu, qui est l'Être même, l'existence même, est infini, d'une infinité de perfection, qui dépasse toute limite spatiale, matérielle, et même toute limite d'essence. Il est ainsi infiniment supérieur à tous les corps et à tous les esprits purs créés. Preuve a posteriori de l'infinité divineIl y a une autre preuve de l'infinité de Dieu; c'est une preuve a posteriori, qui montre que la production des êtres finis ex nihilo ou leur création de rien suppose une puissance active infinie, qui ne peut appartenir qu'à une cause infiniment parfaite. (Cf. saint Thomas, Ia, q. 45, a. 5.) En effet, une cause finie ne peut produire un effet quelconque qu'en transformant un sujet préexistant, susceptible d'être transformé. Ainsi le statuaire a besoin de matière pour faire une statue; ainsi encore le maître forme peu à peu l'intelligence du disciple, mais il ne lui a pas donné l'intelligence. Et plus le sujet à transformer est pauvre, plus la puissance active transformatrice doit être riche et féconde. Plus la terre est pauvre, plus il faut la labourer, y mettre une bonne semence, la fertiliser. Mais si la terre était si pauvre, si pauvre, qu'elle soit réduite à zéro, à rien, absolument rien, alors pour produire de ce rien quelque chose, il faudrait une puissance active non seulement très riche et très féconde, mais une puissance active infiniment parfaite, c'est la puissance créatrice. Les agents créés sont transformateurs, mais ils ne sont pas créateurs. Pour produire tout l'être d'un être fini quelconque, si petit soit-il, pour produire tout l'être d'un grain de sable, c'est-à-dire pour le produire de rien, il faut une puissance infinie, qui ne peut appartenir qu'à l'Être infiniment parfait; et donc la cause première de tout ce qui arrive à l'existence doit être infiniment parfaite. Non seulement le plus élevé des anges n'a pu créer l'univers physique, mais il ne peut même pas créer un grain de poussière, et il ne le pourra jamais; il faut, pour créer de rien (c'est-à-dire: sans aucun sujet préexistant) quoi que ce soit, une puissance infinie Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse ami de la Miséricorde PS Pour ceux qui sont intéressés par le début du recueil http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Garrigou_Lagrange/Providence.html#AVANT-PROPOS | |
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Miséricorde de Dieu
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 16 Fév - 2:27 | |
| CHAPITRE IV LA PROVIDENCE SELON L'ÉVANGILE
CHAPITRE V LA PROVIDENCE ET LA PRIÈRE
En réalité, comme le montrent bien saint Augustin et saint Thomas (IIa-IIae, q. 83, a. 2), la prière n'est pas une force qui aurait son premier principe en nous, ce n'est pas un effort de l'âme humaine qui essaierait de faire violence à Dieu, pour lui faire changer ses dispositions providentielles.
Si l'on parle ainsi quelquefois, c'est par métaphore, c'est une manière humaine de s'exprimer. En réalité, la volonté de Dieu est absolument immuable, autant qu'elle est Miséricordieuse, mais c'est précisément dans cette immutabilité qu'est la source de l'infaillible efficacité de la prière bien faite, comme la source des fleuves est sur les plus hautes montagnes.
La prière en effet a été voulue par Dieu, bien avant que nous ne voulions nous mettre à prier. Dieu de toute éternité a voulu la prière comme une cause des plus fécondes dans notre vie spirituelle ; il l'a voulue comme un moyen d'obtenir la grâce dont nous avons besoin pour arriver au terme de notre voyage.
Un Dieu qui n'aurait pas prévu et voulu de toute éternité les prières que nous lui adressons dans le temps, c'est là une conception aussi puérile que celle d'un Dieu qui s'inclinerait devant nos volontés et changerait ses desseins.
Ce n'est pas nous qui avons inventé la prière. C'est le Seigneur lui-même qui l'a inspirée aux premiers hommes, qui, comme Abel, lui ont adressé leurs supplications. C'est Lui qui la faisait jaillir du cœur des patriarches et des prophètes, et qui continue à l'inspirer à toutes les âmes d'oraison. C'est Lui qui nous a fait dire par son Fils : « Demandez et vous recevrez, cherchez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira ».
La réponse à l'objection que nous avons rappelée est au fond très simple, malgré le mystère de la grâce qui s'y trouve contenu. Cette réponse consiste en ceci : La vraie prière faite dans les conditions voulues est infailliblement efficace parce que Dieu, qui ne peut pas se dédire, a décrété qu'elle le serait.
Non seulement tout ce qui arrive a été prévu et voulu (ou tout au moins permis) par un décret providentiel, mais la manière dont les choses arrivent, les causes qui produisent les événements, les moyens par lesquels s'obtiennent les fins.
La Providence de toute éternité a fixé par exemple qu'il n'y aurait pas de moissons sans semences, pas de vie familiale sans certaines vertus, pas de vie sociale sans autorité et obéissance, pas de science sans labeur intellectuel, pas de vie intérieure sans prière, pas de rédemption sans un Rédempteur, et, sans l'application de ses mérites, pas de salut pour les adultes sans le désir sincère de ce salut.
Dans tous les ordres du plus infime au plus élevé, en vue de certains effets, Dieu a préparé les causes qui les doivent produire, en vue de certaines fins il a préparé les moyens proportionnés. Pour les moissons matérielles il a préparé la semence matérielle, pour les moissons spirituelles des semences spirituelles, parmi lesquelles il faut compter la prière.
La prière est une cause ordonnée de toute éternité par la Providence à produire, dans l'ordre Spirituel, cet effet qui est l'obtention des dons de Dieu nécessaires au salut, comme la chaleur et l'électricité sont les causes ordonnées de toute éternité à produire dans l'ordre physique, les effets que nous constatons tous les jours.
Et donc l'immutabilité des desseins de Dieu, bien loin de s'opposer à l'efficacité de la prière, en est le suprême fondement. Mais il y a plus, la prière doit être l'acte par lequel nous reconnaissons constamment que nous sommes sous le gouvernement de Dieu.
Source : Livres-mystiques.com
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| | | Miséricorde de Dieu
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 16 Fév - 15:59 | |
| CHAPITRE IV LA PROVIDENCE SELON L'ÉVANGILE
CHAPITRE V LA PROVIDENCE ET LA PRIÈRE
La prière est un culte rendu à la Providence
Toutes les créatures ne vivent que des dons de Dieu, mais seul l'homme et l'ange peuvent s'en rendre compte. La plante et l'animal reçoivent sans savoir qu'ils reçoivent. Le Père céleste, dit l'Évangile, nourrit les oiseaux du ciel, mais ils l'ignorent.
L'homme, lui, vit des dons de Dieu et il peut s'en apercevoir. Si le charnel l'oublie, c'est que ses passions oppriment en lui la raison. Si l'orgueilleux ne veut pas l'avouer, c'est que l'orgueil met un bandeau sur les yeux de l'esprit, et lui fait juger de tout, non par la cause la plus élevée, mais par ce qu'il y a souvent de plus inférieur et de plus mesquin.
Si notre raison ne s'égare pas, elle doit convenir que, comme le dit saint Paul : « Nous n'avons rien que nous ne l'ayons reçu. Quid habes quod non accepisti ? (I Cor., IV, 7). L'existence, la santé, la force, la lumière de l'intelligence, l'énergie morale soutenue, la réussite de nos entreprises, qu'un rien pourrait faire échouer, tout cela c'est le don de la Providence.
Et au-dessus de la raison, la foi nous dit que la grâce nécessaire au salut, et plus encore le Saint-Esprit promis par Notre-Seigneur, constituent le don de Dieu par excellence, celui dont parlait Jésus à la Samaritaine, quand il lui disait : « Si tu savais le don de Dieu ! »
La prière est ainsi un culte rendu à la Providence, lorsque nous demandons à Dieu en esprit de foi, la santé pour les malades, la lumière de l'intelligence pour voir clair dans les difficultés, la grâce pour résister à la tentation et pour persévérer dans le bien. Remarquons comment le Seigneur nous invite à rendre à la Providence ce culte quotidien, matin et soir, et souvent dans le cours de la journée. Rappelons-nous comment Notre-Seigneur, après nous avoir dit : Demandez et vous recevrez, nous manifeste la bonté de la Providence à notre égard : « Lequel de vous donnera une pierre à son enfant, si celui-ci lui demande du pain, et s'il lui demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent ?
Si donc méchants comme vous êtes, vous donnez de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ! »
L'assertion de Notre-Seigneur porte avec elle sa preuve : si la bonté existe au cœur des pères, ne leur vient-elle pas du cœur de Dieu, ou de son amour ?
Quelquefois même on dirait que le Seigneur renverse les rôles, lorsque, par sa grâce actuelle prévenante, il nous sollicite pour que nous priions, pour que nous rendions à la Providence ce culte qui lui est dû et pour que nous recevions d'elle ce dont nous avons le plus besoin.
Rappelons-nous par exemple comment Notre-Seigneur amena la Samaritaine à prier : « Si tu savais le don de Dieu, c'est toi qui m'aurais demandé à boire... et je t'aurais donné de l'eau vive... jaillissant en vie éternelle ». Le Seigneur supplie qu'on vienne à Lui ; il est « patient à nous attendre, et pressé de nous exaucer ».
Le Seigneur est comme un père, qui est résolu d'avance d'accorder un plaisir à ses enfants, et qui les porte à le lui demander. Jésus voulait d'avance convertir la Samaritaine et peu à peu il fit jaillir la prière de son cœur, car la grâce sanctifiante n'est pas comme une liqueur qui se verse dans un vase inerte, elle est une vie nouvelle, que l'adulte ne reçoit qu'à condition de la désirer.
Parfois le Seigneur semble ne pas nous exaucer, surtout lorsque notre prière n'est pas assez pure, lorsqu'elle demande les biens temporels pour eux-mêmes, au lieu de les demander dans la mesure où ils sont utiles à notre salut. Puis peu à peu la grâce nous invite à mieux prier, en nous rappelant la parole de l'Évangile : « Cherchez le royaume des cieux et tout le reste vous sera donné par surcroît »
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 17 Fév - 15:32 | |
| CHAPITRE IV LA PROVIDENCE SELON L'ÉVANGILE
CHAPITRE V LA PROVIDENCE ET LA PRIÈRE
La prière est un culte rendu à la Providence
Le Seigneur semble même parfois nous rebuter, comme pour voir si nous persévérerons à prier. Ainsi fit-il à l'égard de la Chananéenne, en lui disant cette parole sévère qui semblait un refus : « C'est aux brebis perdues d'Israël que je suis envoyé ; il ne convient pas de donner aux chiens le pain des enfants ». La Chananéenne, certainement inspirée par la grâce qui lui venait du Christ, répondit : « Pourtant, Seigneur, les petits chiens mangent les miettes tombées de la table de leur maître ». - « O femme, dit Jésus, ta foi est grande, qu'il te soit fait selon ce que tu demandes ». Matth., XV, 22. Et sa fille qui était tourmentée par le démon fut délivrée.
Lorsque nous prions vraiment, nous reconnaissons, non pas seulement de façon abstraite et théorique, mais pratiquement que nous sommes sous le gouvernement de Dieu, infiniment supérieur à celui des hommes. Notre prière doit rendre ainsi incessamment à la Providence le culte qui lui est dû, sous forme d'adoration, de supplication, d'action de grâces ou de réparation. Mais il y a plus encore : la prière a avec la Providence un rapport encore plus intime.
La prière coopère au gouvernement divin
Bien loin de s'opposer aux dispositions providentielles et de vouloir les changer, la prière coopère au gouvernement divin, parce que, en priant, nous nous mettons à vouloir dans le temps ce que Dieu veut pour nous de toute éternité.
Il peut sembler, lorsque nous prions, que ce soit la volonté divine qui s'incline vers la nôtre ; en réalité c'est la nôtre qui s'élève et se met à l'unisson de la volonté divine. Toute prière est, disent les Pères, une élévation de l'âme vers Dieu, qu'il s'agisse de la prière de demande, ou de celle d'adoration, de louange, ou de celle d'action de grâces, ou de celle de réparation, d'amende honorable.
Vraiment celui qui prie comme il le faut, avec humilité, confiance, persévérance, en demandant les biens nécessaires au salut, celui-là coopère au gouvernement divin. Nous sommes deux à vouloir au lieu d'un. Ce pécheur pour lequel nous avons longtemps prié, c'est Dieu qui l'a converti ; mais nous étions l'associé de Dieu. Cette âme éprouvée, pour laquelle nous avons longtemps demandé lumière et force, c'est Dieu qui l'a éclairée et fortifiée ; mais il avait décidé de toute éternité de ne produire cet effet salutaire qu'avec notre concours, qu'à la suite de notre intercession.
Les conséquences de ce principe sont innombrables. Il s'ensuit d'abord que plus la prière est conforme aux intentions divines, plus elle coopère au gouvernement divin. Pour qu'elle ait de plus en plus cette conformité, disons lentement, profondément, tous les jours le Pater, méditons-le et que l'amour accompagne la foi ; cette méditation aimante deviendra une contemplation, par laquelle nous obtiendrons que le nom de Dieu soit sanctifié, glorifié en nous et autour de nous, que son règne arrive, que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel, par laquelle nous obtiendrons aussi le pardon de nos fautes et la délivrance du mal, la sanctification et le salut.
Il suit de là que notre prière est d'autant plus pure et plus efficace que nous prions du nom du Christ et que nous offrons à Dieu les actes d'amour et d'adoration de sa sainte âme, pour suppléer à l'imperfection de notre amour et de notre adoration.
Le chrétien qui, chaque jour un peu mieux, dit le Pater, qui le dit du fond de son âme, non seulement pour soi, mais aussi pour les autres, coopère certes grandement au gouvernement divin. Il y coopère plus que les savants qui ont découvert les lois du cours des astres, plus que les grands médecins, qui ont trouvé les remèdes des plus affreuses maladies. L'influence de la prière d'un saint François, d'un saint Dominique, plus près de nous d'une sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, ne fut certes pas moindre que celle d'un Newton ou d'un Pasteur. Celui qui prie vraiment, comme ont prié les saints, coopère au salut non seulement des corps mais des âmes ; or chaque âme, ouverte par ses facultés supérieures sur l'infini, est comme un univers qui gravite vers Dieu.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 18 Fév - 16:18 | |
| CHAPITRE IV LA PROVIDENCE SELON L'ÉVANGILE
CHAPITRE V LA PROVIDENCE ET LA PRIÈRE
La prière coopère au gouvernement divin
Si nous sommes attentifs à ces rapports si profonds de la prière et de la divine Providence, nous voyons que la prière est certes plus puissante que l'argent, plus puissante que la science. La science fait des merveilles, mais elle s'acquiert par des moyens humains et produit des effets qui restent dans les limites humaines.
La prière, elle, est une force surnaturelle, dont l'efficacité vient de Dieu, des mérites infinis du Christ, de la grâce actuelle qui nous porte à prier ; c'est une force spirituelle plus puissante que toutes les forces naturelles prises ensemble. Elle peut nous obtenir ce que Dieu seul peut donner : la grâce de la contrition, de la charité parfaite et de la vie éternelle, qui est la fin même du gouvernement divin, la manifestation ultime de sa bonté.
Nous avons particulièrement besoin de penser à la nécessité et à la grandeur de la vraie prière ; surtout de la prière unie à celle de Notre-Seigneur et de la Vierge en ce moment où tant de périls menacent l'Europe et le monde entier, en ce moment où le désarroi général doit nous être par contraste un stimulant à penser tous les jours que nous sommes non pas seulement sous le gouvernement souvent déraisonnable, imprudent des hommes, mais sous le gouvernement infiniment sage de Dieu qui ne permet le mal qu'en vue d'un plus grand bien, et qui veut que nous coopérions à ce bien, par une prière chaque jour plus sincère, plus profonde, plus humble, plus confiante, plus persévérante, par une prière unie à l'action, pour que chaque jour un peu mieux se réalise en nous et autour de nous la demande du Pater: Fiat voluntas tua, sicut in cœlo et in terra.
A l'heure où le bolchevisme fait tant d'efforts contre Dieu, il importe de le redire plus sincèrement, non seulement par les paroles, mais par les actes, pour que le règne de Dieu se substitue de jour en jour à celui de la convoitise et de l'orgueil.
Ainsi nous saisirons de façon concrète et pratique que Dieu ne permet les maux de l'heure présente qu'en vue d'un bien supérieur qu'il nous sera donné de voir, sinon ici-bas, après la mort.
QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE PREMIER POURQUOI ET EN QUOI NOUS DEVONS NOUS ABANDONNER A DIEU
La doctrine de l'abandon à la divine Providence, manifestement fondée sur l'Évangile, a été faussée par les quiétistes qui se sont laissés aller à la paresse spirituelle, ont plus ou moins renoncé à la lutte nécessaire à la perfection et ont gravement diminué la valeur et la nécessité de l'espérance, tandis que le véritable abandon est une forme supérieure de la confiance ou espérance en Dieu.
Mais on peut s'écarter aussi de la doctrine de l'Évangile sur ce point par un défaut opposé à celui des quiétistes, et ce défaut opposé à leur paresseuse quiétude est l'inquiétude vaine et l'agitation.
Ici comme ailleurs la vérité est un point culminant, au milieu et au-dessus de ces deux erreurs extrêmes opposées entre elles. Il importe donc de bien déterminer le sens et la portée de la vraie doctrine de l'abandon à la volonté de Dieu, pour se préserver des sophismes qui ne contiennent qu'une fausse apparence de perfection chrétienne.
Nous verrons d'abord pourquoi, puis en quoi nous devons nous abandonner à la Providence. Nous verrons ensuite comment nous devons nous y abandonner et quelle est la conduite de la Providence à l'égard de ceux qui s'abandonnent à elle absolument. Nous nous inspirerons de la doctrine exposée par saint François de Sales, Bossuet, le Père Piny, O. P., et le Père de Caussade, S. J.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 19 Fév - 16:16 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE PREMIER POURQUOI ET EN QUOI NOUS DEVONS NOUS ABANDONNER A DIEU
Pourquoi devons-nous nous abandonner à la divine Providence ?
Tout chrétien répondra : à cause de sa sagesse et de sa bonté. C'est bien certain, mais pour le bien entendre et éviter l'erreur quiétiste qui renonce plus ou moins à l'espérance et à la lutte nécessaire au salut, pour éviter aussi l'autre extrême : l'inquiétude, la précipitation et l'agitation fébrile et stérile, il convient d'énoncer quatre principes déjà accessibles en un sens à la raison naturelle et clairement exprimés par la Révélation dans l'Écriture. Ce sont les principes mêmes de la vraie doctrine de l'abandon, ils nous en montrent le motif.
Le premier de ces principes est celui-ci : Rien n'arrive que Dieu ne l'ait prévu de toute éternité et qu'il ne l'ait voulu ou du moins permis.
Rien n'arrive, soit dans le monde matériel, soit dans le monde spirituel, que Dieu ne l'ait prévu de toute éternité, car il ne passe pas comme nous de l'ignorance à la connaissance, et les événements ne peuvent rien lui apprendre de nouveau. Non seulement Dieu a prévu tout ce qui arrive et arrivera, mais, dans ces choses, ce qu'il y a de réel et de bon, il l'a voulu, et ce qu'il y a de mal, de désordre moral, il l'a seulement permis. La sainte Écriture, nous l'avons vu, est formelle sur ce point, qui ne laisse place à aucun doute, comme l'ont déclaré les Conciles.
Le second principe est que Dieu ne peut rien vouloir et rien permettre qu'en vue de la fin qu'il s'est proposée en créant, c'est-à-dire qu'en vue de la manifestation de sa bonté, de ses perfections infinies, et en vue de la gloire de l'Homme-Dieu, Jésus-Christ, son Fils unique. Comme le dit saint Paul, I Cor., III, 23 : « Tout est à vous, mais vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu : Omnia enim vestra sunt, vos autem Christi, Christus autem Dei ». A ces deux principes s'ajoute celui-ci, formulé encore par saint Paul aux Rom., VIII, 28 : « Nous savons que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son éternel dessein » et qui persévèrent dans son amour.
Dieu fait concourir à leur bien spirituel, non seulement les grâces qu'il leur accorde, non seulement les qualités naturelles qu'il leur a données, mais aussi les maladies, les contradictions, les échecs, jusqu'à leurs fautes, dit saint Augustin, qu'il ne permet que pour les conduire à une humilité plus vraie et par là à un amour plus pur, comme il permit le triple reniement de saint Pierre pour le rendre plus humble et plus défiant de lui-même, par là même plus fort, plus confiant en la divine Miséricorde.
Ces trois premiers principes se résument donc ainsi : « Rien n'arrive que Dieu ne l'ait prévu et voulu ou du moins permis ; il ne veut rien et ne permet rien que pour la manifestation de sa bonté et de ses perfections infinies, pour la gloire de son Fils et le bien de ceux qui l'aiment ».
Ces trois principes nous montrent que notre confiance dans la Providence ne saurait être trop filiale, trop ferme ; nous pouvons même dire qu'elle doit être aveugle, comme la foi qui porte sur les mystères non évidents, non vus, fides est de non visis ; nous sommes en effet certains d'avance que c'est au bien que la divine Providence ordonne infailliblement toutes choses, et nous sommes plus sûrs de la rectitude de ses desseins que de la droiture de nos intentions les meilleures.
Nous n'avons donc, en nous abandonnant à Dieu, rien à craindre; que de ne pas lui être assez soumis.
Mais ces derniers mots nous obligent à formuler, contre le quiétisme, un quatrième principe, non moins certain que les précédents : cet abandon ne nous dispense pas évidemment de faire ce qui est en notre pouvoir pour accomplir la volonté de Dieu signifiée par les préceptes, les conseils, les événements ; mais, quand nous avons loyalement voulu l'accomplir au jour le jour, nous pouvons et devons nous abandonner pour le reste à la volonté divine de bon plaisir, si mystérieuse soit-elle, et éviter l'inquiétude vaine et l'agitation.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 20 Fév - 16:26 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE PREMIER POURQUOI ET EN QUOI NOUS DEVONS NOUS ABANDONNER A DIEU
Pourquoi devons-nous nous abandonner à la divine Providence ?
Ce quatrième principe est équivalemment formulé par le Concile de Trente, sess. VI, c. 13, lorsqu'il dit que tous nous devons très fermement espérer dans le secours de Dieu, et nous confier en lui, en veillant à l'accomplissement de ses préceptes.
Le proverbe commun dit aussi : « Fais ce que dois, advienne que pourra ». Tous les théologiens expliquent ce qu'est la volonté divine signifiée par les préceptes, l'esprit des conseils et les événements.
Ils ajoutent qu'en nous conformant à cette volonté signifiée[, nous devons nous abandonner à sa volonté divine de bon plaisir, si cachée soit-elle, car nous sommes sûrs d'avance que c'est pour le bien qu'elle veut ou permet saintement toutes choses.
Il faut ici particulièrement noter ce qui est dit dans l'Évangile de saint Luc, XVI, 10 : « Celui qui est fidèle dans les petites choses est fidèle aussi dans les grandes » ; si nous faisons chaque jour le possible pour être fidèle au Seigneur dans les choses ordinaires de la vie, ayons confiance qu'il nous accordera la grâce pour lui être fidèle dans les circonstances extrêmes, s'il permet que nous y soyons placés ayons confiance qu'il nous donnera la grâce de mourir héroïquement plutôt que de rougir de lui, et de le trahir, si un jour ou l'autre nous avons à souffrir pour lui.
Tels sont les principes de la doctrine de l'abandon confiant. Ces principes acceptés par tous les théologiens sont sur ce point comme l'expression de la foi chrétienne. On trouve ainsi l'équilibre au-dessus des deux erreurs que nous rappelions au début de cet article.
Par la fidélité au devoir de minute en minute on évite la fausse et paresseuse quiétude des quiétistes, et par l'abandon confiant on échappe à l'inquiétude vaine et à l'agitation stérile. Cet abandon serait paresse s'il ne supposait pas la fidélité quotidienne, qui est comme le tremplin pour s'élancer sûrement dans l'inconnu. Cette fidélité quotidienne à la volonté divine signifiée donne comme le droit de s'abandonner pleinement pour l'avenir à la volonté divine de bon plaisir non encore manifestée.
L'âme fidèle se rappelle souvent la parole de Notre-Seigneur : « Ma nourriture est de faire la volonté de mon Père » ; elle-même se nourrit constamment de la volonté divine signifiée, et elle s'abandonne à la volonté divine non encore manifestée, un peu comme le nageur, s'appuyant sur le flot qui passe, se confie au flot qui arrive, à l'océan qui pourrait l'engloutir, mais qui en réalité le porte.
Ainsi l'âme doit avancer vers la haute mer, vers l'océan infini de l'être, comme disait saint Jean Damascène ; elle doit s'appuyer sur la volonté divine manifestée à l'heure présente, pour s'abandonner à la volonté divine dont dépendent les heures qui suivent et tout l'avenir.
L'avenir est à Dieu ; les événements sont dans sa main : si les marchands qui achetèrent Joseph vendu par ses frères étaient passés une heure plus tôt, Joseph n'eût pas été en Égypte et toute sa vie eût été changée; la nôtre dépend aussi de certains événements dont Dieu est le maître. Fidélité quotidienne et abandon confiant donnent ainsi à la vie spirituelle son équilibre, sa stabilité, son harmonie.
On vit ainsi dans un recueillement presque continuel et une abnégation progressive ; ce sont les conditions ordinaires de là contemplation et de l'union à Dieu. Voilà pourquoi nous devons vivre dans l'abandon à la volonté divine encore inconnue, en nous nourrissant de minute en minute de celle qui est déjà signifiée.
Cette union de la fidélité et de l'abandon nous fait entrevoir ce que doit être l'union de l'ascétique qui insiste sur la fidélité ou conformité à la volonté divine et de la mystique qui met l'accent sur l'abandon.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Sam 22 Fév - 2:09 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE PREMIER POURQUOI ET EN QUOI NOUS DEVONS NOUS ABANDONNER A DIEU
En quoi devons-nous nous abandonner à la divine Providence ?
