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| L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L | |
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Miséricorde de Dieu
Messages : 3597 Date d'inscription : 27/12/2019 Age : 66
| Sujet: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 27 Oct - 4:49 | |
| A LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE MÈRE DE DIEU patronne de la bonne mort en signe de profonde gratitude et d'humble obéissance.
PREMIÈRE PARTIE LA PROFONDEUR DE L'AME ET LA VIE PRÉSENTE
Pour procéder avec ordre, considérons d'abord les profondeurs de la sensibilité éclairée par la connaissance sensible, puis celle de la volonté éclairée par l'intelligence. Le progrès des vertus acquises, plus encore celui des vertus infuses ou surnaturelles nous manifestent ces profondeurs, en particulier le progrès de la charité dans l'âme des Saints, soit aux heures d'épreuves, soit dans leurs joies et leur apostolat débordant.
CHAPITRE I - LA SENSIBILITÉ ET LA CONNAISSANCE SENSIBLE
La sensibilité, principe des émotions et des passions, est, comme les sens et l'imagination, commune à l'homme et à l'animal. On l'appelle aussi appétit sensitif, pour la distinguer de la volonté spirituelle, commune à l'homme, à l'ange et à Dieu, et qui en nous mérite le nom d'appétit rationnel.
Les mouvements de l'appétit sensitif, émotions et passions, se produisent du fait que les sens ou l'imagination nous proposent un objet sensible, soit attrayant, soit redoutable. Ainsi l'animal désire sa nourriture, et chez lui l'émotion et la passion ont tantôt une forme douce, comme chez la colombe ou chez l'agneau, tantôt une forme violente, comme chez le loup, le tigre ou le lion.
Parmi les passions, la première de toutes, supposée par les autres, est l'amour sensitif ; par exemple chez l'animal, celui de la nourriture dont il a besoin. De cet amour naît le désir, la joie, l'espoir, l'audace ou la haine de ce qui lui est contraire, l'aversion, la tristesse, le désespoir, la crainte, la colère.
La passion n'est pas toujours vive, véhémente, dominatrice, mais elle peut le devenir. Chez l'homme les passions doivent être réglées, disciplinées par la droite raison et la volonté ; elles sont alors des forces utiles, pour défendre une grande cause. Mais au contraire les passions déréglées ou indisciplinées deviennent des vices ; l'amour sensitif devient gourmandise et luxure ; l'aversion devient jalousie et envie ; l'audace devient témérité ; la crainte devient lâcheté ou pusillanimité.
On voit alors, soit dans l'ordre du bien, soit dans celui du mal, la profondeur de la sensibilité. Cette profondeur apparaît déjà dans l'animal, dans l'amour et la haine ; par exemple chez le lion qui désire sa proie, ou chez la lionne qui défend ses petits, par l'amour instinctif de la conservation de son espèce.
Mais cette profondeur de la sensibilité apparaît plus encore chez l'homme, car chez lui au-dessus de l'imagination, il y a l'intelligence qui conçoit le bien universel, et la volonté qui désire un bien sans limite lequel n'est réalisé qu'en Dieu. Si donc l'homme, par sa volonté, ne suit pas le droit chemin, s'il cherche le bonheur suprême, non pas en Dieu, mais dans les créatures, alors sa concupiscence devient insatiable, car elle poursuit un bien apparent, qu'elle désire sans bornes.
Si la volonté, faite pour aimer le bien suprême et son rayonnement universel, est dévoyée, alors sa tendance vers l'universel se retrouve dans sa déviation. Cette faculté supérieure devenue folle influe lamentablement sur les autres. C'est une triste preuve, mais encore une preuve, de la spiritualité de l'âme, comme un souvenir de sa grandeur en sa déchéance.
Saint Thomas dit à ce sujet : « La concupiscence naturelle, ou véritablement fondée sur notre nature, ne peut être infinie, car elle porte sur ce qu'exige notre nature et celle-ci ne demande qu'un bien sensible limité ; aussi jamais l'homme ne désire une nourriture infinie, ni un breuvage infini. Au contraire la concupiscence qui n'est pas naturelle, ou fondée sur notre nature, peut-être infinie ; elle procède en effet d'une raison dévoyée qui conçoit l'universel sans limites. Ainsi celui qui désire les richesses, peut les désirer sans fin, il peut désirer devenir toujours plus riche. C'est ce qui arrive chez celui qui met sa fin dernière dans les richesses (Cf. SAINT THOMAS Ia, IIae, q. 3o, a. 4.).
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 8 Nov - 4:58 | |
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PREMIÈRE PARTIE LA PROFONDEUR DE L'AME ET LA VIE PRÉSENTE
CHAPITRE I - LA SENSIBILITÉ ET LA CONNAISSANCE SENSIBLE
Tandis que la concupiscence naturelle à l'animal et à l'homme est limitée, même celle du loup, du tigre ou du lion, qui, lorsqu'il est rassasié, ne cherche pas une proie nouvelle, la concupiscence qui n'est pas naturelle, chez l'homme dépravé, est sans limites, car par son intelligence il conçoit toujours de nouvelles richesses et de nouvelles jouissances à se procurer ; d'où parfois des querelles sans fin entre individus et des guerres interminables entre des peuples.
L'avare est insatiable, de même l'homme de plaisir ou celui qui aspire toujours à dominer. Et comme l'amour contrarié engendre la haine, il y a des haines qui paraissent être sans limites : « La haine est le tonneau des pâles Danaïdes », disait Baudelaire. Selon la mythologie, les Danaïdes, pour avoir poignardé leur époux la nuit de leurs noces, turent condamnées à remplir dans le Tartare un tonneau sans fond, peine interminable d'une dépravation sans mesure.
Cette profondeur de la sensibilité humaine se remarque moins dans l'ordre du bien, parce que, dans cet ordre, elle nous dispose à aimer un bien spirituel qui n'est accessible qu'à la volonté spirituelle ; c'est ce qui arrive dans l'amour de famille et de la patrie, lorsqu'il se porte vraiment sur le bien commun, qui est surtout d'ordre moral, comme la justice sociale et l'équité.
Au contraire, la sensibilité d'une personne dépravée cherche l'infini dans les biens sensibles, elle leur demande ce qu'ils ne peuvent lui donner, ce qui la conduit au désenchantement et au dégoût, rien ne peut plus la satisfaire.)
Si telle est la profondeur de la sensibilité, commune à l'homme et à l'animal, quelle sera celle de la volonté spirituelle, commune à l'homme et à l'ange ?
CHAPITRE II LA VOLONTÉ ÉCLAIRÉE PAR L'INTELLIGENCE SON AMPLITUDE ILLIMITÉE
Peu de personnes ont profondément réfléchi à la supériorité de l'intelligence sur l'imagination, et à celle de l'idée sur l'image qui l'accompagne.
L'intelligence diffère des sens externes et internes, même des plus élevés d'entre eux, en ce qu'elle a pour objet premier, non pas les phénomènes sensibles, non pas la couleur ou le son, ou l'étendue résistante, ou le fait interne de conscience, mais l'être ou le réel intelligible et l'être dans son universalité.
L'intelligence connaît par suite les raisons d'être des choses, les causes des événements, leur fin ou leur but ; elle s'élève même à la connaissance de la Cause suprême, de Dieu, être infini et bien infini.
Toute conception suppose en nous en effet la notion plus universelle d'être. Tout jugement suppose le verbe être : « Pierre court » veut dire. Pierre est courant ». Tout raisonnement démonstratif exprime la raison d'être de ce qui est démontré (si c'est une preuve a priori) ou la raison d'être de l'affirmation de l'existence d'une réalité (si c'est une preuve e posteriori).
Parce que l'intelligence a pour objet l'être, elle cherche les raisons d'être des faits et des choses. Aussi l'enfant ne cesse-t-il de multiplier ses pourquoi ? Pourquoi l'oiseau vole-t-il ? Parce qu'il va chercher sa nourriture, c'est son but ; - parce qu'il a des ailes, c'est la cause sans laquelle il ne pourrait voler ; - Pourquoi a-t-il des ailes ? Parce que telle est sa nature à lui. - Pourquoi meurt-il ? Parce qu'il est un être matériel et que tout être matériel est corruptible.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 9 Nov - 4:06 | |
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CHAPITRE II LA VOLONTÉ ÉCLAIRÉE PAR L'INTELLIGENCE SON AMPLITUDE ILLIMITÉE
Ces multiples raisons d'être (finale, efficiente, formelle, matérielle ne sont, comme telles, accessibles qu'à la raison, non aux sens, ni à l'imagination. Seule l'intelligence, qui a pour objet l'être intelligible, peut connaître la fin, qui est la raison d'être des moyens. Jamais l'imagination ne saisira la finalité comme telle ; elle atteint sensiblement la chose qui est fin, mais non point la finalité : les raisons d'être des choses lui sont inaccessibles.
C'est ce qui montre la distance sans mesure qui existe entre l'image et l'idée si confuse même que reste celle-ci. L'image ne contient que des phénomènes sensibles juxtaposés, par exemple l'image d'une horloge, n'en représente que ce qu'en peut voir l'animal : couleur, son, résistance. Au contraire l'idée d'une horloge contient la raison d'être qui rend intelligibles ces phénomènes ; une horloge est une machine qui se meut d'un mouvement uniforme pour indiquer l'heure solaire. Cette raison d'être, l'animal ne pourra jamais la saisir, l'enfant au contraire la saisit bien vite.
Tandis que les sens et l'imagination n'atteignent que des êtres sensibles, comme sensibles, et par suite, comme singuliers, en telle partie de l'espace et du temps, l'intelligence atteint ces êtres sensibles, comme êtres, elle atteint en eux ce qu'il y a d'intelligible, et par suite d'universel, réalisable en n'importe quelle partie de l'espace et du temps. Elle atteint en concevant l'horloge, ce qu'elle doit être nécessairement, partout et toujours, pour indiquer l'heure solaire. Elle atteint de même, non seulement tel être sensible, mais l'être intelligible dans son universalité. Et par suite l'intelligence connaît, non seulement tel bien sensible et délectable, accessible aux sens, mais le bien intelligible, ce qui constitue le bien.
Nous concevons aussi ce qui est de nature à nous perfectionner, non seulement en nos facultés inférieures, mais en nos facultés les plus hautes. L'intelligence conçoit par conséquent ce que doit être le bien partout et toujours pour nous perfectionner ainsi ; et comme elle conçoit l'être universel qui n'est réalisé concrètement sans limites que dans l'Être suprême, elle conçoit aussi le bien universel qui n'est réalisé concrètement sans limites que dans le Souverain bien, qui est la bonté même.
Non seulement l'intelligence conçoit l'Être suprême, souverainement parfait, mais elle voit, au moins confusément, qu'il doit nécessairement exister. Il y a en effet, dans le monde, des êtres qui arrivent à l'existence et qui disparaissent ensuite : tous les corps corruptibles. Ils n'existent donc pas par eux-mêmes, pas plus ceux du passé que ceux d'aujourd'hui. Il faut donc qu'il existe de toute éternité un premier être, qui ne doive l'existence qu'à lui-même et qui puisse la donner aux autres. Autrement le plus parfait sortirait du moins parfait, sans aucune cause suffisante.
De même pas de mouvement corporel, ni de mouvement spirituel, sans un moteur suprême. Pas d'êtres vivants périssables sans un premier vivant, qui est la vie même. Pas d'ordre du monde sans un Ordonnateur suprême. Pas d'êtres intelligents dans le monde sans une cause première intelligente : quelle plus grande absurdité que de chercher à expliquer le génie d'un saint Augustin par une fatalité matérielle et aveugle. Pas de loi morale sans un suprême Législateur. Pas de moralité et de sainteté dans le monde sans un Dieu souverainement saint. L'intelligence saisit plus ou moins confusément ces vérités nécessaires et universelles.
Mais s'il en est ainsi, quelle n'est pas la profondeur de notre volonté spirituelle, qui est éclairée directement, non pas par les sens ou par l'imagination, mais par l'intelligence. Tandis que l'imagination de l'herbivore lui fait désirer l'herbe, nécessaire à sa subsistance, tandis que l'imagination du carnivore lui fait désirer la chair qui est son aliment, l'intelligence de l'homme lui fait désirer le bien dans son universalité, et par suite le bien sans limite, qui n'est concrètement réalisé qu'en Dieu, car Lui seul est le Bien même par essence.
Et si la sensibilité de l'herbivore et celle du carnivore le porte à désirer chaque jour son bien limité, la volonté de l'homme le porte à désirer un bien sans mesure ; quelle doit donc être sa profondeur ?
Source : Livres-mystiques.com
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Messages : 3597 Date d'inscription : 27/12/2019 Age : 66
| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 10 Nov - 3:08 | |
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CHAPITRE III LA PROFONDEUR DE NOTRE VOLONTÉ EST SANS MESURE, DIEU SEUL VU FACE A FACE PEUT LA COMBLERSi saint Thomas dit qu'en certains hommes, comme l'avare, la concupiscence des richesses est infinie (Ia,IIae,q.30,a.4), que faut-il dire alors du désir de la volonté spirituelle ? Plus la connaissance spirituelle des biens supérieurs et du bien suprême s'élève, plus ce désir spirituel grandit ; et la foi chrétienne nous dit que Dieu seul vu face à face peut le combler. C'est donc que notre volonté est vraiment, en un sens, d'une profondeur sans mesure. C'est pourquoi la béatitude ou le vrai bonheur, que l'homme désire déjà naturellement, ne peut se trouver dans aucun bien limité ou restreint, mais seulement en Dieu connu au moins de façon naturelle et aimé efficacement par-dessus tout. Saint Thomas (Ia,IIae,q.2,a. démontre que la béatitude de l'homme, du fait qu'il conçoit le bien universel, ne peut être ni dans les richesses, ni dans les honneurs, ni dans la gloire, ni dans le pouvoir, ni dans aucun bien du corps, ni dans un bien fini de l'âme, comme la vertu, ni dans aucun bien limité. Et la démonstration qu'il en donne tient à la nature même de notre intelligence et de notre volonté. Ia,IIae,q.2,a.8 : « Impossibile est beatitudinem hominis esse in aliquo bono creato. Beatitudo enim est bonum perfectum, quod totaliter quietat appetitum, alioquin non esset ultimus finis, si adhuc restaret aliquid appetendum. Objectum auteum voluntatis, quae est appetitus humanus, est universale bonum, sicut objectum intellectus est universale verum. Ex quo patet, quod nihil potest quietare voluntatem hominis, nisi bonum universale : quod non invenitur in aliquo creato, sed solum in Deo, quia omnis creatura habet bonitatem participatam. Unde solus Deus voluntatem hominis implere potest. » Lorsque nous avons cru trouver le bonheur dans la connaissance d'une science ou dans une amitié très noble, nous ne tardons pas à nous apercevoir que c'est un bien limité, ce qui faisait dire à sainte Catherine de Sienne : « Si vous voulez qu'une amitié dure, si vous voulez vous désaltérer longtemps à cette coupe, laissez-la toujours se remplir à la source d'eau vive, autrement elle ne pourra plus répondre à votre soif ». Il est impossible en effet que l'homme trouve le vrai bonheur, qu'il désire naturellement, en aucun bien limité, car son intelligence constatant aussitôt la limite, conçoit un bien supérieur et naturellement la volonté le désire. Même s'il nous était donné de voir un ange, de le voir immédiatement dans sa beauté suprasensible, purement spirituelle, nous serions d'abord émerveillés ; mais notre intelligence qui conçoit le bien universel, ne tarderait pas à nous dire : ce n'est là encore qu'un bien fini, et par là même très pauvre en comparaison du Bien même, sans limite et sans, mélange d'imperfection. La collection même simultanée de tous les biens finis et mêlés d'imperfection ne peut pas plus constituer le Bien même, conçu et désiré par nous, qu'une multitude innombrable d'idiots ne saurait valoir un homme de génie. A la suite de saint Grégoire le Grand, saint Thomas a noté à ce sujet : les biens temporels paraissent désirables quand on ne les a pas ; mais quand on les possède, on voit leur pauvreté qui ne peut répondre à notre désir, et qui produit la désillusion, la lassitude et parfois le dégoût. Pour les biens spirituels c'est l'inverse : ils ne paraissent pas désirables à ceux qui ne les ont pas et qui désirent surtout les biens sensibles ; mais plus on les possède, plus on connaît leur valeur, plus on les aime Ia,IIae,q.31,a.5,q.32,a.2,q.33,a.2. Pour la même raison, tandis que les mêmes biens matériels (la même maison, le même champ) ne peuvent appartenir simultanément et intégralement à plusieurs personnes, les mêmes biens spirituels (la même vérité, la même vertu) peuvent appartenir simultanément et pleinement à tous, et chacun les possède d'autant mieux qu'il les communique aux autres Ia,IIae,q.28,a.4,2;IIIa,q. 23,a .1,ad.3. Cela est vrai surtout du Souverain Bien. Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse ami de la Miséricorde | |
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 11 Nov - 4:29 | |
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CHAPITRE III
LA PROFONDEUR DE NOTRE VOLONTÉ EST SANS MESURE, DIEU SEUL VU FACE A FACE PEUT LA COMBLER
Il faut même de toute nécessité qu'il existe ce Bien infini, seul capable de répondre à notre aspiration ; autrement l'amplitude universelle de notre volonté serait une absurdité psychologique, une chose radicalement inintelligible, sans raison d'être.
Si Dieu nous avait créés dans un état purement naturel, sans la grâce, notre fin dernière eut été de le connaître naturellement par le reflet de ses perfections dans les créatures et de l'aimer efficacement par dessus tout.
Mais gratuitement Il nous a appelés à le connaître d'une façon surnaturelle, par la vision immédiate de sa divine essence, à le connaître comme Il se connaît, et à L'aimer surnaturellement comme Il s'aime pour l'éternité.
Alors surtout nous expérimenterons que Dieu seul vu face à face peut remplir le vide profond de notre coeur, que Lui seul peut combler la profondeur de notre volonté.
En quel sens cette profondeur est-elle sans mesure ? On objectera : notre âme comme toute créature est finie, limitée ; et, donc ses facultés le sont aussi. Sans doute la créature la plus élevée est finie, non seulement notre corps est limité mais notre âme l'est aussi, et par suite les facultés de l'âme, comme propriétés de celles-ci sont finies.
Cependant notre intelligence, quoique finie, est faite pour connaître le vrai universel et même le vrai infini qui est Dieu.
De même notre volonté, quoique finie, est faite pour aimer un bien sans limite. Sans doute, même au ciel, notre acte de vision béatifique, du côté du sujet connaissant sera fini, mais il portera sur un objet infini, il l'atteindra d'une manière finie, finito modo, sans le comprendre pleinement autant qu'il est connaissable, autant que Dieu se connaît, mais il l'atteindra immédiatement.
Nous verrons sans aucun intermédiaire l'essence infiniment parfaite de Dieu. Dès ici-bas l'oeil vivant, si petit soit-il, voit l'immensité de l'océan et peut atteindre la nuit jusqu'aux étoiles, qui sont à des milliers de lieues.
Aussi au ciel notre acte de vision de l'essence divine, sans avoir la pénétration de la vision incréée, atteindra immédiatement l'essence divine ; notre amour de Dieu en restant fini du côté du sujet, portera immédiatement sur le Bien infini, nous l'aimerons à notre manière finie, mais nous ne pourrons nous reposer qu'en Lui seul.
Nul autre objet ne pourra satisfaire toutes nos aspirations. Alors seulement, dit le psalmiste, nos désirs seront assouvis, lorsque sa gloire apparaîtra. « Satiabor cum apparuerit gloria tua ». Ps. xvI, 15.
Dès maintenant notre coeur ne trouve un vrai repos durable que dans l'amour de Dieu.
En ce sens, du côté de l'objet capable de la combler, notre volonté est d'une profondeur infinie. Elle est finie comme être, ainsi que notre intelligence, mais elle s'ouvre sur l'infini ; les thomistes disent : « facultates istae entitative sunt finitae, sed intentionaliter sunt infinitae » - nos facultés supérieures sont finies dans leur entité, comme propriétés de l'âme, mais elles ont un objet sans limite.
Déjà dans l'ordre sensible, notre oeil, si petit qu'il soit, atteint les nébuleuses dans l'immensité du firmament.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Jeu 12 Nov - 3:35 | |
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CHAPITRE IV LE FONDEMENT DE LA LIBERTÉ :
Il résulte de ce qui précède que Dieu seul vu face à face peut attirer irrésistiblement notre volonté ; devant tout objet fini elle reste libre.
Saint Thomas a écrit Ia, IIae, q. 10, a. 2 : « Si l'on propose à la vue qui a pour objet la couleur, une chose actuellement colorée ou lumineuse sous tous ses aspects, elle ne peut pas ne pas la voir. Au contraire si on lui propose un objet qui n'est coloré ou lumineux que d'un côté et obscur de l'autre (comme pendant la nuit, une lanterne sourde), la vue ne verra pas cet objet s'il lui est présenté du côté où il n'est pas coloré ou lumineux. Or comme le coloré est l'objet de la vue, le bien est l'objet de la volonté.
Si donc est proposé à celle-ci un objet qui soit universellement bon, à tout point de vue, elle le voudra nécessairement, si elle veut quelque chose et elle ne pourra pas vouloir l'opposé. Si au contraire l'objet qui lui est présenté n'est pas bon à tout point de vue, elle pourra ne pas le vouloir.
Et comme l'absence de quelque bien que ce soit peut être appelé « non-bien », seul le Bien souverainement parfait, auquel rien ne manque, est tel que la volonté ne peut pas ne pas le vouloir. Ce bien c'est la « béatitude ».
Nous ne pouvons pas ne pas vouloir le bonheur, ne pas vouloir être heureux, mais nous oublions souvent que le vrai et parfait bonheur ne se trouve qu'en Dieu aimé par-dessus tout. Et ici-bas nous l'aimons librement parce que nous ne le voyons pas immédiatement tel qu'il est et nous pouvons nous détourner de Lui, en considérant qu'Il nous commande ce qui déplaît à notre orgueil et à notre sensualité.
Mais si Dieu lui-même, qui est le Bien infini, nous était immédiatement et clairement manifesté face à face, nous ne pourrions pas ne pas l'aimer. Il comblerait parfaitement notre capacité affective qui serait irrésistiblement attirée par lui. Elle ne conserverait aucune énergie pour se soustraire à son attrait ; elle ne pourrait trouver aucun motif de se détourner de lui, ou même de suspendre son acte d'amour.
C'est la raison pour laquelle celui qui voit Dieu face à face ne peut plus pécher. Comme le dit saint Thomas Ia, IIae, q. 4, a. 4 : « La volonté de celui qui voit immédiatement l'essence de Dieu, l'aime nécessairement, et n'aime rien que par rapport à Dieu, comme dès ici-bas nous voulons tout en vue d'être heureux ». Dieu seul vu face à face peut captiver invinciblement notre volonté. Cf. Ia, q. 105, a. 4.
Par opposition notre volonté reste libre d'aimer ou de ne pas aimer tout objet qui est bon sous un aspect et non bon ou insuffisant sous un autre. Et même la liberté se définit l'indifférence dominatrice de la volonté à l'égard de tout objet qui est bon sous un aspect, et non bon sous un autre.
Cette définition de la liberté s'applique même non seulement à la liberté humaine, mais à la liberté angélique et analogiquement à la liberté divine. On voit ainsi que Dieu était libre de créer ou de ne pas créer, de nous élever à la vie de la grâce ou de ne pas nous y élever.
On voit dès lors que notre volonté est d'une profondeur infinie, en ce sens que Dieu seul vu face à face peut la remplir et irrésistiblement l'attirer ; Les biens créés ne peuvent, à cause de cela, exercer sur elle un attrait invincible, ils ne l'attirent que superficiellement, elle est libre de les aimer ou de ne pas les aimer.
Il appartient à la volonté d'aller au devant de cet attrait qui est incapable de venir tout à fait jusqu'à elle. C'est par là qu'elle détermine le jugement qui doit la déterminer elle-même.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 13 Nov - 3:03 | |
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CHAPITRE IV LE FONDEMENT DE LA LIBERTÉ :
Il y a là une causalité réciproque de l'intelligence qui dirige et de la volonté qui consent : c'est comme un mariage qui n'est conclu que lorsque la volonté a dit : oui.
Pour la même raison, elle maintient l'intelligence dans la considération qui lui plaît, suspend l'enquête intellectuelle ou la laisse se poursuivre ; et c'est d'elle qu'il dépend en dernière analyse que tel jugement pratique soit le dernier, au terme de la délibération, suivant qu'elle l'accepte ou non. L'acte libre est ainsi une réponse gratuite, partie des profondeurs de la volonté, à la sollicitation impuissante d'un bien fini.
