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 Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales

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Miséricorde de Dieu




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MessageSujet: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 22 Aoû - 17:24

Rappel du premier message :

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ORAISON DÉDICATOIRE

Doux Jésus, mon Seigneur, mon Sauveur et mon Dieu, me voici prosterné devant votre Majesté, vouant et consacrant cet écrie à votre gloire.

Animez les paroles qui y sont de votre bénédiction, à ce que les âmes tour lesquelles je l'ai fait en puissent recevoir les inspirations sacrées que je leur désire, et particulièrement celle d'implorer sur moi votre immense Miséricorde, afin que, montrant aux autres le chemin de la dévotion en ce monde, je ne sois pas réprouvé et confondu éternellement en l'autre; ains qu'avec eux je chante à jamais pour cantique de triomphe, le mot que de tout mon coeur je prononce en témoignage de fidélité, parmi les hasards de cette vie mortelle :

VIVE JÉSUS, VIVE JÉSUS ! Oui, Seigneur Jésus, vivez et régnez en nos coeurs ès siècles des siècles. Ainsi soit-il.


Mon cher Lecteur,

je te prie de lire cette Préface pour ta satisfaction et la mienne.

La bouquetière Glycéra savait si proprement diversifier la disposition et le mélange des fleurs, qu'avec les mêmes fleurs elle faisait une grande variété de bouquets, de sorte que le peintre Pausias demeura court, voulant contrefaire à l'envi cette diversité douvrage, car il ne sut changer sa peinture en tant de façons comme Glycéra faisait ses bouquets :

ainsi le Saint-Esprit dispose et arrange avec tant de variété les enseignements de dévotion, qu'il donne par les langues et les plumes de ses serviteurs, que la doctrine étant toujours une même, les discours néanmoins qui s'en font sont bien différents, selon les diverses façons desquelles ils sont composés.

Je ne puis, certes, ni veux, ni dois écrire en cette Introduction que ce qui a déjà été publié par nos prédécesseurs sur ce sujet; ce sont les mêmes fleurs que je te présente, mon Lecteur, mais le bouquet que j'en ai fait sera différent des leurs, à raison de la diversité de l'agencement dont il est façonné.

Ceux qui ont traité de la dévotion ont presque tous regardé l'instruction des personnes fort retirées du commerce du monde, ou au moins ont enseigné une sorte de dévotion qui conduit à cette entière retraite.

Mon intention est d'instruire ceux qui vivent ès villes, ès ménages, en la cour, et qui par leur condition sont obligés de faire une vie commune quant à l'extérieur, lesquels bien souvent, sous le prétexte d'une prétendue impossibilité, ne veulent seulement pas penser à l'entreprise de la vie dévote, leur étant avis que, comme aucun animal n'ose goûter de la graine de lherbe nommée Palma Christi, aussi nul homme ne doit prétendre à la palme de la piété chrétienne, tandis qu'il vit emmi la presse des affaires temporelles.

Et je leur montre que comme les mères perles vivent emmi la mer sans prendre aucune goutte d'eau marine, et que vers les îles Chélidoines il y a des fontaines d'eau bien douce au milieu de la mer, et que les piraustes volent dedans les flammes sans brûler leurs ailes, ainsi peut une âme vigoureuse et constante vivre au monde sans recevoir aucune humeur mondaine, trouver des sources d'une douce piété au milieu des ondes amères de ce siècle, et voler entre les flammes des convoitises terrestres sans brûler les ailes des sacrés désirs de la vie dévote.

Il est vrai que cela est malaisé, et c'est pourquoi je désirerais que plusieurs y employassent leur soin avec plus d'ardeur quon na pas fait jusques à présent; comme, tout faible que je suis, je m'essaie par cet écrit de contribuer quelque secours à ceux qui d'un coeur généreux feront cette digne entreprise.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyLun 4 Déc - 17:52

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CHAPITRE XX

DE LA DIFFÉRENCE DES VRAIES ET DES VAINES AMITIÉS


Voici donc le grand avertissement, ma Philothée. Le miel d'Héraclée, qui est si vénéneux, ressemble à l'autre qui est si salutaire: il y a grand danger de prendre l'un pour l'autre ou de les prendre mêlés, car la bonté de l'un n'empêcherait pas la nuisance de l'autre.

Il faut être sur sa garde pour n'être point trompé en ces amitiés, notamment quand elles se contractent entre personnes de divers sexe, sous quel prétexte que ce soit, car bien souvent Satan donne le change à ceux qui aiment.

On commence par l'amour vertueux, mais si on n'est fort sage l'amour frivole se mêlera, puis l'amour sensuel, puis l'amour charnel ; oui même il y a danger en l'amour spirituel si on n'est fort sur sa garde, bien qu'en celui-ci il soit plus difficile de prendre le change, parce que sa pureté et blancheur rendent plus connaissables les souillures que Satan y veut mêler c'est pourquoi quand il l'entreprend il fait cela plus finement, et essaie de glisser les impuretés presque insensiblement.

Vous connaîtrez l'amitié mondaine d'avec la sainte et vertueuse, comme l'on connaît le miel d'Héraclée d'avec l'autre : le miel dHéraclée est plus doux à la langue que le miel ordinaire, à raison de l'aconit qui lui donne un surcroît de douceur, et l'amitié mondaine produit ordinairement un grand amas de paroles emmiellées, une cajolerie de petits mots passionnés et de louanges tirées de la beauté, de la grâce et des qualités sensuelles.

Mais l'amitié sacrée a un langage simple et franc, ne peut louer que la vertu et grâce de Dieu, unique fondement sur lequel elle subsiste.

Le miel d'Héraclée étant avalé excite un tournoiement de tête, et la fausse amitié provoque un tournoiement d'esprit qui fait chanceler la personne en la chasteté et dévotion, la portant à des regards affectés, mignards et immodérés, à des caresses sensuelles, à des soupirs désordonnés, à des petites plaintes de n'être pas aimée, à des petites, mais recherchées, mais attrayantes contenances, galanterie, poursuite des baisers, et autres privautés et faveurs inciviles, présages certains et indubitables d'une prochaine ruine de l'honnêteté.

Mais l'amitié sainte n'a des yeux que simples et pudiques, ni des caresses que pures et franches, ni des soupirs que pour le ciel, ni des privautés que pour l'esprit, ni des plaintes sinon quand Dieu n'est pas aimé, marques infaillibles de l'honnêteté.

Le miel d'Héraclée trouble la vue, et cette amitié mondaine trouble le jugement, en sorte que ceux qui en sont atteints pensent bien faire en mal faisant, et cuident que leurs excuses, prétextes et paroles soient des vraies raisons.

Ils craignent la lumière et aiment les ténèbres, mais l'amitié sainte a les yeux clairvoyants et ne se cache point, ains paraît volontiers devant les gens de bien.

Enfin, le miel d'Héraclée donne une grande amertume en la bouche: ains les fausses amitiés se convertissent et terminent en paroles et demandes charnelles et puantes, ou, en cas de refus, à des injures, calomnies, impostures, tristesses, confusions et jalousies qui aboutisssent bien souvent en abrutissement et forcènerie.

Mais la chaste amitié est toujours également honnête, civile et amiable, et jamais ne se convertit qu'en une plus parfaite et pure union d'esprits, image vive de l'amitié bienheureuse que l'on exerce au ciel.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 5 Déc - 18:41

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CHAPITRE XX

DE LA DIFFÉRENCE DES VRAIES ET DES VAINES AMITIÉS


Saint Grégoire Nazianzène dit que le paon, faisant son cri lorsqu'il fait sa roue et pavonnade, excite grandement les femelles qui l'écoutent à la lubricité: quand on voit un homme pavoner, se parer et venir comme cela cajoler, chuchoter et barguigner aux oreilles du'ne femme ou d'une fille, sans prétention d'un juste mariage, ah! sans doute, ce n'est que pour la provoquer à quelque impudicité;

et la femme d'honneur bouchera ses oreilles pour ne pas ouïr le cri de ce paon et la voix de lenchanteur qui la veut enchanter finement: que si elle écoute, o Dieu! quel mauvais augure de la future perte de son coeur!

Les jeunes gens qui font des contenances, grimaces et caresses, ou disent des paroles esquelles ils ne voudraient pas être surpris par leurs pères, mères, maris, femmes ou confesseurs, témoignent en cela qu'ils traitent d'autre chose que de l'honneur et de la conscience.

Notre Dame se trouble voyant un ange en forme humaine, parce qu'elle était seule et qu'il lui donnait des extrêmes, quoique célestes louanges:

o Sauveur du monde, la pureté craint un ange en forme humaine, et pourquoi donc l'impureté ne craindra-t-elle un homme, encore qu'il fût en figure d'ange, quand il la loue des louanges sensuelles et humaines?

CHAPITRE XXI

AVIS ET REMÈDES CONTRE LES MAUVAISES AMITIÉS


Mais quels remèdes contre cette engeance et fourmilière de folles amours, folâtreries, impuretés ? Soudain que vous en aurez les premiers ressentiments, tournez-vous court de l'autre côté, et, avec une détestation absolue de cette vanité, courez à la croix du Sauveur et prenez sa couronne d'épines pour en environner votre coeur, afin que ces petits renardeaux nen approchent.

Gardez bien de venir à aucune sorte de composition avec cet ennemi; ne dites pas: « Je l'écouterai, mais je ne ferai rien de ce qu'il me dira; je lui prêterai l'oreille, mais je lui refuserai le coeur. »

O ma Philothée, pour Dieu, soyez rigoureuse en telles occasions: le coeur et les oreilles s'entretiennent l'un à l'autre, et comme il est impossible d'empêcher un torrent qui a pris sa descente par le pendant d'une montagne, aussi est-il difficile d'empêcher que l'amour qui est tombé en l'oreille ne fasse soudain sa chute dans le coeur.

Les chèvres, selon Alcméon, halènent par les oreilles et non par les naseaux : il est vrai qu'Aristote le nie; or, ne sais-je ce que c'en est; mais je sais bien pourtant que notre coeur halène par loreille, et que comme il aspire et exhale ses pensées par la langue, il respire aussi par l'oreille, par laquelle il reçoit les pensées des autres.

Gardons donc soigneusement nos oreilles de l'air des folles paroles, car autrement soudain notre coeur en serait empesté. N'écoutez nulle sorte de propositions, sous quelque prétexte que ce soit: en ce seul cas, il n'y a point de danger d'être incivile et agreste.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 6 Déc - 19:02

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CHAPITRE XXI

AVIS ET REMÈDES CONTRE LES MAUVAISES AMITIÉS


Ressouvenez-vous que vous avez voué votre coeur à Dieu, et que votre amour lui étant sacrifié, ce serait donc sacrilège de lui en ôter un seul brin; sacrifiez-le-lui plutôt derechef par mille résolutions et protestations, et vous tenant entre icelles comme un cerf dans son fort, réclamez Dieu; il vous secourra et son amour prendra le vôtre en sa protection, afin quil vive uniquement pour lui.

Que si vous êtes déjà prise dans les filets de ces folles amours, o Dieu! quelle difficulté de vous en déprendre! Mettez-vous devant sa divine Majesté; connaissez en sa présence la grandeur de votre misère, votre faiblesse et vanité; puis, avec le plus grand effort de coeur quil vous sera possible, détestez ces amours commencées.