Après nous être conformés aux principes que nous venons d'énoncer, quand nous avons fait tout ce que nous commandent la loi de Dieu et la prudence chrétienne, notre abandon doit s'étendre à tout. Qu'est-ce à dire ?
D'abord à tout l'avenir, à ce que nous serons demain, dans vingt ans et plus tard. Nous devons aussi nous abandonner à Dieu pour le présent, au milieu des difficultés où nous pouvons être à l'heure actuelle ; abandonnons aussi notre passé, nos actes et leurs suites, à la Miséricorde divine.
Il faut de même nous abandonner à Dieu pour ce qui est du corps, santé ou maladie, et pour ce qui est de l'âme, joies et épreuves, de brève ou de longue durée. Il faut nous abandonner à Dieu au sujet de la bienveillance ou de la malice des hommes à notre égard
« Si Dieu est avec nous, dit saint Paul, qui sera contre nous ? Lui qui n'a pas épargné son propre Fils, mais qui l'a livré à la mort pour nous tous, comment avec lui ne nous donnera-t-il pas toutes choses ?... Qui nous séparera de l'amour du Christ ? Sera-ce la tribulation ou l'angoisse, ou la persécution ou la faim, ou la nudité ou le péril ou l'épée... J'ai l'assurance que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu en Jésus-Christ Notre-Seigneur ».
Quel plus parfait abandon, dans la foi, l'espérance et l'amour ? Abandon pour ce qui est des vicissitudes du monde, des révolutions qui peuvent le bouleverser, pour ce qui est de la vie et de la mort, de l'heure de la mort et de la manière douce ou violente dont nous rendrons le dernier soupir.
Les Psaumes disaient de même : « Craignez le Seigneur, car il n'y a point d'indigence pour ceux qui le craignent ; les lionceaux peuvent connaître la disette et la faim, mais ceux qui cherchent le Seigneur ne sont privés d'aucun bien ». (Ps. XXXIII, 10).
« Qu'elle est grande ta bonté, que tu tiens en réserve pour ceux qui te craignent, que tu témoignes à ceux qui mettent en toi leur refuge... Tu les mets à couvert... contre les machinations des hommes, à l'abri des langues qui les attaquent ». (Ps. XXX, 20-21).
Job disait de même : « Je suis environné de moqueurs, mon œil ne s'ouvre que pour voir leurs outrages. O Dieu, sois auprès de toi-même ma caution. Quel autre voudrait me frapper de sa main ? » (Job, XVII, 3).
Comme il est rapporté au livre de Daniel, XIII, 42, c'est ainsi qu'une digne femme, Suzanne, fille d'Helcias, odieusement calomniée par deux vieillards, s'abandonna à Dieu en s'écriant : « Dieu éternel, qui connaissez ce qui est caché et qui savez toutes choses avant qu'elles arrivent, vous savez qu'ils ont rendu un faux témoignage contre moi, maintenant je meurs sans avoir rien fait de ce qu'ils ont méchamment inventé contre moi ».
Comme il est rapporté dans la prophétie, le Seigneur exauça la prière de cette noble femme. Comme on la conduisait à la mort, Dieu éveilla l'esprit d'un jeune enfant nommé Daniel. Celui-ci cria à haute voix : « Pour moi, je suis pur du sang de cette femme ». Tout le peuple se tourna vers lui et lui dit : « Que signifie cette parole que tu dis là ? »
C'est alors que le jeune Daniel, inspiré par Dieu, montra que les deux accusateurs avaient rendu un faux témoignage ; il les sépara l'un de l'autre, les interrogea séparément devant la foule, et, comme ils se contredirent, ils manifestèrent, sans le vouloir, qu'ils avaient menti.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 23 Fév - 2:36 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE PREMIER POURQUOI ET EN QUOI NOUS DEVONS NOUS ABANDONNER A DIEU
En quoi devons-nous nous abandonner à la divine Providence ? Que conclure pratiquement ? C'est qu'en faisant le possible pour accomplir nos devoirs quotidiens, nous devons nous abandonner pour le reste à la divine Providence, avec la plus filiale confiance. Et si nous tâchons vraiment d'être fidèles dans les petites choses, dans la pratique de l'humilité, de la douceur, de la patience, chaque jour pour les choses courantes, le Seigneur, lui, nous donnera la grâce pour être fidèles dans les choses grandes et difficiles, s'il vient à nous les demander ; alors, dans les circonstances extrêmes, il donnera à ceux qui le cherchent des grâces extrêmes.
Il est dit dans le Psaume LIV, 23 : « Jacta super Dominum curam tuam, et ipse te enutriet: Repose-toi sur le Seigneur, et il te soutiendra ; il ne laissera pas à jamais chanceler le juste... Pour moi, je mets en toi ma confiance ».
C'est dans les mêmes sentiments que saint Paul écrit aux Philippiens, IV, 4 : « Réjouissez-vous dans le Seigneur en tout temps : je le répète, réjouissez-vous. Que votre douceur soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. Ne vous inquiétez de rien ; mais en toute circonstance faites connaître à Dieu vos besoins par des prières et des supplications, avec des actions de grâces. Que la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, garde vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus ».
Saint Pierre dit aussi dans sa première Épître, V, 6, pour exhorter à la confiance : « Humiliez-vous sous la puissante main de Dieu, afin qu'il vous élève au temps marqué ; déchargez-vous sur lui de toutes vos sollicitudes, car lui-même prend soin de vous. Soyez sobres, veillez ; votre adversaire, le démon, comme un lion rugissant, rôde autour de vous, cherchant qui dévorer. Résistez-lui, fermes dans la foi, sachant que vos frères dispersés dans le monde endurent les mêmes souffrances que vous. Le Dieu de toute grâce, qui vous a appelés à sa gloire éternelle dans le Christ, après quelques souffrances, achèvera lui-même son œuvre, vous affermira, vous fortifiera, vous rendra inébranlables ».
« Beati omnes qui confident in Domino : Heureux ceux qui mettent en Dieu leur confiance » (Ps. II, 13). « Ceux qui se confient dans le Seigneur, dit Isaïe, prennent de nouvelles forces ; ils élèveront leur vol comme des aigles : ils courront et ne se fatigueront point ; ils marcheront et ne se lasseront point ». (Isaïe, XL, 31).
Un modèle parfait de cet esprit d'abandon à la divine Providence est saint Joseph, au milieu de toutes les difficultés qui surgissent pour lui au moment de la naissance du Sauveur, à Bethléem, puis quand il entend la douloureuse prophétie du vieillard Siméon, et lors de la fuite en Égypte loin d'Hérode, jusqu'au retour à Nazareth.
A son exemple, en pratiquant nos devoirs quotidiens, vivons dans cet esprit, et la grâce divine ne nous manquera pas ; par elle nous serons à la hauteur de ce que le Seigneur nous demandera, si difficile que ce puisse être à certaines heures.
CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Nous avons dit pourquoi nous devons nous confier et nous abandonner à la Providence : à cause de sa sagesse et de sa bonté, et en quoi nous devons nous en remettre à elle : en toutes choses, pour l'âme et le corps, à condition d'accomplir nos devoirs quotidiens, et en nous rappelant que, si nous sommes fidèles dans les petites choses, nous obtiendrons la grâce pour l'être aussi dans les grandes.
Voyons maintenant comment nous devons nous confier et nous abandonner à la Providence, selon la nature des événements qui dépendent ou non de la volonté humaine, et quel doit être l'esprit de cet abandon, de quelles vertus doit-il s'inspirer.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 23 Fév - 15:51 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Des différentes manières de s'abandonner à la Providence selon la nature des événements
Pour bien entendre cette doctrine de sainte indifférence, il convient de remarquer, comme l'ont fait souvent les auteurs spirituels[55], que notre abandon ne doit pas s'exercer de la même manière à l'égard des événements qui ne dépendent pas de la volonté humaine, à l'égard des injustices des hommes et à l'égard de nos fautes et de leurs suites. S'il s'agit de choses qui ne dépendent pas de la volonté humaine, comme d'accidents impossibles à prévoir, de maladies incurables, notre abandon ne saurait être trop absolu.
La résistance serait inutile et ne servirait qu'à nous rendre plus malheureux ; tandis que l'acceptation, en esprit de foi, de confiance et d'amour, rendra très méritoires ces souffrances inévitables[56]. Dans les circonstances douloureuses chaque fois que nous dirons fiat, ce sera un nouveau mérite ; par là l'épreuve réelle deviendra très sanctificatrice. Bien plus, par l'abandon nous tirerons profit d'épreuves probables, qui n'arriveront peut-être pas, comme Abraham eut un grand mérite de se préparer avec un parfait abandon à l'immolation de son fils, que le Seigneur ne lui demanda plus dans la suite. La pratique de l'abandon change ainsi les épreuves actuelles ou à venir en moyens de sanctification, et cela d'autant plus que cette pratique est inspirée par un plus grand amour de Dieu.
S'il s'agit des souffrances qui nous viennent de l'injustice des hommes, malveillance, mauvais procédés, calomnies, que faut-il faire ?
Saint Thomas, en parlant des injures, des reproches immérités et affronts, des détractions, qui n'atteignent que notre personne, dit qu'il faut être prêt à les supporter avec patience, selon ces paroles de Notre-Seigneur : « Si quelqu'un te frappe sur une joue, présente-lui l'autre » (Matth., V, 39). Mais quelquefois, ajoute-t-il, il convient de répondre, soit pour le bien de celui qui insulte, pour réprimer son audace, soit pour éviter un scandale qui pourrait naître de ces détractions ou calomnies. Si nous croyons devoir répondre ainsi et résister de la sorte, faisons-le en nous remettant au Seigneur pour le succès de cette démarche.
En d'autres termes, nous devons déplorer et réprouver ces injustices, non pas en tant qu'elles blessent notre amour-propre ou notre orgueil, mais en tant qu'elles sont une offense à Dieu, et compromettent le salut de ceux qui s'en rendent coupables et de ceux qu'ils peuvent égarer.
Pour ce qui est de nous, nous devons voir dans l'injustice des hommes à notre égard la justice divine qui a permis ce mal pour nous donner une occasion d'expier d'autres fautes, réelles celles-là, et que personne ne nous reproche. Il convient de voir aussi dans cette épreuve la Miséricorde divine, qui a voulu par là nous détacher des créatures, nous délivrer de nos affections désordonnées, de notre orgueil, de notre tiédeur, en nous mettant dans la nécessité pressante de recourir à une prière de supplication fervente.
Ces injustices sont parfois au point de vue spirituel comme un coup de bistouri très douloureux, mais libérateur. La souffrance qu'elles causent doit nous montrer le prix de la justice véritable, elle doit non seulement nous porter à la pratiquer envers le prochain, mais elle doit faire naître en nous la béatitude de ceux qui ont faim et soif de justice et qui seront rassasiés, comme il est dit dans l'Évangile.
Le mépris des hommes, au lieu de produire en nous le trouble ou l'aigreur, peut nous devenir ainsi grandement salutaire, et nous révéler toute la vanité de la gloire humaine, par contraste, toute la beauté de la gloire divine telle que les saints l'ont comprise. C'est le chemin qui conduit à la vraie humilité qui fait accepter et aimer d'être traité comme une personne digne de mépris.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 24 Fév - 16:51 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Des différentes manières de s'abandonner à la Providence selon la nature des événements
Enfin s'il s'agit des inconvénients de tout genre qui peuvent résulter, non plus de l'injustice des autres à notre égard, mais de nos propres fautes, de nos imprudences ou de notre faiblesse, que faut-il faire ?
Il faut distinguer dans nos fautes et leurs suites ce qu'il y a de désordonné, de coupable, et l'humiliation salutaire qui en provient. Quoi que puisse dire notre amour-propre, ce qu'il y a de déréglé dans nos actes, nous ne saurions trop vivement le regretter comme injure faite à Dieu, comme mal fait à notre âme, et presque toujours par voie de conséquence à l'âme du prochain.
Quant à l'humiliation salutaire qui en résulte, nous devons l'accepter avec un complet abandon, comme il est dit dans le Psaume CXVIII, 71-75 : « Bonum mihi, quia humiliasti me, Domine, ut discam justificationes tuas... Cognovi, Domine, quia æquitas judicia tua, et in veritate tua humiliasti me... - Il m'est bon d'avoir été humilié, afin que j'apprenne tes préceptes. Mieux vaut pour moi la loi de ta bouche que des monceaux d'or et d'argent... Je sais, Seigneur, que tes jugements sont justes ; c'est dans ta fidélité que tu m'as humilié. Que ta bonté soit ma consolation... Que ta Miséricorde vienne sur moi et que je vive, car je fais mes délices de ta loi ».
L'humiliation qui résulte de nos propres fautes est le vrai remède à l'estime exagérée que nous avons de nous-même et que nous conservons souvent malgré la mésestime ou le mépris que d'autres nous manifestent. Il nous arrive même de nous raidir par orgueil sous l'humiliation qui nous vient du dehors et de nous donner à nous-même l'encens qu'on nous refuse. C'est une des formes les plus subtiles et les plus dangereuses de l'amour-propre et de l'orgueil.
La Miséricorde divine veut nous en corriger par l'humiliation qui provient de nos propres fautes ; dans sa bonté elle les fait concourir elles-mêmes de la sorte à notre avancement ; il faut donc, tout en travaillant à nous corriger, accepter ces humiliations avec un parfait abandon. Bonum mihi, quia humiliasti me, Domine... C'est la voie qui conduit à la pratique de la parole profonde de l'Imitation, si féconde pour qui l'a vraiment comprise : Amare nesciri et pro nihilo reputari : Aimer à être ignoré et considéré comme rien. Il faut vivre de cette doctrine selon la nature des événements qui dépendent ou ne dépendent pas de nous.
Dans quel esprit nous abandonner à la Providence ?
Serait-ce, comme l'ont dit les quiétistes, dans un esprit qui diminue l'espérance du salut, sous prétexte de haute perfection ?
Bien au contraire, ce doit être dans un grand esprit de foi, de confiance et d'amour. La volonté de Dieu signifiée par ses commandements est que nous devons espérer en lui et travailler avec confiance à notre salut, quels que soient les obstacles ; cette volonté signifiée est le domaine de l'obéissance, et non pas celui de l'abandon. Celui-ci regarde la volonté de bon plaisir, dont dépendent l'avenir incertain pour nous, les choses qui arrivent journellement dans le cours de la vie, comme la santé, la maladie, les succès et les infortunes.
Faire, sous prétexte de perfection, le sacrifice de notre salut, de notre béatitude éternelle, serait chose absolument contraire à l'inclination naturelle vers le bonheur, inclination qui, comme notre nature, nous vient de Dieu. Ce serait contraire à l'espérance chrétienne, non seulement à celle du commun des fidèles, mais à celle des saints qui, dans les plus grandes épreuves, ont héroïquement espéré « contre toute espérance humaine », selon le mot de saint Paul, alors que tout paraissait perdu. Enfin un pareil sacrifice de notre béatitude éternelle serait contraire à la charité elle-même, qui nous fait aimer Dieu pour lui-même, et nous fait désirer le posséder pour le glorifier éternellement.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 25 Fév - 17:35 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Des différentes manières de s'abandonner à la Providence selon la nature des événements
L'inclination naturelle, qui nous vient de Dieu et nous fait désirer le bonheur, n'est pas désordonnée, car elle nous porte déjà à aimer Dieu, souverain bien, plus que nous-mêmes. Saint Thomas[60] l'a montré : Ainsi, dit-il, dans notre organisme la main est naturellement inclinée à aimer le tout plus qu'elle-même, à se sacrifier pour lui, s'il le faut. Ainsi encore la poule par instinct rassemble ses petits sous les ailes, comme dit Notre-Seigneur, et se sacrifie s'il le faut pour les préserver contre le milan ; parce qu'elle aime inconsciemment le bien de son espèce, plus qu'elle-même.
Cette inclination naturelle existe, sous une forme supérieure, chez l'homme. Et en aimant bien la partie supérieure de lui-même, l'homme aime plus encore son Créateur ; cesser de vouloir notre perfection et notre salut serait nous détourner de Dieu[61]. Il ne saurait donc être question de sacrifier, sous prétexte de haute perfection, le désir de notre salut ou de notre béatitude éternelle, comme l'ont pensé les quiétistes.
Loin de là, l'abandon à Dieu est l'exercice excellent des trois vertus théologales, de foi, d'espérance et de charité, pour ainsi dire fondues ensemble[62]. Mais il est vrai de dire que Dieu purifie notre désir du salut de l'amour-propre qui s'y mêle, par les incertitudes qu'il permet en nous à ce sujet, et qui nous obligent à l'aimer plus purement pour luimême[63].
Il faut s'abandonner à Dieu en esprit de foi, en croyant que, comme le dit saint Paul (Rom., VIII, 28) : tout concourt au bien dans la vie de ceux qui aiment Dieu et qui persévèrent dans son amour. Cet acte de foi est celui que fit le saint homme Job, lorsque, privé de ses biens et de ses enfants, il resta soumis à Dieu, en disant : Le Seigneur a donné, le Seigneur a enlevé, que le nom du Seigneur soit béni ! » (Job, I, 21).
C'est ainsi qu'Abraham s'apprêta à obéir à Dieu qui lui demandait l'immolation de son fils, et qu'avec une très grande foi il s'abandonna pour l'avenir de sa race à la volonté divine de bon plaisir. Saint Paul le rappelle en nous disant dans l'Épître aux Hébreux, XI, 17 : « C'est par la foi qu'Abraham, mis à l'épreuve, offrit Isaac en sacrifice. Ainsi celui qui avait reçu les promesses et à qui il avait été dit : « C'est d'Isaac que naîtra ta postérité », offrit ce fils unique, estimant que Dieu est assez puissant pour ressusciter les morts ». Certes nos épreuves sont beaucoup moins grandes, bien qu'elles nous paraissent parfois bien lourdes à cause de notre faiblesse.
Du moins, à l'exemple des saints, croyons que le Seigneur fait bien tout ce qu'il fait, quand il nous envoie l'humiliation et la sécheresse, comme lorsqu'il nous comble d'honneurs et de consolations.
Comme le remarque le Père Piny[64], il n'y a pas de plus grande et de plus vive foi que de croire que Dieu dispose tout pour notre bien spirituel, lorsqu'il semble nous détruire, renverser nos meilleurs desseins, lorsqu'il permet la calomnie contre nous, l'altération irrémédiable de notre santé ou des choses plus douloureuses encore[65]. C'est là une grande foi, car c'est croire ce qui parait le moins croyable : que Dieu nous élève en nous abaissant, et c'est le croire non seulement d'une façon théorique et abstraite, mais d'une façon pratique et vécue.
C'est vivre vraiment de la parole de l'Évangile : « Quiconque s'élève (comme le pharisien) sera abaissé, et quiconque s'abaisse (comme le publicain) sera élevé » (Luc, XVIII, 14). C'est vivre la parole du Magnificat : « Deposuit potentes de sede, et exaltavit humiles ; esurientes implevit bonis, et divites dimisit inanes : Le Seigneur a abaissé ceux qui s'enorgueillissaient, et il a élevé les petits ; il a comblé de biens les affamés, et les riches, il les a renvoyés les mains vides » (Luc, I, 52). Tous nous devons être de ces petits par l'humilité, et de ces affamés, par le vif désir de la vérité divine, qui est le vrai pain de l'âme.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 26 Fév - 17:52 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Dans quel esprit nous abandonner à la Providence ?
Nous devons donc, en accomplissant notre devoir quotidien, nous abandonner au Seigneur avec un grand esprit de foi. Il faut le faire aussi avec une confiance toute filiale dans sa paternelle bonté. La confiance (fiducia ou confidentia) est, dit saint Thomas[66], l'espérance ferme ou fortifiée, qui vient d'une grande foi en la bonté de Dieu auteur du salut. Le motif formel de l'espérance est la bonté de Dieu, toujours secourable, selon ses promesses, Deus auxilians[67].
« Bienheureux, disent les psaumes, ceux qui se confient dans le Seigneur ». (Ps. II, 12). « Ceux qui se confient en Lui sont comme la montagne de Sion ; elle ne chancelle point, elle est assise sur sa base pour toujours ». (Ps. CXXIV, 1.) « Conservez-moi, Seigneur, parce que j'ai espéré en vous ». (Ps. XV, 1). « J'ai placé en vous mon refuge, je ne serai jamais confondu ». (Ps. XXX, 1.)
Saint Paul (Rom., IV, 18), en parlant d'Abraham, qui, malgré son âge très avancé, crut à la promesse divine qu'il deviendrait le père d'un grand nombre de nations, nous dit : « Espérant contre toute espérance, il crut ; ...devant la promesse divine, il n'eut ni hésitation ni défiance ; mais puisant sa force dans la foi, il rendit gloire à Dieu, pleinement convaincu qu'il saurait accomplir sa promesse ».
De même, en faisant notre devoir quotidien, nous devons attendre de Notre-Seigneur la réalisation de sa parole : « Mes brebis entendent ma voix ; je les connais, elles me suivront... et nul ne les ravira de ma main » (Jean, X, 28). Comme le note le Père Piny[68] après avoir fait sérieusement son devoir, s'abandonner avec confiance entre les mains de Notre-Seigneur, c'est être vraiment comme une brebis. Peut-on mieux entendre la voix du bon Pasteur qu'en acquiesçant constamment à ce qu'il ordonne de nous, qu'en le priant avec amour d'avoir pitié de nous, et en se jetant avec confiance dans les bras de sa miséricorde, avec toutes nos fautes et nos regrets ? C'est en même temps déposer en son sein toutes nos craintes sur notre passé et notre avenir. Ce saint abandon, loin de s'opposer à l'espérance, est la confiance filiale la plus sainte, unie à un amour qui se purifie de plus en plus.
L'amour le plus pur consiste en effet à se nourrir de la volonté de Dieu, à l'exemple de Notre-Seigneur, qui a dit : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé et d'accomplir son œuvre » (Jean, IV, 34). « Je ne cherche pas ma propre volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé » (Jean, V, 30). « C'est pour cela que je suis descendu du ciel » (Jean, VI, 38). Il n'y a donc pas de manière plus noble, plus parfaite, plus pure, d'aimer Dieu, que de faire de la divine volonté la sienne propre, en accomplissant sa volonté signifiée et en s'abandonnant ensuite à son bon plaisir. Pour les âmes qui suivent cette route, Dieu est tout ; elles finissent par pouvoir dire : Deus meus et omnia. Dieu est leur centre, et elles n'ont plus de paix qu'en Lui, en soumettant toutes leurs aspirations à son bon plaisir, et en acceptant tranquillement tout ce qu'il fait. Dans les moments les plus difficiles, sainte Catherine de Sienne se rappelait la parole du Maître : « Pense à moi et je penserai à toi ».
Rares sont les âmes qui arrivent à cette perfection. Mais il faut y tendre. Saint François de Sales dit « Notre-Seigneur, aime d'un amour extrêmement tendre ceux qui sont si heureux que de s'abandonner ainsi totalement à son soin paternel, se laissant gouverner par sa divine providence, sans s'amuser à considérer si les effets de cette providence leur seront utiles, profitables, ou dommageables ; étant tout assurés que rien ne leur saurait être envoyé de ce cœur paternel et très aimable, ni qu'il ne permettra que rien ne leur arrive, de quoi il ne leur fasse tirer du bien et de l'utilité pourvu que nous ayons mis toute notre confiance en lui[69]...
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 27 Fév - 16:33 | |
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CHAPITRE II COMMENT DEVONS-NOUS NOUS ABANDONNER A LA PROVIDENCE
Dans quel esprit nous abandonner à la Providence ?
... Quand (en faisant notre devoir quotidien) nous abandonnons tout à la providence divine, Notre-Seigneur prend soin de tout et conduit tout... L'âme est alors vis-à-vis de Lui comme le petit enfant à l'égard de sa mère ; quand elle le met à terre pour cheminer, il chemine jusqu'à ce que sa mère le reprenne, et quand elle veut le porter, il lui laisse faire : il ne sait point et ne pense point où il va, mais il se laisse porter ou mener où il plaît à sa mère.
Tout de même cette âme, aimant la volonté du bon plaisir de Dieu en tout ce qui lui arrive, se laisse porter et chemine néanmoins, faisant avec grand soin tout ce qui est de la volonté de Dieu signifiée[70]. » Elle peut dire alors vraiment, à l'exemple de Notre-Seigneur : « Ma nourriture est de faire la volonté de mon Père », et c'est là qu'elle trouve la paix, cette paix qui est déjà en nous comme la vie éternelle commencée, « inchoatio vitæ æternæ ».
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LE DEVOIR DU MOMENT PRÉSENT
« Omne quodcumque facitis in verbo aut in opere, omnia in nomine Domini facite. Quoi que ce soit que vous fassiez, en parole ou en œuvres, faites tout au nom du Seigneur » Coloss., III, 17.
Pour mieux voir comment nous devons vivre au jour le jour de confiance en Dieu, d'abandon, il convient d'être très attentif au devoir du moment présent et à la grâce qui nous est offerte pour l'accomplir. Nous parlerons d'abord du devoir qui se présente de minute en minute tel que l'ont compris les saints, et nous éclairerons ensuite leur conduite par l'enseignement de l'Écriture et de la théologie qui s'adresse à nous tous.
Le devoir du moment présent tel que les saints l'ont compris et la lumière qu'il contient.
Le devoir de chaque instant, sous des apparences souvent modestes, contient l'expression de la volonté de Dieu sur nous, sur notre vie individuelle. La Vierge Marie a ainsi vécu dans l'union divine en accomplissant au jour le jour la volonté de Dieu dans le devoir quotidien de sa vie très simple, fort commune à l'extérieur, comme celle de toutes les personnes de sa condition. Ainsi ont vécu tous les saints, faisant la volonté de Dieu telle qu'elle se manifestait d'heure en heure, sans se laisser déconcerter par les contrariétés imprévues.