Dieu seul vu face à face attire infailliblement notre volonté et la captive jusqu'en la source de ses énergies. Même un ange vu immédiatement tel qu'il est, si beau qu'il puisse être, ne saurait l'attirer irrésistiblement. Ce n'est là encore qu'un bien fini. Deux biens finis, si inégaux soient-ils, sont également distants de l'infini : en ce sens l'ange et le grain de sable, en comparaison de Dieu, Bonté suprême, sont également infimes.
La profondeur de notre volonté, considérée du côté de l'objet qui peut la remplir, est donc sans limite.
D'où vient qu'une vérité particulière (par exemple l'existence de Marseille ou de Messine) nécessite notre intelligence, tandis que Dieu seul, bien universel, vu face à face, nécessite notre volonté ? - Saint Thomas répond Ia, IIae, q, 10, a. 2, ad 2m : notre intelligence est nécessitée par l'objet qui est vrai à tout point de vue, mais elle n'est pas nécessitée par l'objet qui peut être vrai ou faux, et qui est seulement probable, comme par exemple l'existence d'une ville lointaine, qui a pu être détruite il y a quelques heures par un tremblement de terre.
De même notre volonté n'est nécessitée que par l'objet qui est bon sous tous ses aspects et qui ne peut apparaître insuffisant, tel le bonheur pour lequel nous voulons tout le reste, mais surtout Dieu vu face à face, car nous pouvons cesser de penser au bonheur, tandis que ceux qui voient Dieu immédiatement ne peuvent cesser de le voir et ne peuvent trouver le moindre prétexte de suspendre leur acte d'amour.
Cette doctrine est de nature à éclairer plusieurs problèmes des plus difficiles, en particulier celui de la liberté du Christ.
Dès ici-bas il était absolument impeccable (pour trois raisons : à cause de sa personnalité divine, parce qu'il avait la vision béatifique et la plénitude de grâce inamissible), il ne pouvait donc pas désobéir. Comment alors obéissait-il librement, ce qui est une condition du mérite, en particulier comment a-t-il pu librement obéir au précepte de mourir pour nous sur la croix, précepte dont il a parlé lui-même quand il a dit : « je donne ma vie de moi-même, tel est l'ordre que j'ai reçu de mon Père » JOAN, X, 18, cf. JEAN, XV, 10, XIV, 31, PHILIPP., II, 8.
La réponse des thomistes que nous avons exposée ailleurs, est qu'il ne pouvait pas désobéir d'une façon privative par un acte de désobéissance, il était absolument impeccable. Mais il pouvait cependant ne pas obéir au sens simplement négatif.
Ainsi un très bon religieux recevant un ordre fort dur, n'a même pas la pensée de désobéir (d'une façon privative) ; mais il a conscience qu'il accomplit librement cet acte pénible et qu'il garde, en le posant, la puissance de ne pas le poser (de façon négative).
Et pourquoi la liberté du Christ restait-elle en son obéissance devant la mort de la croix ? Parce que cette mort était un objet bon sous un aspect, pour notre salut, et terriblement redoutable sous un autre. Cet objet n'attirait donc pas irrésistiblement la volonté humaine du Christ, comme l'attirait l'essence divine vue immédiatement ; et d'autre part le précepte, demandant une obéissance libre et méritoire, ne pouvait détruire la liberté de celle-ci, il se serait détruit lui-même.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 15 Nov - 3:14 | |
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CHAPITRE V
LES RACINES DES VICES ET CELLES DES VERTUS DANS LA PROFONDEUR DE L'AME
Pour mieux voir ce qu'est la profondeur de l'âme, en particulier de la volonté, il convient de parler des racines des vices et de celles des vertus qui y pénètrent soit pour notre perte, soit pour notre salut.
La vertu perfectionne l'homme, l'incline vers une fin bonne, et fait de lui non seulement un bon peintre, un bon sculpteur, un bon mathématicien, mais un homme de bien. Le vice est une mauvaise habitude, celle d'agir contrairement à la droite raison ; il déforme l'homme tout entier dans la conduite de la vie, parce qu'il atteint la volonté et l'incline vers une fin mauvaise.
Le vice fait de l'homme non pas seulement un mauvais peintre, un mauvais sculpteur, mais un mauvais sujet, parfois un criminel, un scélérat, un homme de mauvaise volonté ; la chose commence parfois chez des enfants de 14 à 15 ans. Tous les vices ont une racine commune qui est l'amour déréglé de soi-même opposé à l'amour du bien et du Souverain Bien qui est Dieu.
Cette mauvaise racine tend à s'enfoncer de plus en plus dans la volonté, et d'elle naît un mauvais arbre, dont le tronc est l'égoïsme ; la branche centrale et principale, en continuation du tronc est l'orgueil ; et les branches latérales sont la concupiscence de la chair et celle des yeux. Ainsi parle l'Apôtre saint Jean (1 JOAN., II, 16).
Ce mauvais arbre a des branches nombreuses qui naissent des précédentes et qui s'appellent les péchés capitaux. De la concupiscence de la chair naissent la gourmandise et la luxure .
De la concupiscence des yeux ou désir immodéré des biens extérieurs, naît l'avarice et aussi la perfidie, la fraude, la fourberie, l'endurcissement du coeur.De l'orgueil de la vie naissent la vaine gloire et l'ambition, le dégoût des choses spirituelles, l'oubli de Dieu, l'envie, la colère, les emportements, les injures.
Les péchés capitaux conduisent eux-mêmes à d'autres plus graves, qui sont contre les vertus théologales : au blasphème, opposé à la confession de la foi, au désespoir, opposé à l'espérance, à la haine de Dieu et du prochain, opposée à la charité. Certains de ces vices, dans les hommes les plus pervers, ont des racines très profondes, qui manifestent à leur manière et très tristement la profondeur de l'âme.
On connaît ces paroles de saint Augustin dans la Cité de Dieu, 1. XIV, ch. 28 : « Deux amours ont constitué deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu a fait la cité de Babylone, c'est à-dire celle du monde, de l'immoralité, tandis que l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi a fait la cité de Dieu ».
Comme l'homme n'arrive pas du premier coup à la sainteté, il n'arrive pas non plus tout de suite à la complète perversité. L'amour déréglé de soi-même, lorsqu'il devient dominateur, pousse des racines de plus en plus profondes en certaines âmes qui sont sur le chemin de la perdition. Leur voix rend souvent un son aigre et perçant ; elles ferment volontairement les yeux à la lumière divine, qui seule pourrait les éclairer et les délivrer.
Quelquefois elles combattent la vérité bien que celle-ci soit évidente pour elles ; c'est une des formes du péché contre le Saint-Esprit, impugnatio veritatis agnitae. C'est ainsi, selon les Actes des Apôtres, IV, 16, que, après une guérison miraculeuse obtenue par saint Pierre au nom de Jésus, les Pharisiens, membres du Sanhédrin, dirent : « Que ferons-nous à ces hommes (à Pierre et à jean) ? Qu'ils aient fait un miracle insigne, c'est ce qui est manifeste pour tous les habitants de Jérusalem, et nous ne pouvons pas le nier, mais afin que la chose ne se répande pas davantage parmi le peuple, défendons-leur avec menaces de parler désormais en ce nom-là à qui que ce soit ». Et ils leur interdirent de parler au nom de Jésus. A quoi Pierre et Jean répondirent : « Jugez s'il est juste devant Dieu de vous obéir plutôt qu'à Dieu. Nous ne pouvons pas ne pas dire ce que nous avons vu et entendu ».
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 16 Nov - 3:40 | |
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CHAPITRE V
LES RACINES DES VICES ET CELLES DES VERTUS DANS LA PROFONDEUR DE L'AME
Les profondeurs sans mesure de l'âme humaine se révèlent ainsi tristement par l'amour déréglé de soi-même, qui va parfois jusqu'au mépris et à la haine de Dieu. Cette malice s'accompagne d'une haine invétérée et incompréhensible contre le prochain, contre celui-là même à qui on devrait une grande reconnaissance. Certaines perversités effroyables, comme celle de Néron et d'autres persécuteurs, n'ont pas cédé même devant la constance et la bonté rayonnantes des martyrs.
Ce degré incroyable de malice manifeste par contraste la grandeur de Dieu et des Saints. Et le Seigneur permet cette malice et la persécution pour faire resplendir la sainteté des martyrs. En Espagne en 1936 pendant la persécution communiste, les fidèles venaient dire aux prêtres : comment Dieu permet-il de telles atrocités ? Les bons prêtres répondaient : « sans la persécution il n'y a pas de martyrs, et ils sont une gloire de l'Église ». Les fidèles comprenaient et partaient réconfortés.
La profondeur de l'âme humaine apparaît plus encore par les grandes vertus qui s'enracinent en elle, et qui pourraient toujours grandir si le temps de l'épreuve et du mérite n'était limité, comme prélude de l'éternelle vie.
On distingue les vertus acquises par la répétition des actes naturels vertueux et les vertus infuses ou surnaturelles reçues au baptême et qui grandissent en nous par les sacrements, par la Sainte Communion et par nos mérites.
Déjà les vertus acquises manifestent la profondeur de l'âme. La tempérance, particulièrement la chasteté et la force ou le courage font descendre dans notre sensibilité la lumière de la droite raison, pour résister à des tentations parfois très vives d'impureté et de lâcheté. De même la vertu acquise de justice révèle la grandeur de l'âme humaine, surtout lorsque, pour le bien commun de la société, elle fait établir et observer de justes lois qui peuvent demander de grands sacrifices, celui même de la vie. Rappelons-nous la mort de Socrate injustement accusé, et refusant de s'échapper de sa prison par respect pour les lois de son pays.
Mais ce sont surtout les vertus infuses, théologales et morales, qui manifestent la grandeur de l'âme dont elles surélèvent les énergies. Elles procèdent de la grâce sanctifiante, qui est reçue dans l'essence même de l'âme, comme une greffe divine ; celle-ci nous communique une participation de la vie intime de Dieu, de la vitalité de Dieu.
La grâce sanctifiante est en effet le germe de la vie éternelle, semen gloriae, et lorsqu'elle sera pleinement épanouie, elle nous permettra de voir immédiatement Dieu comme il se voit et de l'aimer comme il s'aime. Il se fait ainsi en nous une germination de vie éternelle. Si la germination du blé donne 30,6O et même 100 pour 1, que sera dans l'ordre surnaturel la germination de la vie éternelle !
De cette greffe divine, qu'est la grâce sanctifiante, dérivent dans notre intelligence la foi infuse, et dans notre volonté l'espérance infuse et la charité infuse; d'elle dérivent aussi les vertus infuses de prudence chrétienne, de justice, de religion, de force, de chasteté, d'humilité, de douceur, de patience et les sept dons du Saint-Esprit.
Les vertus infuses, qui dérivent de la grâce sanctifiante, donnent à nos facultés le pouvoir d'agir surnaturellement pour mériter la vie éternelle ; et les sept dons du Saint-Esprit, qui les accompagnent, nous rendent dociles aux inspirations du Maître intérieur.
Lui-même tire alors de nos facultés, même de nos facultés sensibles, des accords, non seulement rationnels, mais surnaturels, qui se font entendre surtout dans la vie des Saints. C'est tout un organisme nouveau qui nous est donné.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 17 Nov - 3:58 | |
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CHAPITRE V LES RACINES DES VICES ET CELLES DES VERTUS DANS LA PROFONDEUR DE L'AME
La foi infuse qui s'appuie sur la Révélation divine, étend considérablement les frontières de notre intelligence, puisqu'elle nous permet de connaître Dieu, non plus seulement comme auteur de la nature, mais comme auteur de la grâce et dans sa vie intime.
Elle nous fait adhérer infailliblement et surnaturellement aux vérités qui dépassent les forces naturelles de toute intelligence créée, même angélique, aux mystères de la Sainte Trinité, de l'élévation du genre humain à l'ordre surnaturel, à ceux de la chute, de l'Incarnation rédemptrice et des moyens de salut. Le don d'intelligence rend cette foi de plus en plus pénétrante.
L'espérance infuse nous fait tendre vers Dieu, vers la vie de l'éternité, et bien qu'elle ne nous donne pas la certitude du salut, qui exigerait une révélation spéciale, elle a une « certitude de tendance » vers le but suprême. Par elle nous tendons sûrement vers la fin ultime, comme l'hirondelle vers la région où elle retourne.
Cette certitude augmente par les inspirations du Saint-Esprit, qui, au milieu des plus grandes difficultés, console le juste et lui faut pressentir qu'il approche du ciel. Le don de crainte filiale nous préserve de la présomption, celui de science nous montre la vanité des choses terrestres et celui de piété augmente notre confiance en Dieu, notre Père. On voit par là la hauteur et la profondeur de l'âme ; on les voit plus encore par la charité.
La charité est une véritable amitié surnaturelle, qui nous unit à Dieu. Déjà dans l'Ancien Testament Abraham est appelé l'ami de Dieu (JUDITH, VIII, 22) de même les prophètes (SAG., VII, 27). Dans le Nouveau Testament Jésus nous dit (JEAN, XV, 15) « Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande.
Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; mais je vous ai appelés mes amis, parce que tout ce que j'ai entendu de mon Père, je vous l'ai fait connaître ». Ces paroles sont dites aux Apôtres, mais ensuite à nous. Et cela va très loin si l'on est fidèle.
Cette vertu nous fait aussi aimer surnaturellement le prochain, en tant qu'il est aimé de Dieu, notre Père commun, en tant que le prochain est enfant de Dieu ou appelé à le devenir.
Cette charité infuse doit s'enraciner de plus en plus dans le fond de la volonté, et en chasser l'amour déréglé de nous-mêmes. Elle dilate notre coeur pour lui donner quelque chose de la grandeur de la bonté divine et nous faire aimer comme lui tous les hommes sans exception. Bien plus, si un juste vivait sur terre un temps indéfini, des milliers d'années, pour mériter, la charité ne cesserait pas de grandir dans les profondeurs de sa volonté.
Saint Thomas a exprimé admirablement cette vérité en disant IIa IIae, q. 24, a. 7 : « La charité infuse peut toujours augmenter en elle-même, car elle est une participation de l'amour incréé et sans limites ; elle peut aussi toujours augmenter du côté de Dieu son auteur, qui peut toujours la faire grandir en nous ; enfin elle peut toujours augmenter du côté de notre âme, qui la reçoit, car plus la charité grandit,. plus notre âme devient capable d'en recevoir l'augmentation ».
La charité, en progressant, dilate notre coeur, qui est en quelque sorte envahi par l'amour de Dieu ( Le Psalmiste dit: « J'ai couru dans la voie de vos commandements, lorsque vous avez dilaté mon coeur » Ps. 118, 32.). Celui-ci la creuse toujours davantage pour la remplir davantage. Il est donné parfois de l'expérimenter dans l'oraison.
Cette page de saint Thomas est une de celles qui montrent le mieux la profondeur sans mesure de notre volonté, où la charité infuse doit s'enraciner de plus en plus en excluant de mieux en mieux l'amour déréglé de nous mêmes, et en nous portant à nous aimer saintement nous-mêmes et le prochain, pour glorifier Dieu dans le temps et dans l'éternité. La charité en grandissant nous fait aimer de plus en plus toutes les âmes de la terre, du purgatoire et du ciel, elle nous fait participer à l'immensité du Coeur de Dieu
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 18 Nov - 5:31 | |
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CHAPITRE V
LES RACINES DES VICES ET CELLES DES VERTUS DANS LA PROFONDEUR DE L'AME
Enfin la charité doit durer éternellement, c'est sa longueur correspondante à sa profondeur et à sa hauteur. Comme le dit saint Paul I. COR., XIII, 8 « La charité ne passera pas »; lorsque la foi fera place à la vision, et l'espérance à la possession de Dieu, la charité comme la grâce sanctifiante, durera éternellement.
C'est pourquoi, dans le juste, la vie de la grâce et de la charité est déjà la vie éternelle commencée. Aussi Jésus dit-il à plusieurs reprises : « Celui qui croit en moi a la vie éternelle ». JOAN., III, 36 ; V, 24; VI, 40, 47. C'est-à-dire: celui qui croit en moi d'une foi vive, unie à la charité, non seulement aura la vie éternelle, mais il l'a en germe.
Les vertus cardinales infuses de prudence, justice, force, tempérance, sont très supérieures aux vertus acquises de même nom. Ce ne sont pas seulement les vertus du parfait honnête homme, mais celles de l'enfant de Dieu.
Entre la prudence acquise et la prudence infuse il y a beaucoup plus de distance qu'entre deux notes musicales de même nom séparées par une gamme complète. La prudence infuse est d'un autre ordre que la prudence acquise, à tel point que cette dernière pourrait toujours grandir sans jamais atteindre le moindre degré de l'autre.
Il en est de même pour les autres vertus morales acquises par rapport à la vertu infuse de même nom. Si la prudence acquise est d'argent, la prudence infuse est d'or, et le don de conseil, supérieur encore, est de diamant.
La vertu acquise facilite l'exercice de la vertu infuse de même nom et du don qui accompagne celle-ci, comme chez le pianiste, l'agilité des doigts facilite l'exercice de l'art qui est dans l'intellect pratique et celui de l'inspiration musicale.
Certaines vertus chrétiennes ont une particulière profondeur ou élévation à cause de leur affinité avec les vertus théologales. L'humilité, comparable à l'excavation qu'il faut creuser pour construire un édifice, nous rappelle cette parole du Sauveur : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » dans l'ordre de la grâce ou du salut.
Elle nous redit ces mots de saint Paul I. COR., IV, 7 : « Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu » ? - « Nous ne sommes pas capables de tirer de nous-mêmes comme venant de nous-mêmes la moindre pensée profitable pour le salut. » Il y faut une grâce, comme pour tout acte surnaturel.
L'humilité chrétienne nous rappelle aussi ces paroles de saint Augustin : « Il n'est pas de faute commis par un autre homme que nous ne soyons capables de commettre nous-mêmes » par notre fragilité, si nous étions placés dans les mêmes circonstances et entourés des mêmes mauvais exemples depuis notre enfance.
C'est pourquoi saint François d'Assise, voyant un criminel conduit au dernier supplice, se dit : si cet homme avait reçu les mêmes grâces que moi, il aurait été peut-être moins infidèle que moi, et si le Seigneur avait permis dans ma vie les fautes qu'il a permises dans la sienne, c'est moi qui serais à sa place aujourd'hui. Il faut remercier Dieu de tout le bien qu'il nous a fait accomplir et de nous avoir fait éviter toutes les fautes que nous aurions pu commettre. Ce sont là les profondeurs de la vie chrétienne
.La magnanimité infuse perfectionne l'acquise et complète l'humilité, en nous gardant dans l'équilibre spirituel. Elle nous fait tendre vers les grandes choses que Dieu demande de chacun de nous, même dans les plus modestes conditions, celle par exemple d'un bon serviteur fidèle à ses maîtres toute sa vie. Elle nous fait éviter l'ambition comme la pusillanimité, en nous rappelant que ces grandes choses ne se feront pas sans humilité et sans le secours de Dieu à demander chaque jour : « Si le Seigneur ne bâtit pas la maison, en vain travaillent ceux qui la bâtissent ». Ps. CXXVI, I.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Jeu 19 Nov - 2:56 | |
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CHAPITRE V
LES RACINES DES VICES ET CELLES DES VERTUS DANS LA PROFONDEUR DE L'AME
La patience et la douceur chrétiennes, qui resplendissent dans les vrais martyrs, font supporter les maux de la vie présente avec égalité d'âme sans se laisser troubler. La patience supporte un mal inévitable pour rester dans le droit chemin, pour continuer son ascension vers Dieu.
Les martyrs sont au plus haut degré maîtres d'eux-mêmes et libres ; en eux apparaît l'acte principal de la vertu de forces qui ne consiste pas à attaquer mais à supporter les choses les plus pénibles sans défaillir, et en priant pour les persécuteurs.
La religion, aidée par le don de piété, nous porte à rendre à Dieu le culte qui lui est dû, avec l'affection filiale que le Saint-Esprit nous inspire et une confiance sans borne dans l'efficacité de la prière et en la bonté de Dieu, alors même que tout paraît désespéré.
La pénitence porte à réparer l'offense faite à Dieu en union avec le sacrifice de la Croix perpétué sur l'autel. Dans une âme qui a le zèle de la gloire de Dieu et du salut du prochain, elle porte à réparer pour les pécheurs.
Telle cette enfant, morte à Rome en odeur de sainteté le 3 juillet 1937, Antoinette Meo, qui dût subir, à moins de six ans, l'amputation d'une jambe, à cause d'un cancer ; lorsque sa mère lui dit : « Si le Seigneur te demandait ta jambe, la lui donnerais-tu ? », elle répondit : « Oui, Maman » et après une minute de réflexion, elle ajouta : « il y a tant de pécheurs dans le monde, il faut bien que quelqu'un répare pour eux. » - A la suite d'une seconde opération, non moins pénible, son père lui demanda « Tes douleurs sont-elles bien fortes ? » « Oui, papa, dit-elle; mais la souffrance est comme l'étoffe, plus elle est forte, plus elle a de valeur ».
Cet esprit de réparation, qui anime la vie des grands saints fait entrer les âmes dans les hauteurs de Dieu. Les vertus infuses grandissent ensemble en ces saints jusqu'à ce qu'ils soient arrivés « à l'état de l'homme parfait, à la mesure de la stature parfaite du Christ » EPHES., IV, 13.
De plus les sept dons du Saint Esprit qui nous rendent dociles aux inspirations du Saint-Esprit, sont, en notre âme comme sept voiles sur une barque, ou mieux comme sept antennes spirituelles pour recevoir les inspirations d'une harmonie dont Dieu est l'auteur.
Si la grande perversité manifeste tristement la profondeur de l'âme, les vertus la révèlent plus encore, surtout les vertus infuses. Parmi elles, la charité doit toujours grandir en nous jusqu'à la mort ; ses racines s'enfoncent toujours plus profondément dans notre volonté pour en chasser tout égoïsme, tout amour déréglé de nous-mêmes.
Cette charité devrait grandir en nous chaque jour par la sainte communion, et même chaque communion devrait être substantiellement plus fervente d'une ferveur de volonté, si non de sensibilité, que la précédente, et par là plus fructueuse, car chacune doit non seulement conserver, mais accroître en nous la charité et ainsi nous disposer à une meilleure communion pour le jour suivant.
Il en est ainsi dans la vie des Saints, car ils ne mettent plus d'obstacles à ce progrès. En eux se réalise ce qui est dit dans la parabole du semeur : « D'autres grains de froment tombèrent dans la bonne terre, et ils produisirent des fruits, l'un cent, un autre soixante, et un autre trente.
Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ». MATTHIEU, XIII, 8. Il suit de ce que nous venons de dire que chez le juste, fidèle à Dieu, le plus bel âge de la vie au point de vue spirituel, c'est la vieillesse, l'âge où le mérite arrive à son plein développement, l'âge qui nous rapproche le plus de l'éternelle jeunesse du ciel.
La profondeur de l'âme se manifeste ainsi à nous de plus en plus. Nous la verrons mieux encore en disant quelques mots des purifications de l'esprit qui existent déjà chez les meilleurs, dans la vie présente, et en parlant ensuite de la vie de l'âme après la mort.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 20 Nov - 2:47 | |
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CHAPITRE VI LE PURGATOIRE AVANT LA MORT ET LE FOND DE L'AME :LA NUIT DE L'ESPRIT
La purification du fond de l'âme a été souvent traitée par Tauler, par Louis de Blois, par saint Jean de la Croix. Louis de Blois (Intstitutio spriritualis, ch. XII. Voir aussi les Sermons de Tauler. trad. Hugueny. Paris, 1927, ch. I, pp. 74-82, 105-120), en expliquant ce que Tauler appelle le fond de l'âme, nous dit : c'est l'origine ou la racine des facultés supérieures « virium illarum est origo ». La substance même de l'âme ne peut opérer, sentir, concevoir, juger, aimer, vouloir, que par ses facultés.