Abjurez la vaine profession que vous en avez faite; renoncez à toutes les promesses reçues, et d'une grande et très absolue volonté, arrêtez en votre coeur et vous résolvez de ne jamais plus rentrer en ces jeux et entretiens d'amour.

Si vous vous pouvez éloigner de l'objet, je l'approuverais infiniment, car comme ceux qui ont été mordus des serpents ne peuvent pas aisément guérir en la présence de ceux qui ont été autrefois blessés de la même morsure, aussi la personne qui est piquée d'amour guérira difficilement de cette passion, tandis quelle sera proche de l'autre qui aura été atteinte de la même piqûre.

Le changement de lieu sert extrêmement pour apaiser les ardeurs et inquiétudes, soit de la douleur, soit de l'amour. Le garçon duquel parle saint Ambroise au livre second de la Pénitence, ayant fait un long voyage, revint entièrement délivré des folles amours qu'il avait exercées, et tellement changé que la sotte amoureuse, le rencontrant et lui disant :

« Ne me connais-tu pas ? je suis bien moi-même. » « Oui da, répondit-il; mais moi, je ne suis pas moi-même » : l'absence lui avait apporté cette heureuse mutation. Et saint Augustin témoigne que pour alléger la douleur qu'il eut en la mort de son ami, il s'ôta de Tagaste, où icelui était mort, et s'en alla à Carthage.

Mais qui ne peut s'éloigner, que doit-il faire ? Il faut absolument retrancher toute conversation particulière, tout entretien secret, toute douceur des yeux, tout souris, et généralement toutes sortes de communications et amorces qui peuvent nourrir ce feu puant et fumeux; ou pour le plus, s'il est forcé de parler au complice, que ce soit pour déclarer, par une hardie, courte et sévère protestation, le divorce éternel que l'on a juré.

Je crie tout haut à quiconque est tombé dans ces pièges d'amourettes:

« Taillez, tranchez, rompez »; il ne faut pas s'amuser à découdre ces folles amitiés, il les faut déchirer; il n'en faut pas dénouer les liaisons, il les faut rompre ou couper; aussi bien les cordons et les liens n'en valent rien. Il ne faut point ménager pour un amour qui est si contraire à l'amour de Dieu.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 7 Déc - 18:45

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CHAPITRE XXI
AVIS ET REMÈDES CONTRE LES MAUVAISES AMITIÉS


Mais après que j'aurai ainsi rompu les chaînes de cet infâme esclavage, encore m'en restera-t-il quelque ressentiment, et les marques et traces des fers en demeureront encore imprimées en mes pieds, c'est-à-dire en mes affections? Non feront, Philothée, si vous avez conçu autant de détestation de votre mal comme il mérite; car si cela est, vous ne serez plus agitée d'aucun mouvement que de celui d'une extrême horreur de cet infâme amour et de tout ce qui en dépend, et demeurerez quitte de toute autre affection envers lobjet abandonné, que de celle d'une très pure charité pour Dieu.

Mais si, pour l'imperfection de votre repentir, il vous reste encore quelques mauvaises inclinations, procurez pour votre âme une solitude mentale, selon ce que je vous ai enseigné ci-devant et retirez-vous-y le plus que vous pourrez; et par mille réitérés élancements d'esprit, renoncez à toutes vos inclinations; reniez-les de toutes vos forces; lisez plus que l'ordinaire des saints livres; confessez-vous plus souvent que de coutume, et vous communiez ; conférez humblement et naïvement de toutes les suggestions et tentations qui vous arriveront pour ce regard avec votre directeur, si vous pouvez, ou au moins avec quelque âme fidèle et prudente; et ne doutez point que Dieu ne vous affranchisse de toutes passions, pourvu que vous continuiez fidèlement en ces exercices.

« Ah ! ce me direz-vous, mais ne sera-ce point une ingratitude, de rompre si impiteusement une amitié? Oh! que bienheureuse est l'ingratitude qui nous rend agréables à Dieu! Non, de par Dieu, Philothée, ce ne sera pas ingratitude, ains un grand bénéfice que vous ferez à l'amant, car en rompant vos liens, vous romprez les siens, puisqu'ils vous étaient communs, et bien que pour l'heure il ne s'aperçoive pas de son bonheur, il le reconnaîtra bientôt après, et avec vous chantera pour action de grâce : «O Seigneur, vous avez rompu mes liens, je vous sacrifierai l'hostie de louange et invoquerai votre saint Nom. »

CHAPITRE XXII
QUELQUES AUTRES AVIS SUR LE SUJET DES AMITIÉS


L'amitié requiert une grande communication entre les amants, autrement elle ne peut ni naître ni subsister. C'est pourquoi il arrive souvent qu'avec la communication de l'amitié, plusieurs autres communications passent et se glissent insensiblement de coeur en coeur, par une mutuelle infusion et réciproque écoulement d'affections, d'inclinations et d'impressions.

Mais surtout, cela arrive quand nous estimons grandement celui que nous aimons; car alors nous ouvrons tellement le coeur à son amitié, qu'avec icelle ses inclinations et impressions entrent aisément tout entières, soit qu'elles soient bonnes ou qu'elles soient mauvaises.

Certes, les abeilles qui amassent le miel d'Héraclée ne cherchent que le miel, mais avec le miel, elles sucent insensiblement les qualités vénéneuses de l'aconit sur lequel elles font leur cueillette. Or donc, Philothée, il faut bien pratiquer en ce sujet la parole que le Sauveur de nos âmes voulait dire, ainsi que les Anciens nous ont appris:

« Soyez bons changeurs et monnayeurs »c'est-à-dire, ne recevez pas la fausse monnaie avec la bonne, ni le bas or avec le fin or; séparez le précieux d'avec le chétif ; oui, car il n'y a presque celui qui nait quelque imperfection.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 9 Déc - 4:49

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CHAPITRE XXII

QUELQUES AUTRES AVIS SUR LE SUJET DES AMITIÉS


Et quelle raison y a-t-il de recevoir pêle-mêle les tares et imperfections de l'ami avec son amitié ? Il le faut certes aimer nonobstant son imperfection, mais il ne faut ni aimer, ni recevoir son imperfection ; car l'amitié requiert la communication du bien et non pas du mal.

Comme donc ceux qui tirent le gravier du Tage, en séparent lor qu'ils y trouvent pour l'emporter, et laissent le sable sur le rivage, de même ceux qui ont la communication de quelque bonne amitié doivent en séparer le sable des imperfections, et ne le point laisser entrer en leur âme.

Certes, saint Grégoire Nazianzène témoigne que plusieurs, aimant et admirant saint Basile, s'étaient laissé porter à limiter, même en ses imperfections extérieures, « en son parler lentement et avec un esprit abstrait et pensif, en la forme de sa barbe et en sa démarche. »

Et nous voyons des maris, des femmes, des enfants, des amis qui ayant en grande estime leurs amis, leurs pères, leurs maris et leurs femmes acquièrent ou par condescendance ou par imitation, mille mauvaises petites humeurs au commerce de l'amitié qu'ils ont ensemble.

Or, cela ne se doit aucunement faire, car chacun a bien assez de ses mauvaises inclinations sans se surcharger de celles des autres; et non seulement l'amitié ne requiert pas cela, mais au contraire, elle nous oblige à nous entraider pour nous affranchir réciproquement de toutes sortes d'imperfections.

Il faut sans doute supporter doucement l'ami en ses imperfections, mais non pas le porter en icelles, et beaucoup moins les transporter en nous.

Mais je ne parle que des imperfections ; car quant aux péchés il ne faut ni les porter ni les supporter en l'ami. C'est une amitié ou faible ou méchante de voir périr l'ami et ne le point secourir, de le voir mourir d'un apostème et n'oser lui donner le coup du rasoir de la correction pour le sauver.

La vraie et vivante amitié ne peut durer entre les péchés. On dit que la salamandre éteint le feu dans lequel elle se couche; et le péché ruine l'amitié en laquelle il se loge: si c'est un péché passager, l'amitié lui donne soudain la fuite par la correction; mais s'il séjourne et arrête, tout aussitôt l'amitié périt, car elle ne peut subsister que sur la vraie vertu; combien moins donc doit-on pécher pour l'amitié?

L'ami est ennemi quand il nous veut conduire au péché, et mérite de perdre l'amitié quand il veut perdre et damner l'ami; ains c'est l'une des plus assurées marques d'une fausse amitié que de la voir pratiquée envers une personne vicieuse, de quelle sorte de péché que ce soit.

Si celui que nous aimons est vicieux, sans doute notre amitié est vicieuse; car puisqu'elle ne peut regarder la vraie vertu, il est force qu'elle considère quelque vertu folâtre et quelque qualité sensuelle.

La société faite pour le profit temporel entre les marchands n'a que l'image de la vraie amitié; car elle se fait non pour l'amour des personnes mais pour l'amour du gain.

Enfin, ces deux divines paroles sont deux grandes colonnes pour bien assurer la vie chrétienne. L'une est du Sage: « Qui craint Dieu aura pareillement une bonne amitié »; l'autre est de saint Jacques: « L'amitié de ce monde est ennemie de Dieu. »

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 10 Déc - 0:31

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CHAPITRE XXIII

DES EXERCICES DE LA MORTIFICATION EXTÉRIEURE


Ceux qui traitent des choses rustiques et champêtres assurent que si on écrit quelque mot sur une amande bien entière et qu'on la remette dans son noyau, le pliant et serrant bien proprement et le plantant ainsi, tout le fruit de l'arbre qui en viendra se trouvera écrit et gravé du même mot.

Pour moi, Philothée, je nai jamais pu approuver la méthode de ceux qui pour réformer lhomme commencent par lextérieur, par les contenances, par les habits, par les cheveux.

Il me semble, au contraire, quil faut commencer par l'intérieur: «Convertissez-vous à moi, dit Dieu, de tout votre coeur »; «Mon enfant, donne-moi ton coeur»; car aussi, le coeur étant la source des actions, elles sont telles qu'il est. L'Epoux divin invitant lâme:

«Mets-moi, dit-il, comme un cachet sur ton coeur, comme un cachet sur ton bras. » Oui vraiment, car quiconque a Jésus-Christ en son coeur, il l'a bientôt après en toutes ses actions extérieures.

C'est pourquoi, chère Philothée, j'ai voulu avant toutes choses graver et inscrire sur votre coeur ce mot saint et sacré:

Vive Jésus! assuré que je suis qu'après cela, votre vie, laquelle vient de votre coeur comme un amandier de son noyau, produira toutes ses actions qui sont ses fruits, écrites et gravées du même mot de salut, et que comme ce doux Jésus vivra dedans votre coeur, il vivra aussi en tous vos déportements, et paraîtra en vos yeux, en votre bouche, en vos mains, voire même en vos cheveux; et pourrez saintement dire, à l'imitation de saint Paul :

«Je vis, mais non plus moi, ains Jésus-Christ vit en moi ». Bref, qui a gagné le coeur de l'homme a gagné tout l'homme.

Mais ce coeur même par lequel nous voulons commencer, requiert quon l'instruise comme il doit former son train et maintien extérieur, afin que non seulement on y voie la sainte dévotion, mais aussi une grande sagesse et discrétion. Pour cela je vous vais brièvement donner plusieurs avis.