Leur secret était celui de devenir de moment en moment ce que l'action divine voulait faire d'eux. En cette action, ils ont vu tout ce qu'ils avaient à faire et à souffrir, tous leurs devoirs et toutes leurs croix. Ils étaient persuadés que l'événement actuel est un signe d'une volonté ou d'une permission de Dieu pour le bien de ceux qui le cherchent. Même la vue du mal en exerçant leur patience, leur montrait par contraste ce qu'il faut faire pour éviter le péché et ses suites funestes.
Les saints voient ainsi dans la suite des événements comme un enseignement providentiel et ils croient qu'au-dessus de la suite des faits extérieurs de notre vie il y a comme une série parallèle de grâces actuelles, qui nous sont incessamment offertes pour nous faire tirer de ces événements agréables ou pénibles le meilleur profit spirituel. La suite des événements, si on savait la bien regarder, contient comme les leçons de choses du bon Dieu, qui sont comme la révélation prolongée ou l'Évangile appliqué, jusqu'à la fin des temps.
En presque tous les domaines on distingue de l'enseignement théorique et abstrait l'enseignement pratique ou appliqué ; il en est de même dans l'ordre des choses spirituelles. Le Seigneur y donne lui-même à sa manière ces deux enseignements, l'un dans l'Évangile, l'autre dans le cours de la vie.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Sam 29 Fév - 5:43 | |
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L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LE DEVOIR DU MOMENT PRÉSENT
Le devoir du moment présent tel que les saints l'ont compris et la lumière qu'il contient.
Cette très grande vérité de vie est souvent bien méconnue. Dès qu'il nous arrive des contrariétés, des revers, ce ne sont généralement que plaintes et murmures. Nous trouvons que cette maladie nous prend lorsque nous avions tant à faire, que telle chose nous manque absolument, qu'on nous enlève les moyens nécessaires, qu'on met des obstacles insurmontables au bien que nous devons accomplir, à l'apostolat que nous devons exercer.
Les saints, en ces circonstances, et même en d'autres bien plus pénibles, disent : Faire au jour le jour la volonté de Dieu est au fond la seule chose nécessaire. Le Seigneur ne commande jamais l'impossible, mais il y a un devoir qu'à chaque moment il rend réellement possible pour chacun de nous, et pour l'accomplissement duquel, il demande notre amour et notre générosité.
Si donc tel événement douloureux est la suite de nos fautes, c'est une leçon providentielle que nous devons recevoir avec humilité pour en tirer profit. Si, sans faute de notre part, le Seigneur permet que nous soyons privés de certains secours, c'est qu'ils ne sont pas vraiment nécessaires à notre sanctification et à notre salut.
Les saints trouvent qu'en un sens rien ne leur manque, si ce n'est un plus grand amour de Dieu. Si nous savions ce que sont les événements que nous appelons obstacles, contrariétés, revers, contretemps, infortune, échecs, nous déplorerions certes le désordre qui peut s'y trouver (et les saints le déploraient plus que nous et en souffraient plus que nous), mais nous nous reprocherions nos murmures, et nous serions plus attentifs au bien supérieur que Dieu poursuit en tout ce qu'il veut et même en ses divines permissions[71].
Devons-nous être surpris de ce que les voies de la Providence soient parfois bien mystérieuses, et de ce que le mystère déconcerte notre raison. « Le juste vit de la foi » dit l'Écriture; en particulier il vit du mystère de la Providence et de ses voies. Et il finit par saisir que, loin d'être contradictoire, ce mystère ne peut être nié sans que tout devienne contradiction en notre vie.
L'Écriture dit à plusieurs reprises : Dieu mortifie et il vivifie, il conduit à toute extrémité et il en ramène [72].
Plus l'action divine fait mourir au péché et à ses suites, plus elle détache de tout ce qui n'est pas Dieu, et plus elle vivifie. On a dit que la grâce est parfois un bourreau, et pourtant, dans l'œuvre qu'elle poursuit en nous, loin de détruire la nature en ce qu'elle a de bon, elle la perfectionne, la restaure et la surélève. D'elle on peut dire ce qui est dit de Dieu : mortificat et vivificat.
Comme le dit le Père de Caussade[73] expliquant ces voies de la Providence : « Plus le mystère est obscur, plus il contient de lumière », car son obscurité provient d'une trop grande lumière pour nos faibles yeux.
De plus ce qui peut nous instruire davantage, c'est ce qui nous arrive à nous en particulier d'un moment à l'autre, selon ce que la Providence a voulu ou permis. Nous pouvons y trouver la manifestation de la volonté divine sur nous pour le moment présent. Et c'est là ce qui forme en nous la connaissance expérimentale de la conduite de Dieu à notre égard, connaissance sans laquelle on ne sait guère se diriger comme il faut dans les choses spirituelles, ni faire aux autres un bien profond[74].
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 1 Mar - 3:45 | |
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L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LE DEVOIR DU MOMENT PRÉSENT
Le devoir du moment présent tel que les saints l'ont compris et la lumière qu'il contient.
Dans l'ordre des choses spirituelles surtout, nous ne savons bien que ce que l'expérience nous a appris par la souffrance ou par l'action. Notre-Seigneur qui avait, en sa sainte âme, dès le premier instant de sa venue en ce monde, la vision béatifique et la science infuse, a voulu avoir aussi la connaissance expérimentale, qui s'acquiert au jour le jour, et qui fait voir les choses même infailliblement prévues sous un aspect spécial, que donne le contact du réel.
Nous prévoyons que tel ami très cher fort malade va bientôt mourir, mais sa mort même contient, si nous savons ouvrir les yeux, un nouvel enseignement pour nous, par lequel Dieu nous parle en quelque sorte, au fur et à mesure que le temps s'écoule. C'est là l'école du Saint-Esprit, ce sont ses leçons de choses, qui n'ont rien de livresque ; et elles varient avec chaque âme ; ce qui est utile à celle-ci ne l'est pas toujours à celle-là.
Sans vouloir trouver superstitieusement un sens à de pures coïncidences sans portée, écoutons simplement ce que la Providence nous dit à nous en particulier dans ces leçons de choses qu'elle nous donne. Il ne faut pas matérialiser et mécaniser cette doctrine ; il s'agit d'un esprit surnaturel à porter simplement en toutes choses, sans contention, ni sotte recherche.
Comme le dit l'auteur[75] que nous venons de citer : « La révélation du moment présent est une source de sainteté toujours jaillissante... Vous tous qui avez soif, sachez que vous n'avez pas à aller chercher bien loin la source des eaux vives ; elle jaillit tout près de vous, dans le moment présent ; hâtez-vous donc d'y courir. Pourquoi, ayant la source si proche, vous fatiguez-vous à courir après les ruisseaux ?.... O amour inconnu ! il semble que vos merveilles soient finies et qu'il n'y ait plus qu'à copier vos anciens ouvrages, à citer vos discours passés.
Et l'on ne voit pas que votre action inépuisable est une source infinie de nouvelles pensées, de nouvelles souffrances, de nouvelles actions... de nouveaux saints ». Le Cœur de Jésus est un « foyer de grâces toujours nouvelles ».
Les saints de chaque époque n'ont pas besoin de copier la vie, ni les écrits de ceux qui les ont précédés, mais de vivre dans un perpétuel abandon aux secrètes inspirations de Dieu ; en cela ils imitent tous leurs devanciers, malgré la diversité des circonstances de chaque époque et de chaque vie individuelle.
Le moment présent, si nous savions voir la lumière divine qu'il contient, nous rappellerait que tout peut nous être moyen, instrument, ou au moins occasion, par manière d'épreuve ou par contraste, d'avancement spirituel dans l'amour de Dieu. Ce moment présent, selon l'ordre voulu par la Providence, a une relation avec notre fin dernière, avec l'unique nécessaire ; ainsi chaque instant du temps qui s'écoule a une relation avec l'unique instant de l'immobile éternité.
Si nous savions la voir, ce n'est pas seulement l'heure de la messe, celle de l'oraison, ou de la visite au Saint Sacrement, qui serait sanctificatrice pour nous, mais toute heure de la journée prendrait son sens surnaturel, et nous rappellerait que nous sommes en marche vers l'éternité. D'où là bonne pratique qui consiste à bénir l'heure qui commence, ou à appeler sur elle la bénédiction divine.
Nous devons être à chaque instant dans l'ordre de Dieu ; il n'y a pas de moment de la journée où nous n'ayons quelque devoir à accomplir, devoir envers Dieu, ou envers le prochain, devoir au moins de patience, lorsque l'action extérieure n'est pas possible. A chaque minute nous devons sanctifier le nom de Dieu, comme s'il n'y avait pas autre chose à attendre dans le temps, comme si à l'instant suivant nous devions entrer dans l'éternité.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 1 Mar - 16:17 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LE DEVOIR DU MOMENT PRÉSENT
Le devoir du moment présent tel que les saints l'ont compris et la lumière qu'il contient.
Si nous savions la voir, ce n'est pas seulement l'heure de la messe, celle de l'oraison, ou de la visite au Saint Sacrement, qui serait sanctificatrice pour nous, mais toute heure de la journée prendrait son sens surnaturel, et nous rappellerait que nous sommes en marche vers l'éternité. D'où là bonne pratique qui consiste à bénir l'heure qui commence, ou à appeler sur elle la bénédiction divine.
Nous devons être à chaque instant dans l'ordre de Dieu ; il n'y a pas de moment de la journée où nous n'ayons quelque devoir à accomplir, devoir envers Dieu, ou envers le prochain, devoir au moins de patience, lorsque l'action extérieure n'est pas possible.
A chaque minute nous devons sanctifier le nom de Dieu, comme s'il n'y avait pas autre chose à attendre dans le temps, comme si à l'instant suivant nous devions entrer dans l'éternité.
Ainsi ont vécu les plus chrétiens de ceux qui pendant la dernière guerre étaient exposés à des tirs d'artillerie, qui recommençaient à intervalles de trois minutes ; ils se disaient : « dans un instant peut-être c'est la mort », et ils vivaient la minute présente dans sa relation à l'éternité.
Ainsi ont vécu les saints non seulement dans les circonstances exceptionnelles, mais dans le cours normal de leur vie, sans perdre pour ainsi dire la présence de Dieu. Or leur conduite s'éclaire par les principes de l'Évangile dont nous parlons et qui s'adressent à nous comme à eux.
L'enseignement de l'Écriture et de la théologie sur le devoir du moment présent.
Saint Paul écrivait dans la Première Épître aux Corinthiens, X, 31 : « Soit que vous mangiez, soit que vous buviez ou quelque autre chose que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu ». - De même aux Colossiens, III, 17 : « Quoi que ce soit que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus, en rendant par lui des actions de grâces à Dieu le Père ».
Notre-Seigneur a dit lui-même, comme le rapporte saint Matthieu, XII, 36 : « La bouche parle de l'abondance du cœur. L'homme bon tire du bon trésor de son cœur des choses bonnes; le mauvais tire d'un mauvais trésor des choses mauvaises. Je vous le dis : au jour du jugement, les hommes rendront compte de toute parole vaine qu'ils auront dite ».
Saint Thomas montre tout le sens et la portée de cette doctrine, lorsqu'il enseigne (Ia-IIae, q. 18, a. 9) qu'il n'y a pas d'acte délibéré qui, concrètement pris hic et nunc, soit moralement indifférent; chacun de nos actes délibérés est soit bon, soit mauvais.
Pourquoi ? Parce que tout acte délibéré d'un être raisonnable doit être raisonnable, ou ordonné à une fin bonne, honnête ; et tout acte délibéré d'un chrétien doit être ordonné au moins virtuellement à Dieu. S'il en est ainsi, cet acte est bon ; s'il n'en est pas ainsi, il est mauvais. Il n'y a pas de milieu. Même nos récréations, nos divertissements, nos promenades doivent avoir une fin honnête.
Le fait d'aller se promener, abstraitement considéré, certes est indifférent. Il peut être indifférent aussi que nous allions nous promener ici plutôt que là, mais cette promenade doit avoir un but raisonnable, par exemple celui de réparer, de renouveler nos forces, pour reprendre ensuite le travail que nous devons accomplir. Par là même nos divertissements prennent un sens moral et une valeur dans la vie de l'être raisonnable.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 2 Mar - 16:24 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LE DEVOIR DU MOMENT PRÉSENT
L'enseignement de l'Écriture et de la théologie sur le devoir du moment présent.
Comme le disait d'une façon symbolique un bon prédicateur, tous nos actes délibérés sont comme les gouttes de pluie qui tombent au sommet des montagnes à la ligne de partage des eaux ; de ces gouttes de pluie, les unes vont à droite de cette ligne vers tel fleuve et tel océan, les autres vont à gauche vers un autre fleuve et vers une mer opposée fort lointaine.
Ainsi tous nos actes délibérés vont soit vers le bien, finalement vers Dieu, soit vers le mal. Nul de ces actes, à le prendre dans la réalité concrète de la vie, n'est indifférent. Cela peut paraître au premier abord bien rigide comme doctrine. Il n'en est rien : il suffit d'une intention virtuelle ou implicite, renouvelée le matin au moment de la prière et chaque fois que le Saint-Esprit nous porte à élever notre cœur vers Dieu.
C'est même au contraire une doctrine très consolante, car il s'ensuit que dans la vie du juste, tout acte délibéré, qui n'est pas un péché, est à la fois moralement bon et méritoire, qu'il soit facile ou difficile, petit ou grand.
Cette doctrine est aussi très sanctifiante, si on l'entend bien et si on la vit. Elle porte à penser que ce que Dieu fait à chaque moment est bien fait, et est un signe de sa volonté. Ainsi Job privé de tout vit dans cette privation une volonté de Dieu, qui l'éprouvait pour le sanctifier, et au lieu de maudire cette minute si pénible, il bénit le nom du Seigneur.
Apprenons donc à reconnaître dans ce qui arrive à chaque instant soit une volonté positive de Dieu, soit une permission divine toujours ordonnée ellemême à un bien supérieur. Ainsi, quoi qu'il arrive, nous garderons la paix.
Saint François de Sales a résumé toute cette doctrine en ces quelques mots : « Chaque moment vient à nous chargé d'un ordre de Dieu, et il va s'enfoncer dans l'éternité pour demeurer à jamais ce que nous l'aurons fait ».
Cette vue presque constante de la volonté divine signifiée par le devoir du moment présent vient surtout du don de sagesse, qui nous fait voir en quelque sorte en Dieu, cause première et fin dernière, tous les événements, qu'ils soient pénibles ou agréables.
C'est pourquoi ce don correspond, dit saint Augustin, à la béatitude des pacifiques, c'est-à-dire de ceux qui conservent la paix là où tant d'autres se troublent, et qui souvent rendent la paix aux plus troublés : Beati pacifici, quia filii Dei vocabuntur.
CHAPITRE IV LA GRACE DU MOMENT PRÉSENT ET LA FIDÉLITÉ DANS LES PETITES CHOSES
Le devoir qu'il nous faut accomplir d'heure en heure est, disions-nous, un signe de la volonté de Dieu sur nous en particulier, hic et nunc, et il contient ainsi une lumière pratique très sanctifiante, qui est celle de l'Évangile appliqué aux diverses circonstances de notre vie ; ce sont vraiment les leçons de choses du bon Dieu. Si, à l'exemple des saints, nous savions considérer ainsi chaque moment, nous verrions que chacun contient non seulement un devoir à accomplir, mais une grâce pour être fidèle à ce devoir.
La richesse spirituelle du moment présent.
Au fur et à mesure que de nouvelles circonstances se présentent avec les obligations qu'elles comportent, de nouvelles grâces actuelles nous sont offertes pour tirer de ces circonstances le meilleur profit spirituel. Au-dessus de la suite des faits extérieurs de notre vie, il y a la série parallèle des grâces actuelles qui nous sont offertes, comme l'air arrive par ondes à notre poitrine pour nous permettre de respirer Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 3 Mar - 17:10 | |
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CHAPITRE IV LA GRACE DU MOMENT PRÉSENT ET LA FIDÉLITÉ DANS LES PETITES CHOSES
La richesse spirituelle du moment présent.
La suite de ces grâces actuelles, reçues avec fruit ou au contraire négligées par chacun de nous, constitue l'histoire individuelle de notre âme, telle qu'elle est écrite en Dieu au livre de vie, telle que nous la verrons un jour.
C'est ainsi que Notre-Seigneur continue de vivre dans son corps mystique ; surtout dans ses saints il continue une vie qui ne finira jamais, vie qui comporte à tout moment des grâces toujours nouvelles et de nouvelles opérations.
Notre-Seigneur a dit : « Je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur, pour qu'il demeure toujours avec vous, l'Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point et ne le connaît point ; mais vous le connaissez, parce qu'il demeure au milieu de vous...
Il vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit » (Jean, XIV, 16, 26). Le Saint-Esprit enseigne donc toutes choses au jour le jour à ceux qui veulent l'entendre, et il écrit la loi de Dieu avec la grâce dans les âmes, soit immédiatement, soit par la prédication de l'Évangile. Saint Paul ne dit-il pas aux Corinthiens : « Avons-nous besoin, comme certains, de lettres de recommandation auprès de vous ou de votre part ? C'est vous-mêmes qui êtes notre lettre... Oui, manifestement vous êtes une lettre du Christ, écrite par votre ministère, non avec l'encre, mais par l'Esprit du Dieu vivant ; non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs » (II Cor., III, 2, 3). - Ainsi s'écrit dans les âmes l'histoire intérieure de la vie de l'Église jusqu'à la fin des temps. C'est elle qui est annoncée de façon symbolique dans l'Apocalypse et qui ne se lira clairement qu'au dernier jour.
Comme le dit le Père de Caussade en trois pages remarquables qu'on nous permettra de citer : « Oh ! la belle histoire ! Le beau livre que l'Esprit-Saint écrit présentement ! Il est sous presse, âmes saintes ! il n'y a point de jour qu'on n'en arrange les lettres, que l'on n'y applique l'encre, que l'on n'en imprime les feuilles. Mais nous sommes dans la nuit de la foi ; le papier est plus noir que l'encre... ; c'est une langue de l'autre monde... Vous ne pourrez lire cet évangile (vivant) que dans le ciel... Si le mélange de vingt-quatre lettres est incompréhensible, de sorte qu'elles suffisent à composer à l'infini des volumes différents et tous admirables dans leur genre, qui pourra exprimer ce que Dieu fait dans l'univers ?... Apprenez-moi, divin Esprit, à lire dans ce livre de vie ! Je veux devenir votre disciple, et, comme un simple enfant, croire à ce que je ne puis voir[76].
« Qu'il y a de grandes vérités cachées aux yeux même des chrétiens qui se croient le plus éclairés !... Pour nous unir à lui, Dieu se sert des créatures les plus mauvaises aussi bien que des meilleures, et des événements les plus fâcheux aussi bien que des plus agréables ; et notre union avec lui est même d'autant plus méritoire, que les moyens qui nous servent à l'entretenir sont, de leur nature, plus répugnants.[77] »
« Le moment présent est toujours plein de trésors infinis ; il contient plus que vous n'avez de capacité. La foi est la mesure : vous y trouverez autant que vous croyez. L'amour est aussi la mesure : plus votre cœur aime, plus il désire, et plus il désire, plus il trouve. La volonté de Dieu se présente, à chaque instant, comme une mer immense que votre cœur ne peut épuiser. Il n'en reçoit qu'autant qu'il s'étend par la foi, par la confiance et par l'amour ; tout le reste du créé ne peut remplir votre cœur, qui a plus de capacité que tout ce qui n'est pas Dieu. Les montagnes qui effraient les yeux ne sont que des atomes dans le cœur. La divine volonté est un abîme, dont le moment présent est l'ouverture : plongez-vous dans cet abîme et vous le trouverez toujours infiniment plus étendu que vos désirs. Ne faites la cour à personne, n'adorez point les fantômes ; ils ne peuvent ni vous donner, ni vous ôter. Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 4 Mar - 15:45 | |
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CHAPITRE IV LA GRACE DU MOMENT PRÉSENT ET LA FIDÉLITÉ DANS LES PETITES CHOSESLa richesse spirituelle du moment présent. La seule volonté de Dieu fera votre plénitude, qui ne vous laissera aucun vide ; adorez-la, allez droit à elle,... ôtez les idoles... Quand le moment effraie, affame, dépouille, accable tous les sens, alors il nourrit, il enrichit, il vivifie la foi, qui se rit des pertes, comme un gouverneur dans une place imprenable se rit des attaques inutiles[78]. » Aussi, conclut le même auteur : « Quand la volonté de Dieu s'est révélée à une âme et qu'elle lui a fait sentir qu'elle est prête à se donner tout entière pourvu que l'âme se donne à elle aussi de son côté, celle-ci éprouve, en toutes rencontres, un secours puissant ; pour lors, elle goûte par expérience le bonheur de cette venue de Dieu ; et elle en jouit d'autant plus qu'elle a mieux compris, dans la pratique, l'abandon où elle doit être, à tous les moments, vis-à-vis de cette volonté toute adorable.[79] » Dieu est comme un océan qui porte ceux qui avec confiance se livrent à lui et font ce qui est en leur pouvoir pour suivre ses inspirations, comme le navire docile aux vents favorables. En ce sens Notre-Seigneur disait (Jean, III, : « Le vent souffle où il veut et tu entends sa voix ; mais tu ne sais ni d'où il vient, ni où il va : ainsi en est-il de quiconque est né de l'Esprit ». Que tout cela est grand ! Pendant que la minute présente s'écoule, rappelons-nous que ce qui existe, ce n'est pas seulement notre corps, notre sensibilité douloureusement ou agréablement impressionnée, mais aussi notre âme spirituelle et immortelle, la grâce actuelle qui nous arrive, le Christ qui influe sur nous, la sainte Trinité qui habite en nous. Alors nous entreverrons l'infinie richesse du moment présent, et son rapport avec l'instant immuable de l'éternité où nous devons entrer un jour. Ne nous contentons pas de voir la minute présente sur la ligne horizontale du temps, entre un passé qui n'est plus et un avenir temporel incertain ; voyons surtout cette minute présente sur la ligne verticale qui la rattache à l'unique instant de l'immobile éternité. Quoi qu'il arrive, disons-nous : en ce moment Dieu est, et il veut m'attirer à Lui. En un des instants les plus douloureux de son existence, où il crut perdue la chère congrégation qu'il venait de fonder, saint Alphonse entendit cette parole de la bouche d'un laïque de ses amis : « Dieu existe toujours, Père Alphonse » ; non seulement il retrouva son courage ; mais cette heure douloureuse fut une des plus fécondes de sa vie. Soyons ainsi saintement attentifs à la grâce actuelle qui de minute en minute nous est offerte pour l'accomplissement du devoir présent. Nous verrons de mieux en mieux ainsi ce que doit être notre fidélité dans les petites choses comme dans les grandes. La fidélité dans les petites choses « Qui fidelis est in minimo, et in majori fidelis est », (Luc, XVI, 10)Notre-Seigneur dit, en saint Luc, XVI, 10 : « Celui qui est fidèle dans les petites choses est fidèle aussi dans les grandes, et celui qui est injuste dans les petites choses est injuste aussi dans les grandes ». Il dit encore à deux serviteurs dans la parabole des talents ou des mines : « C'est bien, serviteur bon et fidèle ; parce que tu as été fidèle en peu de choses, je t'établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton maître ». (Matth., XXV, 21, 23 ; Luc, XIX, 17). Il y a là, relativement aux petites choses, un très grand enseignement qui est fort souvent méconnu même par les âmes naturellement élevées, qui commencent à faire fausse route, lorsque leur fierté dégénère en orgueil. On ne saurait trop insister sur ce point à propos de la fidélité à la grâce du moment. On l'a plusieurs fois remarqué : chez bien des âmes qui se sont sincèrement données à Dieu, qui ont fait des efforts généreux, même héroïques, pour lui prouver leur amour, comme on l'a vu pendant la dernière guerre, un moment critique arrive, où elles doivent abandonner une manière trop personnelle de juger et d'agir, fût-elle déjà élevée, pour entrer dans la voie de la véritable humilité, dans la voie de la « petite humilité », qui s'ignore elle-même, pour ne plus voir que Dieu. Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse Miséricorde de Dieu | |
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 5 Mar - 16:11 | |
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CHAPITRE IV LA GRACE DU MOMENT PRÉSENT ET LA FIDÉLITÉ DANS LES PETITES CHOSES
La fidélité dans les petites choses « Qui fidelis est in minimo, et in majori fidelis est », (Luc, XVI, 10)
Et alors il peut arriver deux choses fort différentes : Ou bien l'âme voit d'elle-même le chemin à prendre, et elle le suit ; ou bien elle ne le voit pas et parfois s'égare dans son ascension au point de redescendre sans bien s'en apercevoir.
Voir ce chemin de la vraie humilité, c'est découvrir dans la vie courante, du matin au soir, des occasions de faire, pour l'amour de Dieu, des actes très petits en apparence, mais dont la répétition incessante est des plus précieuse et conduit à cette délicatesse envers Dieu et envers le prochain qui, lorsqu'elle est constante et profondément sincère, est la marque de la charité parfaite.
Les actes qui sont alors demandés à l'âme sont fort simples, ils passent inaperçus ; il n'y a en eux aucune prise pour l'amour-propre ; Dieu seul les voit, et il semble même à l'âme qu'elle ne lui offre pour ainsi dire rien. Mais ces actes, dit saint Thomas[80], sont comme les gouttes d'eau qui tombent toujours au même endroit et qui à la longue creusent la pierre.
Et c'est ainsi que s'opère peu à peu véritablement l'assimilation des grâces reçues. Ainsi ces grâces pénètrent l'âme et toutes ses facultés, en les surélevant, et peu à peu tout se met au point surnaturellement comme il le faut. Sans cette fidélité dans les petites choses en esprit de foi, d'amour, d'humilité, de patience et de douceur, il n'y a pas pénétration de la vie active, c'est-à-dire de la vie courante de tous les jours, par la vie contemplative. Celle-ci reste comme au sommet de l'intelligence ; elle y est plus spéculative que contemplative, elle ne pénètre pas notre existence, notre manière de vivre ; elle reste presque stérile, tandis qu'elle devrait être chaque jour plus féconde.