C'est pour cela qu'elle les a reçues. Elle diffère ainsi de la substance divine, qui, seule, en tant qu'Acte pur, est immédiatement opérative par elle-même sans avoir besoin de facultés ( SAINT THOMAS Ia, q. 54, a. I; q. 77, a. I, 2.). Dieu n'a pas une faculté intellectuelle qui passerait de la puissance à l'acte, il est la Pensée même ; il n'a pas une volonté qui serait progressivement actualisée, il est l'Amour même. Dieu est comme un éclair de génie et d'amour éternellement subsistant. Au contraire l'âme humaine et l'ange sont doués de facultés et ils ne peuvent connaître intellectuellement que par l'intelligence, vouloir que par la volonté. On ne saurait donc admettre, comme le montre saint Thomas ( Ibid ), que l'essence même de l'âme ait des actes latents de connaissance et d'amour, qui ne procéderaient pas de nos facultés supérieures.
Mais nos actes les plus profonds, suscités par Dieu, sont tellement différents des jugements superficiels souvent faux, de ceux par exemple qui sont répandus dans un milieu peu éclairé et matérialisé, qu'ils paraissent être dans la substance même de l'âme. En réalité ils sont dans le fond de nos facultés supérieures, là où elles s'enracinent dans la substance même de l'âme. En ce sens, d'excellents auteurs comme saint Jean de la Croix ont parlé de « touches substantielles du Saint-Esprit dans le fond de l'âme », touches qui suscitent une connaissance mystique fort élevée et des actes d'amour infus ( Montée du Carmel, I. II, c. 30. Saint jean de la Croix comme Tauler, parle le langage descriptif et concret de la psychologie expérimentale, et non pas le langage ontologique et abstrait de la psychologie rationnelle.).
Dieu plus intime à l'âme qu'elle-même, en tant qu'il lui conserve l'existence, peut toucher et mouvoir ab intus, du dedans, le fond même de nos facultés par un contact non pas spatial, mais spirituel et dynamique (contactas virtutis, non quantativus), qui se manifeste à la conscience comme divin. Ainsi Dieu meut intimement l'âme aux actes les plus profonds, auxquels elle ne pourrait se porter elle-même.
On a justement comparé notre conscience superficielle à la coquille ou enveloppe calcaire d'un grand nombre de mollusques. L'homme a sa coquille lui aussi, celle de ses habitudes routinières de penser, de vouloir, d'agir, qui sont le résultat de son égoïsme, de ses illusions, de ses erreurs. Rien de tout cela n'est en harmonie avec Dieu caché au fond de notre âme et des autres âmes, qui le cherchent sincèrement. Et alors il faut que cette coquille ou conscience superficielle se brise pour qu'on connaisse ce qui est au fond de l'âme et des autres âmes de bonne volonté. Ce qui brise cette coquille ce sont les épreuves, surtout le purgatoire avant la mort. Par exemple lorsqu'une pauvre femme, mère de plusieurs enfants, perd subitement son mari qui faisait vivre toute la famille.
Alors le fond de l'âme de cette pauvre femme se révèle et parfois on constate que c'est une grande chrétienne. - D'autrefois c'est un père de famille fait prisonnier de guerre pendant plusieurs années ; s'il est fidèle, Dieu se penche vers lui et lui révèle la grandeur de la famille chrétienne pour laquelle il souffre. C'est parfois un roi découronné, comme Louis XVI, roi de France, condamné à mort et exécuté pendant la Terreur ; ayant perdu son propre royaume, il dut voir, plus que jamais avant de mourir, la grandeur du royaume de Dieu. L'Europe entière passe en ce moment par l'épreuve purificatrice, plaise à Dieu que beaucoup le comprennent : la douleur qui est la chose la plus inutilisable en apparence, peut devenir féconde par la grâce du Christ. Lui-même a rendu par son amour les souffrances du Calvaire infiniment fructueuses. Le Saint Père le rappelait ces derniers jours aux médecins catholiques et leur citait ces vers d'un poète français : L'homme est un apprenti, la douleur est son maître, Et nul ne se connaît, tant qu'il n'a pas souffert.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 21 Nov - 2:50 | |
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CHAPITRE VI LE PURGATOIRE AVANT LA MORT ET LE FOND DE L'AME : LA NUIT DE L'ESPRIT
La douleur chrétiennement supportée est grandement utile. Déjà dans l'ordre physique, il est utile d'être averti par elle qu'un cancer commence à se former en nous ; c'est fort utile d'en souffrir pour pouvoir être opéré assez tôt.
De même la douleur morale est utile, elle nous fait désirer une vie supérieure à celle des jouissances sensibles, supérieure aux biens sensibles dont nous sommes privés, elle nous fait désirer la vie de l'esprit et celle de l'âme. La douleur nous fait désirer Dieu, qui seul peut guérir certaines blessures du coeur, et qui seul peut fortifier et refaire les âmes. La douleur nous invite à recourir à Dieu, qui seul peut nous rendre la paix en se donnant à nous.
Comme le dit saint Jean Chrysostome [Consolationes ad Stagir. 1. III.] : « la souffrance dans la vie présente est un remède contre l'orgueil qui nous égarerait, contre la vaine gloire et l'ambition. Par elle, la force de Dieu resplendit en des hommes infirmes, qui sans la grâce ne pourraient supporter leurs afflictions. Par elle se manifeste la patience des justes persécutés.
Par elle le juste est porté à désirer la vie éternelle. Le souvenir des grandes souffrances des Saints nous aide à supporter les nôtres et nous invite à les imiter dans une mesure. Enfin la douleur nous apprend à distinguer les faux biens qui passent et les vrais qui durent éternellement ».
C'est pourquoi il est dit dans l'Écriture : « Mon fils ne méprise pas la correction du Seigneur, et ne te laisse pas abattre par sa réprimande. Car le Seigneur corrige celui qu'il aime et il châtie celui qu'il reçoit pour son enfant ». PROV. III, II, HÉBR., XII, 6.
D'où la nécessité de l'épreuve pour purifier le fond de l'âme. Notre Seigneur l'a dit souvent : « Que celui qui veut me suivre, se renonce et porte sa croix tous les jours ». Il a dit aussi : « Je suis la vigne véritable, vous êtes les sarments et mon Père est le vigneron. Tout sarment en moi... qui porte du fruit, il l'émonde, pour qu'il en porte davantage ». JEAN, XV, 2.
Cela est particulièrement nécessaire pour ceux qui, par vocation doivent travailler non seulement à leur sanctification personnelle, mais à celle des autres. C'est pourquoi saint Paul a dit : « On nous méprise et nous bénissons ; on nous persécute et nous supportons ; on nous accable d'injures, et nous répondons par des prières ». I COR., IV, 12.
L'action purificatrice de Dieu sur le fond de l'âme apparaît surtout dans le purgatoire avant la mort, que traversent les âmes les plus généreuses pour arriver à l'union divine dès ici-bas. Dans ce purgatoire leur charité s'enracine de plus en plus dans le fond de l'âme, et finit par y détruire tout amour déréglé de soi-même.
Celui-ci est comme une mauvaise racine de chiendent qui tend toujours à repousser. Il faut que cette mauvaise racine reçoive le coup de mort pour que la charité règne tout à fait dans le fond de l'âme.
Ce purgatoire avant la mort est celui des purifications passives des sens et de l'esprit. Celles-ci ont en effet pour but de purifier précisément le fond de nos facultés, d'y porter le fer et le feu pour en extirper les germes de mort ; elles sont ainsi un purgatoire anticipé pendant lequel on mérite, tandis qu'on ne mérite pas dans l'autre après la mort.
Un simple coup d'oeil sur ces purifications passives permet d'entrevoir les profondeurs de nos facultés supérieures que Dieu peut remplir ou véritablement combler.
Comme le dit saint Jean de la Croix (Nuit obscure, 1. I, c. 3) : « Malgré toute sa générosité, l'âme ne peut arriver à se purifier complètement elle-même, elle ne peut se rendre apte le moins du monde à l'union divine dans la perfection de l'amour. Il faut que Dieu y mette la main et la purifie dans un feu obscur pour elle ».
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 22 Nov - 7:38 | |
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CHAPITRE VI LE PURGATOIRE AVANT LA MORT ET LE FOND DE L'AME : LA NUIT DE L'ESPRIT
Tout d'abord on est sevré des consolations sensibles utiles un moment, mais qui deviennent un obstacle lorsqu'on les recherche pour elles-mêmes avec une sorte de gourmandise spirituelle.
D'où la nécessité de la purification passive des sens, qui met l'âme dans l'aridité sensible et la porte à une vie spirituelle beaucoup plus dégagée des sens, de l'imagination, du raisonnement.
Par les dons du Saint-Esprit, en particulier par le don de science, on reçoit une connaissance intuitive et expérimentale de la vanité des choses terrestres, et par contraste de la grandeur de Dieu.
Pour résister aux tentations, qui se présentent alors assez souvent, il faut aussi des actes très méritoires sinon héroïques de chasteté et de patience.
Il arrive qu'on est purifié par la perte de certaines amitiés, par la perte de la fortune, ou par la maladie, par des épreuves familiales, par exemple pour une personne mal mariée, obligée constamment à des actes très méritoires.
Cette purification passive des sens a pour but de les soumettre pleinement à nos facultés supérieures.
Mais celles-ci ont aussi besoin d'une purification passive profonde : « Les taches du vieil homme, dit saint Jean de la Croix, persistent en effet dans l'esprit, bien qu'il ne s'en doute pas.
Il faut qu'elles disparaissent et cèdent au savon et à la forte lessive de la purification passive de l'esprit, sans quoi la pureté requise pour l'union fera toujours défaut ». (Nuit obscure, 1. II, c. 2).
Les avancés se recherchent encore inconsciemment eux-mêmes et parfois beaucoup ; ils sont très attachés à leur jugement propre, à leur manière particulière de faire le bien ; ils sont trop sûrs d'eux-mêmes; « le démon se plaît à les duper, à les porter à la présomption, et ces défauts sont parfois d'autant plus incurables, qu'ils les prennent pour des perfections spirituelles ». (Ibid).
Ce sont les défauts que les autres voient en nous et que nous ne voyons pas, car nous sommes trompés par notre amour-propre.
La purification de l'esprit est donc indispensable ; c'est un purgatoire avant la mort, pour purifier de tout alliage l'humilité et les trois vertus théologales.
Elle procède d'une lumière infuse, qui est surtout une illumination du don d'intelligence et qui nous paraît obscure, parce qu'elle est trop forte pour les faibles yeux de notre esprit, comme la lumière du soleil pour l'oiseau de nuit.
Elle nous manifeste de plus en plus l'infinie grandeur de Dieu, supérieure à toutes les idées que nous pouvons nous faire de lui ; et d'autre part elle nous montre notre défectibilité et nos déficiences, qui vont beaucoup plus loin que nous ne pensons.
Alors l'humilité devient vraiment l'humilité du coeur; vouloir être rien, s'y complaire pour que Dieu soit tout, « amare nesciri et pro nihilo reputari ».
Il y a ici généralement de fortes tentations contre les vertus théologales pour mettre l'âme dans la nécessité de faire des actes héroïques de ces vertus les plus hautes.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 22 Nov - 16:31 | |
| A LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE MÈRE DE DIEU patronne de la bonne mort en signe de profonde gratitude et d'humble obéissance.
CHAPITRE VI LE PURGATOIRE AVANT LA MORT ET LE FOND DE L'AME : LA NUIT DE L'ESPRIT
Aussi cette purification de l'esprit met en un puissant relief le motif formel des trois vertus théologales très au-dessus de tout motif secondaire qui semble disparaître.
Elle nous oblige à faire des actes très purs et très méritoires de ces vertus qui par là même se développent grandement en nous. Elle nous oblige à croire, en l'absence de toute autre raison, pour ce seul et unique motif : Dieu l'a dit. Elle nous fait adhérer de plus en plus fermement à la Vérité première révélatrice dans un ordre immensément supérieurs aux miracles sensibles et aux raisonnements humains qui les discernent.
De même, elle nous oblige à espérer, contre toute espérance humaine, pour ce très pur motif que Dieu tout-puissant et bon est infiniment secourable (Deus auxilians) et n'abandonne pas le premier. Enfin cette purification nous porte à l'aimer, non pas pour les consolations sensibles ou spirituelles qu'il nous accorde, mais pour Lui-même à cause de son infinie bonté, par dessus tout et plus que nous, puisqu'il est infiniment meilleur que nous. On est aussi conduit à aimer le prochain malgré ses ingratitudes pour l'aider à se sauver.
Alors les trois motifs formels des vertus théologales : Vérité première révélatrice, toute puissance auxiliatrice, infinie Bonté souverainement aimable en soi, apparaissent comme trois étoiles de première grandeur dans la nuit de l'esprit pour nous guider vers la vie éternelle. Cf. Vie de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, fin c. 9.
Elle est passée par cette nuit les dernières années de son existence . On cite comme exemple de purification passive de l'esprit ce fait que saint Vincent de Paul, ayant accepté de souffrir pour un autre prêtre tourmenté dans sa foi, fut lui-même pendant 4 ans assailli de tentations contre la foi si fortes, qu'il écrivit le Credo sur un parchemin qu'il mit sur son coeur et chaque fois que la tentation était véhémente, il pressait le Credo sur son coeur pour s'assurer qu'il ne consentait pas.
Au bout de ces 4 ans, la foi de saint Vincent de Paul, à la suite de tous ces actes héroïques, devait être centuplée et devint de plus en plus rayonnante.
On lit dans la vie de saint Paul de la Croix, fondateur des Passionnistes, qu'il passa par une épreuve semblable durant 45 ans, mais cette épreuve fut surtout réparatrice pour les pécheurs, car il était déjà lui-même très purifié, arrivé à l'union transformante, mais il fondait un Ordre voué à la réparation.
Cette purification passive de l'esprit conduit à la mort mystique, à la mort du moi fait d'amour-propre, d'orgueil spirituel ou intellectuel, subtil, peu conscient, à la mort de l'égoïsme, principe de tout péché.
Finalement dans le fond de la volonté la mauvaise racine est extirpée et c'est l'amour de Dieu et du prochain qui y règne incontestablement, selon le précepte suprême : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toutes tes forces, de tout ton esprit ». DEUTER., VI, 5 ; Luc, X, 27.
L'âme est passée par le purgatoire avant la mort physique, elle y est passée en méritant, tandis que dans l'autre purgatoire, après la mort, on ne mérite plus.
Alors vraiment l'âme est spiritualisée, surnaturalisée, en son fond, d'où toute sa vie spirituelle procède et auquel tout aboutit.
Elle aspire de plus en plus à revenir à son Principe, à rentrer dans « le sein du Père », c'est-à-dire dans les profondeurs de Dieu ; elle aspire de plus en plus à le voir sans aucun intermédiaire. Elle expérimente de mieux en mieux que Lui seul peut la combler.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 23 Nov - 17:32 | |
| A LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE MÈRE DE DIEU patronne de la bonne mort en signe de profonde gratitude et d'humble obéissance.
CHAPITRE VI LE PURGATOIRE AVANT LA MORT ET LE FOND DE L'AME : LA NUIT DE L'ESPRIT
Alors chez les grands Saints se réalise ce que dit saint Augustin : « L'amour de Dieu est poussé jusqu'au mépris de soi ». Cette héroïcité se manifeste surtout par l'amour de la croix. On lit dans les Actes des Apôtres, V, 41 : qu'après la Pentecôte ils furent jetés en prison et « qu'ils sortirent du Sanhédrin joyeux d'avoir été jugés dignes de souffrir des opprobres pour le nom de Jésus, et chaque jour dans le temple et dans les maisons, ils ne cessaient d'annoncer Jésus comme le Christ ».
Ils l'annoncèrent jusqu'au martyre, et leur sang répandu avec celui de milliers d'autres martyrs fut « une semence de chrétiens ». - « L'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi » avait finalement triomphé de « l'amour de soi poussé jusqu'au mépris de Dieu ».
Telle fut la cause de la diffusion de l'Évangile, de la conversion du monde païen, et ensuite de la conversion des barbares.
De même aujourd'hui, seule la sainteté, seule une pléiade de saints peut ramener les masses vers le Christ et l'Église. Les aspirations démocratiques telles que les a conçues Lamennais et bien d'autres n'y suffiraient certes pas.
Il faut la charité surnaturelle d'un saint Vincent de Paul, qui se propose pour fin dernière, non pas la félicité terrestre du peuple et des peuples, mais la vie éternelle véritable, de façon à ce que celle-ci ne soit pas seulement un mot vénéré, mais la réalité suprême, ou Dieu éternellement possédé.
DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
Dans cette deuxième partie nous considérerons :
1° l'impénitence finale 2° la bonne mort 3° l'immutabilité de l'âme soit dans le bien, soit dans le mal, après la mort 4° la connaissance de l'âme séparé 5° le jugement particulier
CHAPITRE I L'IMPÉNITENCE FINALE ET LES CONVERSIONS IN EXTREMIS
Comme toute notre vie de l'éternité dépend de l'état de notre âme au moment de la mort, il faut parler ici de l'impénitence finale, qui s'oppose à la bonne mort et par contraste, des conversions in extremis.
L'impénitence est, chez un pécheur, l'absence ou la privation de la pénitence qui devrait détruire en lui les conséquences morales du péché ou de la révolte contre Dieu.
Ces conséquences du péché sont l'offense faite à Dieu, la corruption de l'âme révoltée et désaxée, les justes châtiments qu'elle a mérités.
La destruction des suites du péché se fait par la réparation satisfactoire, c'est-à-dire par la douleur d'avoir offensé Dieu, et par une compensation expiatrice. Comme l'explique saint Thomas IIIa. q. 84, a. 5, et 85, ces actes de la vertu de pénitence sont pour le pécheur de nécessité de salut, ils sont exigés par la justice et la charité envers Dieu, et aussi par la charité envers nous-mêmes.
L'impénitence est l'absence de contrition et de satisfaction ; elle peut être temporelle, au cours de la vie présente, ou finale, au moment de la mort.
Il faut lire le sermon de Bossuet sur l'endurcissement, qui est la peine des péchés précédents. (Avent de saint Germain et Défense de la Tradition, I. XI, c. IV, V, VI, VII, VIII).
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 24 Nov - 17:37 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
CHAPITRE I L'IMPÉNITENCE FINALE ET LES CONVERSIONS IN EXTREMIS
Comme toute notre vie de l'éternité dépend de l'état de notre âme au moment de la mort, il faut parler ici de l'impénitence finale, qui s'oppose à la bonne mort et par contraste, des conversions in extremis.
L'impénitence est, chez un pécheur, l'absence ou la privation de la pénitence qui devrait détruire en lui les conséquences morales du péché ou de la révolte contre Dieu. Ces conséquences du péché sont l'offense faite à Dieu, la corruption de l'âme révoltée et désaxée, les justes châtiments qu'elle a mérités.
La destruction des suites du péché se fait par la réparation satisfactoire, c'est-à-dire par la douleur d'avoir offensé Dieu, et par une compensation expiatrice. Comme l'explique saint Thomas IIIa. q. 84, a. 5, et 85, ces actes de la vertu de pénitence sont pour le pécheur de nécessité de salut, ils sont exigés par la justice et la charité envers Dieu, et aussi par la charité envers nous-mêmes.
L'impénitence est l'absence de contrition et de satisfaction ; elle peut être temporelle, au cours de la vie présente, ou finale, au moment de la mort. Il faut lire le sermon de Bossuet sur l'endurcissement, qui est la peine des péchés précédents. (Avent de saint Germain et Défense de la Tradition, I. XI, c. IV, V, VI, VII, VIII).
QU'EST-CE QUI DISPOSE A L'IMPÉNITENCE FINALE ?
C'est l'impénitence temporelle. Celle-ci se présente sous deux formes très différentes : l'impénitence de fait est simplement l'absence de repentir ; l'impénitence de volonté est la résolution positive de ne pas se repentir des péchés commis. En ce dernier cas, il y a le péché spécial d'impénitence, qui, à son degré le plus grave, est un péché de malice, celui qu'on commet par exemple en signant un engagement d'enterrement civil.
La différence certes est grande entre ces deux formes, cependant si l'âme est saisie par la mort dans le simple état d'impénitence de fait, il y a pour elle impénitence finale, sans qu'elle s'y soit préparée directement par un péché spécial d'endurcissement.
L'impénitence temporelle de volonté conduit directement à l'impénitence finale, bien que parfois le Seigneur par une Miséricorde spéciale préserve de celle-ci. Dans cette voie de perdition on peut arriver à vouloir délibérément et froidement persévérer dans le péché et repousser la pénitence qui délivrerait.
C'est alors, comme le dit saint Augustin et saint Thomas, IIa, IIae, q. 14, non seulement un péché de malice, mais un péché contre le Saint-Esprit, c'est-à-dire un péché qui va directement contre ce qui relèverait le pécheur.
Celui-ci doit donc faire pénitence au temps voulu, par exemple au temps de la Communion pascale, autrement il tombe de l'impénitence de fait dans celle de la volonté, au moins par omission délibérée. Il est d'autant plus nécessaire de revenir à Dieu qu'on ne peut pas, dit saint Thomas, rester longtemps dans le péché mortel, sans en commettre de nouveaux, qui accélèrent la chute, Ia, IIae, q. 109, a. 8.
Aussi ne faut-il pas attendre pour se repentir. L'Écriture nous presse de le faire sans tarder : « N'attends pas jusqu'à la mort, pour t'acquitter ». Eccli., XVIII, 21 ; saint Jean-Baptiste par sa prédication ne cessait de dire la nécessité urgente du repentir, LUC, III, 3.
- De même jésus dès le début de son ministère : « Repentez-vous et croyez à l'Evangile » MARC, I, 15. Plus tard il dit encore : « Si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous ». Luc, XIII, 5. Saint Paul écrit aux ROM. II, 5 : « Par ton endurcissement et l'impénitence de ton coeur, tu t'amasses un trésor de colère pour le jour de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses oeuvres ».
Dans l'Apocalypse, ii, 16, il est dit à l'ange de l'Église de Pergame : « Repens-toi ! si non, je viendrai à toi promptement », c'est la visite de la justice divine qui est ainsi annoncée, si l'on n'a pas tenu compte de la visite de la Miséricorde.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 25 Nov - 17:17 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
QU'EST-CE QUI DISPOSE A L'IMPÉNITENCE FINALE ?
Les degrés de l'impénitence temporelle volontaire sont nombreux, on l'a souvent remarqué Cf. SAINT THOMAS Ia, IIa, q. 76-78 ; IIa, IIae, q. 15, a. I. Dict. théol. cath. art. Impénitence, c. 1283.. En partant des moins graves, qui sont pourtant déjà très dangereux, il y a celui des endurcis par ignorance coupable, qui sont fixés dans le péché mortel et l'aveuglement qui leur fait constamment préférer les biens d'un jour à ceux de l'éternité ; ils boivent l'iniquité comme de l'eau, avec une conscience endormie ou somnolente, car ils ont toujours gravement négligé de s'instruire de leurs devoirs, de ce qui est nécessaire au salut; ils sont fort nombreux.
Il y a ensuite les endurcis par lâcheté, qui plus éclairés que les précédents et plus coupables, n'ont pas l'énergie de briser les liens qu'ils ont formés en eux-mêmes : liens de la luxure, de l'avarice, de l'orgueil, de l'ambition, et qui ne prient pas pour obtenir cette énergie qui leur manque.
Enfin il y a les endurcis par malice, ceux par exemple, qui, ne priant jamais, se sont révoltés contre la Providence à la suite de quelque malheur, ou encore les viveurs enfoncés dans leurs désordres, qui blasphèment mécontents de tout, et qui devenus matérialistes, parlent encore de Dieu pour l'injurier, finalement les sectaires qui ont la haine satanique de la religion chrétienne et ne cessent d'écrire contre elle.
Il y a beaucoup de différence certes entre les uns et les autres ; mais on ne peut affirmer que pour arriver à l'impénitence finale, il faut avoir été un endurci par malice, ou du moins un endurci par lâcheté ou par ignorance volontaire.
Nous ne pouvons affirmer que Dieu fait Miséricorde à tous les autres pécheurs moins gravement coupables.
Il ne faut pas dire non plus que tous les endurcis par malice seront damnés, car la Miséricorde Divine a converti parfois de grands sectaires qui paraissaient obstinés dans la voie de la perdition.
On lit dans la vie de saint Jean Bosco qu'il vint au lit d'un mourant qui était un franc-maçon, très sectaire. Celui-ci lui dit : surtout ne me parlez pas de religion, autrement voici un revolver dont la balle est pour vous, un autre dont la balle est pour moi.
Mais alors, dit Dom Bosco, parlons d'autre chose, et il lui parla de Voltaire en lui racontant sa vie. Puis vers la fin il dit : « certains disent que Voltaire ne s'est pas repenti et qu'il a fait une mauvaise mort. Je ne le dirai pas, parce que je ne le sais pas. » - « Alors, dit le franc-maçon, même Voltaire a pu se repentir ? » - « Eh oui ». - « Et alors moi aussi je pourrais encore me repentir ? » Et cet homme qui était désespéré parait avoir fait une bonne mort.