Si vous pouvez supporter le jeûne, vous ferez bien de jeûner quelques jours, outre les jeûnes que l'Eglise nous commande; car outre l'effet ordinaire du jeûne, d'élever l'esprit, réprimer la chair, pratiquer la vertu et acquérir plus grande récompense au ciel, c'est un grand bien de se maintenir en la possession de gourmander la gourmandise même, et tenir l'appétit sensuel et le corps sujet à la loi de l'esprit; et bien qu'on ne jeûne pas beaucoup, l'ennemi néanmoins nous craint davantage quand il connaît que nous savons jeûner.

Les mercredi, vendredi et samedi sont les jours auxquels les anciens chrétiens sexerçaient le plus à labstinence prenez-en donc de ceux-là pour jeûner, autant que votre dévotion et la discrétion de votre directeur vous le conseilleront.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 10 Déc - 17:25

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CHAPITRE XXIII

DES EXERCICES DE LA MORTIFICATION EXTÉRIEURE


Ce dirais volontiers comme saint Jérôme dit à la bonne dame Léta: « Les jeûnes longs et immodérés me déplaisent bien fort, surtout en ceux qui sont en âge encore tendre. J'ai appris par expérience que le petit ânon, étant las en chemin, cherche de s'écarter » ; c'est-à-dire, les jeunes gens portés à des infirmités par l'excès des jeûnes, se convertissent aisément aux délicatesses.

Les cerfs courent mal en deux temps: quand ils sont trop chargés de venaison et quand ils sont trop maigres. Nous sommes grandement exposés aux tentations, quand notre corps est trop nourri et quand il est trop abattu; car l'un le rend insolent en son aise et l'autre le rend désespéré en son mésaise; et comme nous ne le pouvons porter quand il est trop gras, aussi ne nous peut-il porter quand il est trop maigre.

Le défaut de cette modération ès jeûnes, disciplines, haires et âpretés rend inutiles au service de la charité les meilleures années de plusieurs, comme il fit même à saint Bernard qui se repentit d'avoir usé de trop d'austérité ; et d'autant qu'ils lont maltraité au commencement, ils sont contraints de le flatter à la fin.

N'eussent-ils pas mieux fait de lui faire un traitement égal, et proportionné aux offices et travaux auxquels leurs conditions les obligeaient?

Le jeûne et le travail matent et abattent la chair. Si le travail que vous ferez vous est nécessaire, ou fort utile à la gloire de Dieu, j'aime mieux que vous souffriez la peine du travail que celle du jeûne: c'est le sentiment de l'Eglise, laquelle, pour les travaux utiles au service de Dieu et du prochain, décharge ceux qui les font du jeûne même commandé.

L'un a de la peine à jeûner, l'autre en a à servir les malades, visiter les prisonniers, confesser, prêcher, assister les désolés, prier et semblables exercices cette peine vaut mieux que celle-là; car outre qu'elle mate également, elle a des fruits beaucoup plus désirables.

Et partant, généralement, il est mieux de garder plus de forces corporelles quil nest requis, que den ruiner plus quil ne faut; car on peut toujours les abattre quand on veut, mais on ne les peut pas réparer toujours quand on veut.

Il me semble que nous devons avoir en grande révérence la parole que notre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ dit à ses disciples : « Mangez ce qui sera mis devant vous. » C'est, comme je crois, une plus grande vertu de manger sans choix ce qu'on vous présente et en même ordre qu'on le vous présente, ou qu'il soit à votre goût ou qu'il ne le soit pas, que de choisir toujours le pire.

Car encore que cette dernière façon de vivre semble plus austère, l'autre néanmoins a plus de résignation, car par icelle on ne renonce pas seulement à son goût, mais encore à son choix ; et si, ce n'est pas une petite austérité de tourner son goût à toute main et le tenir sujet aux rencontres, joint que cette sorte de mortification ne paraît point, n'incommode personne, et est uniquement propre pour la vie civile.

Reculer une viande, pour en prendre une autre, pincer et racler toute chose, ne trouver jamais rien de bien apprêté ni de bien net, faire des mystères à chaque morceau, cela ressent un coeur mol et attentif aux plats et aux écuelles. J'estime plus que saint Bernard bût de l'huile pour de l'eau ou du vin, que s'il eût bu de l'eau d'absinthe avec attention; car c'était signe qu'il ne pensait pas à ce qu'il buvait.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 12 Déc - 1:59

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CHAPITRE XXIII

DES EXERCICES DE LA MORTIFICATION EXTÉRIEURE


Ce dirais volontiers comme saint Jérôme dit à la bonne dame Léta: « Les jeûnes longs et immodérés me déplaisent bien fort, surtout en ceux qui sont en âge encore tendre. J'ai appris par expérience que le petit ânon, étant las en chemin, cherche de s'écarter » ; c'est-à-dire, les jeunes gens portés à des infirmités par l'excès des jeûnes, se convertissent aisément aux délicatesses.

Les cerfs courent mal en deux temps: quand ils sont trop chargés de venaison et quand ils sont trop maigres. Nous sommes grandement exposés aux tentations, quand notre corps est trop nourri et quand il est trop abattu; car l'un le rend insolent en son aise et l'autre le rend désespéré en son mésaise; et comme nous ne le pouvons porter quand il est trop gras, aussi ne nous peut-il porter quand il est trop maigre.

Le défaut de cette modération ès jeûnes, disciplines, haires et âpretés rend inutiles au service de la charité les meilleures années de plusieurs, comme il fit même à saint Bernard qui se repentit d'avoir usé de trop d'austérité ; et d'autant qu'ils lont maltraité au commencement, ils sont contraints de le flatter à la fin.

N'eussent-ils pas mieux fait de lui faire un traitement égal, et proportionné aux offices et travaux auxquels leurs conditions les obligeaient?

Le jeûne et le travail matent et abattent la chair. Si le travail que vous ferez vous est nécessaire, ou fort utile à la gloire de Dieu, j'aime mieux que vous souffriez la peine du travail que celle du jeûne: c'est le sentiment de l'Eglise, laquelle, pour les travaux utiles au service de Dieu et du prochain, décharge ceux qui les font du jeûne même commandé.

L'un a de la peine à jeûner, l'autre en a à servir les malades, visiter les prisonniers, confesser, prêcher, assister les désolés, prier et semblables exercices cette peine vaut mieux que celle-là; car outre qu'elle mate également, elle a des fruits beaucoup plus désirables.

Et partant, généralement, il est mieux de garder plus de forces corporelles quil nest requis, que den ruiner plus quil ne faut; car on peut toujours les abattre quand on veut, mais on ne les peut pas réparer toujours quand on veut.

Il me semble que nous devons avoir en grande révérence la parole que notre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ dit à ses disciples : « Mangez ce qui sera mis devant vous. » C'est, comme je crois, une plus grande vertu de manger sans choix ce qu'on vous présente et en même ordre qu'on le vous présente, ou qu'il soit à votre goût ou qu'il ne le soit pas, que de choisir toujours le pire.

Car encore que cette dernière façon de vivre semble plus austère, l'autre néanmoins a plus de résignation, car par icelle on ne renonce pas seulement à son goût, mais encore à son choix ; et si, ce n'est pas une petite austérité de tourner son goût à toute main et le tenir sujet aux rencontres, joint que cette sorte de mortification ne paraît point, n'incommode personne, et est uniquement propre pour la vie civile.

Reculer une viande, pour en prendre une autre, pincer et racler toute chose, ne trouver jamais rien de bien apprêté ni de bien net, faire des mystères à chaque morceau, cela ressent un coeur mol et attentif aux plats et aux écuelles. J'estime plus que saint Bernard bût de l'huile pour de l'eau ou du vin, que s'il eût bu de l'eau d'absinthe avec attention; car c'était signe qu'il ne pensait pas à ce qu'il buvait.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 12 Déc - 17:08

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CHAPITRE XXIII

DES EXERCICES DE LA MORTIFICATION EXTÉRIEURE


Il en prend ainsi bien souvent en nos affaires; car cette femme voit son mari ou son enfant malade, et soudain, elle court au jeûne, à la haire, à la discipline, comme fit David pour un pareil sujet.

Hélas ! chère amie, vous battez le pauvre âne, vous affligez votre corps, et il ne peut mais de votre mal, ni de quoi Dieu a son épée dégainée sur vous; corrigez votre coeur qui est idolâtre de ce mari, et qui permettait mille vices à l'enfant et le destinait à l'orgueil, à la vanité et à l'ambition.

Cet homme voit que souvent il tombe lourdement au péché de luxure : le reproche intérieur vient contre sa conscience avec l'épée au poing, pour l'outrepercer d'une sainte crainte; et soudain son coeur revenant à soi :

« Ah! félonne chair, dit-il; ah! corps déloyal, tu m'as trahi »; et le voilà incontinent à grands coups sur cette chair, à des jeûnes immodérés, à des disciplines démesurées, à des haires insupportables.

O pauvre âme, si ta chair pouvait parler comme l'ânesse de Balaam, elle te dirait : « Pourquoi me frappes-tu, misérable ? c'est contre toi, o mon âme, que Dieu arme sa vengeance, c'est toi qui es la criminelle; pourquoi me conduis-tu aux mauvaises conversations? pourquoi appliques-tu mes yeux, mes mains, mes lèvres aux lascivetés ?

Pourquoi me troubles-tu par des mauvaises imaginations ? Fais des bonnes pensées, et je n'aurais pas de mauvais mouvements; hante les gens pudiques, et je ne serai point agitée de ma concupiscence.

Hélas! c'est toi qui me jettes dans le feu, et tu ne veux pas que je brûle; tu me jettes la fumée aux yeux, et tu ne veux pas qu'ils s'enflamment. »

Et Dieu sans doute vous dit en ces cas-là: « Battez, rompez, fendez, froissez vos coeurs principalement, car c'est contre eux que mon courroux est animé. »

Certes pour guérir la démangeaison, il n'est pas tant besoin de se laver et baigner, comme de purifier le sang et rafraîchir le foie; ainsi, pour nous guérir de nos vices, il est voirement bon de mortifier la chair, mais il est surtout nécessaire de bien purifier nos affections et rafraîchir nos coeurs.Or, en tout et partout, il ne faut nullement entreprendre des austérités corporelles qu'avec l'avis de notre guide.

CHAPITRE XXIV

DES CONVERSATIONS ET DE LA SOLITUDE


Rechercher les conversations et les fuir, ce sont deux extrémités blâmables en la dévotion civile, qui est celle de laquelle je vous parle. La fuite dicelles tient du dédain et mépris du prochain, et la recherche ressent à l'oisiveté et à l'inutilité.

Il faut aimer le prochain comme soi-même: pour montrer qu'on l'aime, il ne faut pas fuir d'être avec lui, et pour témoigner qu'on s'aime soi-même, on doit demeurer en soi-même quand on y est.