Ceci est d'une importance souveraine. Saint François de Sales en a plusieurs fois parlé[81]. Sous une autre forme saint Thomas dit la même chose lorsqu'il nous enseigne, nous l'avons vu, qu'il n'y a pas dans la réalité concrète de notre vie un seul acte délibéré qui soit, hic et nunc, moralement indifférent[82].
Tous les actes délibérés d'un être raisonnable doivent être raisonnables, avoir une fin honnête, et tous les actes d'un chrétien doivent être au moins virtuellement ordonnés à Dieu aimé par-dessus tout. C'est ce qui montre l'importance des actes multiples que nous avons à accomplir chaque jour : ils sont très petits peut-être en eux-mêmes, mais grands par leur rapport à Dieu et par l'esprit de foi, d'amour, d'humilité, de longanimité, avec lequel nous devons les accomplir et les offrir à Dieu.
Le moment critique, dont nous parlons, marque un tournant difficile dans la vie spirituelle de bien des âmes qui ont été assez avancées, et qui courent risque de redescendre. Arrivée là, si l'âme qui s'est montrée généreuse, héroïque même, mais avec une manière encore beaucoup trop personnelle de juger et d'agir, ne s'aperçoit pas qu'il faut changer, elle continue à marcher en vertu d'une vitesse acquise, et sa prière et son action ne sont plus ce qu'elles doivent être. Il y a là un réel danger. Cette âme peut devenir pour toujours une âme attardée, son développement peut s'arrêter, comme celui d'un nain devenu difforme ; ou bien elle peut prendre une fausse direction.
Au lieu de l'humilité vraie, peut se développer en elle une espèce d'orgueil raffiné, et malheureusement presque inconscient, qui n'apparaît guère d'abord que dans les détails de la vie courante, et qui pour cette raison est ignoré des directeurs qui ne vivent pas avec ceux qu'ils dirigent. Cet orgueil prend rapidement la forme d'une certaine désinvolture ironique, pour devenir ensuite une amertume, qui stérilise tout en se répandant sur toute la vie quotidienne, dans les rapports avec le prochain. Cette amertume peut devenir rancœur et mépris du prochain qu'il faudrait aimer pour l'amour de Dieu. Quand une âme en arrive là, il est difficile de l'amener à faire de saintes réflexions, pour qu'elle revienne au point où elle s'est trompée de route. C'est à la Vierge Marie qu'il faut recommander ces âmes ; souvent elle seule peut les ramener dans le droit chemin[83].
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Ven 6 Mar - 16:40 | |
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CHAPITRE IV LA GRACE DU MOMENT PRÉSENT ET LA FIDÉLITÉ DANS LES PETITES CHOSES
La fidélité dans les petites choses « Qui fidelis est in minimo, et in majori fidelis est », (Luc, XVI, 10)
Pour remédier au mal dont nous parlons, il faut rendre les âmes très attentives à la grâce du moment, et à la fidélité dans les petites choses.
« Ce ne sont point les idées ni les paroles tumultueuses qui doivent nous déterminer à agir, dit encore le Père de Caussade ; car, étant seules, ces idées et ces paroles ne servent qu'à enfler... Il ne faudrait se guider que par ce que Dieu donne à souffrir et à faire ; et on laisse cette substance divine, pour occuper son esprit des merveilles historiques de l'ouvrage divin, au lieu de les accroître par sa fidélité ! Les merveilles de cet ouvrage, qui satisfont notre curiosité dans nos lectures, ne servent souvent qu'à nous dégoûter de ces choses petites en apparence, par lesquelles l'amour divin ferait en nous de grandes choses, si nous ne les méprisions pas.
Insensés que nous sommes ! Nous admirons, nous bénissons cette action divine dans les écrits qui racontent son histoire ; et, lorsqu'elle veut la continuer en écrivant sur nos cœurs, nous tenons le papier dans une inquiétude continuelle et nous empêchons l'action divine de s'exercer par la curiosité de voir ce qu'elle fait en nous et ce qu'elle fait ailleurs... Je veux me renfermer dans l'unique affaire du moment présent, pour vous aimer, mon Dieu, pour m'acquitter de mes obligations et pour vous laisser faire ».
C'est ce que dit l'adage courant : « Age quod agis ».
Alors, si nous faisons vraiment notre possible pour être ainsi fidèles au Seigneur au jour le jour dans les petites choses, il nous donnera certainement la force de lui être fidèles aussi dans les circonstances difficiles et très pénibles, s'il permet que nous y soyons placés. Ainsi se vérifieront les paroles de l'Évangile : « A chaque jour suffit sa peine ». - « Celui qui est fidèle dans les petites choses est fidèle aussi dans les grandes ».
CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
« Justum deduxit Dominus per vias rectas et ostendit illi regnum Dei. - Le Seigneur conduit le juste par des voies droites et lui montre le règne de Dieu »
La fidélité au devoir quotidien par la docilité à la grâce qui nous est offerte de minute en minute ne tarde pas à être récompensée par une assistance spéciale de la Providence à l'égard de ceux qui s'abandonnent ainsi filialement à elle. On peut dire que cette assistance se manifeste surtout de trois façons, sur lesquelles il convient d'insister : La Providence conduit particulièrement ces âmes dans leurs obscurités ; elle les défend contre les ennemis du bien et elle les vivifie intérieurement de plus en plus.
Comment Dieu guide-t-il les âmes qui s'abandonnent à lui ? Il les éclaire par les dons de sagesse, d'intelligence, de science et de conseil, que nous avons reçus avec la grâce sanctifiante et la charité au baptême et plus encore à la confirmation. Ces dons, unis à ceux de piété, de force et de crainte filiale, sont dans les âmes imparfaites comme liés par les inclinations plus ou moins désordonnées, qui font vivre ces âmes à la superficie d'elles-mêmes, et les empêchent d'être attentives aux inspirations du Maître intérieur.
Ces dons ont été souvent comparés aux voiles qui rendent la barque docile au souffle du vent favorable ; mais dans les âmes imparfaites ils sont comme des voiles repliées, qui ne reçoivent pour ainsi dire pas l'impulsion du vent. Lorsqu'au contraire une âme, en faisant le possible pour accomplir son devoir quotidien, pour ramer comme il faut, s'abandonne au Seigneur, il lui envoie des inspirations d'abord latentes, confuses, mais qui, si elles sont bien reçues, deviennent de plus en plus nombreuses, pressantes et lumineuses.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 8 Mar - 3:45 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
« Justum deduxit Dominus per vias rectas et ostendit illi regnum Dei. -
Alors au milieu des événements agréables ou pénibles, des inégalités d'humeur, des sécheresses spirituelles, des pièges du démon ou des hommes, de leurs défiances ou jalousies, l'âme reste en paix, en sa partie supérieure du moins, car elle est intimement persuadée que Dieu la conduit, et en s'abandonnant à Lui, elle ne cherche qu'à faire sa volonté à Lui, sans rien désirer de plus. Ainsi elle le trouve sous toutes les apparences, et se sert de tout pour s'unir à Lui ; même le péché lui rappelle par contraste son infinie grandeur.
Alors se réalise de plus en plus la parole de saint Jean l'Évangéliste aux fidèles à qui il écrit sa première Épître : « l'onction que vous avez reçue de Dieu demeure en vous, et vous n'avez pas besoin que personne vous enseigne ; mais comme son onction vous enseigne sur toutes choses, cet enseignement est véritable et n'est point un mensonge » I Joan., II, 27.
L'âme alors a moins besoin de raisonnements, de méthodes pour prier, méditer, se conduire ; sa manière de penser et de vouloir est devenue plus simple ; elle suit davantage en elle l'action de Dieu, qui se manifeste, moins par l'idée que par instinct, ou par la nécessité des circonstances mêmes, qui ne permettent pas d'agir autrement. Elle est saisie du sens profond de telle parole de l'Évangile qui ne l'avait pas frappée jusque-là. Le Seigneur lui donne l'intelligence des Écritures, comme il le fit pour les deux disciples qui allaient à Emmaüs. Les sermons les plus simples l'éclairent, elle y trouve des trésors, car Dieu se sert d'eux pour l'éclairer lui-même, comme un très grand artiste avec l'instrument le plus ordinaire, avec le plus pauvre crayon, fait un chef-d'œuvre, une admirable figure du Christ ou de la Vierge.
Sans doute dans cette conduite de Dieu à l'égard des âmes qui s'abandonnent à lui, il y a certes de grandes obscurités, des énigmes, des choses déconcertantes et impénétrables, c'est vrai. Mais le Seigneur les fait tourner au bien spirituel de ces âmes et elles verront un jour que les anges trouvaient un sujet de joie en ce qui parfois les a profondément désolées.
Bien plus, par ces obscurités mêmes Dieu éclaire les âmes, au moment où il paraît les aveugler. Lorsqu'en effet les choses sensibles, qui nous charmaient et nous fascinaient, s'effacent, les choses spirituelles commencent à apparaître dans toute leur grandeur ; il arrive qu'un roi déchu, comme Louis XVI en perdant son trône, s'aperçoit plus que jamais de la grandeur de l'Évangile et de bien des grâces qu'il avait déjà reçues. Jusque-là il n'y prenait presque pas garde, parce qu'il était trop absorbé par l'éclat des choses extérieures de son royaume. C'est le royaume des cieux qui maintenant se montre à lui.
C'est une grande loi du monde spirituel, que l'obscurité supérieure des choses divines nous éclaire plus en un sens que l'évidence des choses terrestres. Nous avons un symbole de cette loi dans l'ordre sensible. Si surprenant que cela paraisse au premier abord, dans l'obscurité de la nuit nous voyons beaucoup plus loin que dans la clarté du jour ; il faut en effet que le soleil se cache, pour que les étoiles se montrent et pour que nous entrevoyions les profondeurs insondables du firmament.
Le spectacle que nous pouvons avoir en certaines nuits étoilées est parfois incomparablement plus beau que celui des jours les plus radieux. Le jour, notre vue certes peut s'étendre fort loin sur les régions qui nous entourent et jusqu'au soleil dont la lumière met environ huit minutes à venir jusqu'à nous. Mais dans l'obscurité de la nuit nous voyons d'un seul regard des milliers d'étoiles, dont la plus voisine met quatre ans et demi à nous envoyer sa lumière. Il en est de même au point de vue spirituel ; comme le soleil empêche de voir les étoiles, l'éclat de certaines choses humaines empêche de voir les splendeurs de la foi.
Il convient donc que la Providence supprime de temps en temps dans notre vie cet éclat des choses inférieures pour nous permettre d'entrevoir des choses beaucoup plus hautes et plus précieuses pour notre âme et notre salut.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 8 Mar - 17:59 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
« Justum deduxit Dominus per vias rectas et ostendit illi regnum Dei. -
Il y a même souvent, dans l'ordre spirituel, comme dans l'ordre physique, alternance du jour et de la nuit. Le livre de l'Imitation en parle à plusieurs reprises. Si nous étions trop tristes de ces crépuscules, le Seigneur pourrait nous répondre : comment te manifester autrement ces milliers d'étoiles qui ne se peuvent voir que dans la nuit ?
Ici se vérifie la parole de Notre-Seigneur : « Qui sequitur me, non ambulat in tenebris. Celui qui me suit, ne marche pas dans les ténèbres » Jean, VIII, 12. La lumière de la foi chasse les ténèbres inférieures de l'ignorance, du péché et de la damnation, dit saint Thomas, in Joann., VIII, 12.
Bien plus, l'obscurité divine, qui provient d'une lumière supérieure, trop forte pour nos faibles yeux, nous éclaire à sa façon, elle nous fait entrevoir non plus seulement les profondeurs du firmament, mais les profondeurs de Dieu et le mystère des voies de sa Providence. Saint Paul dit I Cor., II, 6 : « Il est une sagesse que nous prêchons parmi les parfaits, sagesse qui n'est pas celle de ce siècle, ni des princes de ce siècle; dont le règne va finir. Nous prêchons une sagesse de Dieu mystérieuse et cachée, que Dieu, avant les siècles, avait destinée à notre glorification.
Cette sagesse, nul des princes de ce siècle ne l'a connue ; ils n'auraient pas crucifié le Seigneur de la gloire. Mais ce sont, comme il est écrit, des choses que l'œil n'a point vues, que l'oreille n'a point entendues, et qui ne sont pas montées au cœur de l'homme, - des choses que Dieu a préparées pour ceux qui l'aiment. C'est à nous que Dieu les a révélées par son Esprit ; car l'Esprit pénètre tout, même les profondeurs de Dieu ».
Ainsi le Seigneur a sa manière à lui d'éclairer les âmes sur sa vie intime et sur les secrets de ses voies ; il semble parfois les aveugler ; c'est alors en réalité qu'il leur donne une lumière plus haute, au moment même où une lumière inférieure disparaît. Pour les saints la lumière de gloire suit immédiatement les obscurités de la mort.
On s'attriste autour d'eux de voir la vie présente passer si vite et s'éteindre; ils sont heureux de la voir finir pour entrer dans la vie qui ne passe pas.
Dans le cours de notre vie, s'il y a des heures où tout paraît désespéré, si, comme le dit Tauler, les mâts du navire sont brisés, et, si celui-ci, au milieu de la tempête, est réduit à n'être plus qu'un radeau, c'est le moment de s'abandonner pleinement, totalement à Dieu, sans plus aucune réserve, et si nous le faisons de toute notre âme, c'est l'heure où le Seigneur prend lui-même immédiatement la direction de notre vie, car lui seul peut nous sauver. Justum deduxit Dominus per vias rectas et ostendit illi regnum Dei. - Mais Dieu ne se contente pas de conduire le juste.
Dieu défend les âmes qui s'abandonnent à lui contre les ennemis du bien
C'est ce que nous dit saint Paul dans l'Épître aux Romains, VIII, 31 : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Lui qui n'a pas épargné son propre Fils, mais qui l'a livré à la mort pour nous tous, comment avec lui ne nous donnera-t-il pas toutes choses ? » Le livre de la Sagesse, V, 17, dit des justes qui s'abandonnent avec confiance au Seigneur : « il les protégera de sa droite, et son bras les couvrira comme un bouclier ».
La Providence dirige tout ; même les plus petites circonstances qui paraissent insignifiantes sont en sa main, il n'y a pas de hasard pour elle ; et alors elle peut très facilement déjouer par un petit fait imprévu les savants calculs des ennemis du bien. On le voit par exemple dans la vie de Joseph vendu par ses frères. Si au moment où ils voulaient le mettre à mort, des marchands Ismaélites n'étaient pas passés par là, comme par hasard, ils l'auraient laissé dans la citerne où ils l'avaient jeté. Mais ces marchands étant survenus à cette heure et non pas une heure plus tard, comme de toute éternité Dieu l'avait ordonné, Joseph fut vendu comme un esclave. Et ainsi amené en Égypte, il devint plus tard le bienfaiteur de ceux qui avaient voulu le perdre. Rappelons-nous aussi l'histoire d'Esther, celle du prophète Daniel et de tant d'autres. De même et plus encore à la naissance de Notre-Seigneur.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 9 Mar - 18:12 | |
| QUATRIÈME PARTIE L'ABANDON CONFIANT A LA PROVIDENCE
CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
Dieu défend les âmes qui s'abandonnent à lui contre les ennemis du bien
Hérode organise tout pour mettre à mort le Messie, il demande aux Mages venus d'Orient de l'informer exactement de l'enfant ; mais ceux-ci, « avertis en songe de ne point retourner vers Hérode, regagnent leur pays par un autre chemin » Matth., II, 12. « Alors Hérode voyant que les Mages s'étaient joués de lui... ordonne le massacre de tous les enfants qui étaient dans Bethléem et dans les environs », mais un ange du Seigneur apparut à Joseph pendant son sommeil pour lui dire de soustraire l'enfant à la colère du roi et de fuir en Égypte.
Dans la vie des justes l'intervention d'un ange gardien, qui sur l'ordre de Dieu donne une bonne pensée, soit dans le sommeil, soit dans l'état de veille, n'est pas un miracle, c'est un fait providentiel assez fréquent dans la vie de ceux qui s'abandonnent pleinement à Dieu. Il est dit dans le Psaume 90, 10 : « Le malheur ne viendra pas jusqu'à toi, aucun fléau n'approchera de ta tente, car le Seigneur ordonnera à ses anges de te garder dans toutes tes voies. Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte contre la pierre ».
Sans doute il ne faut pas tenter Dieu, mais en faisant quotidiennement son devoir, il faut s'en remettre humblement à lui, et il défend ceux qui s'abandonnent ainsi, comme la mère défend son enfant. S'il permet la persécution extérieure souvent bien douloureuse, comme il la permit contre son Fils, il ne permet pas que le juste perde courage en cette persécution, il le soutient invisiblement ; et si celui-ci dans un moment d'égarement comme Pierre vient à tomber, il le relève et le conduit au port du salut.
Les saints disent même que l'âme qui s'abandonne à Dieu, au lieu de résister à ses ennemis, trouve en eux d'utiles auxiliaires. « Il n'y a, dit le P. de Caussade[86], rien de plus sûr à opposer à la prudence de la chair que la simplicité ; elle en élude admirablement toutes les ruses sans les connaître, sans y penser même. Avoir affaire à une âme simple, c'est en quelque sorte avoir affaire à Dieu. Quelle mesure prendre contre le Tout-Puissant, dont les voies sont inscrutables ? Dieu prend en main la cause de l'âme simple il n'est pas nécessaire qu'elle étudie les intrigues... (qu'on trame contre elle)... L'action divine lui inspire et lui fait prendre des mesures si justes, qu'elle surprend ceux qui la veulent surprendre.
Elle profite de leurs efforts... Ce sont des galériens, qui mènent au port à toutes rames... Toutes les contrariétés lui tournent à bien... Tout ce qu'elle doit craindre, c'est de se mettre elle-même de la partie... (en troublant) un travail où elle n'a rien à faire qu'à voir en paix ce que Dieu fait et à suivre avec simplicité les attraits qu'il lui donne... L'âme qui s'abandonne ainsi à Dieu peut s'abstenir de rien faire ou dire pour sa justification : l'action divine la justifie ». Ainsi en est-il dans la vie des saints, et la voie qu'ils ont suivie, n'est-elle pas, toutes proportions gardées, celle que nous devons suivre ?
Pendant la dernière guerre, au milieu des circonstances difficiles, bien des gens disaient sur un ton plus ou moins dégagé : « Il ne faut pas s'en faire ». C'était la matérialisation égoïste de la doctrine dont nous parlons. L'âme de cette doctrine, c'est l'abandon confiant à la Providence. Si cet abandon confiant n'existe plus, dans les recettes de vie comme celle-là : « il ne faut pas s'en faire », il n'y a plus qu'un corps sans âme, une formule, qui ne vaut que ce que vaut encore l'énergie morale de la personne qui s'en sert.
Lorsqu'on a quitté la voie salutaire dont nous parlons, voilà ce qui reste des plus hautes maximes de vie : une formule morte qui peut servir à tout excuser. Et pourtant la lumière de vie de l'Évangile est offerte à tous. L'hostie consacrée, qui est élevée tous les matins sur l'autel, est offerte pour tous, et tous pourraient s'unir à cette oblation.
C'est un immense malheur de lui préférer cette idole : la pièce d'or, et de mettre à la place de la confiance en Dieu, unie au travail de tous les jours, l'orgueilleuse assurance fondée sur le calcul humain. L'homme se met alors à la place de Dieu, il tue en lui les vertus théologales ; il est à l'antipode de la doctrine dont nous parlons, qui est par excellence la doctrine de vie.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 11 Mar - 5:33 | |
| CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
Dieu vivifie de plus en plus intimement les âmes qui s'abandonnent à lui
Non seulement il les conduit et les défend, mais il les vivifie par sa grâce, par les vertus, par les dons du Saint-Esprit et les inspirations toujours nouvelles qu'il leur envoie. Bien plus il les vivifie lorsqu'il paraît le plus les dépouiller et les faire mourir, selon le mot de saint Paul : « Mihi vivere Christus est et mori lucrum
Le Christ est ma vie, et la mort m'est un gain » Phil., I, 21. Tandis que la vie de certaines personnes c'est le sport, ou l'art, ou l'activité intellectuelle scientifique ou philosophique ; la vie des âmes dont nous parlons, c'est le Christ, comme dit saint Paul, ou l'union au Christ. Lui-même est leur vie, dit saint Thomas (in Epistolam ad Phil., I, 21), en ce sens qu'il est le motif constant de leurs actions vitales les plus profondes. C'est pour lui qu'elles vivent et agissent constamment ; ce n'est pas pour un but humain ; c'est vraiment pour le Seigneur qui les vivifie de plus en plus, et qui les fait vivre de cela même qui semble devoir faire mourir, comme Jésus lui-même a fait de sa Croix le plus grand instrument de salut.
Ce point de doctrine si profond a été admirablement mis en lumière par un dominicain du XVIIe siècle, le P. Chardon dans son livre La Croix de Jésus (3e entretien, ch. VIII et suivants). Il montre que l'action divine qui nous détache progressivement, et parfois de façon bien douloureuse, de ce qui n'est pas Dieu, tend à nous unir à lui de plus en plus, par ce détachement même. Par là la perte est un gain.
La grâce, en augmentant en nous, est à la fois principe de séparation et d'union ; la séparation progressive n'est que l'envers de l'union. « De crainte, dit Chardon, que l'usage trop fréquent des consolations n'arrête l'inclination de l'âme vers lui, Dieu lui suspend le ruisseau, pour la faire soupirer avec plus d'ardeur vers la source... Il lui soustrait ses grâces pour se donner lui-même. Il s'insinue doucement, en se faisant maître de toutes les attentions de ses puissances, afin de la rendre jouissante du Bien unique et nécessaire, que l'on ne doit aimer qu'avec la même solitude, qui sépare de toutes choses la souveraineté de son être ». La disparition d'une lumière et d'une vie inférieure coïncide ainsi avec l'apparition d'une lumière de vie beaucoup plus haute.Lorsqu'un apôtre au milieu de son apostolat, en pleine maturité, est frappé de paralysie, on croit souvent que c'est la fin de son influence ; c'est parfois et ce devrait être le commencement de quelque chose de supérieur : à la place de l'apostolat direct et extérieur, l'apostolat caché mais profond, qui par la prière et l'immolation atteint les âmes dans le Christ, et fait déborder sur elles le calice de la surabondante rédemption. Une prière écrite par un inconnu qui s'est inspiré de saint Augustin résume admirablement cette doctrine :
Acte d'abandon.
« Je me laisse, ô mon Dieu ! dans vos mains. Tournez, retournez cette argile, sicut lutum in manu figuli, comme le vase qui se fait entre les mains du potier (Jérémie, XVIII, 6). Donnez-lui une forme ; brisez-la ensuite, si vous voulez ; elle est à vous ; elle n'a rien à dire. Il me suffit qu'elle serve à tous vos desseins et que rien ne résiste à votre bon plaisir pour lequel je suis fait. Demandez, ordonnez ; que voulez-vous que je fasse ? que voulez-vous que je ne fasse pas ? Élevé, abaissé, persécuté, consolé, souffrant, appliqué à vos œuvres, inutile à tout, il ne me reste qu'à dire, à l'exemple de votre sainte Mère : Qu'il me soit fait selon votre parole. « Donnez-moi l'amour par excellence, l'amour de la croix, non pas de ces croix héroïques dont l'éclat pourrait nourrir l'amour-propre, mais de ces croix vulgaires que nous portons hélas ! avec tant de répugnance, de ces croix de chaque jour, dont la vie est semée et qui se rencontrent au milieu du chemin à toute heure, dans la contradiction, l'oubli, l'insuccès, les faux jugements, les contrariétés, la froideur ou les vivacités des uns, les rebuts ou les mépris des autres, dans les infirmités du corps, les ténèbres de l'esprit, le silence et la sécheresse du cœur. Alors seulement, vous saurez que je vous aime, bien que je ne le sache ni ne le sente moi-même, et cela me suffit ! » Cela, c'est vraiment la sainteté, même la haute sainteté. S'il n'y avait eu dans notre vie aux moments les plus douloureux que quelques minutes semblables, ce seraient là les sommets de notre vie, où nous aurions été très près de Dieu. Or c'est à chaque instant que le Seigneur nous invite à vivre ainsi pour nous perdre en Lui. Même et surtout en ces moments, il est vrai de dire : « Justum deduxit Dominus per vias rectas, et ostendit illi regnum Dei - Le Seigneur conduit le juste par des voies droites, et il lui montre le règne de Dieu ».
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 12 Mar - 4:32 | |
| CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
S'il est une chose qui doive nous intéresser dans le plan providentiel, c'est le chemin de la perfection, tracé de toute éternité par Dieu.
Tous les grands auteurs spirituels ont décrit l'itinéraire de cette ascension. Parmi eux quelques-uns l'ont plus particulièrement considéré dans ses rapports avec la Providence, c'est ce qu'a fait sainte Catherine de Sienne.
Nous voudrions rappeler sur ce point les lignes principales de son témoignage reçu d'en haut.
Nous le choisissons ici de préférence à celui d'autres saints, parce que sainte Catherine de Sienne a une large vue de la réalité concrète, qui permet d'adapter facilement ce qu'elle dit aux besoins spirituels des personnes de toutes les conditions, elle a un langage, qui sans jamais cesser d'être très élevé, est pour tous des plus réalistes et des plus pratiques. Il se rapproche de la hauteur et de la simplicité de l'Évangile.
On a dit souvent qu'il y a une parfaite harmonie entre la doctrine de saint Thomas d'Aquin et celle exposée par sainte Catherine de Sienne dans ses extases, et écrite au fur et à mesure qu'elle parlait par ses secrétaires en ce livre qui a été appelé le Dialogue.
S'il est un sujet où l'harmonie de ces deux doctrines apparaît de façon particulièrement frappante, c'est celui de la perfection chrétienne et de la voie qui y conduit selon le plan de la Providence. Pour nous en rendre compte, nous considérerons les points suivants :
1° En quoi consiste spécialement la perfection ?