- On cite le cas d'un aumônier de prison, qui était saint prêtre, mais qui en assistant un criminel qui ne voulait pas se confesser avant de mourir, finit par lui dire : « Eh bien ! puisque tu veux te perdre, perds-toi». Il fut question de la cause de béatification de cet aumônier, mais elle n'a jamais pu être introduite à cause de cette parole, parce qu'il aurait dû jusqu'au dernier moment parler de la Miséricorde et de la possibilité du retour à Dieu.
Mais les Pères de l'Église et après eux les meilleurs prédicateurs, ont souvent menacé de l'impénitence finale ceux qui refusent de se convertir ou qui remettent toujours leur conversion à plus tard Cf. SAINT AMBROISE, De paenitentia, c. X-XII ; SAINTJÉROME, Epist. 147 ad Sabinianum ; SAINT-AUGUSTIN, Sermons 351, 352, de utilitate agendas paenitestiae ; SAINT JEAN CHRYSOST., 9 homélies sur la pénitence, P. G. t. XLIX, col. 277 SS. ; SAINT BERNARD, De conversione ad clericos ; BOSSUET, Sermon pour le 1er dim. de l'Avent..
Après avoir tant abusé des grâces de Dieu, auront-ils plus tard le secours efficace nécessaire à la conversion ? C'est fort douteux.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Jeu 26 Nov - 16:29 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
LE RETOUR EST DIFFICILE, MAIS RÉELLEMENT POSSIBLE
Il est difficile à cause de l'endurcissement qui suppose l'aveuglement, un jugement perverti et la volonté portée au mal de telle façon qu'elle n'a plus que de faibles mouvements vers le bien. On ne tire plus aucun profit des bons avis, des sermons, on ne lit plus jamais l'Évangile, on ne fréquente plus l'église ; on résiste même aux avertissements salutaires des plus bienveillants ; le coeur devient dur comme une pierre.
C'est l'état de ceux dont parle Isaïe, V, 20-21 : « Malheur à ceux qui appellent le mal bien, et le bien mal, qui font des ténèbres la lumière, et de la lumière les ténèbres, qui font ce qui est doux amer, et ce qui est amer doux ! Malheur à ceux qui sont sages à leurs propres yeux et intelligents à leur propre sens ».
C'est la suite de péchés souvent réitérés, d'habitudes vicieuses, de liaisons criminelles, de lectures par lesquelles on a bu avidement l'erreur en fermant les yeux à la vérité.
Après tant d'abus de grâces, il arrive que le Seigneur refuse au pécheur, non seulement le secours efficace dont est privé tout pécheur ordinaire au moment où il tombe, mais la grâce prochainement suffisante qui rendrait possible l'accomplissement des préceptes.
Cependant le retour à Dieu est encore possible. Le pécheur endurci reçoit encore des grâces suffisantes éloignées, par exemple pendant une mission, ou à l'occasion d'une épreuve; par cette grâce suffisante éloignée il ne peut encore accomplir les préceptes, mais il peut commencer à prier, et s'il n'y résiste pas, il reçoit la grâce efficace pour commencer effectivement à prier.
Cela est certain parce que le salut lui est encore possible, et, contre l'hérésie pélagienne, il ne l'est que par la grâce ; si le pécheur ne résiste pas à cet appel, il sera conduit de grâce en grâce jusqu'à celle de la conversion.
Le Seigneur a dit en effet: « Je ne veux pas la mort de l'impie, mais qu'il se détourne de sa voie et qu'il vive ». EZÉCH., XXXIII, II, 14, 16. Comme le dit saint Paul, I, TIM, II, 4 : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité ».
C'est une autre hérésie, contraire à la précédente, de dire avec Calvin que Dieu par un décret positif prédestine certains à la damnation éternelle, et par suite leur refuse toute grâce.
Il faut dire au contraire avec saint Augustin comme le rappelle le Concile de Trente (Denz. 804) : « Dieu ne commande jamais l'impossible, mais, en nous donnant ses préceptes, il nous avertit de faire ce que nous pouvons, et de lui demander la grâce pour accomplir ce que nous ne pouvons pas ».
Or pour le pécheur endurci il y a encore sur terre, une obligation grave de faire pénitence, ce qui est impossible sans la grâce. Il faut donc conclure qu'il reçoit de temps en temps des grâces suffisantes pour commencer à prier. Le salut est encore possible pour lui.
Mais si le pécheur résiste à ces grâces, il s'enlise, comme celui qui s'aventure sur des sables mouvants, où ses pieds s'enfoncent quand il cherche à se dégager.
La grâce suffisante passe encore de temps à autre comme une brise pour renouveler ses forces, mais s'il continue à y résister, il se prive de la grâce efficace offerte dans la suffisante comme le fruit dans la fleur.
Et alors, aura-t-il plus tard ce secours efficace qui touche le coeur et le convertit véritablement ? Les difficultés augmentent, les forces de la volonté déclinent, et les grâces diminuent.
L'impénitence temporelle volontaire dispose manifestement à l'impénitence finale, quoique la Miséricorde Divine préserve parfois de celle-ci in extremis plusieurs pécheurs endurcis.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 28 Nov - 18:28 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
LA MORT DANS L'IMPÉNITENCE
On peut mourir en état de péché mortel, sans que la pensée d'une telle mort se soit présentée à l'esprit. Ainsi bien des hommes meurent subitement, qui ne se sont jamais repenti des péchés graves qu'ils avaient commis ; on dit qu'après avoir abusé de bien des grâces, ils ont été surpris par la mort ; ils n'avaient pas tenu compte des avertissements reçus. Ils n'ont jamais eu la contrition ni même l'attrition qui avec le sacrement de pénitence les aurait justifiés. Ces âmes sont perdues pour l'éternité. Il y a eu impénitence finale sans le refus spécial et préalable de se convertir au dernier moment.
Si au contraire il y a eu ce refus spécial, c'est l'impénitence finale, acceptée, voulue par le rejet dernier de la grâce offerte, avant la mort, par l'infinie miséricorde. C'est un péché contre le Saint-Esprit qui prend différentes formes : le pécheur recule devant l'humiliation de l'aveu de ses fautes et préfère par suite son malheur personnel, ou il va parfois jusqu'à mépriser explicitement son devoir de justice ou de réparation envers Dieu, en lui refusant l'amour qui lui est dû par le précepte suprême : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toutes tes forces, de tout ton esprit». Luc, X, 27. Ces terribles leçons nous montrent la nécessité du repentir, si différent du remords qui subsiste en enfer sans la moindre attrition.
Les damnés ne se repentent pas de leurs péchés comme faute et offense à Dieu, mais ils voient que c'est à cause d'eux qu'ils sont punis, ils voudraient ne pas souffrir de la peine qui leur est justement infligée, et un ver les ronge, le remords qui naît de la pourriture du péché qu'ils ne peuvent pas ne pas voir et qui les rend mécontents de tout et d'eux-mêmes. Judas a eu le remords, qui laisse dans l'angoisse, mais il n'a pas eu le repentir, qui donne la paix ; il est tombé dans le désespoir au lieu de se confier à l'infinie Miséricorde en demandant pardon Cf. SAINT THOMAS, IIa, IIae, q. 13, a. 4, IIIa, q. 86, a. I. - C. GENTES, 1. IV, c. 89..
Il est donc terriblement dangereux de remettre sa conversion toujours à plus tard . Le Père Monsabré Retraites pascales à Notre-Dame, 1888, 3e instruction à ce sujet dit en substance : « Suprême leçon de prévoyance : 1° Pour profiter de la dernière heure, il faut savoir la reconnaître ; or tout conspire souvent à la dissimuler au pécheur quand il y arrive : ses propres illusions, la lâcheté, la négligence, le manque de sincérité de ceux qui l'entourent. 2° Pour profiter de la dernière heure, si on la sent venir, il faut vouloir se convertir ; or il est grandement à craindre que le pécheur ne le veuille pas.
La tyrannie de l'habitude donne aux derniers vouloirs le cachet de l'irrésolution. Les délais calculés du pécheur ont altéré sa foi et l'ont aveuglé sur son état. D'où il suit que sa dernière heure approche sans qu'il s'en émeuve, et que, dans le fait, il meurt impénitent. 3° Pour profiter de la dernière heure, si l'on veut se convertir, il faut que la conversion soit vraie, et pour cela il faut la grâce efficace.
Or le pécheur retardataire ne tient pas compte de la grâce dans ses calculs, mais seulement de sa volonté. S'il compte sur la grâce, il fait tout ce qu'il peut pour l'écarter de son dernier moment, en spéculant lâchement sur la Miséricorde de Dieu. Et alors arrivera- t-il au véritable regret de l'offense faite à Dieu, à un vrai et généreux repentir. Le pécheur attardé ne sait plus ce que c'est que la pénitence, il court grand risque de mourir dans son péché.
D'où la conclusion : s'assurer dès maintenant le bénéfice d'une vraie pénitence, pour n'avoir pas à craindre de la manquer quand elle devra décider de notre éternité ». N'oublions pas que l'attrition, qui dispose à bien recevoir le sacrement de pénitence et qui justifie avec lui, doit être surnaturelle.
Selon le Concile de Trente, elle suppose la grâce de la foi, celle de l'espérance, et elle doit détester le Péché comme offense à Dieu, (Dens. 798). Or cela suppose probablement comme le baptême des adultes un amour initial de Dieu, comme source de toute justice (Dens. 798). On ne peut en effet détester le mensonge sans aimer la vérité, ni détester l'injustice sans commencer à aimer la justice et Celui qui est source de toute justice.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 28 Nov - 18:29 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT LES CONVERSIONS IN EXTREMIS
Rappelons cependant pour finir que, même pour les endurcis qui ne donnent aucun signe de contrition avant de mourir, nous ne pouvons affirmer qu'au tout dernier moment, juste avant la séparation de l'âme et du corps, ils se sont définitivement obstinés.
Ils ont pu se convertir à la dernière minute de telle façon que Dieu seul a pu le savoir. Le Saint Curé d'Ars, divinement éclairé, dit à une veuve venue pour la première fois dans son église et qui priait en pleurant : « Votre prière, Madame, est entendue ; votre mari est sauvé ; quand il venait de se jeter dans le Rhône, la Sainte Vierge lui a obtenu la grâce de la conversion juste avant de mourir.
Rappelez-vous qu'un mois auparavant, dans votre jardin, il a cueilli la plus belle rose et vous a dit : « porte-la à l'autel de la Vierge Sainte. Elle ne l'a pas oublié ». - D'autres se sont convertis in extremis qui ne se rappelaient avoir fait que quelques actes religieux au cours de leur vie, comme par exemple, un marin avait conservé l'habitude de se découvrir en passant devant une église ; il ne savait même plus le Pater ni l'Ave Maria, mais il restait encore ce lien qui l'empêchait de s'éloigner définitivement de Dieu.
On lit dans la vie du Saint Évêque de Tulle, Mgr Bertau, ami de Louis Veuillot, qu'une pauvre fille de cette ville, qui avait été chanteuse à la cathédrale, tomba dans la misère, puis dans l'inconduite, comme pécheresse publique et qu'elle fut assassinée une nuit dans une rue de Tulle ; la police la trouva expirante et la porta à l'hôpital ; en y arrivant elle mourut en disant : «Jésus, Jésus ! » On demanda à l'évêque : « faut-il lui donner la sépulture ecclésiastique ? » Il répondit : « Oui, puisqu'elle est morte en prononçant le nom de Jésus, mais enterrez-la le matin de très bonne heure, et sans faire l'encensement ».
On trouva dans la pauvre chambre de cette malheureuse le portrait du saint évêque de Tulle, au verso duquel elle avait écrit : « Le meilleur des pères ». Quoiqu'elle fut bien tombée, elle avait reconnu la sainteté de son Évêque, et elle avait conservé en son cœur le souvenir des bontés de Notre Seigneur.
De même un écrivain licencieux, Armand Sylvestre, promit à sa mère, lorsqu'elle mourut, de dire chaque jour un Ave Maria, et chaque jour de ce bourbier qu'était la vie de ce malheureux écrivain s'élevait cette fleur de « l'Ave Maria ».
Il tomba gravement malade, d'une pneumonie, on le porta dans un hôpital de Paris desservi par des religieuses, qui lui dirent : « Voulez-vous un prêtre ». - « Certainement » répondit-il, et il reçut l'absolution, probablement avec une attrition suffisante, par une grâce spéciale que dut lui obtenir la Sainte Vierge. Mais il a dû subir ensuite un long et très dur purgatoire.Un autre écrivain français Adolphe Retté, peu après sa conversion, sincère et profonde, fut frappé de voir dans un Carmel cette pancarte « Priez pour ceux qui vont mourir pendant la messe à laquelle vous allez assister ». Il le fit.
Quelques jours après il tomba gravement malade et fut cloué sur un lit d'hôpital à Beaune plusieurs années jusqu'à sa mort. Chaque jour, le matin il offrait toutes ses souffrances pour ceux qui allaient mourir dans la journée ; il obtint beaucoup de conversions in extremis. Nous verrons au ciel combien dans le monde ont été nombreuses ces conversions et nous chanterons éternellement les Miséricordes de Dieu.
On cite aussi dans la vie de sainte Catherine de Sienne la conversion in extremis de deux grands criminels. La Sainte était allée voir une de ses amies, et l'on entendit dans la rue où habitait cette amie, un grand bruit ; l'amie de sainte Catherine regarda par la fenêtre et vit que c'étaient deux condamnés à mort qu'on conduisait sur une charrette au dernier supplice, en les tourmentant avec des tenailles rougies au feu, ils blasphémaient et hurlaient. Aussitôt sainte Catherine, à l'intérieur de la maison où elle était, se mit en prière, à genoux les bras en croix et demanda la conversion de ces deux criminels.
Source : Livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 29 Nov - 18:54 | |
| DEUXIÈME PARTIE LA MORT ET LE JUGEMENT
LES CONVERSIONS IN EXTREMIS
Alors dans la rue aussitôt ils cessèrent de blasphémer, et demandèrent à se confesser. Les gens qui étaient dans la rue ne pouvaient comprendre ce changement subit ; ils ne savaient pas qu'une Sainte avait prié pour obtenir cette double conversion.
Il y a une soixantaine d'années l'aumônier de la prison de Nancy qui avait pu jusque là convertir tous les criminels qu'il avait conduits à la guillotine, se trouvait dans une voiture cellulaire avec un assassin qui refusait de se confesser avant la mort. La voiture passa devant un sanctuaire de Notre-Dame du Bon Secours.
Alors le vieil aumônier dit : « Souvenez-vous ô très pieuse et douce Vierge Marie qu'on n'a jamais entendu dire qu'aucun de ceux qui ont eu recours à votre intercession aient été abandonnés. Convertissez mon criminel, autrement moi je dirai qu'on a entendu dire que vous ne nous avez pas exaucés ». Et aussitôt le criminel se convertit.
Le retour à Dieu est toujours possible jusqu'à la mort, mais il devient de plus en plus difficile avec l'endurcissement. Alors ne remettons jamais à plus tard notre conversion, et demandons tous les jours par l'Ave Maria la grâce de la bonne mort.
CHAPITRE II LA GRACE DE LA BONNE MORT
Au sujet de la bonne mort, il convient de parler d'abord de la grâce de la persévérance finale et ensuite de la façon dont le juste se prépare à la recevoir.
LE DON INSIGNE DE LA PERSÉVÉRANCE FINALE
Ce don se définit : celui qui fait coïncider le moment de la mort avec l'état de grâce, continué ou restitué. Voyons ce qu'en disent l'Écriture et la Tradition, puis l'explication qu'en fournit la théologie selon saint Thomas.
Cf.SAINT AUGUSTIN, De dono perseverantiae, c.13,14,17.- SAINT THOMAS, Ia, IIae, q. 109, a. I, 2, 4, 9, 10 ; q. 114, a. 9 ; IIa, IIae, q. 137, a. 2..
Commentaires de Cajetan, de Jean de saint Thomas, des Salmanticennes, de Gonet, de Billuart, d'Ed. Hugon. - Dict. théol. cath. art. Persévérance finale (A. MICHEL) c. 1292-1304.
L'Écriture attribue à Dieu la coïncidence de la mort avec l'état de grâce. Dans le livre de la Sagesse, IV, II-14, au sujet de la mort du juste opposée à celle de l'impie, il est dit : « Son âme était agréable à Dieu, c'est pourquoi le Seigneur s'est hâté de le retirer du milieu de l'iniquité » où il aurait pu se perdre. Dans le Nouveau Testament saint Pierre écrit I PETR., V, 10 : « Le Dieu de toute grâce, qui nous a appelés par le Christ Jésus à son éternelle gloire, vous perfectionnera lui-même, vous fortifiera, vous affermira ».
Saint Paul dit aussi, PHIL., I, 6 : « Celui qui a commencé en vous la bonne oeuvre, la perfectionnera jusqu'au jour du Christ. » De même aux ROMAINS, VIII, 28-33 : « Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son éternel dessein... Ceux qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés, et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés et ceux qu'il a justifiés, il les a glorifiés » ; ce qui suppose qu'il leur a conservé la grâce qui justifie. Cf. ROM. IX, 14-24 : « Il a dit à Moise : « Je ferai Miséricorde à qui je veux faire Miséricorde, et j'aurai compassion de qui je veux avoir compassion ». De fait le don de la persévérance finale est accordé à tous les élus.
Saint Augustin dans son livre De dono perseverantiae, c. 13, 14, 17 montre tant pour les enfants que pour les adultes, que le fait de mourir en état de grâce est un insigne bienfait de Dieu. Pour les adultes ce don fixe leur choix volontaire et méritoire dans le bien et les empêche de se laisser abattre par l'adversité. Tout prédestiné aura ce don, mais nul ne peut savoir, sans une révélation spéciale, s'il persévérera ; aussi devons-nous « faire notre salut avec crainte et tremblement ».
Saint Augustin dit enfin, ibid., c. 13, que ce don ne nous est pas accordé selon nos mérites, mais selon la volonté très secrète, très sage et bienfaisante de Dieu, à qui seul il appartient d'imposer quand il lui plaît, un terme à notre vie. Mais, si ce don ne peut être mérité, il peut être obtenu par nos supplications, « suppliciter emereri potest » ibid., c. 6, no 10.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 30 Nov - 17:41 | |
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LE DON INSIGNE DE LA PERSÉVÉRANCE FINALE
Saint Thomas d'Aquin explique très bien ce dernier point de doctrine, Ia, IIae, q. 114, a. 9. Son enseignement, généralement admis par les théologiens, se réduit à ceci : Le principe du mérite, qui est l'état de grâce, ne peut être mérité, car la cause ne peut être effet d'elle-même.
Or la persévérance finale n'est autre que l'état de grâce conservé par Dieu au moment de la mort. Donc elle ne peut être méritée. Elle dépend seulement de Dieu qui conserve en état de grâce ou qui y remet. Cependant elle peut être obtenue par la prière humble et confiante, qui s'adresse non pas à la justice divine, comme le mérite, mais à la Miséricorde.
D'où vient que nous pouvons mériter la vie éternelle, sans pouvoir mériter la persévérance finale ? C'est que la vie éternelle, loin d'être le principe du mérite, en est le terme et le but.
De fait on l'obtiendra, à condition de ne pas perdre ses mérites. Saint Thomas ajoute au sujet des adultes, IIa, IIae, q. 137, a. 4 : « Comme le libre-arbitre est de soi changeant, même lorsqu'il est guéri par la grâce habituelle, il n'est pas en son pouvoir de se fixer immuablement dans le bien ; cela, il peut le choisir, mais il ne peut pas le réaliser » sans une grâce actuelle spéciale.
Le Concile de Trente (Denz. 8o6, 826, 832) confirme cet enseignement traditionnel. Il enseigne la nécessité d'un secours spécial pour que le juste persévère dans le bien : « Ce secours est un grand don, très gratuit, qu'on ne peut obtenir que de celui, qui, selon saint Paul, ROM., XIV, 4, peut soutenir celui qui est debout et relever celui qui tombe ».
Le Concile ajoute, que sans une révélation spéciale, on ne peut être certain d'avance qu'on recevra ce don ; mais on peut et on doit l'espérer fermement, en luttant contre les tentations et en travaillant à son salut par la pratique des bonnes oeuvres.
Au sujet de l'efficacité de la grâce actuelle accordée aux justes pour un dernier acte méritoire, les thomistes admettent qu'elle est efficace intrinsèquement ou par elle-même sans violenter en rien la liberté qu'elle actualise.
Les Molinistes disent qu'elle est efficace extrinséquement, par notre consentement que Dieu avait prévu par la science moyenne.
- Selon les thomistes, cette prévision poserait une passivité en Dieu, qui deviendrait dépendant dans sa prescience d'une détermination créée, qui ne viendrait pas de lui.
Si l'on ne peut être certain d'avance d'obtenir la grâce de la bonne mort, il y a pourtant des signes de prédestination, surtout les suivants : le souci de se préserver du péché mortel, l'esprit de prière, l'humilité qui attire la grâce, la patience dans l'adversité, l'amour du prochain, l'assistance aux affligés, une dévotion sincère envers Notre Seigneur et sa Sainte Mère.
En ce sens, selon la promesse faite à sainte Marguerite-Marie, ceux qui ont communié en l'honneur du Sacré-Coeur neuf fois de suite le premier vendredi du mois, peuvent avoir la confiance d'obtenir de Dieu la grâce de la bonne mort, et cela sous-entend, bien sûr, que les neuf communions ont été bien faites ; la grâce de les bien faire est un don accordé aux élus par le Sacré-Coeur.
Cf. Dict. de Théol. cath. art. Coeur-Sacré de Jésus (dévotion au), par le Père J. Bainvel, S. J., col. 351: « La promesse est absolue, supposant seulement les communions faites et bien faites évidemment. Ce qui est promis, ce n'est pas la persévérance dans le bien toute la vie ; c'est la persévérance finale, emportant la pénitence et les derniers sacrements dans la mesure nécessaire », voir ibidem le texte original de cette grande promesse du Sacré-Coeur.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 1 Déc - 16:43 | |
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LA MORT DU JUSTE
Dans l'Ancien Testament la mort du juste nous est dépeinte en celle de Tobie, cf. TOBIE, XIV, 10 : « A l'heure de sa mort, Tobie appela auprès de lui son fils, les sept jeunes fils de ce dernier, ses petits-fils et leur dit... « Écoutez maintenant, mes enfants, votre père : Servez le Seigneur dans la vérité, et efforcez-vous de faire ce qui lui est agréable.
Recommandez à vos enfants de pratiquer la justice et de faire des aumônes, de se souvenir de Dieu et de le bénir en tout temps dans la vérité et de toute leur force ».
Dans le livre de l'Ecclésiastique XXXIII, 7-15, il est dit que le juste ne se scandalise pas de l'inégalité des conditions et c'est surtout à sa mort qu'il en juge sagement. « Pourquoi y a-t-il des pauvres et des riches, des infortunés et des fortunés » ?
L'Ecclésiastique répond : «pourquoi un jour (de soleil) l'emporte-t-il sur un jour (pluvieux), alors que la lumière de tous les jours vient du soleil ? C'est la sagesse du Seigneur qui a établi entre eux ces distinctions, qui a institué des saisons diverses.
Parmi les jours, il y en a qu'il a élevés et sanctifiés, ce sont les jours de fête, il y en a qu'il a mis parmi les jours ordinaires. Ainsi tous les hommes viennent de la poussière de la terre, dont Adam a été formé.
Mais c'est avec une très grande sagesse que le Seigneur les a distingués, et les a fait marcher dans des voies différentes.
Il a béni les uns et les a élevés. D'autres il a permis, toléré leur péché et ensuite il les a abaissés ». Il donne à chacun selon ses oeuvres. Le juste voit cela surtout au moment de la mort.
Il est dit dans le même livre de l'Ecclésiastique XXXV, II-17, que Dieu exauce la prière du pauvre surtout lorsque celui-ci va mourir, et il punit les cœurs sans pitié. « Le Seigneur n'a point égard au rang des personnes au détriment du pauvre ; il écoute la prière de l'opprimé et de la veuve.
La prière de l'opprimé pénétrera les nues ; le Seigneur ne fera pas attendre son secours ». Cela se vérifie surtout à la mort du juste, fut-il très pauvre et abandonné de tous. Dieu sera avec lui à la dernière heure. Ces hautes pensées reviennent sans cesse dans l'Ancien Testament et plus encore dans le Nouveau qui voit clairement dans la mort du juste le prélude de la vie éternelle.