Or, on y est quand on est seul: « Pense à toi-même, dit saint Bernard, et puis aux autres. » Si donc rien ne vous presse d'aller en conversation ou d'en recevoir chez vous, demeurez en vous-même et vous entretenez avec votre coeur; mais si la conversation vous arrive, ou quelque juste sujet vous invite à vous y rendre, allez de par Dieu, Philothée, et voyez votre prochain de bon coeur et de bon oeil.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 14 Déc - 2:47

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CHAPITRE XXIV

DES CONVERSATIONS ET DE LA SOLITUDE


On appelle mauvaises conversations celles qui se font pour quelque mauvaise intention, ou bien quand ceux qui entreviennent en icelles sont vicieux, indiscrets et dissolus; et pour celles-là, il s'en faut détourner, comme les abeilles se détournent de l'amas de taons et frelons.

Car, comme ceux qui ont été mordus des chiens enragés ont la sueur, l'haleine et la salive dangereuse, et principalement pour les enfants et gens de délicate complexion, ainsi ces vicieux et débordés ne peuvent être fréquentés qu'avec hasard et péril, surtout par ceux qui sont de dévotion encore tendre et délicate.

Il y a des conversations inutiles à toute autre chose quà la seule récréation, lesquelles se font par un simple divertissement des occupations sérieuses; et quant à celles-là, comme il ne faut pas s'y adonner, aussi peut-on leur donner le loisir destiné à la récréation.

Les autres conversations ont pour leur fin l'honnêteté, comme sont les visites mutuelles et certaines assemblées qui se font pour honorer le prochain et quant à celles-là, comme il ne faut pas être superstitieuse à les pratiquer, aussi ne faut-il pas être du tout incivile à les mépriser, mais satisfaire avec modestie au devoir que l'on y a, afin d'éviter également la rusticité et la légèreté.

Restent les conversations utiles, comme sont celles des personnes dévotes et vertueuses; o Philothée, ce vous sera toujours un grand bien d'en rencontrer souvent de telles.

La vigne plantée parmi les oliviers porte des raisins onctueux et qui ont le goût des olives : une âme qui se trouve souvent parmi les gens de vertu ne peut qu'elle ne participe à leurs qualités.

Les bourdons seuls ne peuvent point faire du miel, mais avec les abeilles ils s'aident à le faire: c'est un grand avantage pour nous bien exercer à la dévotion, de converser avec les âmes dévotes.

En toutes conversations, la naïveté, simplicité, douceur et modestie sont toujours préférées. Il y a des gens qui ne font nulle sorte de contenance ni de mouvement qu'avec tant d'artifice que chacun en est ennuyé; et comme celui qui ne voudrait jamais se pourmener qu'en comptant ses pas, ni parler qu'en chantant, serait fâcheux au reste des hommes, ainsi ceux qui tiennent un maintien artificieux et qui ne font rien qu'à cadence, importunent extrêmement la conversation, et en cette sorte de gens il y a toujours quelque espèce de présomption.

Il faut pour l'ordinaire qu'une joie modérée prédomine en notre conversation. Saint Romuald et saint Antoine sont extrêmement loués de quoi, nonobstant toutes les austérités, ils avaient la face et les paroles ornées de joie, gaîté et civilité.

Réjouissez-vous avec les joyeux; je vous dis encore une fois avec l'Apôtre : « Soyez toujours joyeuse, mais en Notre Seigneur, et que votre modestie paraisse à tous les hommes. » Pour vous réjouir en Notre Seigneur, il faut que le sujet de votre joie, soit non seulement loisible, mais honnête :

ce que je dis, parce qu'il y a des choses loisibles, qui pourtant ne sont pas honnêtes ; et afin que votre modestie paraisse, gardez-vous des insolences lesquelles sans doute sont toujours répréhensibles : faire tomber l'un, noircir l'autre, piquer le tiers, faire du mal à un fol, ce sont des risées et joies sottes et insolentes.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 15 Déc - 1:51

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CHAPITRE XXIV

DES CONVERSATIONS ET DE LA SOLITUDE


Mais toujours, outre la solitude mentale à laquelle vous vous pouvez retirer emmi les plus grandes conversations, ainsi que j'ai dit ci-dessus, vous devez aimer la solitude locale et réelle, non pas pour aller ès déserts, comme sainte Marie Egyptienne, saint Paul, saint Antoine, Arsénius et les autres pères solitaires, mais pour être quelque peu en votre chambre, en votre jardin et ailleurs, où plus à souhait vous puissiez retirer votre esprit en votre coeur, et récréer votre âme par des bonnes cogitations et saintes pensées, ou par un peu de bonne lecture, à l'exemple de ce grand évêque Nazianzène qui, parlant de soi-même :

« Je me pourmenais, dit-il, moi-même avec moi-même sur le soleil couchant, et passais le temps sur le rivage de la mer; car j'ai accoutumé d'user de cette récréation pour nie relâcher et secouer un peu des ennuis ordinaires»; et là-dessus il discourt de la bonne pensée quil fit, que je vous ai récitée ailleurs.

Et à l'exemple encore de saint Ambroise, duquel parlant saint Augustin, il dit que souvent, étant entré en sa chambre (car on ne refusait lentrée à personne), il le regardait lire; et après avoir attendu quelque temps, de peur de l'incommoder, il s'en retournait sans mot dire, pensant que ce peu de temps qui restait à ce grand pasteur pour revigorer et récréer son esprit, après le tracas de tant d'affaires, ne lui devait pas être ôté. Aussi, après que les Apôtres eurent un jour raconté à Notre Seigneur comme ils avaient prêché et beaucoup fait: » Venez, leur dit-il, en la solitude, et vous y reposez un peu. »

CHAPITRE XXV

DE LA BIENSÉANCE DES HABITS



Saint Paul veut que les femmes dévotes (il en faut autant dire des hommes) soient revêtues d'habits bienséants, se parant avec pudicité et sobriété. Or, la bienséance des habits et autres ornements dépend de la matière, de la forme et de la netteté. Quant à la netteté, elle doit presque toujours être égale en nos habits, sur lesquels, tant quil est possible, nous ne devons laisser aucune sorte de souillure et vilenie.

La netteté extérieure représente en quelque façon lhonnêteté intérieure. Dieu même requiert lhonnêteté corporelle en ceux qui sapprochent de ses autels et qui ont la charge principale de la dévotion

Quant à la matière et à la forme des habits, a bienséance se considère par plusieurs circonstances du temps, de l'âge, des qualités, des compagnies, des occasions.

On se pare ordinairement mieux ès jours de fête, selon la grandeur du jour qui se célèbre; en temps de pénitence, comme en carême, on se démet bien fort; aux noces on porte les robes nuptiales, et aux assemblées funèbres, les robes de deuil; auprès des princes on rehausse létat, lequel on doit abaisser entre les domestiques.

La femme mariée se peut et doit orner auprès de son mari, quand il le désire; si elle en fait de même en étant éloignée, on demandera quels yeux elle veut favoriser avec ce soin particulier.

On permet plus d'affiquets aux filles, parce qu'elles peuvent loisiblement désirer d'agréer à plusieurs, quoique ce ne soit qu'afin d'en gagner un par saint mariage.

On ne trouve pas non plus mauvais que les veuves à marier se parent aucunement, pourvu qu'elles ne fassent point paraître de folâtrerie, d'autant qu'ayant déjà été mères de famille, et passé par les regrets du veuvage, on tient leur esprit pour mûr et attrempé. Mais quant aux vraies veuves, qui le sont non seulement de corps mais aussi de coeur, nul ornement ne leur est convenable, sinon l'humilité, la modestie et la dévotion; car si elles veulent donner de l'amour aux hommes, elles ne sont pas vraies veuves, et si elles n'en veulent pas donner, pourquoi en portent-elles les outils ?

Qui ne veut recevoir les hôtes, il faut qu'il ôte l'enseigne de son logis. On se moque toujours des vieilles gens, quand ils veulent faire les jolis: c'est une folie qui n'est supportable qu'à la jeunesse.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 16 Déc - 4:48

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CHAPITRE XXV
DE LA BIENSÉANCE DES HABITS


Soyez propre, Philothée; qu'il n'y ait rien sur vous de traînant et mal agencé: c'est un mépris de ceux avec lesquels on converse, d'aller entre eux en habit désagréable; mais gardez-vous bien des afféteries, vanités, curiosités et folâtreries.

Tenez-vous toujours tant qu'il vous sera possible, du côté de la simplicité et modestie, qui est sans doute le plus grand ornement de la beauté et la meilleure excuse pour la laideur. Saint Pierre avertit principalement les jeunes femmes de ne porter point leurs cheveux tant crêpés, frisés, annelés et serpentés.

Les hommes qui sont si lâches que de s'amuser à ces muguetteries sont partout décriés comme hermaphrodites, et les femmes vaines sont tenues pour imbéciles en chasteté; au moins si elles en ont, elle n'est pas visible parmi tant de fatras et bagatelles.

On dit qu'on n'y pense pas mal, mais je réplique, comme j'ai fait ailleurs, que le diable en y pense toujours. Pour moi, je voudrais que mon dévot et ma dévote fussent toujours les mieux habillés de la troupe, mais les moins pompeux et affétés, et, comme il est dit au proverbe, qu'ils fussent parés de grâce, bienséance et dignité.

Saint Louis dit en un mot, que lon se doit vêtir selon son état, en sorte que les sages et bons ne puissent dire: « Vous en faites trop », ni les jeunes gens: « Vous en faites trop peu. » Mais en cas que les jeunes ne se veuillent pas contenter de la bienséance, il se faut arrêter à lavis des sages.

CHAPITRE XXVI
DU PARLER, ET PREMIÈREMENT COMME IL FAUT PARLER DE DIEU


Les médecins prennent une grande connaissance de la santé ou maladie dun homme par linspection de sa langue; et nos paroles sont les vraies indices des qualités de nos âmes: « Par tes paroles, dit le Sauveur, tu seras justifié, et par tes paroles tu seras condamné. » Nous portons soudain la main sur la douleur que nous sentons, et la langue sur lamour que nous avons.

Si donc vous êtes bien amoureuse de Dieu, Philothée, vous parlerez souvent de Dieu, ès devis familiers que vous ferez avec vos domestiques, amis et voisins: oui car « la bouche du juste méditera la sapience, et sa langue parlera du jugement. »Et comme les abeilles ne démêlent autre chose que le miel avec leur petite bouchette, ainsi votre langue sera toujours emmiellée de son Dieu, et n'aura point de plus grande suavité que de sentir couler entre vos lèvres des louanges et bénédictions de son nom, ainsi qu'on dit de saint François, qui prononçant le saint nom du Seigneur, suçait et léchait ses lèvres, comme pour en tirer la plus grande douceur du monde.

Mais parlez toujours de Dieu comme de Dieu, c'est-à-dire révéremment et dévotement, non point faisant la suffisante ni la prêcheuse, mais avec l'esprit de douceur, de charité et d'humilité, distillant autant que vous savez (comme il est dit de l'Epouse au Cantique des Cantiques) le miel délicieux de la dévotion et des choses divines, goutte à goutte, tantôt dedans l'oreille de l'un, tantôt dedans l'oreille de l'autre, priant Dieu au secret de votre âme qu'il lui plaise de faire passer cette sainte rosée jusque dans le coeur de ceux qui vous écoutent.