2° Tombe-t-elle en un sens sous le précepte suprême, ou bien est-elle seulement de conseil ?
3° La lumière de la foi suffit-elle à la perfection chrétienne, ne faut-il pas avoir aussi la lumière du don de sagesse ? Et cette lumière est-elle normalement proportionnée au degré de charité ou d'amour de Dieu ?
4° Quelles purifications, selon le plan de la Providence, sont nécessaires pour arriver à la perfection ? Y arrive-t-on sans avoir traversé les purifications dites passives, sans avoir supporté avec patience et amour les croix de la sensibilité et celles de l'esprit ?
5° Toutes les âmes intérieures sont-elles appelées par la Providence à la contemplation infuse des mystères de la foi, sous la lumière du don de sagesse, et à l'union à Dieu, qui résulte de cette contemplation, et qui est fort différente des grâces extraordinaires telles que les révélations et visions ?
En d'autres termes : selon le plan providentiel, le sommet du développement normal de la vie de la grâce ici-bas ou le prélude normal de la vie du ciel est-il seulement d'ordre ascétique, ou d'ordre mystique ?
Ce qui le caractérise est-ce notre activité propre sous la grâce, ou plutôt notre docilité à recevoir les inspirations du Saint-Esprit ? Pour répondre à ces questions, nous procéderons par citations prises dans les chapitres du Dialogue où il est parlé directement de ces sujets.
I - En quoi consiste spécialement la perfection chrétienne ?
Serait-elle surtout dans la mortification corporelle, ou bien dans les pratiques de piété, ou bien encore dans la connaissance des choses divines ? Sainte Catherine de Sienne répond comme saint Thomas d'Aquin (IIa-IIae, q. 184, a. 1) que la perfection consiste spécialement dans la charité, principalement dans l'amour de Dieu et secondairement dans l'amour du prochain.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Ven 13 Mar - 4:26 | |
| CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
Cette doctrine est nettement exprimée dans le Dialogue ch. II[87], où on lit : « Je te l'ai dit déjà, si tu t'en souviens bien, il y a quelque temps, quand tu souhaitais de faire grande pénitence pour moi. « Que pourrais-je faire, disais-tu, que pourrais-je endurer pour vous, ô Seigneur ? » - Et je te répondis dans ton esprit par ces simples mots : « Je suis Celui qui me complais à peu de paroles et à beaucoup d'œuvres, pour bien faire entendre que celui qui se contente de crier vers moi à son de voix : « Seigneur, je voudrais faire quelque chose pour vous », comme celui qui pour moi veut bien mortifier son corps par de nombreuses pénitences, mais sans renoncer à sa volonté propre, a tort de croire qu'il m'est agréable. ... Moi qui suis infini, je suis en quête d'œuvres infinies, c'est-à-dire d'un sentiment infini d'amour.
Je demande donc que les œuvres de la pénitence et autres exercices corporels soient employés à titre de moyens, et qu'ils n'occupent pas dans l'affection la place principale. Si c'est là ce qu'on aime par-dessus tout, l'on ne m'offre plus que des œuvres finies. Il en sera comme de la parole qui n'est plus rien dès qu'elle est sortie de la bouche, si elle ne procède pas de l'affection intérieure de l'âme. C'est l'âme qui conçoit et engendre la vertu dans la vérité, et c'est par cette vertu intérieure que l'œuvre finie est unie à l'amour de charité ».
Autrement il n'y aura que le côté matériel de la perfection ; l'âme et l'inspiration de la vie intérieure n'y seront plus. Il est dit au même endroit : « On ne doit pas mettre sa fin dans la pénitence ou en tout autre acte extérieur, qui, je te l'ai dit, sont des œuvres finies... qu'il est sage parfois d'interrompre, soit par nécessité, soit par obéissance... (tandis qu'on ne doit pas interrompre la vie d'amour de Dieu). Ces pratiques sont donc un moyen, non le principe... Mais elles me plaisent quand on y cherche un instrument, non le principe de la vertu ». (Ces derniers mots montrent qu'il ne faut pas tomber dans l'autre extrême, en négligeant la mortification corporelle, pratiquée par tous les saints).
« La vertu, continue le Dialogue, est toute entière dans la charité éclairée de la lumière de la vraie discrétion. Sans la charité elle est sans valeur. Cet amour, la discrétion me le donne sans fin et sans mesure, parce que je suis la souveraine et éternelle Vérité. Elle n'impose donc ni loi ni bornes à l'amour dont elle m'aime, mais, à l'égard du prochain, elle le mesure à bon droit, selon l'ordre de la charité.
C'est dans l'ordre de la charité de ne pas se faire tort à soi-même, par le péché, pour rendre service au prochain. Quand il suffirait d'un seul péché... pour produire une action de grande importance, ce ne serait pas d'une charité ordonnée avec discrétion de le commettre...
« Voici l'ordre qu'impose la sainte discrétion. L'âme dirige toutes ses puissances à me servir virilement en toute générosité, et l'amour qu'elle a pour le prochain est tel qu'elle est prête à donner la vie du corps pour le salut des âmes, et mille fois, s'il était possible. Il n'est point de peines et de tourments qu'elle ne soit disposée à subir pour assurer à autrui la vie de la grâce. »
Voilà en quoi consiste spécialement la perfection chrétienne, principalement dans l'amour généreux de Dieu, et secondairement dans l'amour non seulement affectif, mais effectif, du prochain. C'est pourquoi Catherine de Sienne aime à dire que la charité vivifie toutes les vertus[90], qu'elle rend leurs actes méritoires de la vie éternelle[91], qu'elle est comme la mère de toutes les vertus, qu'elle est le vêtement nuptial des serviteurs de Dieu, et que, plantée dans la terre de l'humilité, elle est comparable aussi à un arbre qui élève vers le ciel ses fleurs et ses fruits nombreux, fruits de vie pour l'éternité. La sainte insiste souvent sur ceci que l'amour du prochain est inséparable de l'amour de Dieu, qu'il en est le rayonnement, le signe, la preuve certaine, et que le zèle des âmes inspire toutes les vertus[94]. Elle ajoute aussi qu'on ne peut aimer efficacement le prochain que pour Dieu et en Dieu. « L'amour du prochain est comme le vase qu'on remplit à la fontaine. Si on le retire de la source pour boire, il est bientôt vide. Mais si on le tient plongé dans la source, on peut y boire toujours, il demeure toujours plein ».
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 15 Mar - 4:20 | |
| CHAPITRE V CONDUITE DE LA PROVIDENCE A L'ÉGARD DE CEUX QUI S'ABANDONNENT PLEINEMENT A ELLE
CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
Voulez-vous qu'une amitié dure, voulez-vous vous désaltérer longtemps à cette coupe, laissez-la toujours se remplir à la source d'eau vive, autrement elle ne pourra plus répondre à votre soif.
C'est exactement la même doctrine que celle que nous trouvons dans la Somme Théologique de saint Thomas : Pour lui la perfection consiste spécialement dans la charité, qui vivifie toutes les vertus et nous unit à notre fin dernière, à Dieu auteur de la grâce, en nous le faisant aimer plus que nous-mêmes et par-dessus tout, en nous faisant aussi aimer pour lui tout ce qui mérite de l'être.
Sans la charité rien ne vaut pour la vie éternelle ; la science, même celle des choses divines, n'est fructueuse que par son union à l'amour de Dieu. Elle peut être empoisonnée par l'orgueil[96], dit la sainte, et souvent elle obtient plus de lumière par la prière que par l'étude, de cette lumière de vie, très simple et très haute, principe de la contemplation, qui unifie le savoir et le rend fécond.
II - La perfection et le précepte de l'amour
Cette perfection, qui consiste spécialement dans une haute charité, tombe-t-elle sous les préceptes, ou est-elle seulement de conseil ?
Saint Thomas a enseigné qu'elle tombe sous le précepte suprême, non pas comme matière ou chose à réaliser immédiatement, mais comme la fin vers laquelle tous les chrétiens doivent tendre, chacun selon sa condition, celui-ci dans la vie religieuse, celui-là dans la vie du siècle[97]. Le Docteur Angélique dit expressément que la perfection chrétienne consiste essentiellement dans l'accomplissement généreux des préceptes, surtout des deux préceptes de l'amour de Dieu et du prochain, et qu'elle n'est qu'accidentellement dans la pratique effective des trois conseils de pauvreté, chasteté absolue et obéissance, comme en des moyens d'arriver plus sûrement et plus promptement à la perfection de l'amour de Dieu, perfection qui reste encore accessible dans l'état de mariage, au milieu des occupations du monde, comme le montre la vie de plusieurs saints.
C'est la même doctrine que nous trouvons chez Catherine de Sienne. Son Dialogue montre que le précepte suprême n'a pas de limites, car il est ainsi formulé : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces, de tout ton esprit » Luc, X, 27. Cette loi d'amour n'oblige pas seulement jusqu'à un certain degré, au delà duquel il n'y aurait plus qu'un conseil de charité ; mais tout chrétien doit tendre à la perfection de l'amour. On lit dans le Dialogue : « Tu vois quel est le devoir pour toute âme. Il faut qu'elle m'aime, Moi, d'un amour sans mesure »[. Et même sainte Catherine dit nettement que, bien qu'on puisse observer les préceptes sans pratiquer effectivement les trois conseils évangéliques, on ne peut pas accomplir parfaitement les préceptes sans avoir l'esprit des conseils, l'esprit de détachement des créatures, qui ne fait qu'un avec l'amour de Dieu qui doit toujours grandir en nous.
La sainte l'explique fort bien par ces paroles du Seigneur, ch. 47 : « Comme les conseils sont liés aux commandements, personne ne peut bien observer les commandements, sans observer les conseils, au moins spirituellement. Si l'on possède les richesses du monde, on doit les posséder avec humilité, non avec orgueil, comme une chose prêtée et non comme une chose dont on aurait la pleine propriété, ainsi que ma Bonté les met à votre disposition pour votre propre usage. Vous ne les avez qu'autant que je vous les donne et que je vous les conserve, et je ne le fais qu'autant que je le juge utile à votre salut. C'est donc ainsi que vous devez en user ; ... en observant l'esprit des conseils, en retranchant le venin de l'amour désordonné ».
Nous devons en user comme n'en usant pas, avait dit saint Paul. C'est là « posséder les biens du monde, en seigneurs et non en esclaves », sans s'asservir à eux, comme l'avare à son trésor. Ainsi en tout état, on se conduira de façon à gagner la vie éternelle, et l'on grandira chaque jour dans la charité, comme le précepte suprême le demande, et comme la communion eucharistique nous le permet, en fortifiant notre âme suivant la mesure de son désir.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 15 Mar - 4:24 | |
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CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
II - La perfection et le précepte de l'amour
En suivant cette voie, même au milieu du monde, l'âme pourra arriver à la perfection de la charité, à un amour de Dieu et des âmes très pur et très fort, qui lui permettra, dit la sainte, d'accepter injures, mépris, affronts, moqueries et persécutions pour l'honneur de Notre-Seigneur et le salut du prochain.
III - La Perfection et la lumière du don de sagesse dans l'oraison: Les visites du Seigneur Pour atteindre cette haute charité en laquelle consiste spécialement la perfection chrétienne, suffit-il d'avoir la lumière de la foi et de prier vocalement, ne faut-il pas recourir aussi à l'oraison mentale où le Saint-Esprit éclaire l'âme par lumière de ses dons ? La sainte nous dit : la prière est un des grands moyens d'arriver à la perfection. Fondée sur la connaissance de Dieu et de soi-même, la vraie prière consiste dans l'ardeur du désir. La prière vocale doit être accompagnée de la mentale, autrement elle serait comme un corps sans âme. Et il faut quitter la prière vocale pour la mentale, quand Dieu y invite. On lit dans le Dialogue ch. 66 : « L'âme doit unir aux paroles qu'elle prononce la connaissance de moi et d'elle-même. Ainsi de la prière vocale imparfaite, elle arrivera avec de la persévérance dans cet exercice, à l'oraison mentale parfaite. Mais si elle vise simplement à réciter un certain nombre de formules, et si la prière vocale lui fait négliger l'oraison mentale, elle n'y arrivera jamais...
Qu'elle soit attentive lorsque je visite son esprit d'une manière ou d'une autre. Tantôt je lui enverrai ma lumière, pour qu'elle se connaisse mieux elle-même et conçoive un vrai repentir de ses fautes ; tantôt je lui ferai largesse de ma charité. D'autres fois, je placerai devant son esprit, de différentes manières, la présence de ma Vérité, suivant qu'il me plaît, ou selon que l'âme l'avait elle-même désiré ... Aussitôt qu'elle est avertie dans son esprit des approches de ma visite, elle doit abandonner la prière vocale, quitte à la reprendre, si elle en a le temps, quand l'oraison mentale est terminée. Exception pourtant doit être faite pour l'office divin, que les clercs et religieux ont l'obligation de réciter... Si, à l'heure consacrée à cette récitation, ils sentent leur esprit attiré et élevé par le désir, ils doivent prendre leurs dispositions pour dire l'office avant ou après... Ainsi, avec de l'exercice et de la persévérance, l'âme goûtera l'oraison véritable et se nourrira du sang de mon Fils unique.
C'est ainsi que quelques-uns participent spirituellement au corps et au sang du Christ, bien que non sacramentellement, en communiant à la divine charité, qu'ils goûtent par le moyen de la sainte oraison, peu ou beaucoup, suivant le désir de celui qui prie. Celui qui y apporte peu, trouve peu. Celui qui apporte beaucoup reçoit beaucoup. Plus l'âme s'applique à recueillir sa puissance affective et à l'unir à moi par la lumière de l'intelligence, plus elle connaît. Qui connaît davantage, aime davantage, et qui aime davantage, goûte davantage ».
Sainte Catherine de Sienne montre bien comment ceux qui sont parvenus à l'état d'union sont éclairés dans leur intelligence, par une lumière surnaturelle infuse. « Le regard de leur intelligence, dit-elle[108], se porte alors vers moi, pour contempler ma Divinité, emportant à sa suite la volonté qui s'unit à moi pour s'y nourrir. Cette vue est une grâce infuse que j'accorde à l'âme qui m'aime et me sert en toute vérité ». C'est ainsi qu'on dit communément qu'un saint Thomas a reçu plus de lumière dans l'oraison que dans l'études e généralement, dit-il, aux avancés et aux parfaits.
La sainte ajoute : « C'est cette lumière infuse que possédaient les Docteurs, les Confesseurs, les Vierges et les Martyrs, qui tous en furent éclairés. Et chacun l'a reçue de manière différente, suivant que le demandait son propre salut ou le salut du prochain... Cette lumière surnaturelle est donnée par grâce aux humbles qui veulent la recevoir... mais les orgueilleux s'aveuglent à cette lumière ; leur orgueil et le nuage de l'amour-propre cachent pour eux cette clarté... C'est pourquoi ils ne goûtent de l'Écriture que la lettre, à force de compulser des livres ; ils n'en savourent pas la moelle, parce qu'ils sont privés de la lumière qui l'a composée et qui aussi en révèle le sens ».
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 15 Mar - 17:45 | |
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CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
III - La Perfection et la lumière du don de sagesse dans l'oraison: Les visites du Seigneur
On voit que cette lumière de vie, qui est celle du don de sagesse, est normalement donnée, comme l'avait dit saint Thomas, à un degré qui correspond à celui de la charité.
Ce qui, fait dire à la sainte, ibid., « Avec cette lumière on aime, parce que l'amour suit l'intelligence. Plus on connaît, plus on aime, et plus on aime, plus on connaît. Amour et connaissance s'alimentent ainsi l'un l'autre réciproquement .
Si ceux qui écrivent sur Raphael et Michel-Ange ne négligent rien pour approfondir leur sujet, nous ne devons évidemment rien négliger pour approfondir l'Évangile et pour vivre vraiment de la sainte Messe !
Il est dit ailleurs, au ch. 28 : « La joie que ressent celui qui suit la voie véritable, nulle langue ne la peut dire, aucune oreille ne peut l'entendre, il n'est point d'œil qui la puisse voir, car celui-là possède et goûte déjà le bien qui est préparé pour la vie du ciel ». « Est quædam inchoatio vitæ æternæ », avait dit saint Thomas.
Cet état d'union est décrit au ch. 89, où il est tout à fait distingué des visions et révélations, dont il est parlé ch. 70. En lui s'unissent la connaissance vécue de notre indigence et la connaissance quasi expérimentale de l'infinie bonté de Dieu ; elles sont, dit la sainte, comme le point le plus bas et le point le plus élevé d'un cercle qui grandirait toujours jusqu'à notre entrée au ciel. Cette belle image montre combien ces deux connaissances expérimentales de soi-même et de Dieu sont unies, et diffèrent d'une connaissance abstraite et spéculative. Nous sommes ici au cœur même de la vraie vie spirituelle. « En s'exerçant et en progressant encore dans la connaissance d'elle-même, est-il dit en ce chapitre, l'âme apprend à se mépriser, à se haïr parfaitement, en même temps qu'elle arrive à une vraie connaissance de ma Bonté, où s'enflamme son amour.
Elle commence dès lors à unir et à conformer sa volonté à la mienne et à éprouver en elle-même une joie et une compassion toute nouvelle. La joie qu'elle ressent en elle c'est de m'aimer ;... et en même temps elle s'afflige avec amour de l'offense qui m'est faite et de la perte du prochain...Elle se désole de ne pouvoir rendre honneur et gloire à mon nom comme elle le voudrait, et dans l'angoisse de son désir, elle trouve délicieux d'être admise à se rassasier à la table de la sainte Croix, pour ressembler à l'Agneau sans tache, humble et patient, mon Fils unique ». Nous sommes ici au centre du mystère de la Rédemption.
La contemplation, que comporte cette union à Dieu, qui caractérise la pleine perfection de la vie chrétienne, est bien une contemplation infuse car il est dit, ch. 60 fin, et 61 : « Si mes serviteurs rougissent de leur imperfection, s'ils se mettent à aimer la vertu, s'ils arrachent avec une sainte haine la racine de l'amour-propre spirituel qui est en eux..., alors ils me seront si agréables... que je me manifesterai à eux...
En plus de la manifestation commune, mes amis goûtent et connaissent, ils éprouvent, ils sentent par expérience ma charité au fond de leur âme. La seconde manifestation de ma charité a lieu, dans l'âme même, quand je me révèle moi-même à elle par sentiment d'amour... Quelquefois même je me révèle à l'âme en lui donnant l'esprit de prophétie ». Mais, on le voit par le ch. 70, cette dernière faveur n'est plus normale, elle est extraordinaire.
IV - Les épreuves providentielles et l'union à Dieu Cette union à Dieu dont nous venons de parler suppose manifestement la mortification ou purification active, que nous devons nous imposer à nous-mêmes pour faire mourir en nous la concupiscence de la chair, celle des yeux et l'orgueil de la vie. Suppose-t-elle aussi des purifications passives ou l'acceptation patiente et généreuse de la croix ? Bien certainement. La doctrine exposée par sainte Catherine de Sienne est des plus nettes sur ce point, quand elle parle de la tentation, des tribulations des justes, et des différentes sortes de larmes fort distinctes les unes des autres, suivant qu'elles procèdent soit de l'amour-propre, soit du pur amour.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 16 Mar - 18:02 | |
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IV - Les épreuves providentielles et l'union à Dieu
Aux tentations l'âme peut toujours résister par la vertu du sang du Sauveur, Dieu ne commande jamais l'impossible. Ces tentations lorsqu'on y résiste, nous font mieux connaître et nous-mêmes et la bonté de Dieu, et elles fortifient la vertu.
De même Dieu nous envoie des tribulations pour nous purifier de nos fautes et imperfections et nous mettre dans la nécessité de grandir dans son amour, lorsqu'il n'y a plus pour nous d'air respirable qu'en Lui. La manière d'accueillir ces épreuves est la pierre de touche de la perfection de l'âme.
Alors peu à peu, après les larmes stériles de l'amour-propre, après celles de la crainte servile qui redoute le châtiment plus que le péché, l'âme finit par connaître les larmes du pur amour, comme il est dit au ch. 89 : « Lorsque l'amour sensitif a été vaincu (par la mortification et les premières épreuves), il reste l'amour-propre spirituel, avec ce besoin égoïste de consolations spirituelles, qu'elles viennent de moi directement ou de quelque créature aimée d'une affection spirituelle.
Quand donc l'âme éprouvée se voit privée de ce qu'elle aime, des consolations, soit intérieures qui viennent de Moi, soit extérieures, qui lui viennent des créatures, et qu'elle se trouve en butte aux tentations ou aux persécutions des hommes, son cœur est en souffrance. Aussitôt les yeux, qui sympathisent avec la douleur et la peine du cœur, se mettent à pleurer.
Ce sont des larmes de tendresse et de compassion que l'âme répand sur elle-même, d'une compassion spirituelle, il est vrai, mais qui n'en procède pas moins de l'amour-propre... Mais en progressant encore dans la connaissance d'elle-même, elle apprend à se mépriser et à se haïr parfaitement... et elle en arrive à ne s'affliger vraiment et profondément que de l'offense faite à Dieu et de la perte des âmes... Alors, ses yeux répandent les larmes du pur amour… ; elle est tout ensemble bienheureuse et affligée, bienheureuse à cause de l'union qu'elle a avec moi, en goûtant l'amour divin, et affligée par l'offense qu'elle voit faire à ma Bonté et à ma Grandeur qu'elle contemple et savoure dans la connaissance d'elle-même et de moi. Cette affliction ne fait pas obstacle à l'état d'union ». Elle rappelle l'affliction de Notre-Seigneur qui s'unissait, même sur la croix, à la paix parfaite.
Les purifications qui conduisent à cet état d'union sont manifestement, on le voit, les purifications passives dont parlera si longuement saint Jean de la Croix ; il suffit pour s'en rendre compte de lire le ch. 24 : De quelle manière Dieu coupe les rameaux vivants unis au cep pour leur faire porter beaucoup de fruit ; de même le ch. 43 : de l'utilité des tentations, le ch. 45 : quels sont ceux à qui ces épines ne font aucun mal, et encore le ch. 20 : comment sans les tribulations supportées avec patience, il est impossible de plaire à Dieu.
V - Conclusion:
L'Appel général Que conclure ? Les textes que nous venons de citer le montrent assez clairement : L'union à Dieu, en laquelle consiste normalement la pleine perfection de la vie chrétienne, n'est pas seulement une union active, fruit de notre activité personnelle, aidée de la grâce commune ; c'est aussi une union passive, fruit de la docilité au Saint-Esprit, aux divines inspirations des sept dons, qui grandissent normalement avec la charité.
Ainsi l'âme arrive normalement à une manière contemplative de prier, de lire l'Écriture, d'assister à la messe, en contemplant toujours plus profondément la valeur infinie du sacrifice de l'autel, qui perpétue en substance celui de la Croix. Elle arrive à une manière contemplative d'exercer l'apostolat, sans perdre l'union à Dieu, mais au contraire en la conservant, pour la donner aux autres.
A cet état d'union toutes les âmes intérieures sont-elles appelées ? - Sainte Catherine, ne répond-elle pas à cette question, en expliquant, au ch. 53, les paroles de Notre-Seigneur : Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive et des fleuves d'eaux vives couleront de sa poitrine. (Jean, VII, 37).
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 17 Mar - 16:53 | |
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CHAPITRE VI LA PROVIDENCE ET LE CHEMIN DE LA PERFECTION
V - Conclusion: L'Appel général
« Tous, dit le Dialogue, vous avez été appelés, en général et en particulier par ma Vérité, mon Fils, lorsque plein d'un ardent désir, il criait dans le temple : « Qui a soif vienne à moi et boive »... Ainsi vous êtes invités à la source d'eau vive de la grâce. Il vous faut donc passer par mon Fils, qui est devenu votre pont, et marcher avec persévérance, sans que ni épines, ni vents contraires, ni prospérités, ni adversités, ni d'autres peines que ce soit, vous puissent faire regarder en arrière. Persévérez, jusqu'à ce que vous me trouviez, Moi, qui vous donne l'eau vive ; et c'est par l'intermédiaire de ce doux Verbe d'amour, mon Fils unique, que je vous la donne... « La première condition, c'est d'avoir soif. Car ceux-là seuls qui ont soif sont invités : « QUI A SOIF, est-il dit, qu'il vienne et qu'il boive ». Celui donc qui n'a pas soif, ne saurait persévérer dans son voyage, la moindre fatigue l'arrête... la persécution l'épouvante et dès qu'elle l'effleure, le voilà qui tourne le dos. Il a peur parce qu'il est seul... Il faut donc que vous ayez soif...
« Lorsque l'homme est rempli de ma charité et de l'amour du prochain, il se trouve par là même accompagné de nombreuses et réelles vertus. C'est alors que l'âme est disposée à avoir soif, soif de la vertu, de mon honneur, et du salut des âmes... Alors elle se met en marche sur le chemin qui mène à la source d'eau vive... Arrivée là, l'âme passe par la porte du Christ crucifié, et goûte l'eau vive, en se désaltérant en moi, qui suis l'Océan de la Paix ».
Cette même idée est exprimée par sainte Catherine sous forme d'un autre symbole, au ch. 26, où le Père lui dit de passer par un pont qui relie la terre au ciel et qui est Notre-Seigneur Jésus-Christ, la voie, la vérité et la vie. « Les pieds du Sauveur percés de clous, y est-il dit, doivent te servir de degré pour arriver au côté, qui est le second degré où te sera révélé le secret du cœur... Alors l'âme s'emplit d'amour, en voyant qu'elle est tant aimée. Elle monte alors du deuxième degré au troisième, c'est-à-dire à cette bouche pleine de douceur, où elle trouve la paix ».
Enfin quel est le signe par lequel on voit que l'âme est arrivée à l'amour parfait ? Le Seigneur l'explique à Catherine du ch. 74 au 79 : « Il me reste maintenant à te dire à quel signe l'on voit que l'âme est arrivée à l'amour parfait. Ce signe est celui-là même qu'on vit dans les apôtres, quand ils eurent reçu le Saint-Esprit.