Il nous a été donné de voir la mort du juste en un pauvre homme, Joseph d'Estengo, qui habitait avec les siens à un huitième étage près du Campo santo de Rome. Il avait la gangrène aux quatre membres, souffrait beaucoup surtout par le froid, lorsque les nerfs se tordaient avant de mourir.
Pourtant il ne se plaignait jamais et offrait toutes ses souffrances au Seigneur pour le salut de son âme, pour les siens, pour la conversion des pécheurs. Il fut frappé de la phtisie fulminante, on dut le porter à l'autre extrémité de Rome à l'hôpital del Littorio, où après trois semaines environ il mourut dans un parfait abandon, seul, au milieu d'une nuit.
Or à l'instant précis où il mourait son vieux père, très bon chrétien, à l'autre extrémité de la ville entendait la voix de son fils qui lui disait : « Père, je vais au ciel ».
Et son excellente mère rêvait que son fils montait au ciel avec ses mains et ses pieds guéris, comme il sera de fait après la résurrection des morts.
C'est une des grandes grâces de ma vie d'avoir connu ce pauvre qui me fut indiqué par une dame de saint Vincent de Paul, laquelle ajouta : « vous serez heureux de le connaître », vraiment oui, c'était un ami de Dieu ; sa mort l'a confirmé, c'était bien celle du juste. Beati qui in Domino moriuntur.
« Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur » et comme le dit l'Écriture qui goûtent la mort » comme le prélude de l'éternelle vie.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 2 Déc - 17:17 | |
| DEUXIÈME PARTIE
LA MORT ET LE JUGEMENT
COMMENT SE PRÉPARER A LA MORT
Le juste attend la mort et s'y prépare par la vigilance, d'abord dans une crainte respectueuse, en se rappelant les fautes commises et en considérant les expiations à venir. Il a une foi vive en la vie éternelle, qui est le but suprême de son voyage ; elle est surtout pour lui la possession inamissible de Dieu par la vision béatifique, l'union au Christ Rédempteur, à sa Sainte Mère, aux saints, à ceux qu'il a connus et qui sont morts ou mourront chrétiennement.
A cette foi, le juste joint une confiance toujours plus ferme dans le secours de Dieu pour arriver au but, et comme sa charité grandit de jour en jour, « le Saint-Esprit rend témoignage à son esprit qu'il est enfant de Dieu ». ROM., VIII, 16. Par là « la certitude de tendance » que comporte l'espérance s'affermit en lui de plus en plus.
Le juste aussi prend soin de se faire avertir très à l'avance de l'approche du dernier moment. C'est un manque de foi de ne pas oser avertir les malades qu'ils vont mourir, et c'est une faute, on les trompe et on les empêche ainsi de se préparer. Il est bon de s'entendre avec quelqu'un pour s'avertir mutuellement. Il convient enfin qu'en avançant vers le terme, le juste fasse souvent le sacrifice de sa vie en union avec le Sacrifice de la Messe qui perpétue sur l'autel, de façon sacramentelle, celui de la Croix.
Il convient même qu'il fasse ainsi son sacrifice personnel en pensant aux quatre fins du sacrifice : l'adoration pour reconnaître la souveraine excellence de Dieu, auteur de la vie et maître de l'heure de notre mort ; la réparation, pour expier toutes les fautes passées ; la supplication, pour obtenir la grâce de la persévérance finale ; l'action de grâces, pour remercier le Seigneur des bienfaits innombrables qu'il nous avait préparés de toute éternité et que nous avons quotidiennement reçus depuis notre naissance.
Il est bon de faire à l'avance le sacrifice de sa vie en disant souvent comme le conseillait Sa Sainteté Pie X : « Seigneur, mon Dieu, quel que soit le genre de mort qu'il vous plaise de me réserver, dès maintenant de tout coeur et de plein gré, je l'accepte de votre main avec toutes ses angoisses, ses peines, et ses douleurs ».
On se prépare ainsi chaque jour à faire très bien le sacrifice de sa vie au dernier moment, en union avec les messes qui se célébreront alors près ou loin de nous, c'est-à-dire en union avec l'oblation toujours vivante au Coeur du Christ « qui ne cesse d'intercéder pour nous ». HEB., VII, 25.
Et si le juste met en cet acte dernier un grand amour de Dieu, il pourra obtenir la remise d'une grande partie de la peine temporelle due à ses péchés et abréger considérablement son purgatoire. Il convient aussi grandement de faire célébrer la messe pour obtenir la grâce des grâces qui est celle de la bonne mort. Ainsi le chrétien est fortifié par la grâce de l'extrême-onction contre l'horreur naturelle de la mort et contre les tentations de l'ennemi du salut. Dans le regret poignant de quitter ceux qu'il aime, il est consolé enfin par le saint viatique et les prières des agonisants.
Celles-ci sont extrêmement belles, surtout la prière : Proficiscere anima christiana. « Pars de ce monde, âme chrétienne : Au nom de Dieu le Père tout puissant, qui t'a créée. Au nom de Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, qui a souffert pour toi. Au nom du Saint Esprit, qui t'a été donné. Au nom de la glorieuse et Sainte Mère de Dieu, la Vierge Marie. Au nom du Bienheureux Joseph, son époux ; au nom des Anges et des Archanges, des Trônes et des Dominations, des Principautés et des Puissances, des Chérubins et des Séraphins. Au nom des Patriarches et des Prophètes. Au nom des Apôtres, des Évangélistes, des Martyrs, des Confesseurs, des Vierges et de tous les Saints et Saintes de Dieu. Aujourd'hui que ta demeure soit en paix dans la Jérusalem céleste, par Jésus-Christ Notre-Seigneur. Amen ».
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Jeu 3 Déc - 17:55 | |
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LA MORT ET LE JUGEMENT
COMMENT SE PRÉPARER A LA MORT
On dirait que toute l'Église du Ciel vient au devant de l'âme chrétienne qui s'élève en état de grâce de l'Église militante, pour recevoir bientôt son éternelle récompense.
Bossuet dans son Opuscule sur la préparation à la mort montre que les derniers actes doivent être les actes de foi, d'espérance et de charité, fondus pour ainsi dire dans un acte d'abandon parfait.
« O mon Dieu, je m'abandonne à vous ; je n'ai à craindre que de ne pas assez m'abandonner à vous par Jésus-Christ. Je mets la croix de votre Fils entre mes péchés et votre justice. Mon âme pourquoi es-tu triste, et pourquoi te troubles-tu ? Espère en lui et dis-lui de toutes tes forces : O mon Dieu, vous êtes mon salut... Le temps approche où la foi se changera en claire vue. Mon Sauveur, je crois, aidez mon incrédulité et soutenez ma faiblesse... Je n'ai rien à espérer de moi-même, mais vous avez commandé d'espérer en vous... Je me réjouis d'entendre dire que j'irai dans la maison du Seigneur... Quand vous verrai-je, ô le bien unique... Mon Dieu, ma vie et ma force, je vous aime ; je me réjouis de votre puissance, de votre éternité, de votre bonheur.
Bientôt, dans un moment, je serai en état de vous embrasser. Recevez-moi dans votre unité ».
« Pour nous, dit saint Paul, notre patrie c'est le ciel, d'où nous attendons, comme Sauveur, Notre Seigneur Jésus-Christ, qui viendra transformer notre corps humilié pour le rendre semblable à son corps glorieux, par la puissance qui lui assujettit toutes choses... Et que la paix divine, qui surpasse toute intelligence, garde vos coeurs et vos pensées dans le Christ Jésus. » PHILIPP., III, 20, IV, 7.
« Le chrétien, dit encore Bossuet, ibid., expire en paix en s'unissant à l'agonie du Sauveur. Mon Seigneur, je cours à vos pieds au jardin des oliviers : je me prosterne avec vous la face contre terre ; je m'approche autant que je puis de votre saint corps pour recueillir sur le mien le précieux sang qui découle de vos veines. Je prends à deux mains le calice que votre Père m'envoie... Venez, ange consolateur de Jésus-Christ souffrant et agonisant dans mes membres. Fuyez, troupes infernales... Ah ! mon Sauveur, je dirai avec vous : Tout est consommé.
Je remets mon âme entre vos mains. Amen. Mon âme, commençons l'Amen éternel, l'Alleluia éternel, qui sera la joie et le cantique des bienheureux dans l'éternité... Adieu, mes frères mortels ; adieu, sainte Église catholique.
Vous m'avez porté dans vos entrailles, vous m'avez nourri de votre lait ; achevez de me purifier par vos sacrifices, car je meurs dans votre unité et votre foi. Mais, ô Église, point d'adieu pour vous ; je vais vous trouver au ciel, voir votre source, les Apôtres, les martyrs, les confesseurs, les vierges. Je chanterai éternellement avec eux les Miséricordes de Dieu. » -
Saint Jean de la Croix dit : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'amour », sur la sincérité de notre amour de Dieu, de notre amour de notre âme à sauver et sur la sincérité de notre amour du prochain.
CHAPITRE III LA CAUSE DE L'IMMUTABILITÉ DE L'AME SITOT APRÈS LA MORT
Quelle est la raison pour laquelle l'âme est immuablement fixée dans le bien ou dans le mal, sitôt après la mort ? Cette mystérieuse question pourrait être examinée après celle du jugement particulier, car elle s'éclaire mieux par ce que la Révélation nous dit de ce jugement. Cependant en soi le jugement particulier suppose que le temps du mérite est fini, et donc en soi ce terme du mérite doit être considéré d'abord.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 4 Déc - 17:22 | |
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CHAPITRE III
LA CAUSE DE L'IMMUTABILITÉ DE L'AME SITOT APRÈS LA MORT
Voyons ce que nous dit l'Écriture et la Tradition sur le fait et la nature de cette immuabilité de l'âme ; nous verrons ensuite comment les théologiens l'expliquent et nous distinguerons trois conceptions assez différentes de la cause de ce fait.
Cf. SAINT THOMAS, C. Gentes, 1. IV, C. 91, 92, 94, 95 (Commentaire de SILVESTRE DE FERRARE) ; De Veritate, q. 24, a. II. - Ia, q. 64, a. 2 (Comment. de Cajetan) - Salmanticenses, de Gratia, de Merito, disp. I, dub. IV, no 36. - BILLOT, De Novissimis, 1921, p. 33 ; Dict. Théol. cath., art. mort., col. 2492 ss. (A. MICHEL).
LE FAIT DE L'IMMUTABILITÉ, LE TERME DE L'ÉTAT DU MÉRITE
Nous ne parlons pas ici de la question étudiée aujourd'hui par les physiologistes et les médecins : quand y a-t-il mort non seulement apparente, mais réelle ?
Il paraît certain que dans plusieurs cas de mort accidentelle ou subite, la vie latente peut demeurer parfois plusieurs heures dans l'organisme qui était un moment auparavant parfaitement sain ; elle peut durer, semble-t-il, une demi-heure dans les cas de morts provoquées par une maladie qui mine depuis longtemps l'organisme. Nous ne considérons ici que la mort réelle, la séparation de l'âme et du corps.
Or le magistère ordinaire de l'Église enseigne que l'âme humaine sitôt après la mort est jugée sur toutes les actions bonnes ou mauvaises de son existence terrestre, et cela suppose que le temps du mérite est fini. Cet enseignement commun n'a pas été solennellement défini, mais il est fondé sur l'Écriture et la Tradition. Il n'y a plus de mérites après la mort contrairement à ce qu'ont dit beaucoup de protestants.
Déjà dans l'Ancien Testament, il est dit dans le livre de l'Ecclésiastique XI, 28 : « C'est chose facile devant le Seigneur, au jour de la mort, de rendre à l'homme selon ses oeuvres..., à la fin de sa vie ses oeuvres seront dévoilées » ; ce verset 28 de la Vulgate est dans l'original au v. 24. Voir aussi Ecclésiaste, IX, 10. Dans le Nouveau Testament (MATTH., XXV, 13, Luc, XIII, 22, JEAN , V, 29) le jugement dernier porte uniquement sur les actes de la vie présente.
Dans l'Évangile selon saint Luc, XVI, 19-31, il est question du jugement particulier : le mauvais riche et le pauvre Lazare sont jugés uniquement sur les actes de la vie terrestre et irrévocablement : Abraham répond à l'âme du mauvais riche : « entre nous et vous il y a pour toujours un grand abîme ».
De même Jésus dit avant de mourir au bon larron : « Aujourd'hui tu seras avec moi en paradis ». Luc, XXIII, 43. - Notre Seigneur ne cesse de nous exhorter à la vigilance et à la pénitence pour que nous ne soyons pas surpris par la mort ; par exemple après la parabole des vierges sages et des vierges folles il dit : « Veillez donc, car vous ne savez ni le jour, ni l'heure » MATTH., XXV, 13 ; MARC, XIII, 33.Saint Paul dit encore plus explicitement II COR., V, 10 : « Nous tous il nous faut comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu'il a mérité étant dans son corps, selon ses oeuvres, soit bien, soit mal ». - Ibid., VI, 2 : « Voici maintenant le temps favorable, voici le jour du salut ». - GAL., VI, 10 : « Ainsi donc pendant que nous avons le temps, faisons le bien envers tous ». - PHIL., I, 23 : « Je désire mourir et être avec le Christ, ce qui est de beaucoup le meilleur ».
On lit aussi dans l'Épître aux Hébreux, III, 13 : « Exhortez-vous les uns les autres chaque jour, tant que dure ce temps appelé : aujourd'hui ! afin que personne ne s'endurcisse ». De même HÉBR., IX, 27, « Il est arrêté que les hommes meurent une seule lois, après quoi vient le jugement ». Le verset suivant fait allusion au jugement dernier, mais celui-ci aussi portera uniquement sur les actes de la vie présente.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 5 Déc - 17:41 | |
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CHAPITRE III
LE FAIT DE L'IMMUTABILITÉ, LE TERME DE L'ÉTAT DU MÉRITE
Dans l'Évangile de saint Jean IX, 4, Jésus dit : « Il faut tant qu'il est jour que nous fassions les oeuvres de Celui qui m'a envoyé ; la nuit vient où personne ne peut travailler,venit nox, quando nemo potest operari », c'est-à-dire après la mort.
Les Pères ont souvent expliqué dans ce sens ce texte de saint Jean, surtout saint Cyprien, saint Hilaire, saint Jean Chrysostome, saint Cyrille d'Alex., saint Augustin, saint Grégoire le Grand ; Cf. A. DE JOURNEL, Enchiridion patristicum, index théol., n° 584, ces Pères enseignent qu'après la mort on ne peut mériter ni démériter.
C'est manifestement l'enseignement du magistère Ordinaire et universel de 1 Église. Bien qu'il n'y ait pas de définition solennelle sur ce point, il y a des déclarations de l'Église qui sont nettement dans ce sens. Le IIe Concile de Lyon (Denz. 464) dit : « Les âmes de ceux qui meurent en état de péché mortel ou avec le seul péché originel descendent ensuite en enfer (mox post mortem in infernum descendunt), pour y subir des peines inégales. »
On trouve la même expression dans le Concile de Florence (Denz. 693) et dans la Constitution « Benedictus Deus » de Benoît XII (Denz. 531), Léon X (Denz. 778) condamne cette proposition de Luther : « Les âmes du purgatoire ne sont pas certaines de leur salut, du moins pas toutes, et il n'est pas prouvé par l'Écriture, ni par des raisons théologiques qu'elles ne peuvent plus mériter ou grandir dans la charité ».
Enfin le Concile du Vatican se proposait de promulguer cette définition dogmatique « Post mortem, quae est vice nostrae terminus, illico omnes manifestari nos oportet ante tribunal Christi, ut referat unusquisque propria corporis prout gessit, sive bonum, sive malum (II COR., v, 10) ; neque ullus post hanc mortalem vitam relinquitur locus paenitentiae ad justifiE CETTE IMMUTABILITÉ ?cationem ». MANSI, Concil., t. LIII, col. 175.
QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
Des théologiens, comme Scot et Suarez [Cf. SCOT, in II Sent., dist. VII. - SUAREZ, de Angelis,1. III, c. x. 1. VIII, c. x.], ont pensé que l'immutabilité dans le mal ou l'obstination s'explique, pour l'homme et pour le démon, parce que Dieu n'offre plus la grâce de la conversion et que le désespoir, où ils tombent, les confirme dans leur état Quant aux âmes du purgatoire, disent ces auteurs, elles sont préservées du péché par une protection spéciale de la Providence.
Il y a dans cette explication une difficulté ; un grand théologien thomiste, le Cardinal Cajetan [In Iam, q. 64, a. 2, n° 18.], a cherché à expliquer l'obstination de l'homme comme saint Thomas explique celle du démon. Il a dit en substance : L âme humaine dans le premier instant de l'état de séparation de son corps, commence à juger à la manière des esprits purs. Or l'esprit pur a un jugement pratique immuable qui ressemble au jugement immuable de Dieu. Pourquoi ?
Pour Dieu, c'est clair ; parce que de toute éternité il voit tout ce qui arrivera et il n'apprend rien de nouveau qui puisse changer ses décrets éternels. I
l y a, toute proportion gardée, quelque chose de semblable pour l'esprit pur créé. Tandis que nous, dans le temps, nous voyons successivement les divers aspects d'un parti à prendre, tandis qu'après avoir choisi nous apprenons du nouveau et modifions notre choix, l'esprit pur, qui a une connaissance toute intuitive, voit simultanément les divers aspects du parti à prendre, il voit simultanément le pour et le contre, tout ce qui est à considérer, et après avoir librement choisi il n'apprend rien de nouveau qui puisse changer son choix ; dès lors celui-ci reste immuable, et ressemble aux décrets très libres mais immuables de Dieu. Cela tient à la perfection de l'intelligence de l'esprit pur.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 6 Déc - 15:42 | |
| DEUXIÈME PARTIE
CHAPITRE III
QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
Et alors, selon le Cardinal Cajetan, l'âme séparée de son corps, à l'instant même où elle commence sa vie d'âme séparée, choisit immuablement ce qu'elle veut par un tout dernier acte instantané, soit méritoire, soit déméritoire. Alors elle se fixe elle-même dans son choix, et l'on comprend dès lors pourquoi Dieu infiniment bon n'offre plus la grâce de la conversion à l'âme qui s'est obstinée.
Cette opinion du Cardinal Cajetan, si ingénieuse qu'elle soit, n'a pas été acceptée du moins entièrement par les thomistes postérieurs, ni par les autres théologiens. On a répondu : S'il en était ainsi, un pécheur mourant en état de péché mortel pourrait se réconcilier avec Dieu sitôt après la mort, et inversement un juste mort en état de grâce pourrait se perdre, par une faute commise aussitôt après, ce qui paraît contraire au témoignage de l'Écriture. Cette remarque a été faite par Suarez et plusieurs autres.
Les thomistes postérieurs à Cajetan lui ont répondu. Ainsi parlent en particulier Sylvestre de Ferrare in C. Gentes, 1. IV, c. XCV et les Carmes de Salamanque, Cursus theol.: De gratia, de Mérito, disp. I, dub. IV, n° 36.] : « Selon l'Écriture, l'homme ne peut mériter qu'avant la mort, c'est ce qu'expriment surtout ces paroles du Sauveur (JOAN, IX, 4) : « Il faut faire les oeuvres de Celui qui m'a envoyé pendant qu'il est encore jour, car la nuit vient où nul ne peut plus travailler, « avent nox, in qua nemo potest operari ».
Aussi les théologiens admettent communément qu'une des conditions du mérite est d'être un homme encore viator, voyageur ; et c'est donc l'homme qui doit mériter et non pas l'âme séparée du corps.
Et alors quelle est la solution généralement admise par les disciples de saint Thomas ? C'est une solution qui paraît être entre les deux précédentes et au-dessus d'elles, le juste milieu et le sommet qui exprime le mieux la pensée de saint Thomas.
Elle est bien exposée par le grand théologien Sylvestre de Ferrare in C. Gentes, IV, c. 95. Il dit : « Quoique l'âme dans le premier instant de séparation de son corps ait une vue ou appréhension intellectuelle immobile et commence alors à être obstinée dans le mal (ou au contraire fixée dans le bien), cependant à ce moment il n'a plus de démérite (ni de mérite) comme quelques-uns le disent, car le mérite et le démérite n'appartiennent pas à l'âme seule, mais à l'homme viator ; or dans le premier instant de l'état de séparation l'homme n'existe plus, il n'est plus là pour mériter...
Et donc pour l'homme, l'obstination est causée initialement (inchoative) par la vue ou l'appréhension mobile de telle fin (lorsque l'âme est encore unie au corps) et elle est causée d'une façon définitive (completive) par l'immobile appréhension de l'âme dès qu'elle est séparée du corps ». De même pour la fixation immuable dans le bien. Telle paraît bien être la pensée de saint Thomas [Cf. C. Gentes, 1. IV, c. XCV, et De Veritate, q. 24, a. II.].
L'Écriture a dit en ce sens : « Si un arbre tombe au midi ou au nord, il reste à la place où il est tombé » (ECCLÉSIASTE, XI, 3).
Cette solution paraît contenir dans une synthèse supérieure ce qu'il y a de vrai dans les deux précédentes : 1° L'obstination dans le mal ou la fixation dans le bien sont causées initialement par le dernier démérite ou le dernier mérite de l'âme unie au corps ; 2° elles sont causées de façon définitive par l'immobile appréhension ou intuition de l'âme séparée, qui adhère alors immuablement à ce qu'elle a choisi. Bref : l'âme commence à se fixer par le dernier acte libre de la vie présente, et elle achève de se fixer par sa manière immuable de juger et de vouloir librement au premier instant après la mort. Elle s'immobilise ainsi elle-même dans son propre choix. Dès lors ce n'est pas un manque de Miséricorde de la part de Dieu de ne plus offrir la grâce de la conversion à l'âme ainsi obstinée.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 7 Déc - 17:21 | |
| DEUXIÈME PARTIE CHAPITRE III QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
On objecte : la liberté du deuxième acte à l'instant précis qui suit la mort est diminuée puisque cet acte est toujours conforme au précédent.
A cela il faut répondre que la liberté de ce second acte est diminuée en effet pour le pécheur qui ne s'est pas repenti avant la mort, car comme il est dit en saint Jean, VIII, 34 : « celui qui pèche, est esclave du péché ».
Mais au contraire pour le juste mort en état de grâce, la liberté de l'acte qu'il fait sitôt après la mort est plus grande, car la liberté qui est une suite de l'intelligence, grandit avec la lucidité de celle-ci ; ainsi la liberté de l'ange et plus encore celle de Dieu est plus grande que la nôtre; et cependant l'élection souverainement libre de Dieu est posée de façon immuable et ne change plus. Il en sera de même de notre acte libre posé sitôt après la mort, il ne changera plus.
Quand plus tard au jugement dernier l'âme reprendra son corps, elle ne changera plus, car elle se sera déjà immobilisée elle-même dans son choix, et elle; n'apprendra rien de nouveau sur la fin dernière, en reprenant son corps. Elle ne changera donc pas son choix.
C'est plus facile à comprendre pour l'immutabilité dans le bien, mais il en est de même pour l'obstination dans le mal. Seulement les mystères d'iniquité sont plus obscurs que les mystères de grâce ; car ces derniers en eux-mêmes sont souverainement lumineux, tandis que les autres sont les ténèbres mêmes.
L'entrée dans l'état de séparation du corps fixe à jamais le choix librement déterminé avant la mort, comme l'hiver le grand froid fixe sur les vitres le brouillard en figures variées ; le givre est précisément le brouillard qui se dépose sous forme de glace immobile. Mais la meilleure image ou métaphore est celle de l'Écriture : « Si un arbre tombe au midi ou au nord (c'est son dernier mouvement) il reste (immobile) à la place où il est tombé. »
On peut compléter cette doctrine par ce que dit saint Thomas au Contra Gentes, IV, c. 95. Le Saint Docteur y montre que chacun juge pratiquement selon son penchant, et surtout selon son inclination à ce qu'il a choisi comme fin ultime ; ainsi l'ambitieux, juge selon l'inclination de l'orgueil, et l'humble selon son penchant à l'humilité.
Or notre inclination vers la fin ultime choisie par nous peut changer tant que l'âme est unie au corps (qui lui a été donné pour qu'elle tende à sa fin), mais cette inclination ne change plus après la séparation du corps, car l'âme juge alors d'une façon immuable selon cette inclination même et elle est dès lors fixée dans son choix. L'humble continue à juger définitivement selon le penchant de la vertu ; l'orgueilleux continue de. juger toujours selon son orgueil, avec une amertume qui ne finira pas ; son jugement est à jamais perverti et par là même son choix volontaire dans lequel il s'obstine.