Surtout il faut faire cet office angélique doucement et souèvement, non point par manière de correction, mais par manière d'inspiration, car c'est merveille combien la suavité et amiable proposition de quelque bonne chose est une puissante amorce pour attirer les coeurs.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 16 Déc - 18:59

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CHAPITRE XXVI

DU PARLER, ET PREMIÈREMENT COMME IL FAUT PARLER DE DIEU


Ne parlez donc jamais de Dieu ni de la dévotion par manière d'acquit et d'entretien, mais toujours avec attention et dévotion: ce que je dis pour vous ôter une remarquable vanité, qui se trouve en plusieurs qui font profession de dévotion, lesquels à tous propos disent des paroles saintes et ferventes par manière d'entregent et sans y penser nullement, et après les avoir dites, il leur est avis qu'ils sont tels que les paroles témoignent ce qui n'est pas.

CHAPITRE XXVII

DE L'HONNÊTETÉ DES PAROLES ET DU RESPECT QUE L'ON DOIT AUX PERSONNES

« Si quelqu'un ne pèche point en parole, dit saint Jacques, il est homme parfait. » Gardez-vous soigneusement de lâcher aucune parole déshonnête; car encore que vous ne les disiez pas avec mauvaise intention, si est-ce que ceux qui les oient, les peuvent recevoir d'une autre sorte.

La parole déshonnête tombant dans un coeur faible, s'étend et se dilate comme une goutte dhuile sur le drap; et quelquefois elle saisit tellement le coeur, qu'elle le remplit de mille pensées et tentations lubriques.

Car, comme le poison du corps entre par la bouche, aussi celui du coeur entre par l'oreille, et la langue qui le produit est meurtrière, d'autant qu'encore qu'à l'aventure le venin qu'elle a jeté nait pas fait son effet, pour avoir trouvé les coeurs des auditeurs munis de quelque contrepoison, si est-ce qu'il n'a pas tenu à sa malice qu'elle ne les ait fait mourir.

Et que personne ne me dise qu'il n'y pense pas, car Notre Seigneur qui connaît les pensées a dit que « la bouche parle de l'abondance du coeur »; et si nous n'y pensons pas mal, le malin néanmoins en pense beaucoup, et se sert toujours secrètement de ces mauvais mots pour en transpercer le coeur de quelqu'un.

On dit que ceux qui ont mangé de l'herbe qu'on appelle angélique ont toujours l'haleine douce et agréable; et ceux qui ont au coeur l'honnêteté et chasteté, qui est la vertu angélique, ont toujours leurs paroles nettes, civiles et pudiques.

Quant aux choses indécentes et folles, l'Apôtre ne veut pas que seulement on les nomme, nous assurant que rien ne corrompt tant les bonnes moeurs que les mauvais devis.

Si ces paroles déshonnêtes sont dites à couvert, avec afféterie et subtilité, elles sont infiniment plus vénéneuses; car, comme plus un dard est pointu, plus il entre aisément en nos corps, ainsi plus un mauvais mot est aigu, plus il pénètre en nos coeurs.

Et ceux qui pensent être galants hommes à dire de telles paroles en conversation, ne savent pas pourquoi les conversations sont faites ; car elles doivent être comme essaims d'abeilles assemblées pour faire le miel de quelque doux et vertueux entretien, et non pas comme un tas de guêpes qui se joignent pour sucer quelque pourriture.

Si quelque sot vous dit des paroles messéantes, témoignez que vos oreilles en sont offensées, ou vous détournant ailleurs ou par quelque autre moyen, selon que votre prudence vous enseignera.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 17 Déc - 18:26

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CHAPITRE XXVII

DE L'HONNÊTETÉ DES PAROLES ET DU RESPECT QUE L'ON DOIT AUX PERSONNES


C'est une des plus mauvaises conditions qu'un esprit peut avoir, que d'être moqueur: Dieu hait extrêmement ce vice et en a fait jadis des étranges punitions. Rien n'est si contraire à la charité, et beaucoup plus à la dévotion, que le mépris et contemnement du prochain.

Or, la dérision et moquerie ne se fait jamais sans ce mépris; c'est pourquoi elle est un fort grand péché, en sorte que les docteurs ont raison de dire que la moquerie est la plus mauvaise sorte d'offense que l'on puisse faire au prochain par les paroles, parce que les autres offenses se font avec quelque estime de celui qui est offensé, et celle-ci se fait avec mépris et contemnement.

Mais quant aux jeux de paroles qui se font des uns aux autres avec une modeste gaîté et joyeuseté, ils appartiennent à la vertu nommée eutrapélie par les Grecs, que nous pouvons appeler bonne conversation ; et par iceux on prend une honnête et amiable récréation sur les occasions frivoles que les imperfections humaines fournissent.

Il se faut garder seulement de passer de cette honnête joyeuseté à la moquerie. Or, la moquerie provoque à rire par mépris et contemnement du prochain; mais la gaîté et gausserie provoque à rire par une simple liberté, confiance et familière franchise, conjointe à la gentillesse de quelque mot. Saint Louis, quand les religieux voulaient lui parler des choses relevées après dîner :

« Il n'est pas temps d'alléguer, disait-il, mais de se récréer par quelque joyeuseté et quolibets : que chacun dise ce quil voudra honnêtement »; ce qu'il disait, favorisant la noblesse qui était autour de lui pour recevoir des caresses de sa majesté. Mais, Philothée, passons tellement le temps par récréation que nous conservions la sainte éternité par dévotion.

CHAPITRE XXVIII

DES JUGEMENTS TÉMÉRAIRES


« Ne jugez point et vous ne serez point jugés, dit le Sauveur de nos âmes; ne condamnez point et vous ne serez point condamnés. » Non, dit le saint Apôtre, e ne jugez pas avant le temps, jusques à ce que le Seigneur vienne, qui révélera le secret des ténèbres et manifestera les conseils des coeurs.

Oh ! que les jugements téméraires sont désagréables à Dieu! Les jugements des enfants des hommes sont téméraires, parce qu'ils ne sont pas juges les uns des autres, et jugeant ils usurpent l'office de Notre-Seigneur; ils sont téméraires, parce que la principale malice du péché dépend de l'intention et conseil du coeur, qui est le secret des ténèbres pour nous; ils sont téméraires, parce qu'un chacun a assez à faire à se juger soi-même, sans entreprendre de juger son prochain.

C'est chose également nécessaire pour n'être point jugés, de ne point juger les autres et de se juger soi-même; car, comme Notre-Seigneur nous défend l'un, l'Apôtre nous ordonne l'autre, disant: « Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions point jugés. »

Mais, o Dieu, nous faisons tout au contraire; car ce qui nous est défendu, nous ne cessons de le faire, jugeant à tout propos le prochain; et ce qui nous est commandé, qui est de nous juger nous-mêmes, nous ne le faisons jamais.

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CHAPITRE XXVIII

DES JUGEMENTS TÉMÉRAIRES


Selon les causes des jugements téméraires, il y faut remédier. Il y a des coeurs aigres, amers et âpres de leur nature, qui rendent pareillement aigre et amer tout ce qu'ils reçoivent, et convertissent, comme dit le Prophète, le jugement en absinthe, ne jugeant jamais du prochain qu'avec toute rigueur et âpreté : ceux-ci ont grandement besoin de tomber entre les mains d'un bon médecin spirituel, car cette amertume de coeur leur étant naturelle, elle est malaisée à vaincre; et bien qu'en soi elle ne soit pas péché, ains seulement une imperfection, elle est néanmoins dangereuse, parce qu'elle introduit et fait régner en l'âme le jugement téméraire et la médisance.

Aucuns jugent témérairement non point par aigreur mais par orgueil, leur étant avis qu'à mesure qu'ils dépriment l'honneur d'autrui, ils relèvent le leur propre : esprits arrogants et présomptueux, qui s'admirent eux-mêmes et se colloquent si haut en leur propre estime, qu'ils voient tout le reste comme chose petite et basse:

« Je ne suis pas comme le reste des hommes », disait ce sot Pharisien. Quelques-uns n'ont pas cet orgueil manifeste, ains seulement une certaine petite complaisance à considérer le mal dautrui, pour savourer et faire savourer plus doucement le bien contraire, duquel ils s'estiment doués; et cette complaisance est si secrète et imperceptible, que si on n'a bonne vue on ne la peut découvrir, et ceux même qui en sont atteints ne la connaissent pas si on ne la leur montre.

Les autres, pour se flatter et excuser envers eux-mêmes et pour adoucir les remords de leurs consciences, jugent fort volontiers que les autres sont vicieux du vice auquel ils se sont voues, ou de quelque autre aussi grand, leur étant avis que la multitude des criminels rend leur péché moins blâmable.

Plusieurs s'adonnent au jugement téméraire, pour le seul plaisir qu'ils prennent à philosopher et deviner des moeurs et humeurs des personnes, par manière d'exercice d'esprit; que si par malheur ils rencontrent quelquefois la vérité en leurs jugements, l'audace et l'appétit de continuer s'accroît tellement en eux, que l'on a peine de les en détourner.

Les autres jugent par passion, et pensent toujours bien de ce qu'ils aiment et toujours mal de ce qu'ils haïssent, sinon en un cas admirable et néanmoins véritable, auquel l'excès de l'amour provoque à faire mauvais jugement de ce qu'on aime :

effet monstrueux, mais aussi provenant d'un amour impur, imparfait, troublé et malade, qui est la jalousie, laquelle, comme chacun sait, sur un simple regard, sur le moindre souris du monde condamne les personnes de perfidie et d'adultère.

Enfin, la crainte, l'ambition et telles autres faiblesses d'esprit contribuent souvent beaucoup à la production du soupçon et jugement téméraire.

Mais quels remèdes ? Ceux qui boivent le suc de l'herbe ophiusa d'Ethiopie cuident partout voir des serpents et choses effroyables : ceux qui ont avalé l'orgueil, l'envie, l'ambition, la haine, ne voient rien qu'ils ne trouvent mauvais et blâmable; ceux-là pour être guéris doivent prendre du vin de palme, et j'en dis de même pour
ceux-ci:

buvez le plus que vous pourrez le vin sacré de la charité, elle vous affranchira de ces mauvaises humeurs qui vous font faire ces jugements tortus.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 19 Déc - 18:37

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CHAPITRE XXVIII

DES JUGEMENTS TÉMÉRAIRES


La charité craint de rencontrer le mal, tant s'en faut qu'elle l'aille chercher ; et quand elle le rencontre, elle en détourne sa face et le dissimule, ains elle ferme ses yeux avant que de le voir, au premier bruit qu'elle en aperçoit, et puis croit par une sainte simplicité que ce n'était pas le mal, mais seulement l'ombre ou quelque fantôme de mal; que si par force elle reconnaît que c'est lui-même, elle s'en détourne tout incontinent et tâche d'en oublier la figure.

La charité est le grand remède à tous maux, mais spécialement pour celui-ci. Toutes choses paraissent jaunes aux yeux des ictériques et qui ont la grande jaunisse; l'on dit que pour les guérir de ce mal, il leur faut faire porter de l'ictère sous la plante de leur pied.

Certes, ce péché de jugement téméraire est une jaunisse spirituelle, qui fait paraître toutes choses mauvaises aux yeux de ceux qui en sont atteints; mais qui en veut guérir, il faut qu'il mette les remèdes non aux yeux, non à l'entendement, mais aux affections qui sont les pieds de l'âme: si vos affections sont douces, votre jugement sera doux ; si elles sont charitables, votre jugement le sera de même. Je vous présente trois exemples admirables.