Ils sortirent du cénacle, délivrés de toute crainte, ils annonçaient ma parole, et prêchaient la doctrine de mon Fils unique. Loin de redouter les souffrances, c'est de leurs souffrances qu'ils se faisaient gloire. Ceux qui ont la passion de mon honneur, et qui ont faim du salut des âmes courent à la table de la sainte Croix. Ils n'ont d'ambition que de souffrir et d'affronter mille fatigues pour le service du prochain... Ceux-là courent avec ardeur dans la voie du Christ crucifié ; ils suivent sa doctrine, et rien ne peut ralentir leur course, ni les injures, ni les persécutions, ni les plaisirs que le monde leur offre. Ils passent par-dessus tout cela, avec une force inébranlable, une persévérance que rien ne trouble, le cœur transformé par la charité, goûtant et savourant cette nourriture du salut des âmes, prêts à tout supporter pour elles. Voilà qui prouve, à n'en pas douter, que l'âme aime son Dieu à la perfection et sans aucun intérêt...
Si ces parfaits s'aiment eux-mêmes, c'est pour Moi ; s'ils aiment le prochain, c'est pour Moi, pour rendre honneur et gloire à mon nom... Au milieu de toutes les injures, c'est la patience qui brille et qui 'affirme sa royauté. A ceux-là je fais la grâce de sentir que je ne suis jamais séparé d'eux, tandis que dans les autres je m'en vais et je reviens, non que je leur retire ma grâce, mais bien le sentiment de ma présence. Avec ces très parfaits, parvenus à la grande perfection et qui sont morts entièrement à toute leur volonté, je n'agis pas de la sorte. Sans interruption je me repose en eux par ma grâce et par l'expérience que je leur donne de ma présence » (Ch. 78).
C'est là manifestement l'exercice éminent de la charité et du don de sagesse, qui nous donne, dit saint Thomas[126], la connaissance quasi expérimentale de Dieu présent en nous. C'est là vraiment la vie mystique, sommet du développement normal de la vie de la grâce, et prélude de la vie du ciel.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 18 Mar - 17:59 | |
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V - Conclusion: L'Appel général
Ceux qui connaissent la doctrine spirituelle de saint Thomas peuvent voir combien lui sont conformes ces paroles prononcées par sainte Catherine de Sienne en extase ; elles sont, croyons-nous, l'expression de la doctrine traditionnelle, qui se contente de mettre l'accent où il faut dans la lecture de l'Évangile, et des Épîtres. « Qui manet in caritate, in Deo manet, et Deus in eo. - Celui qui demeure dans l'amour, demeure en Dieu et Dieu demeure en lui » I Jean, IV, 16. « Unctio ejus docet vos de omnibus. - Son onction vous enseigne sur toute chose » I. Jean, II, 27.
« Spiritus testimonium reddit spiritui nostro quod sumus filii Dei. Si autem filii et heredes : heredes quidem Dei, coheredes autem Christi, si tamen compatimur ut et conglorificemur. L'Esprit de Dieu lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers, héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ, si toutefois nous souffrons avec lui, pour être glorifiés avec lui ». Rom., VIII, 17.
« Mortui enim estis et vita vestra est abscondita cum Christo in Deo. Cum Christus apparuerit, vita vestra, tunc et vos apparebitis cum ipso in gloria. Vous êtes morts et votre vie est cachée en Dieu avec Jésus-Christ. Quand Jésus-Christ, qui est votre vie, apparaîtra, alors vous apparaîtrez en gloire avec lui ». Coloss., III, 3. 4.
Avons-nous forcé le sens des textes du Dialogue ? Il vaut mieux dire que bien au contraire nous ne saurions les comprendre pleinement. Comme le disait Raphaël, « comprendre c'est égaler », et pour saisir pleinement le sens des textes que nous avons cités, c'est tout l'esprit de foi et toute la charité de Catherine de Sienne qu'il faudrait avoir.
Tel est d'après ce témoignage le chemin de la perfection tracé de toute éternité par Dieu dans le plan providentiel, pour conduire les âmes à leur destinée. C'est le chemin qui conduit à la source d'eau vive : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive et des fleuves d'eau vive couleront de sa poitrine... » « L'eau que je lui donnerai deviendra en lui une source jaillissant en vie éternelle ».
CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE PREMIER - PROVIDENCE ET JUSTICE DIVINE
Après avoir parlé de la Providence en elle-même et de sa conduite à l'égard des âmes, il convient de la considérer dans son rapport avec la Justice divine et avec la Miséricorde. Comme en nous la prudence est connexe avec la justice et les autres vertus morales qu'elle dirige, en Dieu la Providence s'unit à la Justice et à la Miséricorde qui sont les deux grandes vertus de l'Amour de Dieu à notre égard. La Miséricorde est fondée sur le souverain Bien en tant qu'il est diffusif de soi, communicatif de lui-même. La Justice est fondée sur les imprescriptibles droits du souverain Bien à être aimé par-dessus tout.
Ces deux vertus, dit le Psalmiste, s'unissent dans toutes les œuvres de Dieu : « Omnes viæ Domini Misericordia et veritas » Ps. 24, 10. Mais, comme le remarque saint Thomas, Ia, q. 21, a. 4, en certaines œuvres divines apparaît davantage la justice, comme dans les châtiments infligés par Dieu, en d'autres apparaît surtout la Miséricorde, comme dans la justification ou conversion du pécheur.
La Justice, qui s'attribue analogiquement à Dieu, n'est pas la justice commutative, celle qui règle les échanges entre égaux, car nous ne pouvons rien offrir à Dieu qui ne lui appartienne déjà. La justice qui lui est attribuée est la justice distributive, analogue à celle du père à l'égard de ses enfants, eu à celle du meilleur des rois à l'égard de ses sujets.
C'est ainsi que par sa justice Dieu fait trois choses : 1° il donne à chaque créature ce qui lui est nécessaire pour atteindre sa fin, 2° il récompense les mérites, 3° il punit les fautes et les crimes, surtout lorsque le coupable ne demande pas Miséricorde. Il importe pour nous de considérer comment la Providence dirige les actes de la justice : 1° dans le cours de notre existence, 2° au moment de la mort, 3° après cette vie.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 19 Mar - 17:50 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE PREMIER - PROVIDENCE ET JUSTICE DIVINE
Providence et justice dans le cours de notre existence
La Providence et la Justice s'unissent pour nous donner pendant la vie présente ce qui nous est nécessaire pour atteindre notre fin, c'est-à-dire pour que nous puissions vivre honnêtement, selon la droite raison, pour que nous puissions connaître Dieu surnaturellement, l'aimer, le servir, et par ce moyen obtenir la vie éternelle.
Il y a sans doute ici parmi les hommes une grande inégalité de conditions naturelles et surnaturelles. Les uns sont riches, les autres pauvres ; les uns sont naturellement bien doués, les autres ont une nature ingrate, une santé débile, un tempérament chagrin. Mais le Seigneur ne commande jamais l'impossible, et nul n'est tenté au delà de ses forces aidées par la grâce qui lui est offerte. Sans doute le sauvage du centre de l'Afrique ou de l'Amérique a reçu beaucoup moins que nous ; mais s'il fait son possible selon que sa conscience le lui montre, il sera conduit par la Providence de grâce en grâce jusqu'à celle de la bonne mort ; la vie éternelle lui est accessible. Jésus est mort pour tous les hommes et parmi les adultes ceux-là seuls sont privés de la grâce nécessaire au salut, qui la refusent par leur résistance. Dieu, qui ne commande jamais l'impossible, offre à tous le nécessaire pour le salut.
Bien plus il n'est pas rare que la Providence et la Justice par la distribution des biens surnaturels compensent l'inégalité des conditions naturelles. Il n'est pas rare que le pauvre en sa simplicité plaise plus à Dieu que le riche, et reçoive de plus grandes grâces. Rappelons-nous la parabole du mauvais riche en saint Luc, XVI, 19-31 : « Il y avait un homme riche qui était vêtu de pourpre et de fin lin, et qui faisait chaque jour splendide chère. Un pauvre nommé Lazare, était couché à sa porte, couvert d'ulcères et souhaitant de se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche ; mais les chiens mêmes venaient lécher ses ulcères.
Or il arriva que le pauvre mourut et il fut porté par les anges dans le sein d'Abraham. Le riche mourut aussi,... et tandis qu'il était en proie aux tourments, il invoqua Abraham... qui lui répondit : « Mon fils, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie et que pareillement Lazare a eu ses maux : maintenant il est ici consolé, et toi, tu souffres. » C'est dire que parfois la Providence et la Justice divines par la distribution des biens surnaturels compensent l'inégalité des conditions naturelles.
Il est dit aussi dans les béatitudes évangéliques que celui qui est privé des joies d'ici-bas se sent parfois plus attiré que les autres vers les joies de la vie intérieure. Notre-Seigneur nous le fait entendre en disant : « Bienheureux les pauvres en esprit..., bienheureux les doux..., bienheureux ceux qui pleurent... ceux qui ont faim et soif de justice,... ceux qui souffrent persécution pour la justice, car le royaume des cieux est à eux ».
Certains de ses serviteurs, Jésus les aime cloués sur la croix, parce que ainsi ils sont plus semblables à Lui, par l'oblation effective de tout leur être pour le salut des pécheurs. Il continue à vivre en eux ; sa prière et sa souffrance durent en eux en quelque sorte jusqu'à la fin du monde, et surtout son amour, car l'amour parfait est la donation complète de soi. Pour certaines personnes, toutes les routes de la vie à un moment se trouvent barrées ; aucun avenir humain ne s'offre plus à elles. C'est parfois le moment où une vocation supérieure leur est donnée. Certaines sont clouées sur un lit de douleur pendant de longues années. Il n'y a plus qu'une route ouverte, celle de la sainteté.
Ainsi la Providence et la Justice, en donnant à chacun le nécessaire, compensent souvent par la grâce l'inégalité des conditions naturelles. Elles nous récompensent aussi, dès cette vie, de nos mérites et nous rappellent nos grands devoirs par de salutaires avertissements, par des corrections bien méritées, qui sont des peines médicinales pour nous faire rentrer dans le droit chemin. Ainsi une mère qui aime son enfant d'un amour éclairé et fort, le corrige.
Si nous acceptons bien ces corrections salutaires, nous expions nos fautes et à leur occasion le Bon Dieu nous inspire une humilité plus sincère, un amour plus pur et plus fort. Les âmes se divisent selon qu'elles écoutent ou ne veulent pas écouter ces avertissements de Dieu.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Sam 21 Mar - 3:25 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE PREMIER - PROVIDENCE ET JUSTICE DIVINE
La Providence et la justice au moment de la mort Généralement ceux qui dans le cours de leur vie ont été attentifs aux avertissements de la justice de Dieu et aux imprescriptibles droits du souverain Bien à être aimé par-dessus tout, ne sont pas surpris par la mort, et trouvent la paix à ce moment suprême.Mais d'ordinaire il en est tout autrement de ceux qui n'ont pas voulu entendre les avertissements divins, et qui dans le cours de la vie ont confondu l'espérance avec la présomption. S'il est une chose qui dépend de la Providence, c'est l'heure de notre mort. « Tenez-vous prêts, dit Notre-Seigneur, car le Fils de l'homme viendra à l'heure que vous ne pensez pas » Luc, XII, 40. De même la manière dont nous mourrons, les circonstances de notre mort, tout cela est profondément inconnu pour nous, et relève de la divine Providence à laquelle nous devons nous confier, en nous préparant par une vie meilleure à bien mourir. Et combien sont différentes, au point de vue de la Justice divine, la mort du juste et celle du pécheur impénitent. La mort du pécheur impénitent est appelée dans l'Apocalypse, XX, 6, 14, une « seconde mort » ; car le pécheur était déjà mort spirituellement à la vie de la grâce, et si son âme se sépare du corps en cet état, elle sera pour toujours privée de cette vie surnaturelle. Daigne le Seigneur nous préserver de cette « seconde mort ». Le pécheur, qui ne se repent pas, dit sainte Catherine de Sienne, « est au dernier moment avec son injustice, avec la lumière de la foi éteinte, cette lumière qu'il avait reçue vive au baptême, et qui a été étouffée par le vent de l'orgueil et de la vanité du cœur. Son cœur, il l'a tendu comme une voile à tous les souffles contraires au salut : la voile de l'amour-propre, largement ouverte à tous les vents de la flatterie, en descendant le fleuve des délices et des grandeurs du monde, en s'abandonnant aux séductions de la chair fragile, aux artifices et aux pièges du démon ». « Le remords de la conscience (qu'il ne faut pas confondre avec le repentir) se réveille alors avec une telle vivacité, dit la sainte, qu'il ronge le pécheur au plus intime de lui-même. Il reconnaît à cette heure la vérité de ce qu'il méconnaissait auparavant. Le sentiment de son erreur le jette dans une grande confusion, et le démon est là... pour le pousser au désespoir ». Que dire, lisons-nous en ce Dialogue, de cette lutte, qui trouve le pécheur, désarmé, privé de la foi vive, qui est comme éteinte en lui, privé de l'espérance ferme, qu'il n'a pas nourrie, en se confiant au jour le jour au Seigneur et en travaillant pour lui ? Le malheureux a placé son espoir en lui-même, sans voir que tout ce qu'il avait lui était prêté et qu'il faudrait en rendre compte un jour. Il est privé aussi de la flamme de la charité, de l'amour de Dieu qu'il a complètement perdu. Il se trouve seul dans sa nudité spirituelle, sans aucune vertu, et après avoir refusé d'entendre tant d'avertissements donnés au cours de la vie, de quelque côté qu'il se tourne, il ne voit que sujet de confusion. La justice divine n'a pas été assez considérée dans le cours de la vie. C'est son poids qui se fait sentir maintenant, et l'ennemi du bien cherche à faire croire au pécheur qu'il n'y a pas de Miséricorde pour lui. Combien il faut prier pour les agonisants ! Si nous le faisons, d'autres prieront pour nous au moment de notre mort. A ces derniers instants la Miséricorde se penche encore sur le pécheur, comme elle se pencha sur Judas, lorsque Notre-Seigneur dit à la Cène (Matth., XXVI, 24) : « Malheur à l'homme par qui le Fils de l'homme sera trahi ! Mieux vaudrait pour lui que cet homme-là ne fût pas né ». Notre-Seigneur n'a pas dit encore quel est celui qui va le trahir, il est trop bon pour le révéler. Alors dit l'Évangile : « Judas qui le trahissait, prit la parole et dit : Est-ce moi, Maître ? » - « Tu l'as dit, répondit Jésus ». - Quand Judas après les autres apôtres dit le dernier : « Est-ce moi, Maître ? » il cherche à dissimuler, comme si l'on pouvait dissimuler devant Celui qui dès ici-bas voyait les secrets des cœurs. Il faut remarquer, note saint Thomas dans son Commentaire sur ces mots, la mansuétude avec laquelle Jésus l'appelle encore ami et lui répond : Tu l'as dit, comme pour dire : « Ce n'est pas moi qui l'affirme, qui le révèle, mais c'est toi qui l'as dit ». Notre-Seigneur se montre là encore plein de longanimité et de Miséricorde, fermant les yeux sur les péchés des hommes pour leur donner encore un avertissement salutaire et les amener à la pénitence. C'est ce que nous dit l'Écriture dans ces paroles si touchantes : Longanimis (est Dominus) et multum misericors (Ps. 102, ; dissimulans peccata hominum propter pœnitentiam (Sagesse, XI, 24). Que les doux écoutent et ils se réjouiront : Audiant mansueti et lœtentur. Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse Miséricorde de Dieu | |
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 22 Mar - 5:08 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE
CHAPITRE PREMIER - PROVIDENCE ET JUSTICE DIVINE
Ce dernier avertissement de Dieu nous permet de dire : Les pécheurs oseraient-ils affirmer que Dieu est un tyran pour eux ? C'est eux qui sont des tyrans pour eux-mêmes ; c'est eux qui manquent de bienveillance envers eux-mêmes et de bienveillance envers Dieu en lui refusant cette joie qu'il aurait à leur dire ce qu'il dit au sujet du prodigue : « mon fils était perdu et je l'ai retrouvé : perierat et inventus est ». Luc, XV, 32.
Oh ! si le pécheur décharge sa conscience par une sincère confession, par un acte de foi, de confiance en Dieu, de contrition, il est sauvé en cette dernière minute par la Miséricorde Divine, qui vient s'unir à la justice. Par la Miséricorde, chacun, à la mort, peut, s'il le veut, s'il ne résiste pas, se rattacher à l'espérance. Le repentir succède alors au remords.
Sans cela, l'âme succombe sous le remords en s'abandonnant au désespoir : péché plus grave encore que les précédents, péché qui n'a pas l'excuse de la faiblesse, de l'entraînement de la sensualité, péché par lequel le pécheur estime son crime plus grand que la Miséricorde Divine. Et une fois ce péché commis, l'âme ne s'afflige plus que de son propre malheur, et non pas du péché comme offense à Dieu ; cette affliction diffère hélas ! beaucoup de celle de l'attrition, et de la contrition.
Oh ! bienheureux le pécheur qui se repent alors, comme le bon larron, en pensant que « la Miséricorde Divine est, comme le dit Catherine de Sienne, incomparablement plus grande que tous les péchés que peuvent commettre toutes les créatures ensemble ». Plus heureux encore le juste, qui a considéré toute sa vie le devoir à accomplir par amour, et qui, après avoir mérité et lutté ici-bas, désire la mort pour jouir de la vision de Dieu, un peu comme saint Paul qui désirait mourir pour être avec le Christ : « cupio dissolvi et esse cum Christo ». Phil., I, 23.
Une paix plus ou moins profonde, suivant la perfection de chacun, remplit généralement l'âme des justes à l'agonie, et parfois surtout l'âme de ceux qui ont le plus redouté dans le cours de la vie la justice divine. Leur mort est paisible, parce que leurs ennemis ont été vaincus pendant la vie. La sensualité a été réduite en esclavage, par le frein de la raison. La vertu triomphe de la nature, réprime la crainte naturelle de la mort, par le désir d'atteindre la fin dernière, le souverain Bien.
La conscience, qui s'est conformée pendant la vie à la justice, demeure tranquille, bien que le démon cherche à la troubler et à l'effrayer.
Alors, il est vrai, apparaît davantage la valeur du temps de l'épreuve, le prix de la vertu, et l'âme juste se reproche de n'avoir pas assez bien employé ce temps. Mais la peine qu'elle en éprouve n'est pas accablante ; elle est profitable et porte l'âme à se recueillir, pour se mettre en présence du précieux sang du Sauveur, de l'Agneau de Dieu, qui efface les péchés du monde.
La Miséricorde et la Justice s'unissent ainsi admirablement dans ce passage du temps à l'éternité. Le juste, en mourant, pressent le bonheur qui lui est préparé, il goûte déjà à sa destinée, et l'on peut en voir quelquefois un reflet sur ses traits.
La Providence et la Justice de l'autre vie
Sitôt après la mort la Providence et la Justice s'exercent par le jugement particulier. La révélation nous le dit assez clairement dans la parabole dont nous parlions tout à l'heure : celle du mauvais riche et du pauvre Lazare, dont les âmes sont définitivement jugées sitôt après avoir quitté ce monde. Saint Paul l'enseigne aussi clairement en plusieurs endroits : « Il nous faut tous comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu'il a mérité étant dans son corps, selon ses œuvres, soit bien, soit mal ». – « J'ai le désir de partir et d'être avec le Christ ».
- « J'ai achevé ma course... il ne me reste plus qu'à recevoir la couronne de justice, que me donnera en ce jour-là le Seigneur, le juste Juge, et non seulement à moi, mais à tous ceux qui auront aimé son avènement ». - « Il est arrêté que les hommes meurent une seule fois, après quoi vient le jugement ».
L'Église primitive croyait universellement que les martyrs entrent aussitôt au ciel, et que les criminels non repentants, comme le mauvais larron, sont punis sitôt après la mort.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 22 Mar - 17:39 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE PREMIER - PROVIDENCE ET JUSTICE DIVINE
La Providence et la Justice de l'autre vie
La nature de ce jugement particulier, s'explique par l'état de l'âme séparée du corps ; dès qu'elle le quitte elle se voit comme substance spirituelle, comme un esprit pur se voit, et elle connaît aussitôt son état moral ; elle reçoit une illumination intérieure, qui rend inutile toute discussion ; la sentence est portée par Dieu, transmise par la conscience qui est l'écho de la voix de Dieu ; l'âme voit alors clairement ce qui lui est dû selon ses mérites et ses démérites qui lui sont alors nettement rappelés. C'est ce que dit symboliquement la liturgie dans le Dies iræ : Liber scriptus proferetur, in quo totum continetur : L'âme verra tout ce qui a été écrit à son sujet au livre de vie.
La justice infligera alors des peines proportionnées aux fautes, soit pour un temps, soit pour toujours. Le péché mortel, dont on ne veut pas se repentir avant la mort, est après elle comme une maladie incurable mais dans un sujet immortel dans l'âme. On s'est détourné, sans repentance, du Souverain Bien ; on a pratiquement nié sa dignité infinie de fin dernière, et l'on n'est pas revenu sur cette négation pratique quand il en était temps encore. C'est un désordre irréparable et conscient ; il y a remords mais sans repentir, l'orgueil et la révolte durent toujours et la peine qui leur est due dure toujours elle aussi; c'est surtout la privation perpétuelle de la vie divine de la grâce et de la vue de Dieu, de la béatitude suprême, avec la certitude d'avoir manqué pour toujours et par sa faute sa destinée.
La Justice de Dieu apparaît ici infinie ; c'est un mystère qui nous dépasse, comme celui de sa Miséricorde. Ici-bas les concepts ou idées que nous pouvons avoir de la Justice divine et des autres perfections de Dieu restent limités, bornés, malgré la correction que nous leur apportons par la négation de toute limite. Ils nous représentent en effet les attributs divins comme distincts les uns des autres, bien que nous ajoutions qu'il n'y a entre eux aucune distinction réelle. Il s'ensuit que ces idées bornées durcissent un peu la physionomie spirituelle de Dieu, comme lorsqu'on veut avec de petits carrés de mosaïque reproduire une physionomie humaine. Notre concept de justice étant distinct de celui de Miséricorde, il nous semble que la justice divine n'est pas seulement infiniment juste, mais qu'elle est trop raide, et la Miséricorde arbitraire.
Nous verrons dans la patrie que même les perfections divines, qui semblent le plus opposées, sont intimement fondues, qu'elles s'identifient sans pourtant se détruire dans la Déité, c'est-à-dire dans la vie intime de Dieu, que nous connaîtrons alors clairement et immédiatement. Alors nous verrons que la Justice et la Miséricorde n'existent à l'état pur, c'est-à-dire pures de toute imperfection, qu'en Dieu, et qu'en Lui la justice ne peut exister sans être unie à la Miséricorde et inversement que la Miséricorde ne peut être sans la Justice et la Providence, comme en nous les vertus cardinales sont connexes et ne sauraient se sépare. Voilà ce qui apparaît aux saints dès le jugement particulier, immédiatement suivi de leur entrée dans la gloire.
Une autre manifestation de la justice aura lieu au jugement universel, après la résurrection des corps, selon ces paroles du Credo : « Credo in Jesum Christum... qui venturus est judicare vivos et mortuos ». Notre-Seigneur dit en saint Matthieu, XXV, 31-46 : « Tous les peuples de la terre verront le Fils de l'homme venant sur les nuées du ciel avec une grande puissance et une grande majesté. Et il enverra ses anges avec la trompette retentissante, et ils rassembleront ses élus des quatre vents, depuis une extrémité du ciel à l'autre. » Si Jésus n'était pas le Fils de Dieu, comment aurait-il pu prononcer, lui pauvre ouvrier de village, de telles paroles ? Ce serait la folie la plus manifeste ; tout nous montre au contraire qu'elles sont la sagesse même.
Ce jugement universel convient manifestement parce que l'homme n'est pas seulement une personne privée, mais il vit en société et ce jugement manifestera à tous la rectitude des voies de la Providence, la raison de ses décisions et leur résultat. La justice divine apparaîtra souverainement parfaite, alors que si souvent la justice humaine est boiteuse. La Miséricorde apparaîtra infinie à l'égard de tous les pécheurs repentants et pardonnés. Tout genou fléchira devant le Christ-Sauveur, victorieux du péché, du démon et de la mort. La gloire des élus apparaîtra aussi, celui qui aura été humilié sera élevé, et le règne de Dieu sera établi à jamais dans la lumière de gloire, dans l'amour et dans la paix. C'est ce règne que nous désirons, en disant tous les jours dans le Pater : « Que votre règne arrive, que votre volonté (signifiée par vos préceptes et l'esprit des conseils) soit faite sur la terre comme au ciel.
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Que Jésus Miséricordieux vous bénisse Miséricorde de Dieu
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 23 Mar - 18:29 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE II - PROVIDENCE ET MISÉRICORDE
Nous avons considéré les rapports de la Providence avec la Justice divine, qui distribue à tous les secours nécessaires pour atteindre leur fin, qui récompense les mérites et punit les fautes et les crimes. Il nous faut parler maintenant des rapports de la Providence avec la Miséricorde Divine.
Au premier abord il semble que la Miséricorde soit si différente de la Justice qu'elle lui soit contraire, il semble qu'elle s'oppose à la Justice et vienne restreindre les droits de celle-ci. En réalité deux perfections divines, si différentes soient-elles, ne peuvent être contraires l'une à l'autre ; l'une ne peut être la négation de l'autre ; mais, bien loin de là, elles s'unissent, avons-nous dit, jusqu'à s'identifier dans l'éminence de la Déité ou de la vie intime de Dieu.