Et même si Dieu lui offrait l'unique voie de retour qui est celle de l'humilité et de l'obéissance, l'obstiné refuserait cette unique voie.
Il y a quelque chose d'un peu semblable dans la vie présente, une maladie congénitale reste toute la vie ; de même assez souvent quand on entre bien ou mal dans un état de vie permanent. Par exemple, si l'on entre très chrétiennement dans l'état de mariage, la bonne disposition qu'on avait en y entrant est confirmée ; et aussi souvent hélas, si on y entre mal, la mauvaise disposition persiste et devient habituelle. De même si l'on entre pour un excellent motif en religion, et malheureusement aussi si on y entre pour un motif humain. Voir plus loin, chap. VI : la connaissance de l'âme séparée, chapitre où se confirme ce que nous venons de dire.
On a objecté encore : mais les damnés, du fait qu'ils sont instruits par leur malheur, pourraient revenir sur leur jugement pratique et sur leur choix, qui reste libre.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 8 Déc - 17:28 | |
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CHAPITRE III
QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
La théologie répond avec saint Thomas [Supplementum, q. 98, a. 2.] : les damnés ne sont pas instruits pratiquement et effectivement par leur malheur.
Sans doute ils voudraient ne pas souffrir, mais ils ne veulent pas non plus revenir vers Dieu, car il n'y aurait qu'une route possible, celle de l'humilité et de l'obéissance, et ils ne veulent pas de cette route ; si le Seigneur la leur ouvrait, ils ne la prendraient pas. Ils ne regrettent pas leurs péchés comme faute, dit saint Thomas [Ibid.], mais seulement comme cause de leurs souffrances. Ils n'ont pas le repentir qui porte à demander pardon, ils n'ont que le remords qui les laisse dans la révolte. Et il y a un abîme entre les deux.
On objecte encore : mais il est incroyable que le démon lui-même ait préféré son isolement orgueilleux à la béatitude surnaturelle, à la vision de Dieu, qui est un bien infiniment supérieur aux joies amères de l'orgueil.
La théologie répond encore en s'appuyant sur la Révélation (Cf. SAINT THOMAS, Ia, q. 63, a. 3.), le démon, si étonnant que cela puisse paraître, a préféré sa vie intellectuelle naturelle dont il s'est grisé, sa béatitude naturelle et son isolement orgueilleux, plutôt que de tendre par la voie de l'humilité et de l'obéissance à la béatitude surnaturelle, qu'il ne pouvait recevoir que de la grâce de Dieu et qu'il aurait reçue en commun avec des hommes inférieurs à lui.
C'est le propre de l'orgueilleux de se complaire en sa propre excellence, au point de rejeter tout ce qui paraît la restreindre.
De fait on trouve même des hommes qui préfèrent l'étude des mathématiques ou de la philosophie rationaliste à l'Évangile qui est pourtant incomparablement supérieur.
Ils la préfèrent au point de nier tous les miracles qui confirment l'Évangile et la vie de l'Église, et parfois ils persévèrent toute leur vie dans leur négation On leur cite les miracles du Christ, ceux des saints modernes, ceux de Lourdes.
Ils répondent : mais tout le monde fait des miracles. Ils ne veulent pas voir avec quel sérieux sont examinés par les médecins et les théologiens les miracles requis par la Sacrée Congrégation des rites pour la béatification et canonisation des serviteurs de Dieu.
Il serait pourtant facile de s'instruire sur le sérieux d'un tel examen, qui rejette beaucoup de miracles probables, pour ne retenir que les certains..
D'autres comme Lamennais se séparent de l'Église parce qu'ils veulent la défendre à leur manière, et non pas comme elle doit être défendue ; ils se croient plus sages qu'elle, et après s'être exaltés, les malheureux tombent par orgueil.
Cela permet d'entrevoir ce qu'a été le péché de l'ange qui inspire celui du naturalisme.
Que conclure pratiquement ? Qu'il importe souverainement de ne pas toujours remettre à plus tard sa conversion ; on pourrait être surpris par la mort. Et notre dernier acte libre avant de mourir doit décider de notre éternité heureuse ou malheureuse.
C'est pourquoi il importe beaucoup de prier pour ceux qui paraissent s'éloigner de Dieu et même il convient de faire célébrer des Messes pour qu'ils obtiennent la grâce de la bonne mort, comme l'a recommandé Benoît XV.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 9 Déc - 17:34 | |
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CHAPITRE III
QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
J'ai connu un homme qui avait été élevé très chrétiennement, mais qui ensuite s'était éloigné de Dieu et qui, après avoir perdu sa femme et sa fille unique, qui était un ange de piété, fut assailli d'une terrible tentation de désespoir pendant plusieurs mois.
Il voulait se tuer, et le jour où il allait le faire, à l'instant où, à Tulle, il allait se précipiter dans un ravin, sa soeur et les Carmélites priaient ardemment pour lui. Au moment où il allait se donner la mort, NotreSeigneur lui apparut avec un regard triste et doux et l'appela par son nom de baptême : «Joseph ».
A la vue de cette Miséricorde de Dieu, Joseph Maisonneuve (c'était son nom) comprit que la rédemption était aussi pour lui. Il se convertit tout à fait, devint un homme doux et humble de cœur, il expia ses fautes par la plus grande pénitence jusqu'à la dernière heure, et mourut en odeur de sainteté.
On l'appelle le saint homme de Tulle, et depuis sa mort on a obtenu par son intercession des guérisons qui paraissent vraiment miraculeuses (On a écrit sa vie : Joseph Maisonneuve par un ancien Supérieur des Missionnaires diocésains de Tulle. Tulle, 1935.).
Or ce saint converti avait, dans la même ville de Tulle, un ami qui vivait mal ; il priait toutes les nuits les bras en croix pour sa conversion et faisait de rudes pénitences pour l'obtenir. Un jour il apprit que cet ami s'était donné un coup de revolver, mais n'était pas encore mort ; il se porte vers lui aussitôt, le moribond eut encore 24 heures à vivre, et joseph Maisonneuve l'exhorta si bien qu'il se repentit et fit une mort très chrétienne.
L'important est de bien mourir. Pour cela il faut se rappeler la parole de Notre-Seigneur : « Qui n'est pas avec moi, est contre moi » (Dans l'économie actuelle du salut, tout homme est, soit en état de grâce, soit en état de péché, en d'autres termes : soit converti vers Dieu, soit détourné de lui) ; mais il est vrai de dire aussi et Jésus l'a dit aux Apôtres : « Qui n'est pas contre vous est pour vous » MARC, IX, 39.
Ceux qui cherchent sincèrement la vérité religieuse répondent déjà à la grâce actuelle qui les porte au bien. En eux commencent à se vérifier cette parole intérieure entendue par saint Bernard, redite par Pascal : « Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais déjà trouvé ». Nous voyons ainsi de mieux en mieux combien est vraie la parole de saint Jean de la Croix : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'amour » sur la sincérité de notre amour de Dieu.
NOTE Est-ce que tous les hommes reçoivent avant de mourir une vue globale de leur vie passée, qui soit comme une grâce suffisante pour se convertir ? Des personnes qui ont été sur le point de se noyer affirment avoir reçu cette intuition.
A cette question il faut répondre qu'il y a les morts les plus différentes, depuis les plus saintes, dont une révélation annonce quelquefois le jour et l'heure, jusqu'à celle des Pharisiens auxquels Notre-Seigneur a dit « vous mourrez dans votre péché ».
L'immobilité de l'âme soit dans le bien soit dans le mal, commence librement pendant la vie présente, nous l'avons vu, et s'achève par un acte libre (conforme au précédent) au premier instant de l'état de séparation du corps.
Cela éclaire ce qui nous occupe ici. En effet l'obstination a pu commencer longtemps avant la mort, comme il arrive chez les pêcheurs endurcis, et ces malheureux peuvent être surpris par une mort subite, même dans le sommeil, sans avoir la vue globale de leur vie passée, ni le temps de se convertir avant la mort ; c'est là la peine de cette faute spéciale qui consiste à remettre toujours sa conversion à plus tard ou qui consiste même à ne pas vouloir se convertir du tout.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 11 Déc - 20:14 | |
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CHAPITRE III
QUELLE EST LA NATURE ET LA CAUSE PROCHAINE DE CETTE IMMUTABILITÉ
D'autres pécheurs, qui ne sont pas endurcis, reçoivent des grâces actuelles plus fréquentes pour revenir à Dieu, et parmi ces grâces il y a peut-être assez souvent une vue globale de leur vie passée. C'est un effet spécial de la Miséricorde Divine pour les porter à se convertir et les empêcher de s'obstiner, surtout s'ils vont mourir d'une mort imprévue, presque subite.
D'autres hommes sont en état de grâce, mais faibles, et vont se trouver dans des circonstances difficiles avant la mort. Alors il se peut que Dieu en sa Miséricorde, leur accorde assez souvent une vue globale de leur vie passée pour les encourager à persévérer malgré les difficultés de la route.
Cela paraît conforme à la Miséricorde de Dieu a qui ne veut pas la mort éternelle du pécheur, mais qu'il se convertisse ». (EZÉCH., XXXIII, II). On peut citer ici les textes de l'Écriture où est exprimée la volonté salvifique universelle, par laquelle Dieu veut le salut de tous, et par laquelle il a inspiré à son Fils de s'offrir pour tous sur la Croix.
Cette réponse est aussi conforme à bien des révélations privées et à l'expérience de plusieurs de ceux qui ont failli mourir subitement.
Cependant il ne faut pas abuser par présomption de ce qui vient d'être dit pour remettre toujours à plus tard de se convertir. On peut abuser aussi de ce point de vue des meilleurs signes de la Divine Miséricorde, lorsqu'on oublie de considérer que Dieu est en même temps souverainement juste et qu'il rendra à chacun selon ses oeuvres.
Certainement, la Providence du Seigneur est irréprochable, et jamais aucun pécheur ne s'est perdu par manque de secours divin, nunquam homo peccavit ex insufficientia auxilii divini ( Cela proviendrait d'une négligence divine ; or une négligence divine est une contradiction dans les termes. Si elle s'était produite une seule fois, Dieu ne serait plus Dieu, car il ne serait plus sage ; sa prudence et sa Providence seraient un vain mot : ces négations sont un blasphème très évident, qui manifeste à sa manière par contraste le clair-obscur du mystère divin dont nous parlons..
Les jugements de Dieu sont toujours droits, parfaitement justes, et la justice ne manifeste sa sévérité que lorsqu'on a abusé de sa Miséricorde.
CHAPITRE IV - LE JUGEMENT PARTICULIER
Nous avons vu au début du chapitre précédent que l'existence du jugement particulier, affirmée comme de foi par le Magistère ordinaire de l'Église, est fondé sur l'Écriture et la Tradition.
Des raisons théologiques confirment cette existence du jugement particulier, car il convient qu'il y ait une sanction définitive dès que l'âme est capable d'être jugée sur tous ses mérites et ses démérites, c'est-à-dire dès que le temps du mérite est fini, or cela arrive sitôt après la mort. Si du reste il en était autrement, elle resterait dans l'incertitude jusqu'au jugement général, ce qui paraît contraire à la sagesse de Dieu, autant qu'à sa Miséricorde et à sa justice (Cf. SAINT THOMAS, IIIa, q. 59, a. 4, ad Im, a. 5. Suppl. q. 69, a. 2; q. 88, a, I, ad. Ia; C. Gentes,1. IV, c. 91, 95..
DE QUELLE NATURE EST CE JUGEMENT PARTICULIER
Ce jugement divin nous est révélé comme analogue à celui de la justice humaine. Mais l'analogie comporte des ressemblances et des différences.
Le jugement d'un tribunal humain exige trois choses : l'examen de la cause, le prononcé de la sentence et l'exécution de celle-ci.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 12 Déc - 18:49 | |
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CHAPITRE III
DE QUELLE NATURE EST CE JUGEMENT PARTICULIER
Dans le jugement divin l'examen de la cause se fait instantanément, car il ne requiert ni la déposition de témoins pour et contre, ni la moindre discussion. Dieu connaît l'âme par une intuition immédiate, et l'âme, à l'instant où elle est séparée de son corps, se voit immédiatement et est éclairée d'une façon décisive et inévitable sur tous ses mérites et ses démérites.
Elle voit donc sans possibilité d'erreur son état, tout ce qu'elle a pensé, désiré, dit et fait de bien et de mal, tout le bien qu'elle a omis ; sa mémoire et sa conscience lui rappellent toute sa vie morale et spirituelle jusque dans les moindres détails.
C'est alors seulement que nous verrons clairement tout ce que comportait notre vocation particulière ou individuelle, celle d'une mère, d'un père, d'un apôtre.
La sentence est prononcée aussi instantanément, non pas par une voix sensible, mais d'une façon toute spirituelle, par une illumination intellectuelle, qui réveille les idées acquises et donne les idées infuses nécessaires pour voir tout le passé d'un seul regard, et qui surélève le jugement pour le préserver de toute erreur.
L'âme voit spirituellement alors qu'elle est jugée par Dieu, et sous la lumière divine sa conscience porte ce même jugement définitif. Cela se fait au premier instant où elle est séparée du corps, de sorte que, dès qu'il est vrai de dire d'une personne qu'elle est morte, il est vrai de dire aussi qu'elle est jugée.
L'exécution de la sentence est immédiate elle aussi ; rien en effet ne peut la retarder. Du côté de Dieu la toute puissance accomplit aussitôt l'ordre de la justice divine ; et, du côté de l'âme, le mérite et le démérite sont, dit saint Thomas, comme la légèreté et la gravité des corps.
Dès qu'il n'y a pas d'obstacles, les corps pesants descendent, et les corps plus légers que leur milieu s'élèvent aussitôt. Comme les corps tendent à leur lieu naturel, les âmes séparées vont, sans retard aucun, à la récompense due à leur mérite (à moins qu'elles ne doivent encore subir une peine temporaire au purgatoire), ou elles vont à la peine éternelle due à leurs démérites ; bref, elles vont les unes et les autres vers la fin de leurs propres actes.
Les Pères de l'Église ont souvent comparé de même la charité à une vive flamme qui ne cesse de monter tandis que la haine descend toujours.
Le jugement particulier a donc lieu à l'instant de la séparation de l'âme et du corps, au premier instant où il est vrai de dire : l'âme est séparée.
Ainsi est terminé le temps du mérite et du démérite ; autrement une âme du purgatoire pourrait encore se perdre, et une âme réprouvée pourrait encore être sauvée.
Les âmes du purgatoire sont donc arrivées au terme du mérite, sans être encore parvenues à la béatitude éternelle. Ces âmes en état de grâce restent libres, mais cela ne suffit pas au mérite, car une de ses conditions, selon tous les théologiens, est d'être encore viator ou dans l'état de voie.
Au moment du jugement particulier l'âme ne voit pas Dieu intuitivement ; autrement elle serait déjà béatifiée. Elle ne voit pas non plus l'humanité du Christ, sauf faveur exceptionnelle ; mais par une lumière infuse, elle connaît Dieu comme souverain juge et aussi le Rédempteur comme juge des vivants et des morts. Les prédicateurs dans l'exposé de cette doctrine se servent souvent, à l'exemple des Pères de symboles pour la rendre plus accessible à tous et plus saisissante ; mais comme doctrine elle se réduit à ce que nous venons de dire.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 13 Déc - 17:55 | |
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CHAPITRE III
DE QUELLE NATURE EST CE JUGEMENT PARTICULIER
Bienheureuses les âmes qui auront fait une grande partie de leur purgatoire sur la terre, par l'acceptation généreuse des contrariétés quotidiennes. Par ces multiples sacrifices de tous les jours elles seront arrivées à un amour pur et parfait, et c'est sur lui qu'elles seront jugées.
Il y a bien des degrés dans la pureté de l'amour. Saint Pierre avant la Passion a semblé faire un acte d'amour pur quand il protesta à Jésus qu'il était prêt à mourir avec Lui.
Mais il se mêlait à cet acte de la présomption ; pour l'en purifier la Providence permit le triple reniement de Pierre d'où il sortit plus humble, plus défiant de lui-même, plus confiant en Dieu. Et il fit plus tard un acte de très pur amour quand il se laissa conduire au martyre et désira par humilité être crucifié la tête en bas.
Comment arriver avant la mort à un acte de pur amour ? « Ce n'est pas en faisant des efforts de tête, ni en raidissant sa volonté, que l'on parvient à donner plus de force à son amour, c'est en faisant généreusement beaucoup de sacrifices, en acceptant de grand coeur les épreuves ». ( Mgr Auguste SAUDREAU, L'Idéal de l'âme fervente, 1920. Ch. III : Le jugement particulier de l'âme parfaite, pp. 49-52. )
Alors le Seigneur augmente beaucoup en nous la charité infuse, et l'on se prépare ainsi au jugement particulier où l'on trouvera alors en Jésus bien plus un ami qu'un juge. Ainsi Dieu rendra à chacun selon ses oeuvres, et le jugement particulier nous fixera sur notre salut éternel.
Mais le jugement général n'en reste pas moins nécessaire pour se prononcer sur les actes de l'homme en tant qu'il est, non pas une personne individuelle, mais un membre de la société humaine dans laquelle il a eu une influence bonne ou mauvaise plus ou moins durable. Voyons ce que nous en dit la Révélation.
CHAPITRE V - LE JUGEMENT DERNIER ET UNIVERSEL
La foi chrétienne s'exprime ainsi en divers Symboles : « Je crois en Jésus-Christ qui viendra juger les vivants et les morts ». Le Symbole dit de saint Athanase, enseigne plus précisément qu'au dernier avènement du Sauveur, « tous les hommes ressusciteront dans leur corps et devront rendre compte de leurs propres actes ».
l est de roi qu'après la résurrection générale, le Christ jugera tous les hommes sur ce qu'ils auront pensé, désiré, dit, fait et omis pendant leur vie terrestre, c'est-à-dire sur leurs oeuvres bonnes et mauvaises, et qu'il rendra à chacun selon ses oeuvres. (Denzinger, 54, 86, 287, 429, 693). Voyons à ce sujet ce que nous dit l'Écriture, et comment l'explique la Théologie.
LE JUGEMENT DERNIER DANS L'ÉCRITURE
Les traditions religieuses de bien des peuples ont transmis la croyance à une suprême justice, qui se manifestera par les sanctions d'outre-tombe. On la retrouve sous une forme ou sous une autre dans les croyances des peuples civilisés.
Elle montre la nécessité d'une rétribution individuelle et décrit le jugement qui doit la fixer. Au-dessus de ce jugement des individus, parmi les religions païennes, celle des anciens Perses admet un jugement dernier et universel. (Dict. de Théol. cath., art. Jugement (croyances du paganisme, c. 1727-1734) par J. RIVIERE.)
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Lun 14 Déc - 16:51 | |
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CHAPITRE V - LE JUGEMENT DERNIER ET UNIVERSEL
LE JUGEMENT DERNIER DANS L'ÉCRITUREDans la Bible, les premiers livres de l'Ancien Testament, quoiqu'ils manifestent une foi profonde en la justice de Dieu, parlent de façon encore bien obscure des sanctions de l'au-delà. La raison en est que l'Ancien Testament est ordonné au Nouveau, c'est-à-dire à la venue du Sauveur promis, tandis que le Nouveau Testament est immédiatement ordonné à la vie éternelle. Aussi il en parle souvent et de façon beaucoup plus explicite que l'Ancien Testament. Cependant on y trouve des affirmations comme celle qui se lit dans l'ECCLESIASTE, XII, 4 : « Dieu citera en jugement sur tout ce qui est caché et toute oeuvre soit bonne, soit mauvaise ». Mais c'est surtout avec les Prophètes que se précise l'annonce du jugement dernier et universel. ISAIE, LXVI, 15-24, parlant de la restauration d'Israël pour l'éternité « avec de nouveau cieux et une nouvelle terre », dit au nom du Seigneur : « Toute chair viendra se prosterner devant moi », puis il annonce aux impies des châtiments éternels. DANIEL, XII I-2, dit plus clairement : « Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière se réveilleront, les uns pour une vie éternelle, les autres pour un opprobre, pour une infamie éternelle ». JOËL, III, 2, écrit : « J'assemblerai toutes les nations, et je les ferai descendre dans la vallée de Josaphat Cette dénomination est symbolique, le mot Josaphat veut dire Jahvé juge, et peut s'appliquer à tout lieu où Dieu rendra son jugement général.) et là j'entrerai en jugement avec elles ». Le livre de la Sagesse, V, 15 (II° siècle, avant Jésus-Christ) parle de même ; après avoir décrit les peines réservées aux méchants après la mort, il dit : « mais les justes vivront éternellement, leur récompense est auprès du Seigneur ». (Cf. ibid., VI, 6, XV, . Au livre II° des Macchabées, VII, 9, 36, les sept frères martyrs disent à leur juge : « Le Roi de l'univers nous ressuscitera pour une vie éternelle... mais toi, par le jugement de Dieu, tu porteras le juste châtiment de ton orgueil ». Dans le Nouveau Testament, le jugement universel est annoncé par Jésus lui-même à plusieurs reprises. MATTH., XI, 22-23 : « Malheur à toi Corozaïn, malheur à toi Betzaïda... oui, je vous le dis, au jour du jugement il y aura moins de rigueur pour Tyr et Sidon, que pour vous », XII, 41 : « Les hommes de Ninive se dresseront au jour du jugement avec cette génération et la condamneront, parce qu'ils ont fait pénitence à la voix de Jonas, et il y a ici plus que Jonas ». De même Luc, X, 12-14 ; XI, 31-32. MATTH., XVI, 27 : « Le Fils de l'homme rendra à chacun selon ses oeuvres ». Ce jugement universel est presque toujours donné dans l'Évangile comme l'œuvre du Christ, surtout dans le grand discours sur la fin du monde, conservé par les trois premiers Évangiles (SAINT MATH., XXIV, 31-46) : « Lorsque le Fils de l'homme viendra dans sa gloire et tous les anges avec lui, il s'assiéra sur le trône de sa gloire. Et toutes les nations étant rassemblées devant lui, il séparera les uns d'avec les autres, comme le pasteur sépare les brebis d'avec les boucs... » (SAINT MATTH., XXIV, 31 ; MARC, XIII, 27 ; LUC, XXI, 27). Enfin Jésus, pendant sa Passion dit au grand Prêtre : « Vous verrez le Fils de l'homme siéger à la droite du Tout Puissant et venir sur les nuées du ciel... » (MATTH., XXVI, 64). Dans l'Évangile de saint Jean, XII, 48, il est dit « Celui qui me méprise et ne reçoit pas ma parole a son juge : c'est la parole même que j'ai annoncée ; elle le jugera au dernier jour ». - JOAN., VI, 40, 44, 55 : « Quiconque croit en moi, a la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour » ; XI, 25 ; JOAN., V, 29: « L'heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront ma voix ; et ils en sortiront, ceux qui ont fait le bien, pour une résurrection de vie ; ceux qui ont fait le mal, pour une résurrection de condamnation ». Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse Miséricorde de Dieu | |
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CHAPITRE V - LE JUGEMENT DERNIER ET UNIVERSEL
LE JUGEMENT DERNIER DANS L'ÉCRITURE
Dans les ACTES, X, 42, Pierre dit : « Jésus nous a commandé de prêcher que c'est lui que Dieu a établi juge des vivants et des morts ». Et saint Paul écrit II COR., V , 10 : « Nous tous, il nous faut comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu'il a mérité étant dans son corps, selon ses oeuvres; bien ou mal ».
Le même saint Paul parle très clairement ailleurs de la résurrection générale et du jugement dernier ; (I COR., XV 26) : « Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort... Alors le Fils lui-même fera hommage à celui qui lui aura soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous ». - ROM., II, 11-16 : « Dieu ne fait pas acception de personnes... C'est ce qui apparaîtra au jour où il jugera par Jésus-Christ les actions secrètes des hommes ». Cf. ROM., XIV, 12 ; II COR., XI, 15 ; II TIM., IV, 14.