Isaac avait dit que Rébecca était sa soeur; Abimélech vit qu'il se jouait avec elle, cest-à-dire qu'il la caressait tendrement, et il jugea soudain que c'était sa femme : un oeil malin eût plutôt jugé qu'elle était sa garce, ou que, si elle était sa soeur, qu'il eût été un inceste; mais Abimélech suit la plus charitable opinion qu'il pouvait prendre d'un tel fait.

Il faut toujours faire de même, Philothée, jugeant en faveur du prochain, autant qu'il nous sera possible; que si une action pouvait avoir cent visages, il la faut regarder en celui qui est le plus beau.

Notre Dame était grosse, saint Joseph le voyait clairement; mais parce que d'autre côté il la voyait toute sainte, toute pure, toute angélique, il ne put onques croire qu'elle eût pris sa grossesse contre son devoir, si qu'il se résolvait, en la laissant, d'en laisser le jugement à Dieu:

quoique l'argument fût violent pour lui faire concevoir mauvaise opinion de cette vierge, si ne voulut-il jamais l'en juger. Mais pourquoi ? parce, dit l'Esprit de Dieu, qu'il était juste : l'homme juste, quand il ne peut plus excuser ni le fait ni l'intention de celui que d'ailleurs il connaît homme de bien, encore n'en veut-il pas juger, mais ôte cela de son esprit et en laisse le jugement à Dieu.

Mais le Sauveur crucifié, ne pouvant excuser du tout le péché de ceux qui le crucifiaient, au moins en amoindrit-il la malice, alléguant leur ignorance. Quand nous ne pouvons excuser le péché, rendons-le au moins digne de compassion, l'attribuant à la cause la plus supportable qu'il puisse avoir, comme à l'ignorance ou à l'infirmité.

Mais ne peut-on donc jamais juger le prochain ? Non certes, jamais; c'est Dieu, Philothée, qui juge les criminels en justice. Il est vrai qu'il se sert de la voix des magistrats, pour se rendre intelligible à nos oreilles: ils sont ses truchements et interprètes, et ne doivent rien prononcer que ce qu'ils ont appris de lui comme étant ses oracles; que s'ils font autrement, suivant leurs propres passions, alors c'est vraiment eux qui jugent et qui par conséquent seront jugés, car il est défendu aux hommes, en qualité d'hommes, de juger les autres.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 20 Déc - 18:06

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CHAPITRE XXVIII
DES JUGEMENTS TÉMÉRAIRES


De voir ou connaître une chose, ce n'est pas en juger; car le jugement, au moins selon la phrase de l'Ecriture, présuppose quelque petite ou grande, vraie ou apparente difficulté quil faille vider; c'est pourquoi elle dit que « ceux qui ne croient point sont déjà jugés », parce qu'il n'y a point de doute en leur damnation.

Ce n'est donc pas mal fait de douter du prochain, non, car il nest pas défendu de douter, ains de juger; mais il n'est pourtant pas permis ni de douter, ni de soupçonner sinon ric-à-ric tout autant que les raisons ou arguments nous contraignent de douter; autrement les doutes et soupçons sont téméraires.

Si quelque oeil malin eût vu Jacob quand il baisa Rachel auprès du puits, où qu'il eût vu Rébecca accepter des bracelets et pendants d'oreille d'Eliézer, homme inconnu en ce pays-là, il eût sans doute mal pensé de ces deux exemplaires de chasteté, mais sans raison et fondement; car quand une action est de soi-même indifférente, c'est un soupçon téméraire d'en tirer une mauvaise conséquence, sinon que plusieurs circonstances donnent force à largument.

C'est aussi un jugement téméraire de tirer conséquence d'un acte pour blâmer la personne ; mais ceci, je le dirai tantôt plus clairement.

Enfin, ceux qui ont bien soin de leur conscience, ne sont guère sujets au jugement téméraire; car comme les abeilles, voyant le brouillard ou temps nubileux, se retirent en leurs ruches à ménager le miel, aussi les cogitations des bonnes âmes ne sortent pas sur des objets embrouillés ni parmi les actions nubileuses des prochains : ains, pour en éviter la rencontre, se ramassent dedans le coeur pour y ménager les bonnes résolutions de leur amendement propre. Cest le fait d'une âme inutile, de s'amuser à l'examen de la vie dautrui.

J'excepte ceux qui ont charge des autres, tant en la famille qu'en la république; car une bonne partie de leur conscience consiste à regarder et veiller sur celle des autres. Qu'ils fassent donc leur devoir avec amour; passé cela, qu'ils se tiennent en eux-mêmes pour ce regard.

CHAPITRE XXIX
DE LA MEDISANCE


Le jugement téméraire produit linquiétude, le mépris du prochain, l'orgueil et complaisance de soi-même et cent autres effets très pernicieux, entre lesquels la médisance tient des premiers rangs, comme la vraie peste des conversations.

O que n'ai je un des charbons du saint autel pour toucher les lèvres des hommes, afin que leur iniquité fût ôtée et leur péché nettoyé, à limitation du séraphin qui purifia la bouche dIsaïe! Qui ôterait la médisance du monde, en ôterait une grande partie des péchés et de l'iniquité.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 21 Déc - 18:08

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CHAPITRE XXIX

DE LA MEDISANCE


Quiconque ôte injustement la bonne renommée à son prochain, outre le péché qu'il commet, il est obligé à faire la réparation, quoique diversement selon la diversité des médisances; car nul ne peut entrer au ciel avec le bien d'autrui, et entre tous les biens extérieurs la renommée est le meilleur.

La médisance est une espèce de meurtre, car nous avons trois vies: la spirituelle qui gît en la grâce de Dieu, la corporelle qui gît en l'âme, et la civile qui consiste en la renommée; le péché nous ôte la première, la mort nous ôte la seconde, et la médisance nous ôte la troisième.

Mais le médisant par un seul coup de sa langue, fait ordinairement trois meurtres: il tue son âme et celle de celui qui l'écoute, d'un homicide spirituel, et ôte la vie civile à celui duquel il médit; car, comme disait saint Bernard, et celui qui médit et celui qui écoute le médisant, tous deux ont le diable sur eux, mais l'un la en la langue et l'autre en l'oreille. David parlant des médisants «Ils ont affilé leurs langues, dit-il, comme un serpent. »

Or le serpent a la langue fourchue et à deux pointes, comme dit Aristote; et telle est celle du médisant, qui d'un seul coup pique et empoisonne l'oreille de l'écoutant et la réputation de celui de qui elle parle.

Je vous conjure donc, très chère Philothée, de ne jamais médire de personne, ni directement, ni indirectement : gardez-vous d'imposer des faux crimes et péchés au prochain, ni de découvrir ceux qui sont secrets, ni d'agrandir ceux qui sont manifestes, ni d'interpréter en mal la bonne oeuvre, ni de nier le bien que vous savez être en quelqu'un, ni le dissimuler malicieusement, ni le diminuer par paroles; car, en toutes ces façons, vous offenseriez grandement Dieu, mais surtout accusant faussement et niant la vérité au préjudice du prochain; car c'est double péché, de mentir et nuire tout ensemble au prochain.

Ceux qui pour médire font des préfaces d'honneur, ou qui disent de petites gentillesses et gausseries entre d'eux, sont les plus fins et vénéneux médisants de tous.

Je proteste, disent-ils, que je l'aime et que au reste, c'est un galant homme; mais cependant, il faut dire la vérité, il eut tort de faire une telle perfidie. C'est une fort vertueuse fille, mais elle fut surprise, et semblables petits agencements.

Ne voyez-vous pas l'artifice ? Celui qui veut tirer à l'arc, tire tant qu'il peut la flèche à soi, mais ce n'est que pour la darder plus puissamment: il semble que ceux-ci retirent leur médisance à eux, mais ce n'est que pour la décocher plus fermement, afin quelle pénètre plus avant dedans les coeurs des écoutants.

La médisance dite par forme de gausserie, est encore plus cruelle que toutes; car, comme la cigué n'est pas de soi un venin fort pressant, ains assez lent et auquel on peut aisément remédier, mais étant pris avec le vin, il est irrémédiable, ainsi la médisance qui, de soi, passerait légèrement par une oreille et sortirait par l'autre, comme l'on dit, s'arrête fermement en la cervelle des écoutants, quand elle est présentée dedans quelque mot subtil et joyeux.

« Ils ont, dit David, le venin de l'aspic en leurs lèvres. » L'aspic fait sa piqûre presque imperceptible, et son venin d'abord rend une démangeaison délectable, au moyen de quoi le coeur et les entrailles se dilatent et reçoivent le poison, contre lequel par après il n'y a plus de remède.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 22 Déc - 19:14

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CHAPITRE XXIX

DE LA MEDISANCE


Ne dites pas : «Un tel est un ivrogne », encore que vous l'ayez vu ivre; ni : « Il est adultère », pour l'avoir vu en ce péché; ni : « Il est inceste », pour l'avoir trouvé en ce malheur; car un seul acte ne donne pas le nom à la chose.

Le soleil s'arrêta une fois en faveur de la victoire de Josué, et s'obscurcit une autre fois en faveur de celle du Sauveur; nul ne dira pourtant qu'il soit ou immobile ou obscur.

Noé s'enivra une fois et Loth une autre fois, et celui-ci de plus commit un grand inceste : ils ne furent pourtant ivrognes ni l'un ni l'autre, ni le dernier ne fut pas inceste; ni saint Pierre sanguinaire pour avoir une fois répandu du sang, ni blasphémateur pour avoir une fois blasphémé.

Pour prendre le nom d'un vice ou d'une vertu, il faut y avoir fait quelque progrès et habitude; c'est donc une imposture de dire qu'un homme est colère ou larron, pour l'avoir vu courroucer ou dérober une fois.

Encore qu'un homme ait été vicieux longuement, on court fortune de mentir quand on le nomme vicieux. Simon le lépreux appelait Madeleine pécheresse, parce qu'elle lavait été naguère; il mentait néanmoins, car elle ne l'était plus, mais une très sainte pénitente; aussi Notre Seigneur prend en protection sa cause.

Ce fol pharisien tenait le publicain pour grand pécheur, ou peut-être pour injuste, adultère, ravisseur; mais il se trompait grandement, car tout à l'heure même il était justifié.

Hélas! puisque la bonté de Dieu est si grande, qu'un seul moment suffit pour impétrer et recevoir sa grâce, quelle assurance pouvons-nous avoir qu'un homme, qui était hier pécheur, le soit aujourdhui? Le jour précédent ne doit pas juger le jour présent, ni le jour présent ne doit pas juger le jour précédent:

il n'y a que le dernier qui les juge tous. Nous ne pouvons donc jamais dire qu'un homme soit méchant, sans danger de mentir; ce que nous pouvons dire, en cas qu'il faille parler, c'est qu'il fit un tel acte mauvais, il a mal vécu en tel temps, il fait mal maintenant; mais on ne peut tirer nulle conséquence d'hier à ce jourd'hui, ni de ce jourd'hui au jour dhier, et moins encore au jour de demain.