La Miséricorde, loin de s'opposer à la Justice en la restreignant, s'unit à elle en la dépassant, dit saint Thomas. « Toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité (ou justice), » lisons-nous dans le Psaume 24, 10. Mais, ajoute l'Apôtre saint Jacques : « La Miséricorde s'élève au-dessus de la Justice ». En quel sens faut-il l'entendre ? « En ce sens, dit saint Thomas, que toute œuvre de justice suppose une œuvre de Miséricorde ou de bonté toute gratuite et se fonde sur elle. Si, en effet, Dieu doit quelque chose à sa créature, c'est en vertu d'un don précédent... (S'il se doit de nous accorder la grâce nécessaire au salut, c'est que d'abord par pure bonté il nous a créés et nous a appelés à une béatitude surnaturelle ; et s'il doit récompenser nos mérites, c'est qu'il nous a d'abord donné la grâce pour mériter). La Miséricorde (ou la pure Bonté) est ainsi comme la racine et le principe de toutes les œuvres de Dieu ; elle les pénètre de sa vertu et les domine. A titre de source première de tous les dons, c'est elle qui influe le plus fortement et c'est pourquoi elle dépasse la Justice, qui vient seulement en second lieu et lui reste subordonnée ».
La Justice est comme une branche sur l'arbre de l'Amour de Dieu ; la Miséricorde ou la pure bonté, communicative et rayonnante, c'est l'arbre même.
Nous allons le mieux entendre en considérant notre propre vie. Il convient de considérer les rapports de la Providence et de Miséricorde, comme nous l'avons fait en parlant de la Justice, premièrement dans le cours de la vie présente, deuxièmement à l'article de la mort, et troisièmement dans l'autre vie.
Providence et Miséricorde dans le cours de notre existence
Si la Justice divine dans la vie présente donne à chacun le nécessaire pour vivre comme il faut et atteindre sa fin, la Miséricorde, elle, donne bien au delà du strict nécessaire. En ce sens, elle dépasse la Justice.
Par exemple, Dieu pouvait nous créer dans un état purement naturel, nous donner seulement une âme spirituelle et immortelle, sans la grâce ; c'est par pure bonté qu'il nous a donné dès le jour de la création, de participer surnaturellement à sa vie intime ; il nous a donné la grâce sanctifiante, principe de nos mérites surnaturels.
De même, après notre chute, il pouvait en justice nous laisser dans la déchéance. Il pouvait aussi nous relever du péché par un simple pardon, annoncé par un prophète, à telles et telles conditions. Il a fait infiniment plus : par pure Miséricorde, il nous a donné son propre Fils, comme victime rédemptrice ; et nous pouvons toujours faire appel aux mérites infinis du Sauveur. La Justice ne perd pas ses droits, mais la Miséricorde l'emporte.
Après la mort de Jésus, il suffisait que nos âmes soient portées par des grâces intérieures et par la prédication de l'Évangile ; la divine Miséricorde nous a donné beaucoup plus : elle nous a donné l'Eucharistie, qui perpétue en substance le sacrifice de la Croix sur nos autels et nous en applique les fruits.
Enfin chacun de nous, en naissant dans une famille chrétienne et catholique, a reçu de la Divine Miséricorde incomparablement plus que le nécessaire accordé par Dieu au sauvage du centre de l'Afrique. Avec ce nécessaire, s'il ne résiste pas aux premières grâces prévenantes, ce sauvage recevra les autres grâces indispensables au salut. Mais nous avons reçu depuis l'enfance bien davantage. Si nous y prenons garde nous avons été conduits par les mains invisibles de la Providence et de la Miséricorde, qui nous a préservés de bien des faux pas, et nous a individuellement relevés après nos chutes.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 24 Mar - 17:25 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE II - PROVIDENCE ET MISÉRICORDE
Providence et Miséricorde dans le cours de notre existence
De même encore si la Justice divine récompense dès ici-bas nos mérites, la Miséricorde nous a donné au delà de nos mérites.
Il est dit dans l'oraison du XIe dimanche après la Pentecôte : « Dieu tout-puissant et éternel, qui dans l'effusion de vos bontés surpassez les mérites et les désirs de ceux qui vous prient, répandez sur nous votre Miséricorde, faites-nous remise des châtiments que notre conscience nous fait craindre et accordez-nous ce que nous n'osons attendre de nos prières, par Jésus-Christ Notre-Seigneur ».
La grâce de l'absolution après un péché mortel n'est pas méritée, c'est un don gratuit. Combien de fois nous a-t-il été accordé !
De même la grâce de la communion n'est pas obtenue par nos mérites ; elle est le fruit du sacrement de l'Eucharistie qui par lui-même la produit en nous, et tous les jours, si nous le voulons. Que de communions la Miséricorde Divine nous a accordées !
Pensons que si nous étions fidèles à combattre toute attache au péché véniel, chacune de nos communions deviendrait substantiellement plus fervente que la précédente ; puisque chacune doit, non seulement conserver, mais augmenter en nous la charité, et nous disposer ainsi à recevoir Notre-Seigneur le lendemain avec une ferveur substantielle, une promptitude de volonté, non seulement égale, mais plus grande.
Si nous étions attentifs à cette loi d'accélération de l'amour de Dieu dans l'âme des justes, nous serions dans l'admiration. Nous verrions que de même que la pierre tombe d'autant plus vite qu'elle se rapproche de la terre qui l'attire, ainsi les âmes justes doivent marcher d'autant plus vite vers Dieu qu'elles se rapprochent de lui et qu'elles sont par suite plus attirées par lui.
On comprend dès lors la parole du Psaume : « Misericordia Domini plena est terra ». « La terre est remplie de la Miséricorde du Seigneur ». Ps. 32, 5. Et les pécheurs peuvent dire comme il est écrit dans le Psaume 89, 14 : « Reviens, Seigneur, aie pitié de nous, rassasie-nous le matin de ta bonté, et nous serons dans la joie et l'allégresse. ».
Si nous voyions le cours de notre existence, tel qu'il est écrit au livre de vie, combien y verrions-nous d'interventions de la Providence et de la Miséricorde, qui sont venues reconstituer la chaîne de nos mérites qui avait été peut-être souvent brisée par nos péchés.
Mais non moins belle est l'intervention de la Miséricorde au moment suprême.
Providence et Miséricorde à l'article de la mort
Si la Justice seule intervenait à ce moment, tous ceux qui ont mal vécu mourraient de même : après avoir négligé tant d'avertissements de la Providence, ils ne répondraient pas non plus au dernier, et leur remords ne se changerait pas en repentir salutaire. Mais, grâce à la Miséricorde, ce dernier appel se fait plus pressant. Si la Justice inflige la peine due au péché, la Miséricorde ici encore la dépasse, en pardonnant.
Pardonner veut dire « donner au delà » de ce qui est dû. Les droits de la Justice sont sauvegardés, mais la Miséricorde l'emporte, en inspirant souvent au pécheur qui va mourir un grand acte d'amour de Dieu, de contrition, qui efface le péché et la peine éternelle due au péché mortel.
Ainsi par l'intervention de la Miséricorde, par les mérites infinis du Sauveur, par l'intercession de Marie, refuge des pécheurs, et de Joseph, patron des mourants, beaucoup meurent autrement qu'ils n'ont vécu .Ce sont les ouvriers de la dernière heure, dont il est parlé dans la parabole évangélique (Matthieu, XX, 9) ; ils reçoivent comme les autres la vie éternelle au degré proportionné aux quelques actes méritoires qu'ils ont accomplis avant de mourir, dans leur agonie.
Ainsi expira le bon larron, qui, touché de la bonté de Jésus mourant, se convertit, et eut le bonheur d'entendre le Sauveur lui dire : « Tu seras avec moi ce soir en paradis ».
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 25 Mar - 18:02 | |
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CHAPITRE II - PROVIDENCE ET MISÉRICORDE
Providence et Miséricorde à l'article de la mort
Ces interventions de la Miséricorde à l'article de la mort sont une des choses les plus sublimes de la vraie religion. Ce fut assez clair souvent pendant la dernière guerre ; beaucoup, en y mourant de façon tragique après une absolution, ont été sauvés, qui se seraient peut-être perdus s'ils avaient continué à vivre dans les circonstances ordinaires, au milieu de leurs occupations et de leurs plaisirs.
De même, là où les hôpitaux sont chrétiens, combien de pauvres gens, avertis par la maladie qui va les emporter, vont se préparer à une bonne mort en ces hôpitaux, entendre les paroles d'une religieuse et celles d'un prêtre qui finalement les réconcilie avec Dieu après des trente et quarante ans de vie presque indifférente et qui laissait beaucoup à désirer.
La Miséricorde Divine appelle tous les mourants ; Jésus a dit : « Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et qui ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai » (Matth., XI, 28). Il est mort pour tous les hommes. Il est l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde, comme il est rappelé dans les belles prières pour les agonisants.
La mort du pécheur repentant est une des plus grandes manifestations de la Divine Miséricorde. Il y a de cela les exemples les plus frappants, dans la Vie de sainte Catherine de Sienne écrite par son confesseur le bienheureux Raymond de Capoue.
A force de prier pour deux criminels condamnés au dernier supplice, et qui blasphémaient pendant qu'on les torturait avec des tenailles brûlantes, elle obtint que Notre-Seigneur apparût tout couvert de ses blessures à ces misérables condamnés, les invitant à se convertir et leur promettant le pardon.
Ils demandèrent alors très instamment un prêtre, confessèrent leurs péchés avec une vive contrition, changèrent leurs blasphèmes en louanges, et allèrent joyeusement à la mort, comme aux portes du ciel. Les témoins de ce fait en furent extrêmement surpris et ne surent à quelle cause il fallait attribuer un si subit changement de leurs dispositions intérieures.
Une autre fois la sainte assista elle-même au supplice du jeune noble Nicolas Tuldo, condamné à mort pour avoir mal parlé du gouvernement. Comme il tenait excessivement à la vie et ne pouvait accepter une peine qui lui paraissait si injuste, elle prépara elle-même son âme à paraître devant Dieu.
Elle raconta ainsi cette mort dans une lettre à son confesseur Raymond de Capoue : « En m'apercevant (au lieu du supplice), il s'est mis à sourire. Il a voulu que je trace sur lui le signe de la croix. Je l'ai fait, puis je lui ai dit : « A genoux ! aux noces, mon doux frère ! Tu vas avoir la vie qui ne finit jamais ».
Alors, il s'est étendu avec une grande douceur et je lui ai étendu le cou. Penchée sur lui, je lui rappelais le sang de l'Agneau ! Lui ne savait que répéter : Jésus ! Catherine ! Il le redisait encore quand j'ai reçu sa tête dans mes mains. Alors j'ai fixé mon regard sur la divine Bonté et j'ai dit : « Je veux ! »
« Et j'ai vu, comme on voit la clarté du soleil, l'Homme-Dieu, le côté ouvert. Il recevait le sang dans son Sang, et le feu du saint désir donné par grâce à cette âme dans le feu de sa divine Charité ».
Si la mort du pécheur repentant est une manifestation de la Miséricorde Divine, plus belle encore est la mort du juste qui a toujours été fidèle. Ses derniers instants sont généralement paisibles, parce qu'il a vaincu ses ennemis pendant sa vie, et que l'âme est préparée à son passage à l'éternité.
Le juste fait alors de sa mort, en union avec les messes qui se célèbrent, un dernier sacrifice de réparation, d'adoration, d'action de grâces et de supplication pour obtenir la dernière grâce de la persévérance finale, qui porte avec elle l'assurance du salut.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 26 Mar - 17:05 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE II - PROVIDENCE ET MISÉRICORDE
Providence et Miséricorde après la mort
« La Miséricorde et la Justice, nous a dit l'Écriture, s'unissent dans toutes les œuvres de Dieu » (Ps. 24, 10), bien que la première domine en certaines œuvres comme la conversion du pécheur, et la seconde en d'autres comme le châtiment dû au péché.
C'est ainsi qu'après la mort, « la Miséricorde, dit saint Thomas[149], s'exerce même à l'égard des réprouvés, en ce sens qu'ils sont punis moins qu'ils ne le méritent ». Si la Justice seule intervenait, ils souffriraient plus encore. Sainte Catherine de Sienne parle de même. La Miséricorde vient adoucir la Justice même à l'égard de ceux qui ont soulevé la haine entre les individus, entre les classes, entre les peuples, même à l'égard des plus pervers, de ces monstres, qui ont montré comme un Néron une malice raffinée, et une opiniâtreté qui a résisté à tous les conseils.
Évidemment la Miséricorde Divine s'exerce plus encore à l'égard des âmes du purgatoire, en leur inspirant l'amour de la réparation, amour qui adoucit en quelque sorte la vive douleur purificatrice qu'elles éprouvent, et confirme leur certitude du salut.
Au ciel, la Miséricorde Divine éclate dans les saints, selon le degré de leur amour de Dieu. Notre-Seigneur les accueille en disant, comme il est rapporté en saint Matthieu, XXV, 34 : « Venez, les bénis de mon Père ; prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès l'origine du monde. Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli ; nu, et vous m'avez vêtu ; malade, et vous m'avez visité ; en prison, et vous êtes venus à moi. »
Les justes répondront : « Seigneur, quand avons-nous vu que vous aviez faim... que vous aviez soif... et sommes-nous venus à vous ? » Et le Roi leur répondra : « En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi-même que vous l'avez fait ».
Quelle joie sera celle de l'instant de notre entrée dans la gloire, quand nous recevrons la lumière de gloire pour voir Dieu face à face de cette vision qui ne finira plus et qui aura pour mesure l'unique instant de l'immobile éternité.
Quelle consolation de penser à cette infinie Miséricorde, qui est au-dessus de toute malice et qui ne saurait être épuisée. C'est pourquoi nulle rechute, si honteuse ou si criminelle qu'elle soit, ne doit porter le pécheur au désespoir. Le plus grand outrage qu'on puisse faire à Dieu, c'est de penser qu'il n'est pas assez bon pour nous pardonner. Comme nous l'a déjà dit sainte Catherine de Sienne, « sa Miséricorde est incomparablement plus grande que tous les péchés que peuvent commettre toutes les créatures ensemble ».
Soyons attentifs aux paroles des Psaumes que la liturgie nous rappelle souvent à ce sujet : Misericordias Domini in æternum cantabo... Je chanterai à jamais les Miséricordes du Seigneur... Dans les cieux tu as établi ta fidélité... Tu es puissant, Seigneur, et ta fidélité t'environne... C'est toi qui domptes l'orgueil de la mer, et la présomption des méchants, pour venir au secours des faibles ». (Ps. 88, 2...)
« Misericors Dominus, longanimis et multum Misericors. Le Seigneur est Miséricordieux et compatissant, lent à la colère et riche en bonté. Ce n'est pas pour toujours qu'il réprimande. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant sa bonté est grande. Comme un père a compassion de ses enfants, il a compassion de ceux qui le craignent, car il sait de quoi nous sommes formés. Il se souvient que nous sommes poussière.
« L'homme ! Ses jours sont comme l'herbe ; il fleurit comme la fleur des champs. Qu'un souffle passe sur lui, il n'est plus... Mais la Miséricorde de Dieu dure à jamais pour ceux qui le craignent. Misericordia autem Domini ab æterno et usque in æternum super timentes eum » Ps. 102, 8-17.
Daigne le Seigneur réaliser en nous ces divines paroles, pour que nous le glorifiions à jamais : « Misericordias Domini in æternum cantabo ». Rarement les rapports de la Miséricorde, de la Justice et de la Providence ont été mieux exprimés que dans le Dies iræ.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Ven 27 Mar - 18:49 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE II - PROVIDENCE ET MISÉRICORDE
Providence et Miséricorde après la mort
Dies iræ, dies illa, solvet sæclum in favilla... Jour de colère, jour terrible, où l'univers sera réduit en cendres, selon les oracles de David et les prédictions de la Sibylle. Quantus tremor est futurus, Quando Judex est venturus... Quelle sera la terreur des hommes, lorsque le souverain Juge viendra scruter toutes leurs actions, cuncta stricte discussurus !
Mors stupebit et natura, Cum resurget creatura, Judicanti responsura : La nature et la mort seront dans l'effroi, quand l'homme ressuscitera pour répondre à son Juge. Liber scriptus proferetur, In quo totum continetur, Unde mundus judicetur. Alors sera présenté un livre qui contient tout ce qui doit être la matière du jugement universel sur le monde.
Judex ergo cum sedebit, Quidquid latet apparebit : Nihil inultum remanebit. Quand le juge sera assis sur son tribunal, tout ce qui était caché sera révélé, aucun crime ne demeurera impuni...
Rex tremendæ majestatis, Qui salvandos salvas gratis, Salve me, fons pietatis. O Roi, dont la majesté est si redoutable, qui sauvez vos élus par une Miséricorde gratuite, qui salvandos salvas gratis, sauvez-moi, ô source de bonté !
Recordare Jesu pie, Quod sum causa tuæ viæ, Ne me perdas illa die. Souvenez-vous, ô Jésus, plein de douceur, que pour moi vous êtes descendu du ciel, ne me perdez pas en ce jour.
Quærens me, sedisti lassus : Redemisti, crucem passus : Tantus labor non sit cassus. Vous vous êtes épuisé de lassitude en me cherchant ; vous m'avez racheté par les souffrances de la croix : qu'un si grand travail ne soit point sans fruit !
Juste judex ultionis, Donum fac remissionis, Ante diem rationis. O Juge qui punissez avec justice, accordez-moi le pardon de mes fautes avant le jour de votre jugement... Qui Mariam absolvisti, Et latronem exaudisti, Mihi quoque spem dedisti. Vous avez absous Marie-Madeleine, et pardonné au bon larron ; à moi vous me donnez l'espoir...
Oro supplex et acclinis, Cor contritum quasi cinis, Gere curam mei finis. Prosterné, suppliant, le cœur brisé, comme réduit en cendres, pitié, Seigneur, à mon dernier moment... Huic ergo parce Deus : Pie Jesu Domine, Dona eis requiem. Ayez pitié de nous, mon Dieu ! Doux Jésus, ô Seigneur, donnez-nous l'éternel repos. Amen.
Prenons l'habitude de prier pour les agonisants pour que la Miséricorde Divine s'incline sur eux, et nous-mêmes nous serons ainsi assistés par la prière d'autres âmes au moment de notre mort. Nous ne savons pas où et comment nous mourrons, peut-être serons-nous seuls, mais si nous avons souvent prié pour les agonisants, si nous avons souvent dit avec attention et avec cœur : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort », alors la Miséricorde s'inclinera aussi sur nous, au moment suprême.
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
Une des questions vitales, qui doit le plus intéresser toutes les âmes, quel que soit l'état où elles se trouvent, est celle de la bonne mort, question sur laquelle saint Augustin écrivit un de ses derniers et de ses plus beaux livres, où s'exprime sa pensée définitive sur le mystère de la grâce, De dono perseverantiæ.
Cette question vitale a été entendue en des sens très différents et radicalement opposés par les semipélagiens d'une part et par les protestants et les jansénistes de l'autre. C'est même à l'occasion de ces hérésies contraires que l'Église a précisé sa doctrine sur ce point, en montrant toute l'élévation de la vérité au milieu et au-dessus des erreurs extrêmes. Rappelons brièvement ces erreurs, pour mieux voir par contraste le prix de la vérité, pour mieux saisir ce qu'est la grâce de la bonne mort ; nous verrons ensuite comment nous pouvons l'obtenir.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 29 Mar - 5:20 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
La doctrine de l'Église et les erreurs contraires
Les semipélagiens ont soutenu que l'homme peut avoir sans la grâce l'initium fidei et salutis, le commencement de la foi salutaire et de la bonne volonté, que le Seigneur affermit ensuite. Ce n'est pas Lui qui ferait le premier pas vers le pécheur pour le convertir, c'est le pécheur qui ferait le premier pas vers Dieu. D'après les mêmes principes, les semipélagiens soutenaient que l'homme, une fois justifié par la grâce, peut persévérer jusqu'à la mort sans une grâce spéciale ; il suffit, disaient-ils, que l'initium salutis, qui est la bonne volonté naturelle, subsiste pour que le juste persévère jusqu'à la fin.
Cela revenait à dire non seulement que Dieu veut sauver les hommes, mais qu'il veut également les sauver tous, et qu'il est, non pas l'auteur, mais le spectateur de ce qui discerne le juste de l'impie, de l'initium salutis et, de la bonne disposition finale, en tant qu'elle se trouve en celui-ci plutôt qu'en celui-là, en Pierre plutôt qu'en Judas. C'était nier le mystère de la prédestination et oublier les paroles de Notre-Seigneur : « Personne ne vient à moi, si mon Père ne l'attire » (Jean, VI, 44), paroles qui s'appliquent au premier et au dernier élan de notre cœur vers Dieu. « Sans moi, vous ne pouvez rien faire », avait dit encore Notre-Seigneur (Jean, XV, 5). Et comme le rappelle le IIe Concile d'Orange contre les semipélagiens, saint Paul avait ajouté « Qui est-ce qui te discerne ? Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu ? » (I Cor., IV, 7). « Nous ne sommes pas capables de tirer de nous-mêmes, comme venant de nous-mêmes, la moindre pensée, profitable pour le salut » (II Cor., III, 5), à plus forte raison le moindre désir salutaire, qu'il s'agisse du premier ou du dernier.
Aussi saint Augustin montra-t-il que la première grâce et la dernière grâce sont particulièrement gratuites : la première grâce prévenante ne saurait être méritée, ni due en quelque manière à un bon mouvement naturel, puisque le principe du mérite est la grâce sanctifiante, et que celle-ci est un don gratuit, comme son nom l'indique, une vie toute surnaturelle non seulement pour l'homme, mais pour l'ange lui-même. Saint Augustin montra aussi que la dernière grâce, celle de la persévérance finale, est un don spécial, la grâce spéciale des élus, que personne, dit Notre-Seigneur, ne peut arracher de la main de son Père, « nemo potest rapere eos de manu Patris mei » (Jean, X, 29).
Il ajoutait que lorsque cette grâce est accordée, c'est par Miséricorde ; si au contraire elle n'est pas donnée, c'est par un juste châtiment de fautes, généralement réitérées, qui ont éloigné l'âme de Dieu. On le voit par la mort du bon larron et par celle du mauvais.
Pour saint Augustin, deux grands principes dominent cette question. Le premier est que les élus sont, non seulement connus d'avance, mais plus aimés par Dieu. Saint Paul avait dit : « Qui te discerne ? Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu ? » (I Cor., IV, 17). Saint Thomas dira : « Comme l'amour de Dieu est cause de tout bien, nul ne serait meilleur qu'un autre, s'il n'était plus aimé par Dieu » (Ia, q. 20, a. 3).
L'autre principe nettement formulé par saint Augustin est que Dieu ne commande jamais l'impossible ; mais, en commandant, il nous ordonne de faire ce que nous pouvons et de demander la grâce pour accomplir ce que nous ne pouvons pas : « Deus impossibilia non jubet, sed jubendo monet et facere quod possis et petere quod non possis ». Ces paroles du De Natura et gracia, c. 43, n° 50, de saint Augustin, sont citées par le Concile de Trente (Denzinger, n° 804) ; elles montrent que Dieu par amour veut rendre et rend réellement possible à tous le salut ou l'accomplissement de ses préceptes ; quant aux élus, il les leur fait accomplir jusqu'à la fin.
Comment ces deux grands principes, si certains, si incontestables l'un et l'autre, se concilient-ils intimement ? Aucune intelligence créée, humaine ou angélique, ne peut le voir, avant d'avoir reçu la vision béatifique. Il faudrait voir comment se concilient, dans la Déité, l'infinie Miséricorde, l'infinie justice et la souveraine liberté il faudrait avoir la vision immédiate de l'essence divine.
Les principes ainsi opposés par saint Augustin au semipélagianisme furent approuvés en substance, on le sait, par le IIe Concile d'Orange. Il reste ainsi que la grâce de la bonne mort est une grâce spéciale, propre aux élus.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 29 Mar - 16:35 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
La doctrine de l'Église et les erreurs contraires
Contrairement au semipélagianisme, le protestantisme et aussi le jansénisme ont faussé le premier principe formulé par saint Augustin, en niant le second ; sous prétexte d'affirmer le mystère de la prédestination, ils ont nié la volonté salvifique universelle et soutenu que Dieu commande parfois l'impossible, et qu'au moment de la mort la fidélité aux préceptes divins n'est pas possible à tous.
On connaît la Ire proposition extraite de l'ouvrage de Jansénius (Denzinger, n° 1092)[153] : Certains commandements de Dieu, selon cette proposition, sont impossibles même pour des hommes justes et non pas seulement pour des justes négligents, somnolents ou n'ayant pas le plein usage de leur raison et de leur volonté, mais pour des justes qui veulent accomplir les préceptes et s'efforcent même de les pratiquer, justis volentibus et conantibus.
Même pour eux l'accomplissement de certains préceptes est impossible, car la grâce qui le rendrait possible leur fait défaut.
Proposition désespérante qui montre toute la distance qui sépare le jansénisme de la vraie doctrine de saint Augustin et de saint Thomas : « Deus impossibilia non jubet ». Cette grave erreur est la négation de la justice de Dieu, et donc de Dieu même ; c'est à plus forte raison la négation de sa miséricorde, de la grâce suffisante offerte à tous ; c'est même la négation de la vraie liberté humaine (libertas a necessitate). Enfin le péché de ce point de vue devient inévitable, dès lors il n'est plus péché, et ne pourrait être sans cruauté éternellement puni.
Les mêmes principes erronés conduisirent les protestants à soutenir que non seulement la prédestination est gratuite, mais que les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires au salut des adultes, que la foi suffit. D'où la parole de Luther : « Pecca fortiter et crede fortius ». Pèche fortement, mais crois plus fermement encore à l'application qui t'est faite des mérites du Christ et à ta prédestination.
Ceci n'est plus l'espérance, c'est une impardonnable présomption. Car le jansénisme et le protestantisme oscillent entre la présomption et le désespoir, sans pouvoir trouver la véritable espérance chrétienne et la charité.
Contre cette hérésie le Concile de Trente (sess. VI, cap. 13 et canon 16; Denzinger, nos 806 et 826) définit : « Bien que nous devions tous espérer fermement en Dieu, personne ne peut avoir, sans une révélation spéciale, la certitude absolue qu'il persévérera jusqu'à la fin ».