Dans l'APOCALYPSE, XX, 12, saint Jean dit enfin : « Je vis les morts, grands et petits, debout devant le trône. Des livres furent ouverts... et les morts furent jugés d'après ce qui était dans ces livres, selon leurs oeuvres ». Les Pères grecs et latins non seulement enseignent explicitement ce dogme, mais ils décrivent vivement le jugement dernier. Il suffit de citer saint Augustin, Cité de Dieu, L.XX, c. 30, n. 3 : « Nul ne nie ou met en doute que Jésus-Christ, comme l'annoncent les Saintes Écritures, prononcera le dernier jugement ».
Les circonstances de ce jugement universel, selon l'Écriture, sont les suivantes : le juge sera Jésus en son humanité, car ce sont ses mérites qui nous ont ouvert les portes du ciel. La matière de ce jugement sera la vie intégrale de chacun, ses pensées, paroles, ses oeuvres, ses omissions, le bien et le mal qu'il a faits. Le temps de ce jugement est certain, Dieu seul le sait (MARC, XIII, 32), quoiqu'il ait donné dans l'Écriture certains signes de son approche (MARC, XIII, 7-33) : « On verra se soulever peuple contre peuple... il y aura des tremblements de terre, des famines ... Il faut qu'auparavant l'Évangile soit prêché à toutes les nations... Vous serez en haine à tous, dit Jésus à ses disciples, à cause de mon nom... Il y aura en ces jours des tribulations telles qu'il n'y en a point eu depuis le commencement du monde... Il s'élèvera de faux Christ et de faux prophètes, qui feront des signes et des prodiges, jusqu à séduire, s'il se pouvait, les élus eux-mêmes.
Pour vous, prenez garde ! Voyez, je vous ai tout annoncé d'avance... Alors on verra le Fils de l'homme venir dans les nuées avec une grande puissance et une grande gloire... Veillez et priez ; car vous ne savez pas quand ce sera le moment ». Saint Paul ajoute (II THESS., II, 3) : « Ne vous laissez pas séduire... Tant que l'apostasie ne sera point arrivée et que l'homme de péché (l'Antechrist) n'aura point paru, le Jugement n'aura pas lieu ».
L'apostasie dont parle ici saint Paul est celle dont parle SAINT MATTH., XXIV, 11, 13,22-25; LUC, XVIII, 8 ; XXI, 28; l'apostasie des peuples quand la charité de beaucoup sera refroidie.
Saint Pierre annonce (II PETR., III, 12) : « Les cieux enflammés se dissoudront, et les éléments embrasés se fondront. Nous attendons, selon la promesse du Seigneur « de nouveaux cieux et une nouvelle terre » (IS., LXV, 17), où la justice habite ». Saint Paul dit (ROM., VIII, 19) : « La création attend... avec l'espérance qu'elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu ». Enfin l'Apocalypse, XXI, 1, annonce un renouvellement de ce monde où a vécu l'humanité déchue ; débarrassé de toute souillure, ce monde sera rétabli par Dieu dans un état égal, et même supérieur à celui dans lequel il avait été créé. La Jérusalem céleste dont il est parlé ici, c'est l'Église triomphante, société des saints, à jamais établie dans la vie éternelle, après l'avènement glorieux de son Époux : « Et (pour les justes) Dieu essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus ; il y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu ».
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 16 Déc - 17:29 | |
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CHAPITRE V - LE JUGEMENT DERNIER ET UNIVERSEL
LES RAISONS DE CONVENANCE DU JUGEMENT DERNIER
Saint Thomas ( IIIa, q. 59, a. 5 ; Suppl, q. 88, a. I, ad I ; a. 3 ; q. 9I, a. 2. ) explique ces raisons.
1. Les hommes après leur mort vivent dans la mémoire de ceux qui restent sur la terre, et souvent sont jugés contrairement à la vérité. De puissants esprits faux, tels un Spinoza, un Kant, un Hégel sont jugés comme de grands philosophes ; des faux prophètes et des hérésiarques comme Luther et Calvin sont considérés par beaucoup comme des maîtres de la pensée religieuse, tandis que de grands saints et de grands docteurs sont profondément méconnus.
On verra alors ce que valaient beaucoup d'histoires de la philosophie, beaucoup d'études sur les origines du Christianisme écrites à grand renfort de critique dans un esprit absolument rationaliste ; on verra que leurs perpétuelles variations et contradictions provenaient de leur erreur fondamentale la négation du surnaturel. On verra aussi tous les mensonges des États, des prétendus grands politiques, tous les mensonges des hypocrites qui se sont servi de la religion, au lieu de la servir ; tous les masques tomberont.
On pourra juger de l'histoire universelle de l'humanité et de l'Église, en voyant les événements non plus seulement sur la ligne horizontale du temps qui s'écoule entre le passé et le futur, mais sur la ligne verticale qui rattache ces événements à l'unique instant de l'immobile éternité.
Les secrets des cœurs seront découverts, comme l'annonçait le vieillard Siméon (Luc, I, 35) à propos du premier avènement du Sauveur, figure du dernier. Les pharisiens, Caïphe et Pilate seront définitivement jugés et la Vérité nous délivrera de tous les mensonges, qui auront fait tant de mal.
Il faut évidemment, si Dieu existe, que la vérité soit rétablie et qu'elle ait le dernier mot.
2. De plus beaucoup de défunts ont des imitateurs soit en bien, soit en mal ; le mal est plus facile à imiter et cherche à se faire passer pour le bien. Il faut ici encore que la vérité et la justice soient reconnues. « Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice, ils seront rassasiés ».
3. Enfin les effets des actions des hommes durent parfois très longtemps après leur mort. L'enseignement d'Arius et d'autres hérésiarques trouble les intelligences et les âmes pendant des siècles, tandis que l'influence de la prédication des Apôtres s'exercera jusqu'à la fin du monde. Il faut que tout cela soit reconnu sous la lumière infaillible du jugement de Dieu, et cela ne peut l'être qu'à la fin des temps.
Le Catéchisme du Concile de Trente, I° P. ch. 8, dit en substance : « La justice divine veut que les bons recouvrent leur réputation souvent attaquée par les méchants qui triomphaient. De plus le corps, aussi bien que l'âme, doit recevoir le châtiment ou la récompense qu'il mérite, aussi convient-il que le jugement universel suive la résurrection générale.
Ce jugement obligera aussi tous les hommes à rendre à la justice de Dieu et à sa Providence les louanges qui leur sont dues. - Il convient enfin que ce jugement soit porté par Jésus-Christ, parce qu'il est le Fils de l'homme, parce qu'il s'agit de juger les hommes, et parce qu'il a été lui-même jugé injustement par des juges pervers ».
Mais il convient que le jour du jugement dernier soit connu de Dieu seul, car la fin du monde ne dépend que de la volonté libre de Dieu ; elle n'arrivera en effet que lorsque le nombre des élus sera complet, et ce nombre ne peut être fixé que par Celui qui seul prédestine. (SAINT THOMAS, Suppl., q. 91, a. 2).
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Jeu 17 Déc - 17:14 | |
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CHAPITRE V - LE JUGEMENT DERNIER ET UNIVERSEL
LES RAISONS DE CONVENANCE DU JUGEMENT DERNIER
Les Apôtres jugeront avec le Christ comme jésus l'a annoncé ; et aussi les pauvres volontaires qui ont tout quitté par amour de la vérité et de la justice pour suivre Jésus-Christ. « Celui qui se sera humilié sera exalté » et alors se réalisera parfaitement la parole du Magnificat : « Deposuit potentes de sede et exaltavit humiles ».
DU JUGEMENT RÉSERVÉ AUX ORGUEILLEUX ET CELUI DES HUMBLES
L'auteur de l'Imitation (L.I, c. 24) dit à ce sujet : « Par quel étrange oubli de vous-même, vous en allez-vous, sans rien prévoir, vers ce jour de jugement...
Il y a sur terre un grand et salutaire purgatoire l'homme patient qui, en butte aux outrages, s'afflige plus de la malice d'autrui que de sa propre injure ; qui prie sincèrement pour ceux qui le contristent, et leur pardonne du fond du coeur... Il vaut mieux se purifier maintenant de ses péchés et retrancher ses vices, que d'attendre de les expier en l'autre vie... ; chaque vice aura son tourment propre...
Alors l'humble et le pauvre auront une grande confiance, et de tous côtés l'épouvante environnera le superbe. Alors on verra qu'il fut sage en ce monde celui qui apprit à être insensé et méprisable pour Jésus-Christ.
Alors on s'applaudira des tribulations souffertes avec patience. Alors le mépris des richesses aura plus de poids dans la balance que tous les trésors de la terre. Alors les oeuvres saintes l'emporteront sur les beaux discours... Donc tout est vanité, hormis aimer Dieu et le servir. Car celui qui aime Dieu de tout son coeur ne craint ni la mort, ni le jugement, ni l'enfer, parce que l'amour parfait nous donne un sûr accès près de Dieu ».
(Cf. Ibid., L.III, c. 14) : Qu'il faut considérer les secrets jugements de Dieu, pour ne pas s'enorgueillir du bien qu'on fait. - ch. 28 : Que votre paix ne dépende point des jugements des hommes. - ch. 36 Contre les vains jugements des hommes, qu'il faut humblement tout remettre à Dieu, qui seul connaît tout. - ch. 58 : Qu'il ne faut pas chercher à sonder les secrets jugements de Dieu: « Humbles réjouissez-vous ; pauvres, tressaillez d'allégresse, parce que le royaume de Dieu est à vous, si vous marchez dans la vérité ».
Bienheureux ceux qui ont entendu comme Bernadette de Lourdes cette parole : « Je ne te promets pas le bonheur en cette vie, mais dans l'autre ». Ce fut pour Bernadette une révélation spéciale qu'elle était prédestinée, mais qu'elle aurait bien des croix sur la terre.
Il y a de même des vies chrétiennes remplies de croix ; lorsqu'elles sont bien supportées, c'est un signe de prédestination, dit saint Thomas ; ces croix qui pleuvent sont plus et mieux qu'une pluie de diamants ; on le verra clairement après la mort ( De même il y a des peuples chrétiens et catholiques, souvent sacrifiés comme la Pologne; il semble que pour beaucoup de leurs enfants prédestinés, le Seigneur ait dit aussi : « Je ne te promets pas le bonheur en cette vie, mais dans l'autre » ). La Providence apparaîtra alors absolument irréprochable en toutes ses voies.
CHAPITRE VI - LA CONNAISSANCE DE L'AME SÉPARÉE
Nous avons parlé jusqu'ici de la profondeur de l'âme dans la vie présente, puis de la mort et du jugement particulier, il faut maintenant considérer ce qu'est la vie future, d'abord en général, puis en particulier en enfer, au purgatoire et au ciel.
Pour se faire une juste idée de la vie future en général, il faut voir ce que la Théologie enseigne sur la connaissance que possède l'âme séparée de son corps, l'âme qui n'a plus l'usage de ses sens, ni de l'imagination ; ainsi s'explique l'état de sa volonté éclairée par cette connaissance nouvelle d'outre-tombe.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 18 Déc - 17:42 | |
| DEUXIÈME PARTIE CHAPITRE VI - LA CONNAISSANCE DE L'AME SÉPARÉE
Nous avons dit plus haut (Ch. III de la 2e partie) que selon les meilleurs théologiens, l'âme commence à se fixer, soit dans le bien, soit dans le mal, par le dernier acte de volonté soit méritoire, soit déméritoire, qu'elle fait au moment où elle va se séparer de son corps, et elle achève de se fixer par l'acte de volonté qu'elle produit à l'instant précis où commence l'état de séparation du corps.
Cela s'explique, avons-nous dit, parce que chacun juge selon son inclination, et alors il n'est pas étonnant que l'humble, qui est mort en état de grâce, continue de juger et de vouloir conformément à l'humilité, dans l'état de séparation; tandis que l'orgueilleux, qui est mort dans l'impénitence finale, continue de juger et de vouloir selon son orgueil.
Il y a là certes en cette fixité soit dans le bien, soit dans le mal, quelque chose de mystérieux. Mais cela n'est pas sans analogie avec des faits que nous constatons dans la vie présente. Nous constatons ici-bas que la disposition que nous avons en entrant dans un état permanent dure souvent ensuite tant que dure cet état.
C'est ainsi au point de vue physique que l'enfant qui vient au monde en de bonnes conditions jouit ensuite d'une bonne santé, tandis que celui qui est né en de mauvaises conditions n'a qu'une santé débile. De même, au point de vue moral, celui qui entre chrétiennement dans l'état de mariage, y persévère souvent de façon chrétienne ; tandis que celui qui y entre avec une intention défectueuse ou mauvaise, ne sera pas béni de Dieu en cet état, sauf conversion.
De même encore celui qui entre en religion pour un bon motif y persévère d'habitude, tandis que celui qui y entre pour un mauvais motif, n'y persévère pas ou ne profite pas de la vie religieuse. Ainsi s'explique d'une certaine manière la fixité de l'âme après la mort, fixité qui est affirmée par la Révélation ( Même dans le cours de la vie présente, beaucoup de ceux qui seront sauvés ont fait quelque grand acte qui n'a pas été rétracté dans la suite, et beaucoup de ceux qui se perdent ont fait quelque acte particulièrement mauvais.).Ce que nous allons dire maintenant de la connaissance de l'âme séparée confirme cet enseignement ; cette connaissance comporte en effet une immutabilité qui est propre à l'état de séparation.
Saint Thomas traite de cette question. (I, q. 89, q. 10, a. 4-6). Le principe qui éclaire ces problèmes est que l'intelligence humaine est la dernière des intelligences, mais pourtant une véritable intelligence, immatérielle ou spirituelle.
LA CONNAISSANCE PRÉTERNATURELLE
Tout d'abord il est certain que l'âme séparée, n'ayant plus son corps, n'a plus les opérations sensitives des sens externes et internes, en particulier de l'imagination, car celles-ci sont les opérations d'un organe animé.
Et même elle n'a plus que radicalement les facultés sensitives, car celles-ci n'existent actuellement que dans le composé humain ; l'imagination humaine, comme l'imagination animale, n'existe plus actuellement après la corruption de son organe, de même les habitudes des facultés sensitives, par exemple les souvenirs de la mémoire sensitive, n'existent plus actuellement dans l'âme séparée, mais seulement de façon radicale. Donc une âme séparée ne voit pas sensiblement, n'entend pas, n'imagine plus.
Par contre, elle conserve actuellement ses facultés supérieures, purement spirituelles : l'intelligence et la volonté, et les habitudes de celles-ci. Mais il faut faire ici une différence entre les âmes réprouvées et les autres. Les âmes réprouvées peuvent conserver certaines sciences acquises, mais non pas les vertus, soit acquises, soit infuses : elles ont perdu la foi infuse et l'espérance infuse.
Au contraire les âmes du purgatoire conservent la science acquise qu'elles avaient et les vertus soit acquises, soit infuses des facultés supérieures, notamment la foi, l'espérance, la charité, la prudence, la religion, la pénitence, la patience, la justice, l'humilité. C'est très important.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 20 Déc - 3:32 | |
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LA CONNAISSANCE PRÉTERNATURELLEDe même l'âme séparée conserve les actes de ces facultés supérieures et des habitudes qui sont restées en elle. Cependant l'exercice de ces actes est en partie empêché, parce qu'il n'y a plus le concours de l'imagination, ni de la mémoire sensitive, concours qui est très utile pour se servir des idées abstraites des choses sensibles. Que serait un prédicateur qui n'aurait plus l'usage de l'imagination au service de son intelligence ? Aussi les théologiens enseignent-ils communément que le mode d'être de l'âme séparée de son corps étant préternaturel (car l'âme est faite pour animer son corps), elle a aussi un mode d'agir préternaturel, et qu'elle reçoit de Dieu, à l'instant de la séparation, des idées infuses presque semblables à celles des anges, et dont elle peut se servir sans le concours de l'imagination (Ia, q. 89, a. 1). Ainsi, sur terre, un théologien devenu aveugle, ne pouvant plus lire, devient davantage homme d'oraison et reçoit des inspirations supérieures pour mieux connaître l'esprit même de la Théologie. Peut-être qu'auparavant il travaillait trop et ne priait pas assez ; maintenant il se consacre à la prière intérieure ; ce qui est un progrès. Mais de ces idées infuses reçues par l'âme séparée dérive une autre difficulté, fort différente de la précédente. Tandis que l'usage des idées abstraites et acquises est difficile sans le concours de l'imagination, l'usage des idées infuses est difficile parce qu'elles sont en quelque sorte trop élevées pour l'intelligence humaine qui est la dernière de toutes et qui a pour objet proportionné le dernier des intelligibles dans l'ombre des choses sensibles. Ces idées infuses sont pour ainsi dire trop hautes, comme des conceptions métaphysiques pour un esprit non préparé, ou comme une armure géante pour un jeune combattant : le jeune David préférait sa fronde à l'armure de Goliath. Cependant cette double difficulté, dans la connaissance de l'âme séparée, est compensée parce qu'elle se voit intuitivement elle-même comme l'ange se voit (Ia, q. 89 a. 2). Par suite elle voit très clairement, sans aucun doute possible, sa spiritualité, son immortalité, sa liberté, et en elle-même, comme en un miroir, elle connaît avec une certitude parfaite Dieu, auteur de sa nature. Ainsi les grands problèmes philosophiques sont résolus avec une parfaite clarté. Saint Thomas dit même, ibid : « anima quodammodo sic liberior est ad intelligendum ». Il suit de là que les âmes séparées se connaissent naturellement les unes les autres, quoique moins parfaitement que les anges. Par les idées infuses, qu'elles ont reçues, elles connaissent non seulement l'universel, mais les singuliers, par exemple les personnes restées sur la terre, qui ont un rapport spécial avec elles, soit par les liens de la famille ou de l'amitié, soit par une ordination divine. La distance locale n'empêche pas cette connaissance, qui ne provient pas des sens, mais des idées infuses (cf. ibid., a. 4 et 7). Ainsi l'âme séparée d'une bonne mère chrétienne, se rappelle au purgatoire les enfants qu'elle a laissés sur la terre. Ces âmes connaissent-elles ce qui arrive de nouveau sur terre ? Saint Thomas (ibid. a. répond naturellement elles l'ignorent, car elles sont séparées de la société de ceux qui sont encore en état de voie. Cependant, s'il s'agit des âmes bienheureuses, il est plus probable qu'elles connaissent, comme les anges, ce qui arrive sur la terre, surtout à ceux qui leur sont chers ; cela fait partie de leur béatitude accidentelle. Celles qui sont au purgatoire peuvent avoir soin de nous, même si elles ignorent notre état actuel, comme nous prions pour elles, bien que nous ignorions ce qui leur arrive, par exemple si elles sont encore au purgatoire ou si elles sont déjà délivrées. Source : Livres-mystiques.com Que Jésus Miséricordieux vous bénisse ami de la Miséricorde | |
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 20 Déc - 17:09 | |
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L'ÉVITERNITÉ ET LE TEMPS DISCONTINU
Quelle est la durée des âmes séparées ? (Saint Thomas traite cette question Ia, q. 10, a. 4-6, surtout a. 5. c. et ad. Im (Cf. CAJETAN, JEAN DE SAINT THOMAS, GONET). On distingue trois principales durées : le temps, l'éternité et une durée intermédiaire appelée l'aevum ou l'éviternité dont nous allons parler.
Sur terre notre durée est le temps continu, qui est la mesure du mouvement continu, surtout du mouvement apparent du soleil ; c'est ainsi que nous distinguons les heures, les jours, les années, les siècles. - Lorsque l'âme est séparée de son corps et n'est pas encore béatifiée, elle a une double durée : l'aevum, l'éviternité et le temps discontinu.
L'éviternité est la durée de ce qu'il y a d'immuable dans les anges et les âmes séparées, la durée de leur substance, de leur connaissance naturelle de soi et de Dieu et de l'amour qui en résulte. L'éviternité ne comporte pas de variété, de succession, c'est un perpétuel présent ; mais elle diffère de l'éternité, parce que de fait elle a commencé et parce qu'elle est unie au temps discontinu qui suppose l'avant et l'après.
Le temps discontinu ou discret, opposé au temps continu ou solaire, est dans les anges et les âmes séparées, la mesure de leurs pensées et affections successives. Une pensée dure un instant spirituel, la pensée suivante dure un autre instant spirituel.
Nous en avons quelque idée en réfléchissant à ceci que, sur terre, une personne en extase peut rester deux heures solaires et plus dans une seule pensée, qui représente pour elle un seul instant spirituel. De même l'histoire caractérise les siècles, par exemple le XIIIe ou le XVIIe par les idées qui prédominent en chacun d'eux ; on dit : le siècle de saint Louis et celui de Louis XIV.
Il suit de là qu'un instant spirituel dans la vie des anges ou des âmes séparées peut durer plusieurs jours et même plusieurs années de notre temps solaire, comme une personne qui est en extase pendant trente heures de suite, peut être absorbée par une seule pensée.
Pour les âmes béatifiées, à cette double durée de l'éviternité et du temps discontinu, s'ajoute l'éternité participée, qui mesure leur vision béatifique de l'essence divine et l'amour qui en résulte. C'est l'unique instant de l'immobile éternité, sans aucune succession.
L'éternité participée diffère pourtant de l'éternité essentielle, propre à Dieu, comme l'effet diffère de la cause, et parce qu'elle a commencé. De plus l'éternité essentielle de Dieu mesure tout ce qui est en lui , sa substance et toutes ses opérations, tandis que l'éternité participée ne mesure en l'âme béatifiée que la vision béatifique et l'amour de Dieu qui en résulte.
L'éternité est comme le point indivisible qui est le sommet d'un cône, ou d'une montagne ; le temps continu est figuré par la base de ce cône ; l'éviternité et le temps discontinu sont entre les deux comme une section conique circulaire et comme le polygone inscrit en cette section circulaire.
Le temps continu s'écoule sans cesse ; son présent (nunc fluens) fuit toujours entre le passé et l'avenir ; notre vie présente comporte dès lors une succession d'heures variées de travail, de prière, de sommeil. L'éternité au contraire est un perpétuel présent (nunc stans) sans passé, ni futur, l'unique instant d'une vie qui se possède toute à la fois (tota simul).
L'éviternité s'en rapproche, elle permet de mieux concevoir l'immutabilité de la vie de l'âme séparée, non béatifiée ou non encore béatifiée : l'immutabilité de la connaissance qu'elle a d'elle-même, l'immutabilité du vouloir qui se porte sur la fin dernière choisie, l'immutabilité du vouloir dans le bien ou dans le mal, qui est la suite de l'immutabilité du jugement sur la fin dernière, à partir de l'instant de la séparation du corps.
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L'ÉVITERNITÉ ET LE TEMPS DISCONTINU
Il convient de se rappeler ces paroles de saint Augustin : « Unis-toi à l'éternité de Dieu et tu seras éternel ; unis-toi à l'éternité de Dieu et attends avec lui les événements qui se passent au-dessous de toi » (Comm. in Ps. 91).
Considérons les divers moments de notre vie terrestre, non pas seulement sur la ligne horizontale du temps qui s'écoule entre le passé et l'avenir, mais sur la ligne verticale qui les rattache à l'unique instant de l'immobile éternité.
Alors nos actes seront de plus en plus méritoires et accomplis par amour de Dieu, ils passeront du temps à l'éternité, où ils resteront inscrits à jamais au « livre de vie ».
Cet enseignement théologique sur les diverses espèces de durée, de la terre, du purgatoire et du ciel, permet de mieux distinguer, dès la vie présente, ce qu'on peut appeler le temps du corps et celui de l'âme. Le temps du corps, c'est le temps solaire qui mesure la durée de notre organisme et de ce point de vue, quelqu'un qui a 80 ans est un vieillard, mais son âme peut rester très jeune.
Ainsi comme on distingue trois âges de la vie du corps : l'enfance, l'âge adulte, la vieillesse, on distingue chez le juste trois âges de la vie de l'âme : la voie purgative des commençants, la voie illuminative des progressants, et la voie unitive des parfaits.
Alors on comprend de mieux en mieux que chez beaucoup de ceux qui sont sauvés ou seront sauvés, il y a eu, au cours de leur vie terrestre, quelque grand acte qui n'a pas été rétracté dans la suite et qui a porté ses fruits, bien que peut-être il n'y ait eu rien de bien saillant après lui.
C'est ainsi que j'ai connu un jeune israélite, fils d'un banquier de Vienne en Autriche, qui vers l'âge de 25 ans, au moment de se décider à faire un procès au plus grand adversaire de sa famille, procès qui l'aurait enrichi, se rappela cette parole du Pater qu'il avait entendu quelquefois réciter. « Pardonnez-nous nos offenses, comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés ».