Encore qu'il faille être extrêmement délicat à ne point médire du prochain, si faut-il se garder d'une extrémité en laquelle quelques-uns tombent, qui, pour éviter la médisance, louent et disent bien du vice. S'il se trouve une personne vraiment médisante, ne dites pas pour l'excuser qu'elle est libre et franche.

Une personne manifestement vaine, ne dites pas qu'elle est généreuse et propre; et les privautés dangereuses, ne les appelez pas simplicité ou naïvetés; ne fardez pas la désobéissance du nom de zèle, ni l'arrogance du nom de franchise, ni la lasciveté du nom d'amitié.

Non, chère Philothée, il ne faut pas, pensant fuir le vice de la médisance, favoriser, flatter ou nourrir les autres, ains faut dire rondement et franchement mal du mal, et blâmer les choses blâmables: ce que faisant, nous glorifions Dieu, moyennant que ce soit avec les conditions suivantes.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 23 Déc - 18:38

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CHAPITRE XXIX

DE LA MEDISANCE


Pour louablement blâmer les vices d'autrui, il faut que l'utilité ou de celui duquel on parle, ou de ceux à qui lon parle, le requière. On récite devant des filles les privautés indiscrètes de tels et de telles qui sont manifestement périlleuses; la dissolution d'un tel ou d'une telle en paroles ou en contenance, qui sont manifestement lubriques :

Si je ne blâme librement ce mal et que je le veuille excuser, ces tendres âmes qui écoutent, prendront occasion de se relâcher à quelque chose pareille; leur utilité donc requiert que tout franchement je blâme ces choses-là sur le champ, sinon que je puisse réserver à faire ce bon office plus à propos, et avec moins d'intérêt de ceux de qui on parle, en une autre occasion.

Outre cela, encore faut-il quil m'appartienne de parler sur ce sujet, comme quand je suis des premiers de la compagnie, et que, si je ne parle, il semblera que j'approuve le vice ; que si je suis des moindres, je ne dois pas entreprendre de faire la censure.

Mais surtout, il faut que je sois exactement juste en mes paroles, pour ne dire pas un seul mot de trop : par exemple, si je blâme la privauté de ce jeune homme et de cette fille, parce quelle est trop indiscrète et périlleuse, o Dieu, Philothée, il faut que je tienne la balance bien juste, pour ne point agrandir la chose, pas même d'un seul brin.

S'il ny a qu'une faible apparence, je ne dirai rien de cela; s'il ny a qu'une simple imprudence, je ne dirai rien davantage; s'il n'y a ni imprudence, ni vraie apparence du mal, ains seulement que quelque esprit malicieux en puisse tirer prétexte de médisance, ou je n'en dirai rien du tout, ou je dirai cela même.

Ma langue, tandis que je parle du prochain, est en ma bouche comme un rasoir en la main du chirurgien qui veut trancher entre les nerfs et les tendons: il faut que le coup que je donnerai soit si juste, que je ne dise ni plus ni moins que ce qui en est.

Et enfin, il faut surtout observer, en blâmant le vice, dépargner le plus que vous pourrez la personne en laquelle il est.

Il est vrai que des pécheurs infâmes, publics et manifestes, on en peut parler librement, pourvu que ce soit avec esprit de charité et de compassion, et non point avec arrogance et présomption, ni pour se plaire au mal d'autrui; car, pour ce dernier, c'est le fait d'un coeur vil et abject.

J'excepte entre tous, les ennemis déclarés de Dieu et de son Eglise; car ceux-là, il les faut décrier tant qu'on peut, comme sont les sectes des hérétiques et schismatiques, et les chefs d'icelles : c'est charité de crier au loup, quand il est entre les brebis, voire où qu'il soit.

Chacun se donne liberté de juger et censurer les princes, et de médire des nations tout entières, selon la diversité des affections que l'on a en leur endroit :

Philothée, ne faites pas cette faute; car outre l'offense de Dieu, elle vous pourrait susciter mille sortes de querelles.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 6 Jan - 4:09

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CHAPITRE XXXVIII

AVIS POUR LES GENS MARIÉS


Si vous voulez, o maris, que vos femmes vous soient fidèles, faites-leur-en voir la leçon par votre exemple. «Avec quel front, dit saint Grégoire Nazianzène, voulez-vous exiger la pudicité de vos femmes, si vous-mêmes vivez en impudicité? comme leur demandez-vous ce que vous ne leur donnez pas ? »

Voulez-vous qu'elles soient chastes ? comportez-vous chastement envers elles, et, comme dit saint Paul : « Qu'un chacun sache posséder son vaisseau en sanctification. » Que si au contraire vous-mêmes leur apprenez les friponneries, ce n'est pas merveille que vous ayez du déshonneur en leur perte. Mais vous, ô femmes, desquelles l'honneur est inséparablement conjoint avec la pudicité et honnêteté, conservez jalousement votre gloire et ne permettez qu'aucune sorte de dissolution ternisse la blancheur de votre réputation.

Craignez toutes sortes d'attaques, pour petites qu'elles soient; ne permettez jamais aucune muguetterie autour de vous.

Quiconque vient louer votre beauté et votre grâce, vous doit être suspect; car quiconque loue une marchandise qu'il ne peut acheter, il est pour l'ordinaire grandement tenté de la dérober.

Mais si à votre louange quelqu'un ajoute le mépris de votre mari, il vous offense infiniment; car la chose est claire, que non seulement il vous veut perdre, mais vous tient déjà pour demi perdue, puisque la moitié du marché est faite avec le second marchand, quand on est dégoûté du premier.

Les dames tant anciennes que modernes ont accoutumé de pendre des perles en nombre à leurs oreilles, pour le plaisir, dit Pline, quelles ont à les sentir grilloter, s'en tretouchant l'une lautre.

Mais quant à moi, qui sais que le grand ami de Dieu, Isaac, envoya des pendants d'oreilles pour les premières arrhes de ses amours à la chaste Rébecca, je crois que cet ornement mystique signifie que la première chose qu'un mari doit avoir d'une femme, et que la femme lui doit fidèlement garder, c'est loreille, afin que nul langage ou bruit n'y puisse entrer, sinon le doux et amiable grillotis des paroles chastes et pudiques, qui sont les perles orientales de l'Evangile: car il se faut toujours ressouvenir que l'on empoisonne les âmes par l'oreille, comme le corps par la bouche.

L'amour et la fidélité, jointes ensemble, engendrent toujours la privauté et confiance; c'est pourquoi les saints et saintes ont usé de beaucoup de réciproques caresses en leur mariage, caresses vraiment amoureuses mais chastes, tendres mais sincères.

Ainsi Isaac et Rébecca, la plus chaste paire des mariés de l'ancien temps, furent vus par la fenêtre se caresser en telle sorte, qu'encore qu'il n'y eût rien de déshonnête, Abimélech connut bien qu'ils ne pouvaient être sinon mari et femme.

Le grand saint Louis, également rigoureux à sa chair et tendre en l'amour de sa femme, fut presque blâmé d'être abondant en telles caresses, bien qu'en vérité il méritât plutôt louange de savoir démettre son esprit martial et courageux à ces menus offices, requis à la conservation de l'amour conjugal; car bien que ces petites démonstrations de pure et franche amitié ne lient pas les coeurs, elles les approchent néanmoins, et servent d'un agencement agréable à la mutuelle conversation.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 14 Jan - 16:11

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CHAPITRE XXXVIII

AVIS POUR LES GENS MARIÉS


Sainte Monique étant grosse du grand saint Augustin, le dédia par plusieurs offres à la religion chrétienne et au service de la gloire de Dieu, ainsi que lui-même le témoigne, disant que déjà il avait goûté « le sel de Dieu dans le ventre de sa mère ».

C'est un grand enseignement, pour les femmes chrétiennes, d'offrir à la divine Majesté les fruits de leurs ventres, même avant qu'ils en soient sortis, car Dieu qui accepte les oblations d'un coeur humble et volontaire, seconde pour l'ordinaire les bonnes affections des mères en ce temps-là: témoin Samuel, saint Thomas dAquin, saint André de Fiésole et plusieurs autres.

La mère de saint Bernard, digne mère d'un tel fils, prenant ses enfants en ses bras, incontinent qu'ils étaient nés, les offrait à Jésus-Christ, et dès lors les aimait avec respect, comme chose sacrée et que Dieu lui avait confiée; ce qui lui réussit si heureusement, qu'enfin ils furent tous sept très saints.

Mais les enfants étant venus au monde et commençant à se servir de la raison, les pères et ,mères doivent avoir un grand soin de leur imprimer la crainte de Dieu au coeur. La bonne reine Blanche fit ardemment cet office à lendroit du roi saint Louis son fils, car elle lui disait souventefois:

« J'aimerais trop mieux, mon cher enfant, vous voir mourir devant mes yeux, que de vous voir commettre un seul péché mortel » ; ce qui demeura tellement gravé en l'âme de ce saint fils que, comme lui-même racontait, il ne fut jour de sa vie, auquel il ne lui en souvînt, mettant peine, tant qu'il lui était possible, de bien garder cette divine doctrine.

Certes, les races et générations sont appelées en notre langage, maisons, et les Hébreux même appellent la génération des enfants, édification de maison: car c'est en ce sens qu'il est dit que Dieu édifia des maisons aux sages-femmes d'Egypte.

Or, c'est pour montrer que ce n'est pas faire une bonne maison de fourrer beaucoup de biens mondains en icelle, mais de bien élever les enfants en la crainte de Dieu et en la vertu: en quoi on ne doit épargner aucune sorte de peine ni de travaux, puisque les enfants sont la couronne du père et de la mère.

Ainsi sainte Monique combattit avec tant de ferveur et de constance les mauvaises inclinations de saint Augustin, que l'ayant suivi par mer et par terre elle le rendit plus heureusement enfant de ses larmes, par la conversion de son âme, qu'il n'avait été enfant de son sang par la génération de son corps.

Saint Paul laisse en partage aux femmes le soin de la maison; c'est pourquoi plusieurs ont cette véritable opinion, que leur dévotion est plus fructueuse à la famille que celle des maris qui, ne faisant pas une si ordinaire résidence entre les domestiques, ne peuvent pas par conséquent les adresser si aisément à la vertu.

A cette considération, Salomon en ses proverbes fait dépendre le bonheur de toute la maison, du soin et industrie de cette femme forte qu'il décrit.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 14 Jan - 17:51

Bien heureuse de votre retour ! Encore merci pour la lecture.
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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyLun 15 Jan - 17:17

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CHAPITRE XXXVIII

AVIS POUR LES GENS MARIÉS


Il est dit au Genèse qu'Isaac, voyant sa femme Rébecca stérile, pria le Seigneur pour elle, ou, selon les Hébreux, il pria le Seigneur vis-à-vis d'elle, parce que l'un priait dun côté de l'oratoire et l'autre de l'autre : aussi l'oraison du mari faite en cette façon fut exaucée.