Le Concile cite ici les paroles de saint Paul : « Ainsi, mes bien-aimés, comme vous avez toujours été obéissants, travaillez à votre salut avec crainte et tremblement... car c'est Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire selon son bon plaisir » (Philipp., II, 12).
« Que celui qui croit être debout, prenne garde de tomber » (I Cor., X, 12). Qu'il mette sa confiance dans le Tout-Puissant, seul capable de relever celui qui tombe et de conserver le juste, « qui potens est eum, qui stat, statuere » (Rom., XIV, 4), pour qu'il reste debout dans un monde corrompu et pervers.
Ainsi l'Église maintient la doctrine de l'Évangile au-dessus des divagations de l'erreur, ici au-dessus des hérésies contraires du semipélagianisme et du protestantisme. D'une part les élus sont plus aimés que les autres, mais d'autre part Dieu ne commande jamais l'impossible et veut par amour rendre réellement possible à tous la fidélité à ses préceptes.
Il reste donc, contrairement au semipélagianisme, que la grâce de la bonne mort est un don spécial, et, contrairement au protestantisme et au jansénisme, que, parmi les adultes, ceux-là seuls sont privés du dernier secours qui le refusent, en résistant à la grâce suffisante qui leur est offerte, comme le fit le mauvais larron, si près du Christ rédempteur.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Lun 30 Mar - 16:56 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
La doctrine de l'Église et les erreurs contraires
Contrairement au semipélagianisme, le protestantisme et aussi le jansénisme ont faussé le premier principe formulé par saint Augustin, en niant le second ; sous prétexte d'affirmer le mystère de la prédestination, ils ont nié la volonté salvifique universelle et soutenu que Dieu commande parfois l'impossible, et qu'au moment de la mort la fidélité aux préceptes divins n'est pas possible à tous.
On connaît la Ire proposition extraite de l'ouvrage de Jansénius (Denzinger, n° 1092)[153] : Certains commandements de Dieu, selon cette proposition, sont impossibles même pour des hommes justes et non pas seulement pour des justes négligents, somnolents ou n'ayant pas le plein usage de leur raison et de leur volonté, mais pour des justes qui veulent accomplir les préceptes et s'efforcent même de les pratiquer, justis volentibus et conantibus.
Même pour eux l'accomplissement de certains préceptes est impossible, car la grâce qui le rendrait possible leur fait défaut.
Proposition désespérante qui montre toute la distance qui sépare le jansénisme de la vraie doctrine de saint Augustin et de saint Thomas : « Deus impossibilia non jubet ». Cette grave erreur est la négation de la justice de Dieu, et donc de Dieu même ; c'est à plus forte raison la négation de sa miséricorde, de la grâce suffisante offerte à tous ; c'est même la négation de la vraie liberté humaine (libertas a necessitate). Enfin le péché de ce point de vue devient inévitable, dès lors il n'est plus péché, et ne pourrait être sans cruauté éternellement puni.
Les mêmes principes erronés conduisirent les protestants à soutenir que non seulement la prédestination est gratuite, mais que les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires au salut des adultes, que la foi suffit. D'où la parole de Luther : « Pecca fortiter et crede fortius ». Pèche fortement, mais crois plus fermement encore à l'application qui t'est faite des mérites du Christ et à ta prédestination.
Ceci n'est plus l'espérance, c'est une impardonnable présomption. Car le jansénisme et le protestantisme oscillent entre la présomption et le désespoir, sans pouvoir trouver la véritable espérance chrétienne et la charité.
Contre cette hérésie le Concile de Trente (sess. VI, cap. 13 et canon 16; Denzinger, nos 806 et 826) définit : « Bien que nous devions tous espérer fermement en Dieu, personne ne peut avoir, sans une révélation spéciale, la certitude absolue qu'il persévérera jusqu'à la fin ».
Le Concile cite ici les paroles de saint Paul : « Ainsi, mes bien-aimés, comme vous avez toujours été obéissants, travaillez à votre salut avec crainte et tremblement... car c'est Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire selon son bon plaisir » (Philipp., II, 12).
« Que celui qui croit être debout, prenne garde de tomber » (I Cor., X, 12). Qu'il mette sa confiance dans le Tout-Puissant, seul capable de relever celui qui tombe et de conserver le juste, « qui potens est eum, qui stat, statuere » (Rom., XIV, 4), pour qu'il reste debout dans un monde corrompu et pervers.
Ainsi l'Église maintient la doctrine de l'Évangile au-dessus des divagations de l'erreur, ici au-dessus des hérésies contraires du semipélagianisme et du protestantisme. D'une part les élus sont plus aimés que les autres, mais d'autre part Dieu ne commande jamais l'impossible et veut par amour rendre réellement possible à tous la fidélité à ses préceptes.
Il reste donc, contrairement au semipélagianisme, que la grâce de la bonne mort est un don spécia, et, contrairement au protestantisme et au jansénisme, que, parmi les adultes, ceux-là seuls sont privés du dernier secours qui le refusent, en résistant à la grâce suffisante qui leur est offerte, comme le fit le mauvais larron, si près du Christ rédempteur.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mar 31 Mar - 16:46 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
II - Pouvons-nous mériter la grâce de la bonne mort ?
A cette raison profonde, bien des théologiens en ajoutent une autre, qui est une confirmation.
Le mérite proprement dit de condigno, ou fondé en justice, suppose la promesse divine d'une récompense pour telle bonne œuvre. Or Dieu n'a jamais promis la persévérance finale ou la préservation du péché d'impénitence finale, à ceux qui, pendant un temps plus ou moins long, observeraient ses commandements.
Bien plus, la persévérance finale consiste précisément dans cette obéissance jusqu'à la mort, elle ne peut donc être méritée par elle, car elle se mériterait elle-même. Nous revenons ainsi à la raison fondamentale : le principe du mérite ne saurait être mérité.
Et cette raison s'applique, toute proportion gardée, au mérite de congruo, fondé sur les droits de l'amitié qui nous unit à Dieu et dont le principe est aussi l'état de grâce. Tout cela revient à dire que c'est la Miséricorde Divine et non la justice divine qui nous a mis en état de grâce et qui nous y conserve.
Sans doute le juste peut mériter la vie éternelle, qui n'est pas le principe du mérite, mais le terme. Encore faut-il pour qu'il l'obtienne, qu'il ne perde pas ses mérites, par un péché mortel avant de mourir. Par nos actes de charité nous n'avons pas un droit à être préservé du péché mortel.
C'est la Miséricorde qui nous en préserve. Et c'est là un des grands fondement de l'humilité chrétienne.
On a fait à cette doctrine communément admise par les théologiens une objection assez spécieuse.
On a dit : Qui mérite le plus peu mériter le moins. Or le juste peut mériter de condigno la vie éternelle, qui est plus que la persévérance finale. Donc il peut mériter celle-ci. A cela saint Thomas répond (ibid. ad 2 et 3) : Qui peut le plus peut le moins, toutes choses égales d'ailleurs, oui ; autrement, non. Or il y a une différence entre la vie éternelle et la persévérance finale. La vie éternelle, loin d'être le principe de l'acte méritoire, en est le terme ; tandis que la persévérance finale n'est que l'état de grâce continué, état qui est, nous l'avons dit, le principe du mérite.
On insiste : Mais qui peut mériter la fin, peut mériter les moyens. Or la persévérance finale ou la bonne mort est le moyen nécessaire pour obtenir la vie éternelle. Et donc elle peut être méritée comme celle-ci.
Les théologiens répondent généralement en niant la majeure prise dans son universalité. Les mérites sont en effet des moyens d'obtenir la vie éternelle, et ils ne sont pourtant pas mérités ; il suffit qu'on puisse les avoir autrement. De même on peut avoir autrement que par le mérite la grâce de la persévérance finale ; on peut l'obtenir par la prière, qui ne s'adresse pas comme le mérite à la justice de Dieu, mais à sa Miséricorde.
On insiste encore : Mais si l'on ne peut mériter la persévérance finale, on ne peut mériter la vie éternelle, qui ne s'obtient qu'après.
D'après ce que nous avons dit, il faut répondre : Le juste peut par n'importe quel acte de charité mériter la vie éternelle, mais ensuite il peut perdre ses mérites par le péché mortel, et il ne recevra pas de fait la vie éternelle que s'il ne perd pas ses mérites ou que s'ils lui sont Miséricordieusement rendus par la grâce de la conversion. Aussi le Concile de Trente, sess. 6, cap. 16 et can. 32, dit-il que le juste peut mériter de recevoir la vie éternelle, si in gratia decesserit, s'il meurt en état de grâce.
Nous revenons à ce qu'a dit saint Augustin et après lui saint Thomas : ce don de la persévérance finale, s'il est donné, c'est par Miséricorde ; s'il n'est pas donné c'est par une juste châtiment de fautes généralement réitérées, qui ont éloigné l'âme de Dieu.
De là dérivent une foule de conséquences tant spéculatives que pratiques, notons seulement celle de l'humilité que nous devons avoir en travaillant avec confiance à notre salut.
Ce que nous venons de dire par un côté est redoutable ; ce qui nous reste à dire est au contraire fort consolant.
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Mer 1 Avr - 16:36 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
III - Comment la grâce de la bonne mort peut elle être obtenue par la prière ? Quelles doivent être les conditions de cette prière ?
Si le don de la persévérance finale ne peut être à proprement parler mérité, car le principe du mérite ne se mérite pas, il peut être obtenu par la prière, qui s'adresse non pas à la justice de Dieu, comme le mérite, mais à sa Miséricorde.
Nous ne méritons pas tout ce que nous obtenons par la prière ; par exemple, le pécheur en état de mort peut, par une grâce actuelle, prier et obtenir la grâce sanctifiante ou habituelle, qu'il ne saurait mériter, puisque c'est elle qui est le principe du mérite.
Il en est de même de la grâce de la persévérance finale : nous ne pouvons pas à proprement parler la mériter, mais par la prière nous pouvons l'obtenir pour nous et même pour d'autres (cf. saint Thomas, ibid., ad 1). Nous pouvons aussi et nous devons nous disposer à recevoir cette grâce par une vie meilleure.
Ne pas demander la grâce de la bonne mort et ne pas s'y préparer serait même, bien sûr, quoi qu'en aient dit les quiétistes, la plus funeste et la plus insensée des négligences, incuria salutis.
C'est pourquoi Notre-Seigneur nous a appris à dire dans le Pater : « Ne nous laissez pas succomber à la tentation, mais délivrez-nous du mal ». Et l'Église nous fait dire tous les jours : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Ainsi soit-il ».
Pouvons-nous par la prière obtenir infailliblement cette grâce de la bonne mort ? La théologie, s'appuyant sur la promesse de Notre-Seigneur : « Petite et accipietis », nous enseigne que la prière faite en certaines conditions nous obtient infailliblement les biens nécessaires au salut, et par suite la dernière grâce.
Mais quelles sont ces conditions de la prière infailliblement efficace ? - Saint Thomas nous dit (IIa-IIae, q. 83, a. 15, ad 2) : « Il y a quatre conditions : il faut demander pour soi les biens nécessaires au salut, avec piété et persévérance ».
Nous obtenons en effet plus sûrement ce que nous demandons pour nous que ce que nous implorons pour un pécheur, qui résiste peut-être à la grâce au moment où nous prions pour lui[161]. Mais même en demandant pour nous les biens nécessaires au salut, la prière n'est infailliblement efficace que si elle est faite avec piété, humilité, confiance et aussi avec persévérance.
Ainsi seulement elle exprime un désir sincère et profond, non interrompu de notre cœur. Et ici reparaît, avec notre fragilité, le mystère de la grâce : nous pouvons manquer de persévérance dans la prière, comme dans les œuvres méritoires. Et c'est pourquoi nous disons à la sainte messe avant la communion :
« Ne permettez pas, Seigneur, que nous nous séparions jamais de vous, a te nunquam separari permittas ». Ne permettez pas que nous succombions à la tentation de ne pas prier, délivrez-nous du mal de perdre le goût et la volonté de prier ; donnez-nous de persévérer dans la prière, malgré les sécheresses et la lassitude profonde qu'il nous arrive parfois d'éprouver.
Toute notre vie est ainsi enveloppée de mystère chacun de nos actes salutaires suppose le mystère de la grâce, et chacun de nos péchés est un mystère d'iniquité, qui suppose une permission divine du mal en vue d'un bien supérieur, qui ne se verra clairement qu'au ciel. « Justus ex fide vivit ».
Ce n'est pas seulement pour mériter que nous avons besoin d'être aidés jusqu'à la fin, c'est aussi pour prier.
Comment obtiendrons-nous ce secours nécessaire pour persévérer dans la prière ? En nous rappelant la parole du Sauveur : « Si vous demandez à mon Père une chose en mon nom, il vous la donnera ; vous n'avez encore rien demandé en mon nom ». (Jean, XVI, 23, 24).
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Jeu 2 Avr - 16:43 | |
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CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
III - Comment la grâce de la bonne mort peut elle être obtenue par la prière ? Quelles doivent être les conditions de cette prière ?
Nous devons prier au nom du Sauveur ; cela purifie et fortifie singulièrement notre intention ; c'est plus que l'épée de Brennus dans la balance.
Nous devons aussi lui demander de prier pour nous. Or sa prière continue tous les jours pour nous à la sainte messe, ou, comme le dit le Concile de Trente, il ne cesse de s'offrir par le ministère de ses prêtres, et de nous appliquer les mérites de sa Passion.
Si la grâce de la bonne mort ne peut être méritée, mais seulement obtenue par la prière, il faut pour l'obtenir recourir à la plus grande, à la plus efficace de toutes les prières, à celle de Notre-Seigneur, prêtre principal au sacrifice de la messe.
C'est pourquoi le Pape Benoît XV, dans une lettre au Directeur de l'archiconfrérie de Notre-Dame de la bonne mort, a vivement recommandé aux fidèles de faire célébrer des messes de leur vivant pour obtenir la grâce de la bonne mort.
C'est en effet la plus grande grâce, celle des élus, et si, au dernier moment, nous nous unissons par un grand acte d'amour au sacrifice du Christ perpétué sur l'autel, nous pouvons même obtenir la remise de la peine temporelle due à nos péchés et éviter le purgatoire.
Pour obtenir cette grâce de la persévérance finale, il convient donc de nous unir souvent à la consécration eucharistique qui est l'essence du sacrifice de la messe, et de nous y unir en pensant aux quatre fins du sacrifice : l'adoration, la supplication, la réparation et l'action de grâces. Pensons que Jésus, en continuant de s'offrir ainsi, offre tout son corps mystique, spécialement les âmes qui souffrent surnaturellement, un peu comme il a souffert.
Ceci va très loin, si l'on persévère dans cette voie. Si nous nous unissons souvent ainsi au sacrifice de la messe et aux messes qui se célèbrent tout le long du jour à la surface de la terre, là où le soleil se lève, alors nous nous disposons le mieux possible à faire une bonne mort, c'est-à-dire à nous unir aux messes qui se célébreront, près ou loin de nous, en cette heure dernière de notre vie.
Nous ferons alors de notre mort, en union avec le sacrifice du Christ continué en substance sur l'autel, un sacrifice d'adoration devant le souverain domaine de Dieu, maître de la vie et de la mort, devant la majesté de Celui « qui conduit à toute extrémité et qui en ramène » (Tob., XIII, 2), un sacrifice de supplication pour obtenir la dernière grâce pour nous et pour ceux qui mourront à la même heure, un sacrifice de réparation, pour toutes les fautes de notre vie, un sacrifice d'action de grâces pour tous les bienfaits reçus depuis le baptême.
Ce sacrifice ainsi fait avec un ardent amour de Dieu pourra nous ouvrir aussitôt les portes du ciel, comme il les ouvrit au bon larron mourant à côté de Notre-Seigneur, lorsqu'il achevait de célébrer sa messe sanglante, le sacrifice de la croix.
Avant d'arriver à cette dernière heure, nous devons souvent prier pour les mourants. On trouve à la porte de certaines chapelles cette petite inscription : Priez pour ceux qui vont mourir pendant que se célébrera la sainte messe.
Un écrivain français fut un jour très frappé par cette inscription : il pria ainsi pour les mourants tous les jours qui suivirent en assistant à la messe ; puis il tomba gravement malade pendant des années, et, ne pouvant plus aller à la messe, il offrit quotidiennement ses souffrances pour ceux qui meurent dans la journée. Il eut ainsi la joie d'obtenir plusieurs conversions très inattendues, in extremis.
Prions aussi pour les prêtres qui assistent les mourants ; c'est un si grand ministère que d'assister une âme à l'agonie, au dernier combat ! Prions pour que le prêtre arrive assez tôt, pour qu'il obtienne du ciel le moment de lucidité voulu lorsque le malade est déjà dans une profonde torpeur, pour qu'il puisse lui suggérer les plus grands sacrifices que Dieu demande, pour que sa prière sacerdotale faite au nom du Christ, de Marie, de tous les Saints, obtienne la dernière grâce, la grâce des grâces.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Sam 4 Avr - 5:55 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
III - Comment la grâce de la bonne mort peut elle être obtenue par la prière ?
Le prêtre, qui assiste ainsi les mourants, a quelquefois l'immense consolation de voir pour ainsi dire Notre-Seigneur sauver les âmes au milieu de leurs souffrances du dernier moment. Et après avoir prié peut-être pour obtenir la guérison, il finit, en voyant l'âme bien disposée à la mort, par dire avec une grande confiance et une grande paix cette admirable prière de l'Église : « Kyrie eleison, Christe eleison, Kyrie eleison... Proficiscere, anima christiana, de hoc mundo, in nomine Dei Patris omnipotentis, qui te creavit, in nomine Jesu Christi Filii Dei vivi, qui pro te passus est, in nomine Spiritus Sancti, qui in te effusus est... »
« Sortez de ce monde, âme chrétienne, au nom de Dieu le Père tout-puissant, qui vous a créée, au nom de Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, qui a souffert pour vous, au nom de l'Esprit-Saint, qui est descendu sur vous, au nom de la glorieuse et sainte Mère de Dieu, la Vierge Marie, au nom du bienheureux Joseph, époux prédestiné de la Vierge, au nom des anges et des archanges..., au nom des patriarches, des prophètes, des apôtres, des évangélistes, au nom des martyrs, des confesseurs, au nom de tous les saints et de toutes les saintes de Dieu.
Qu'aujourd'hui votre habitation soit dans la paix et votre demeure dans la Jérusalem céleste, par Jésus-Christ, Notre-Seigneur ».
Le mystère du salut
A la lumière d'une sainte mort s'éclaire ainsi pour nous le mystère de la prédestination, le mystère terrible et doux du choix des élus. Nous saisissons mieux les deux grands principes, formulés par saint Augustin et par saint Thomas, que nous citions au début de ce chapitre. D'une part, « comme l'amour de Dieu est cause de tout bien, nul ne serait meilleur qu'un autre, s'il n'était plus aimé par Dieu ». Nul ne serait meilleur qu'un autre par un acte salutaire initial ou final, par un acte salutaire facile ou difficile, commencé ou continué, s'il n'était plus aimé par Dieu. En ce sens Notre-Seigneur a dit des élus : « personne ne pourra les ravir de la main de mon Père ». Il parlait ici de l'efficacité de la grâce, qui fait dire à saint Paul : « Qui est-ce qui te distingue ? Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu ? » Quelle leçon plus profonde d'humilité ?
D'autre part, Dieu ne commande jamais l'impossible et par amour il rend réellement possible à tous, surtout à tous les mourants, l'accomplissement de ses préceptes, et ils ne sont privés de la dernière grâce que s'ils la refusent par résistance au dernier appel.
Et donc, comme le disent saint Augustin et saint Thomas, si la grâce de la persévérance finale est accordée, c'est par miséricorde, comme elle le fut au bon larron ; si elle n'est pas accordée, c'est par un juste châtiment de fautes généralement réitérées et par un juste châtiment aussi de la dernière résistance, comme il advint pour le larron impénitent qui se perdit, en mourant si près du Rédempteur.
Comme le dit saint Prosper, en des paroles redites par un Concile du IXe siècle : « Si certains sont sauvés, c'est par le don du Sauveur ; si d'autres se perdent, c'est par leur faute ».
Comment ces deux grands principes, si certains chacun pris à part, le principe de l'efficacité de la grâce et celui du salut possible à tous, se concilient-ils intimement ? Saint Paul répond : « O altitudo divitiarum sapientiæ et scientiæ Dei ; quam incomprehensibilia sunt judicia ejus et investigabiles viæ ejus » ! - « O élévation des richesses de la sagesse et de la science de Dieu ! que ses jugements sont incompréhensibles et ses voies impénétrables » (Rom., XI, 33).
Nulle intelligence créée ne peut voir l'intime conciliation de ces deux principes, avant d'avoir reçu la vision béatifique. Voir cette intime conciliation, serait voir comment l'infinie Justice, l'infinie Miséricorde et la souveraine Liberté s'unissent et s'identifient, sans aucune distinction réelle, dans la Déité, dans la vie intime de Dieu, dans ce qui est ineffable en Lui, en cette perfection qui lui est absolument propre et naturellement incommunicable aux créatures, en la Déité en tant qu'elle est supérieure à l'être, à l'un, au vrai, au bien, à l'intelligence, à l'amour ; car toutes ces perfections absolues peuvent être naturellement participées par les créatures, tandis que la Déité n'est participable que par la grâce sanctifiante, participation de la nature divine, non pas seulement en tant qu'elle est vie intellectuelle, mais en tant qu'elle est vie proprement divine, principe par lequel Dieu se voit immédiatement et s'aime.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: La Providence et la confiance en Dieu par Fr. Garrigou-Lagrange Dim 5 Avr - 3:46 | |
| CINQUIÈME PARTIE PROVIDENCE, JUSTICE ET MISÉRICORDE
CHAPITRE III LA PROVIDENCE ET LA GRACE DE LA BONNE MORT
Le mystère du salut
Pour voir l'intime conciliation des principes dont nous parlons, il faudrait voir l'essence divine.
Plus ces deux principes à concilier deviennent évidents pour nous, plus, par contraste, apparaît obscure, d'une obscurité translumineuse, l'éminence de la vie intime de Dieu, en laquelle ils s'unissent.
Ces deux principes sont comme les deux parties d'un demi-cercle éblouissant, au-dessus duquel se trouve, pour parler comme les mystiques, la grande ténèbre, qui n'est autre que « la lumière inaccessible où Dieu habite ». (I Tim., VI, 16).
Tel nous paraît être fort imparfaitement exprimé l'objet, nous ne dirons pas seulement de la spéculation, mais de la contemplation augustinienne, qui a inspiré constamment saint Thomas en ces difficiles questions.
L'obscurité divine du mystère dont nous parlons dépasse de beaucoup la théologie discursive, c'est l'objet propre de la foi, fides est de non visis, et de la foi éclairée par les dons d'intelligence et de sagesse, fides donis illustrata.
De ce point de vue supérieur, la contemplation de ce mystère terrible et doux devient pacifiante, comme l'écrivait Bossuet, tout pénétré de cette doctrine, à une personne tourmentée par toutes sortes de pensées au sujet de la prédestination : « Ces pensées, lui écrivait-il, quand elles viennent dans l'esprit, et que l'on fait de vains efforts pour les dissiper, doivent se terminer à un abandon total de soi-même à Dieu, assuré que notre salut est infiniment mieux entre ses mains qu'entre les nôtres ; et c'est là seulement qu'on trouve la paix.
C'est là que doit aboutir toute la doctrine de la prédestination, et ce que doit produire le secret du souverain Maître qu'il faut adorer et non pas prétendre sonder.
Il faut se perdre dans cette hauteur et dans cette profondeur impénétrable de la sagesse de Dieu et se jeter comme à corps perdu dans son immense bonté, en attendant tout de lui, sans néanmoins se décharger du soin qu'il nous demande pour notre salut... La fin de ce tourment doit être de vous abandonner à Dieu, qui par ce moyen sera obligé, par sa bonté et par ses promesses, de veiller sur vous. Voilà le vrai dénouement pour nous, durant le temps de cette vie, de toutes les pensées qui vous viennent sur la prédestination : après cela il faut se reposer, non sur soi, mais uniquement sur Dieu et sur sa bonté paternelle ».
Bossuet parle de même dans un des plus beaux chapitres de ses Méditations sur l'Évangile, IIe partie, 72e jour : « L'homme superbe craint de rendre son salut trop incertain, s'il ne le tient en sa main, mais il se trompe. Puis-je m'assurer sur moi-même ? Mon Dieu, je sens que ma volonté m'échappe à chaque moment : et si vous vouliez me rendre le seul maître de mon sort, je refuserais un pouvoir si dangereux à ma faiblesse.
Qu'on ne me dise donc pas que cette doctrine de grâce et de préférence met les bonnes âmes au désespoir. Quoi ! on pense me rassurer davantage, en me renvoyant à moi-même, et en me livrant à mon inconstance ? Non, mon Dieu, je n'y consens pas. Je ne puis trouver d'assurance qu'en m'abandonnant à vous.
Et j'y en trouve d'autant plus, que ceux à qui vous donnez cette confiance, de s'abandonner tout à fait à vous, reçoivent dans ce doux instinct la meilleure marque qu'on puisse avoir sur la terre de votre bonté ». Confitemini Domino, quoniam bonus... (Ps. CXVII).
Telle nous paraît être, nous l'avons montré ailleurs, la vraie pensée de saint Augustin en ce qu'elle a de plus élevé, lorsque finalement, au-dessus de tout discours, elle se repose dans l'obscurité divine du mystère, où doivent se concilier ses aspects en apparence les plus opposés.
Formulés en ces deux principes : Dieu ne commande jamais l'impossible. - Nul ne serait meilleur, s'il n'était plus aimé par Dieu, ces deux aspects du mystère sont, dans la nuit de l'esprit, comme deux étoiles de première grandeur, extrêmement lumineuses, mais elles ne suffisent pas à nous montrer les dernières profondeurs du firmament, le secret de la Déité.
Source : Livres-mystiques.com
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