Il se dit : mais si, au lieu de faire ce procès qui m'enrichirait, je pardonnais ! Et il pardonna complètement, en renonçant pour toujours à faire ce procès. Au même moment, il reçut la foi à tout l'Évangile, il fit l'ascension de cette montagne de lumière qu'est l'Évangile, par ce sentier qu'était cette parole du Pater.
Dans la suite il devint prêtre, religieux dominicain, il mourut vers l'âge de 90 ans ; il n'y eut rien de particulièrement saillant dans sa vie ; mais son âme resta au niveau où elle avait été élevée au moment de son admirable conversion, et elle se rapprocha insensiblement de l'éternelle jeunesse qu'est la vie du ciel.
Nous devons être particulièrement attentifs à certains grands actes que le bon Dieu peut parfois nous demander ; il arrive qu'un grand acte de dévouement décide ainsi non seulement de toute notre vie spirituelle d'ici-bas, mais de celle de l'éternité. On juge d'une chaîne de montagnes par ses sommets, ainsi Dieu juge de la vie des justes.
TROISIÈME PARTIE
L'ENFER
Nous parlerons assez longuement de l'enfer pour trois raisons. Aujourd'hui on ne prêche plus guère sur ce sujet, et on laisse ainsi oublier une vérité révélée très salutaire ; on ne fait plus assez attention à ceci que la crainte de l'enfer est le commencement de la sagesse et porte à se convertir. En ce sens on a pu dire : l'enfer a sauvé beaucoup d'âmes.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mar 22 Déc - 17:05 | |
| TROISIÈME PARTIE
L'ENFER
De plus il y a dans le monde beaucoup d'objections très superficielles contre l'enfer, et qui paraissent à certains croyants plus vraies que les réponses traditionnelles. Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont jamais approfondi ces réponses.
Il est très facile de saisir une objection superficielle, faite d'un point de vue inférieur et extérieur, et il est difficile de bien saisir une réponse qui vise les profondeurs de la vie de l'âme ou la hauteur sans mesure de la justice de Dieu. Il y faut plus de maturité et de pénétration.
Un jour un prêtre chargea un de ses amis avocat de préparer pour une conférence contradictoire des objections contre la doctrine de l'enfer ; l'avocat présenta très brillamment les objections communes conçues d'un point de vue inférieur accessible à tous, et qui frappent l'imagination.
Comme le prêtre ne s'était pas assez préparé pour répondre, les objections parurent plus fortes que les réponses, celles-ci semblèrent verbales, elles ne captivaient pas l'imagination et ne conduisaient pas assez l'intelligence des auditeurs aux notions du péché mortel sans repentance, de l'obstination, de l'état de terme si différent de l'état de voie, à la notion enfin de la justice infinie de Dieu.
Il faut donc insister sur tous ces points, d'autant que le dogme de l'enfer fait plus apprécier par contraste le prix du salut. De même on ne connaît bien le prix de la justice que lorsqu'on souffre d'une grave injustice ou qu'on en est menacé. Notre Seigneur a éclairé Sainte Thérèse sur la beauté du ciel, après lui avoir montré la place qu'elle aurait eue en enfer, si elle avait suivi la route où elle avait fait quelques pas.
L'enfer désigne à proprement parler l'état des damnés, des démons et des hommes morts en état de péché mortel, qui sont éternellement punis ; il désigne aussi le lieu où sont les damnés.
L'existence de l'enfer a été niée au IIIe siècle par Arnobe qui soutint à la suite des gnostiques, que les réprouvés sont annihilés; cette erreur a été renouvelée par les Sociniens au XVIe siècle. Les Origénistes, au IVe siècle surtout, ont nié l'éternité des peines de l'enfer ; pour eux tous les réprouvés, anges et hommes, finalement se convertiraient. Cette erreur a été reprise par les protestants libéraux et par les spirites.
Tous les rationalistes disent que l'éternité des peines répugne à la sagesse de Dieu, à sa miséricorde, à sa justice, comme si la peine devait être proportionnée au temps qu'il a fallu pour commettre la faute, et non pas à sa gravité et à l'état perpétuel où l'âme se trouve après elle, lorsque cette faute est sans repentance.
L'Église dans le Symbole dit de saint Athanase ( « Qui bona egerunt, ibunt in vitam aeternam : qui vero mala, in ignem aeternum ») et en plusieurs Conciles affirme comme dogme de foi l'existence de l'enfer et l'éternité des peines (du dam et du sens) et aussi l'inégalité des peines proportionnées à la gravité des fautes commises et restées sans repentance, cf. 4° Concile de Latran ( Illi cum diabolo paenam perpetuam (recipiunt)) (Denz. 429) Concile de Florence (Denz. 693), BENOIT XII (Denz. 531) cf. ibid. 50, 321, 410, 464. Le Concile de Trente (Denz. 835) mentionne « les peines éternelles ».
Voyons d'abord ce que nous enseigne sur ce point la Sainte Écriture. Ce qu'elle nous en dit prépare à mieux entendre la doctrine du purgatoire, où il y a la certitude du salut, et la doctrine de la béatitude éternelle.
Les ténèbres et le mal montrent à leur manière le prix de la lumière éternelle et la sainteté inamissible.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Mer 23 Déc - 17:15 | |
| TROISIÈME PARTIE
CHAPITRE I - L'ENFER DANS LA SAINTE ÉCRITURE
Le mot enfer vient du latin infernus, qui désigne les lieux inférieurs, souterrains et ténébreux. Dans l'Ancien Testament le terme correspondant, scheol, désigne la demeure des morts en général, justes et impies, (GEN., XXXVII, 35 ; NUM., XVI, 30) ; ce qui n'a rien de surprenant, car, avant l'Ascension de Jésus-Christ, aucune âme ne pouvait entrer au ciel. C'est encore dans le même sens qu'il est parlé de la descente de Jésus aux enfers. Mais dans le Nouveau Testament, l'enfer des damnés est souvent appelé la géhenne (MT., V, 22, 29; XXIII, 15, 33, etc., de même MARC, LUC), qui signifie en hébreu la vallée de Hinnôm, un ravin du sud de Jérusalem où l'on jetait des immondices de tous genres et des cadavres dévorés par les vers ; des feux y brûlaient presque perpétuellement pour consumer ces pourritures. C'était depuis Isaie une figure du véritable enfer ; l'enfer était cela pour toujours : un vers qui ne meurt pas, un feu qui ne s'éteint pas.
L'ENFER DANS L'ANCIEN TESTAMENT
Dans le Dictionnaire de théologie catholique, l'auteur du savant article sur l'enfer, M. Richard, a fait une étude approfondie des textes de l'Ancien Testament, qui peuvent être allégués pour prouver l'existence de l'enfer au sens strict. Il remarque qu'avant les prophètes le sort des méchants après la mort reste assez obscur, bien que les sanctions ultra-terrestres soient plusieurs fois affirmées ; par exemple ECCLÉSIASTE XII, 13, 14 : « Crains Dieu et observe ses commandements, car c'est là le tout de l'homme. Car Dieu citera en jugement sur tout ce qui est caché, toute oeuvre soit bonne, soit mauvaise. » Item PROV., XI, 4.
Mais c'est aux grands prophètes que Dieu a commencé de découvrir clairement les perspectives de la vie future. Nous avons déjà cité quelques-uns de ces textes en parlant du jugement dernier. ISAIE, LXVI, 15-24 expose la grande vision prophétique de l'au-delà. C'est la restauration d'Israël pour l'éternité avec « de nouveaux cieux et une nouvelle terre » 22. « Toute chair viendra se prosterner devant moi, dit Jahvé, et quand ils sortiront, ils verront les cadavres des hommes qui se sont révoltés contre moi, car leur ver ne mourra point et leur feu ne s'éteindra point, et ils seront en horreur à toute chair. » Tous les commentateurs y voient l'affirmation du jugement dernier, et sous une forme symbolique celle de l'enfer éternel. Ce dernier texte est cité dans MARC, IX, 43, par Jésus Lui-même et dans Luc, III, 17, par Saint Jean-Baptiste.
DANIEL XII, 1-2, dit plus clairement : « Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour un opprobre, pour une infamie éternelle », c'est ici que l'Ancien Testament annonce pour la première fois la résurrection des pécheurs pour un jugement de condamnation.
Le livre de la SAGESSE (IIe siècle avant Jésus-Christ) V, 15, après avoir décrit les peines réservées aux méchants après la mort, dit au contraire : « Mais les justes vivent éternellement ; leur récompense est auprès du Seigneur et le Tout-Puissant a souci d'eux », Il ajoute : VI, 6 : « Aux petits on pardonne par pitié, mais les puissants seront puissamment châtiés, XV, 8, il est dit de l'impie : « on lui redemandera son âme qui lui avait été prêtée ».
L'ECCLÉSIASTIQUE VII, 17 parle de même : « Humilie profondément ton âme, car le feu et le ver sont le châtiment de l'impie ». Au livre II des Macchabées, c. VII, 9-36, il est dit que les sept frères martyrs sont soutenus dans leur supplice par la pensée de la vie éternelle et disent à leur juge : « Le Roi de l'univers nous ressuscitera pour une vie éternelle ; ... mais toi par le jugement de Dieu, tu porteras le juste châtiment de ton orgueil ».
Tous ces textes de l'Ancien Testament parlent de l'enfer proprement dit, et plusieurs affirment l'inégalité des peines proportionnées à la gravité des fautes commises et restées sans repentir.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Ven 25 Déc - 6:33 | |
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L'ENFER DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
Dès le début pour préparer par la pénitence la venue du Sauveur, le Précurseur dit aux plus coupables : « Race de vipères, qui vous a appris à fuir la colère qui vient ». « Faites donc de dignes fruits de pénitence » MATTH., III, 7. « Il vient Celui qui est plus puissant que moi... sa main tient le van, ou le crible pour trier le grain, et il nettoiera son aire, et il amassera le froment dans son grenier, et il brûlera la paille dans un feu qui ne s'éteint point ». LUC, III, 7, 17.
Jésus annonce simultanément le salut éternel pour les bons et la géhenne pour les méchants. Il le fait d'abord en exhortant à la pénitence. Aux scribes qui disaient de lui : « c'est par le prince des démons qu'il chasse les démons », il répond : « Tous les péchés seront remis aux enfants des hommes, même les blasphèmes qu'ils auront proférés. Mais celui qui aura blasphémé contre le Saint-Esprit, n'obtiendra jamais de pardon ; il est coupable d'un péché éternel, MARC, III, 29, cf. MATTH., XII, 32 ; JOAN., VIII, 20-24, 35 ( Ce péché contre le Saint Esprit lutte en effet contre la lumière et la grâce qui remet le péché, et de sa nature il est ainsi irrémissible, quoique parfois par une Miséricorde exceptionnelle Dieu le remette en la vie présente.). Il ordonne la charité fraternelle et d'éviter la luxure à tout prix « pour que le corps ne soit pas jeté dans la géhenne ». MATTH., V, 22, 29, 30.
A Capharnaüm, après avoir admiré la foi du centurion, Jésus annonce la conversion des Gentils ; tandis que certains juifs infidèles et obstinés « seront jetés dans les ténèbres extérieures, où il y aura des pleurs et des grincements de dents » MATTH., VIII, 12. Cette expression se trouve jusqu'à six fois en SAINT MATTHIEU, on la lit aussi en SAINT LUC, XIII, 28.
Il prémunit les Apôtres contre la crainte du martyre en leur disant : « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l'âme ; craignez plutôt celui qui peut perdre l'âme et le corps dans la géhenne ». MATTH., X, 28.
Toute cette doctrine est résumée dans SAINT MARC, IX, 42-48 : « Si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la : mieux vaut pour toi entrer mutilé dans la vie, que d'aller avec les deux mains dans la géhenne, dans le feu inextinguible, là où le ver ne meurt point, et où le feu ne s'éteint point... » Item SAINT MATTHIEU, XVIII, 8-9.
Cet enseignement est exposé aussi dans les paraboles, celle de l'ivraie, du filet, des noces royales, des vierges sages et des vierges folles, des talents.
De même dans les malédictions adressées aux Pharisiens hypocrites, qui perdent les âmes : MATTH., XXIII, 15 : « Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites, guides aveugles,... semblables à des sépulcres blanchis pleins de pourriture ; serpents, race de vipères, comment éviterez-vous d'être condamnés à la géhenne ? » MATTH., XXIII, 13-37.
Plus clairement encore dans le discours sur la fin du monde et le jugement dernier, Jésus dit, MATTH., XXV, 33-46 : « Alors le Roi dira à ceux qui sont à sa droite : Venez les bénis de mon Père... car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger... S'adressant ensuite à ceux qui seront à sa gauche, il dira : Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. Car j'ai eu faim et vous ne m'avez pas donné à manger... j'ai eu soif... j'étais étranger... j'étais nu... j'étais malade... j'étais en prison, et vous ne m'avez pas secouru. Et ceux-ci s'en iront à l'éternel supplice et les justes à l'éternelle vie ».
C'est la dernière sentence, sans appel et sans fin. On ne peut pas dire que le mot « éternel » à propos du feu est dit seulement au sens large, car il s'oppose à la vie éternelle comme l'exige le parallélisme, et tout le monde accorde que la vie éternelle est ainsi appelée au sens propre du mot ( Cf. SAINT-AUG. De Civitate Dei, XXI, 23.)
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Sam 26 Déc - 2:01 | |
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L'ENFER DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
L'Évangile de saint Jean parle constamment de l'opposition entre la vie éternelle et la perte éternelle, qui est surtout la privation de Dieu. « Celui qui ne croit pas au Fils, n'aura pas la vie éternelle », mais la colère de Dieu demeure sur lui, » III, 36.
Aux Pharisiens qui s'obstinent : « Vous mourrez dans votre péché. Où je vais vous ne pourrez venir » VIII, 24. « Quiconque se livre au péché est esclave du péché, et l'esclave ne demeure pas toujours comme les fils dans la maison », VIII, 34. « Si quelqu'un ne demeure pas en moi il est jeté dehors, comme le sarment et il sèche ; puis on jette ces sarments au feu, et ils brûlent », XV, 6.
Les Epîtres de saint Paul annoncent de même aux justes la vie éternelle et à ceux qui s'obstinent dans le mal l'enfer éternel : ceux qui font les oeuvres de la chair n'entreront pas dans le royaume de Dieu, GAL., V, 19-21 ; EPH., V, 5 ; I COR., VI, 9, 10.
Il y en a qui périssent II COR., II, 15, 16 ; IV, 3 ; XIII, 5. Il y a deux cités irréconciliables, celle du Christ et celle de Bélial, II COR., VI, 14-18. Il y a des réprouvés à jamais, I TIM, V, 6, 11-15 ; II TIM., II, 12-20. On lit dans l'Épître aux Hébreux X, 31 : « Il est effroyable de tomber entre les mains du Dieu vivant ».
Saint Pierre annonce aux faux prophètes qu'ils vont à leur perte éternelle, II PETR., II, 1-4, 12, 14 ; III, 7. L'Épître de saint Jude, 6, 13, parle des « chaînes éternelles, d'épaisses ténèbres pour l'éternité ». L'Épître de saint Jacques, II, 13, menace d'un jugement sans Miséricorde celui qui ne fait pas Miséricorde ; les mauvais riches sans coeur à l'égard des pauvres s'amassent des trésors de colère pour le dernier jour, IV, 4-8 ; V, 3.
Enfin l'APOCALYPSE oppose la victoire éternelle du Christ, dans la Jérusalem céleste, et la damnation de tous ceux qui seront jetés dans « l'étang du feu et du soufre », XXI, 8. Cette damnation éternelle est appelée « la seconde mort » ibid. ; c'est la privation de la vie divine, de la vision de Dieu XXI, 27 ; XXI, 15, en un lieu de supplice éternel, où seront tourmentés par le feu tous ceux qui porteront le signe de la bête, et qui seront exclus du livre de vie, XIII 18 ; XIV, 10, 11 ; XX, 6, 14.
C'est ce qu'annonçaient déjà les grands prophètes en particulier ISAIE , LXVI, 15-24 ; depuis lors jusqu'à l'Apocalypse, la révélation de l'enfer éternel n'a cessé de se préciser en même temps que celle de l'éternelle vie ; on y trouve la peine du dam, celle du feu, l'inégalité des châtiments et leur éternité, à cause du péché mortel sans repentance, qui a laissé l'âme dans la révolte habituelle et perpétuelle contre Dieu infiniment bon.
Nous ne pouvons rapporter ici le témoignage de la tradition. Rappelons seulement qu'avant le III° siècle et la controverse des Origénistes, les Pères enseignent l'existence et l'éternité des peines de l'enfer ( Cf. ROUET DE JOURNEL, Enchir. patristic., Index theologicus n° 594.- Dict. theol. Cathol., art. Enfer (M. RICHARD), c. 47-56. ). Les martyrs disent souvent qu'ils ne craignent pas le feu temporel, mais le feu éternel.
Du III° siècle au V°, la plupart des Pères combattent l'erreur d'Origène et des Origénistes sur la non éternité des peines de l'enfer ; parmi eux il faut citer surtout saint Méthode, saint Cyrille de Jérus., saint Épiphane, saint Basile, saint Chrysostome, saint Ephrem, saint Cyprien, saint Jérôme, surtout saint Augustin ( Cf. R. DE JOURNEL, op. cit., ibid. - Dict. theol. cath., art. Enfer, c. 56-77.).
Pour tous ces Pères l'affirmation de la conversion finale des démons et des hommes réprouvés est contraire à la révélation, pour eux un démon converti est une impossibilité, de même un damné converti.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 27 Déc - 2:11 | |
| TROISIÈME PARTIE
L'ENFER DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
Au V° siècle la controverse finit par la condamnation de cette erreur d'Origène au Synode de Constantinople (année 553) confirmé par le Pape Vigile (Dent., 211).
Les Pères citent souvent les paroles d'Isaïe, rappelées par Jésus : « le ver qui ne meurt pas et le feu qui ne s'éteint pas » ; la controverse origéniste a servi à mieux préciser le sens des mots de l'Évangile (MATTH., XXV, 41-46) « feu éternel », « supplice éternel» ; saint Augustin en particulier ( De Civitate Dei, XXI, 23.) montre que le mot éternel ne peut pas être pris ici au sens large, puisqu'il s'oppose, comme le parallélisme l'exige, à la vie éternelle ainsi appelée de l'aveu de tous au sens propre du mot.
NOTE : CONFIRMATION
La Maçonnerie, qui nie l'enfer, est une preuve de son existence.
En lisant l'Encyclique de Léon XIII Humanum genus sur la maçonnerie, avril 1884, et les ouvrages les plus objectifs sur cette question, ouvrages résumés dans l'article Franc-maçonnerie du Dict. de théol. cath., on voit quel est le but réel de celle-ci ( Voir aussi dans le Dict. Apologétique de la Foi catholique, le bon article Franc-Maçonnerie par l'historien A. GAUTHEROT.).
Depuis que la malice du démon a divisé le monde en deux camps, dit en substance Léon XIII, la vérité a ses défenseurs, mais aussi ses adversaires implacables. Ce sont les deux cités opposées dont parle saint Augustin ; celle de Dieu représentée par l'Eglise de Jésus-Christ, avec sa doctrine du salut éternel ; et celle de Satan avec sa révolte continuelle contre l'enseignement révélé.
La lutte est perpétuelle entre ces deux armées, et depuis la fin du XVIIe siècle, date des débuts de la Franc-Maçonnerie, qui a réuni toutes les sociétés secrètes, les sectes maçonniques ont organisé une guerre d'extermination contre Dieu et l'Église. Elles ont pour but de déchristianiser la vie individuelle, familiale, sociale, internationale, et pour cela tous ses membres se regardent comme des frères sur toute la surface du globe ; ils constituent une autre église : une association internationale et secrète.
Léon XIII à la fin de la même Encyclique signale la manière dont ces sectes clandestines s'insinuent dans la confiance des princes, sous le prétexte fallacieux de protéger leur autorité contre la domination de l'Église ; en réalité c'est afin de saper tout pouvoir, comme le prouve l'expérience ; car ensuite, dit le Pape, ces hommes fourbes flattent les multitudes, en faisant miroiter à leurs yeux, une prospérité dont les rois et l'Église seraient les seuls ennemis.
En définitive ils précipitent les nations dans l'abîme de tous les maux, dans les agitations révolutionnaires et la ruine générale, qui ne profitent qu'à quelques habiles.
Ce but réel de déchristianisation de la société a été d'abord masqué par un but apparent. La secte s'est présentée au début sous les dehors d'une société philanthropique et philosophique. Mais ensuite, après ses triomphes, elle a jeté le masque. Elle se glorifie de toutes les révolutions qui ont bouleversé l'Europe, en particulier de la Révolution française, de toutes les lois contre le clergé, les ordres religieux, de la laïcisation des écoles, de l'enlèvement du crucifix dans les hôpitaux et les tribunaux, de la loi du divorce, de tout ce qui déchristianise la famille, et diminue l'autorité du père, pour lui substituer celle d'un État athée.
Elle pratique la devise : diviser pour régner : séparer de l'Église les rois et les états ; affaiblir les états en les séparant les uns des autres pour les dominer par un pouvoir occulte international; préparer des conflits de classes, en séparant des patrons les ouvriers ; affaiblir et ruiner l'amour de la patrie ; dans la famille séparer les époux en rendant le divorce légal et toujours plus facile, séparer enfin des parents les enfants pour faire de ceux-ci la proie de l'école dite neutre, mais impie, et de l'État athée.
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| Sujet: Re: L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L Dim 27 Déc - 16:33 | |
| TROISIÈME PARTIE
L'ENFER DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
NOTE : CONFIRMATION
Elle prétend travailler aussi au progrès de la civilisation, en rejetant toute révélation divine, toute autorité religieuse ; les mystères et les miracles doivent être bannis du programme scientifique.
Le péché originel, les sacrements, la grâce, les prières, les devoirs envers Dieu sont absolument rejetés, de même la distinction du bien et du mal, le bien est réduit à l'utile, toute obligation morale disparaît ; les sanctions de l'au-delà n'existent plus. L'autorité ne vient pas de Dieu, mais du peuple souverain.
En particulier la haine de Jésus-Christ règne dans la Maçonnerie, le blasphème et l'imprécation sont spécialement réservé à son saint nom ; on se procure même des hosties consacrées pour les profaner de la façon la plus outrageante.
L'apostasie est de rigueur lors de la réception dans les grades élevés. Aux yeux des initiés, comme à ceux des juifs endurcis, la condamnation de Jésus de Nazareth par l'autorité judiciaire est parfaitement justifiée et la crucifixion légitimée. L'Église catholique est donc combattue comme l'ennemie. Enfin la notion de Dieu d'abord tolérée, est rayée du vocabulaire maçonnique.
La perversité satanique de l'œuvre apparaît enfin par le secret dont elle enveloppe ses desseins. Les principaux projets, discutés dans des comités mystérieux, sont absolument soustraits à la connaissance des profanes et même de beaucoup d'affiliés de rang moins élevé.
Quant aux initiés, lors de la réception aux grades supérieurs, ils jurent de ne jamais révéler les secrets de la société, et eux qui se posent comme les défenseurs de la liberté, se livrent complètement à une puissance occulte, qu'ils ne connaissent pas et dont ils ne connaîtront probablement jamais les projets les plus cachés.
Le vol, la suppression de documents des plus importants, le sacrilège, l'assassinat, la violation de toutes les lois divines et humaines pourraient leur être imposés ; sous peine de mort ils devraient exécuter ces ordres abominables.
L'arbre se juge à ses fruits ; la racine de ce mauvais arbre est la haine de Dieu, du Christ Rédempteur et de son Église ; c'est donc une oeuvre satanique, qui est à sa manière une preuve de l'existence de l'enfer, de cet enfer que la même secte prétend nier.
Il ne faut donc pas s'étonner que l'Église ait condamné à plusieurs reprises la Franc-maçonnerie, sous Clément XII, Benoît XIV, Léon XII, Grégoire XVI, Pie IX, Léon XIII, cf. Denz., 1697, 1718, 1859 sq.
Le saint Office dans sa circulaire de février 1871 à l'épiscopat, impose même l'obligation de dénoncer les coryphées et les chefs occultes de ces sociétés dangereuses ; le fils n'est pas dispensé de dénoncer son père et réciproquement.
L'époux doit agir de même à l'égard de son épouse, le frère à l'égard de sa soeur ( Cf. Dict. théol. cath., art. Franc-maçonnerie, col 728.).
Le bien général de la société requiert cette sévérité. Le motif de cette décision du Saint Office est fondé sur les supercheries auxquelles recourent les loges, en livrant au public des noms d'emprunt.
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