C'est la plus grande et plus fructueuse union du mari et de la femme, que celle qui se fait en la sainte dévotion, à laquelle ils se doivent entreporter l'un l'autre à l'envi. Il y a des fruits, comme le coing, qui pour l'âpreté de leur suc ne sont guère agréables qu'en confiture; il y en a d'autres, qui pour leur tendreté et délicatesse ne peuvent durer, s'ils ne sont aussi confits, comme les cerises et abricots. Ainsi les femmes doivent souhaiter que leurs maris soient confits au sucre de la dévotion, car l'homme sans dévotion est un animal sévère, âpre et rude ; et les maris doivent souhaiter que leurs femmes soient dévotes, car sans la dévotion la femme est grandement fragile, et sujette à déchoir ou ternir en la vertu.

Saint Paul a dit que « l'homme infidèle est sanctifié par la femme fidèle, et la femme infidèle par l'homme fidèle », parce qu'en cette étroite alliance du mariage, l'un peut aisément tirer l'autre à la vertu. Mais quelle bénédiction est-ce quand l'homme et la femme fidèles se sanctifient l'un lautre en une vraie crainte du Seigneur!

Au demeurant, le support mutuel de l'un pour l'autre doit être si grand, que jamais tous deux ne soient courroucés ensemble et tout à coup, afin qu'entre eux il ne se voie de la dissension et du débat. Les mouches à miel ne peuvent sarrêter en lieu où les échos et retentissements et redoublements de voix se font, ni le Saint-Esprit certes en une maison en laquelle il y ait du débat, des répliques et redoublements de crieries et altercations.

Saint Grégoire Nazianzène témoigne que de son temps les mariés faisaient fête au jour anniversaire de leurs mariages. Certes, j approuverais que cette coutume s'introduisît, pourvu que ce ne fût point avec des appareils de récréations mondaines et sensuelles, mais que les maris et femmes, confessés et communiés en ce jour-là, recommandassent à Dieu, plus fervemment que lordinaire, le progrès de leur mariage, renouvelant les bons propos de le sanctifier de plus en plus par une réciproque amitié et fidélité, et reprenant haleine en Notre Seigneur pour le support des charges de leur vacation.

CHAPITRE XXXIX

DE L'HONNÊTETÉ DU LIT NUPTIAL


Le lit nuptial doit être immaculé, comme lApôtre lappelle, c'est-à-dire exempt d'impudicités et autres souillures profanes. Aussi le saint mariage fut premièrement institué dedans le paradis terrestre, où jamais, jusques à l'heure, il n'y avait eu aucun dérèglement de la concupiscence, ni chose déshonnête.

Il y a quelque ressemblance entre les voluptés honteuses et celles du manger, car toutes deux regardent la chair, bien que les premières, à raison de leur véhémence brutale, s'appellent simplement charnelles. J'expliquerai donc ce que je ne puis pas dire des unes, par ce que je dirai des autres.

1. Le manger est ordonné pour conserver les personnes: or, comme manger simplement pour nourrir et conserver la personne est une bonne chose, sainte et commandée, aussi ce qui est requis au mariage, pour la production des enfants et la multiplication des personnes, est une bonne chose et très sainte, car c'est la fin principale des noces.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 16 Jan - 17:20

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CHAPITRE XXXIX

DE L'HONNÊTETÉ DU LIT NUPTIAL


2. Manger, non point pour conserver la vie, mais pour conserver la mutuelle conversation et condescendance que nous nous devons les uns aux autres, c'est chose grandement juste et honnête : et de même, la réciproque et légitime satisfaction des parties au saint mariage, est appelée par saint Paul devoir; mais devoir si grand, qu'il ne veut pas que l'une des parties s'en puisse exempter, sans le libre et volontaire consentement de l'autre, non pas même pour les exercices de la dévotion, qui m'a fait dire le mot que j'ai mis au chapitre de la sainte Communion pour ce regard; combien moins donc peut-on s'en exempter, pour des capricieuses prétentions de vertu ou pour les colères et dédains!

3. Comme ceux qui mangent pour le devoir de la mutuelle conversation doivent manger librement et non comme par force, et de plus sessayer de témoigner de l'appétit, aussi le devoir nuptial doit être toujours rendu fidèlement, franchement, et tout de même comme si c'était avec espérance de la production des enfants, encore que pour quelque occasion on n'eût pas telle espérance.

4. Manger non point pour les deux premières raisons mais simplement pour contenter l'appétit, c'est chose supportable, mais non pas pourtant louable; car le simple plaisir de l'appétit sensuel ne peut être un objet suffisant pour rendre une action louable, il suffit bien si elle est supportable.

5. Manger non point par simple appétit, mais par excès et dérèglement, c'est chose plus ou moins vitupérable, selon que l'excès est grand ou petit.

6. Or, l'excès du manger ne consiste pas seulement en la trop grande quantité, mais aussi en la façon et manière de manger. C'est grand cas, chère Philothée, que le miel si propre et salutaire aux abeilles leur puisse néanmoins être si nuisible, que quelquefois il les rend malades, comme quand elles en mangent trop au printemps; car cela leur donne le flux de ventre, et quelquefois il les fait mourir inévitablement, comme quand elles sont emmiellées par le devant de leur tête et de leurs ailerons.

A la vérité, le commerce nuptial qui est si saint, si juste, si recommandable, si utile à la république, est néanmoins en certain cas dangereux à ceux qui le pratiquent; car quelquefois il rend leurs âmes grandement malades de péché véniel, comme il arrive par les simples excès; et quelquefois il les fait mourir par le péché mortel, comme il arrive lorsque l'ordre établi pour la production des enfants est violé et perverti; auquel cas, selon quon ségare plus ou moins de cet ordre, les péchés se trouvent plus ou moins exécrables, mais toujours mortels. Car dautant que la procréation des enfants est la première et principale fin du mariage, jamais on ne peut loisiblement se départir de l'ordre qu'elle requiert, quoique pour quelque autre accident elle ne puisse pas pour être effectuée, comme il arrive quand la stérilité ou la grossesse déjà survenue empêche la production et génération; car en ces occurrences le commerce corporel ne laisse pas de pouvoir être juste et saint, moyennant que les règles de la génération soient suivies: aucun accident ne pouvant jamais préjudicier à la loi, que la fin principale du mariage a imposée.

Certes, l'infâme et exécrable action que Onan faisait en son mariage était détestable devant Dieu, ainsi que dit le sacré texte du trente-huitième chapitre de Genèse ; et bien que quelques hérétiques de notre âge, cent fois plus blâmables que les Cyniques desquels parle saint Jérôme sur l'Epître aux Ephésiens, aient voulu dire que c'était la perverse intention de ce méchant qui déplaisait à Dieu, l'Ecriture toutefois parle autrement, et assure en particulier que la chose même qu'il faisait était détestable et abominable devant Dieu.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 17 Jan - 16:05

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CHAPITRE XXXIX

DE L'HONNÊTETÉ DU LIT NUPTIAL


7. C'est une vraie marque d'un esprit truand, vilain, abject et infâme, de penser aux viandes et à la mangeaille avant le temps du repas, et encore plus quand après icelui on s'amuse au plaisir que l'on a pris à manger, s'y entretenant par paroles et pensées, et vautrant son esprit dedans le souvenir de la volupté que l'on a eue en avalant les morceaux, comme font ceux qui devant dîner tiennent leur esprit en broche, et après dîner dans les plats; gens dignes d'être souillards de cuisine, qui font, comme dit saint Paul, un dieu de leur ventre.

Les gens d'honneur ne pensent à la table qu'en s'asseyant, et après le repas se lavent les mains et la bouche pour n'avoir plus ni le goût, ni l'odeur de ce qu'ils ont mangé.

L'éléphant n'est qu'une grosse bête, mais la plus digne qui vive sur la terre et qui a le plus de sens ; je vous veux dire un trait de son honnêteté:

il ne change jamais de femelle et aime tendrement celle qu'il a choisie, avec laquelle néanmoins il ne parie que de trois ans en trois ans, et cela pour cinq jours seulement et si secrètement que jamais il n'est vu en cet acte; mais il est bien vu pourtant le sixième jour, auquel avant toutes choses il va droit à quelque rivière en laquelle il se lave entièrement tout le corps, sans vouloir aucunement retourner au troupeau, qu'il ne soit auparavant purifié.

Ne sont-ce pas de belles et honnêtes humeurs d'un tel animal, par lesquelles il invite les mariés à ne point demeurer engagés d'affection aux sensualités et voluptés que selon leur vocation ils auront exercées, mais icelles passées de s'en laver le coeur et l'affection, et de s'en purifier au plus tôt, pour par après avec toute liberté d'esprit pratiquer les autres actions plus pures et relevées.

En cet avis consiste la parfaite pratique de l'excellente doctrine que saint Paul donne aux Corinthiens: « Le temps est court, dit-il; reste que ceux qui ont des femmes soient comme n'en ayant point ».

Car, selon saint Grégoire, celui a une femme comme n'en ayant point qui prend tellement les consolations corporelles avec elle, que pour cela il n'est point détourné des prétentions spirituelles; or, ce qui se dit du mari s'entend réciproquement de la femme.

«Que ceux qui usent du monde, dit le même apôtre, soient comme n'en usant point. » Que tous donc usent du monde, un chacun selon sa vocation, mais en telle sorte que n'y engageant point l'affection, on soit aussi libre et prompt à servir Dieu, comme si l'on n'en usait point. »

C'est le grand mal de l'homme, dit saint Augustin, de vouloir jouir des choses desquelles il doit seulement user, et de vouloir user de celles desquelles il doit seulement jouir »:

nous devons jouir des choses spirituelles, et seulement user des corporelles ; desquelles quand l'usage est converti en jouissance, notre âme raisonnable est aussi convertie en âme brutale et bestiale.

Je pense avoir tout dit ce que je voulais dire, et fait entendre, sans le dire, ce que je ne voulais pas dire.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 18 Jan - 17:04

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CHAPITRE XL

AVIS POUR LES VEUVES


Saint Paul instruit tous les prélats, en la personne de son Timothée, disant: « Honore les veuves qui sont vraiment veuves. Or, pour être vraiment veuve, ces choses sont requises:

1. Que non seulement la veuve soit veuve de corps, mais aussi de coeur, c'est-à-dire qu'elle soit résolue, d'une résolution inviolable, de se conserver en l'état d'une chaste viduité; car les veuves qui ne le sont qu'en attendant loccasion de se remarier, ne sont séparées des hommes que selon la volupté du corps, mais elles sont déjà conjointes avec eux selon la volonté du coeur.

Que si la vraie veuve, pour se confirmer en l'état de viduité, veut offrir à Dieu en voeu son corps et sa chasteté, elle ajoutera un grand ornement à sa viduité et mettra en grande assurance sa résolution; car voyant qu'après le voeu il n'est plus en son pouvoir de quitter sa chasteté sans quitter le paradis, elle sera si jalouse de son dessein, qu'elle ne permettra pas seulement aux plus simples pensées de mariage d'arrêter en son coeur un seul moment, si que ce voeu sacré mettra une forte barrière entre son âme et toute sorte de projets contraires à sa résolution.

Certes saint Augustin conseille extrêmement ce voeu à la veuve chrétienne; et l'ancien et docte Origène passe bien plus avant, car il conseille aux femmes mariées de se vouer et destiner à la chasteté viduale, en cas que leurs maris viennent à trépasser devant elles, afin qu'entre les plaisirs sensuels qu'elles pourront avoir en leur mariage, elles puissent néanmoins jouir du mérite d'une chaste viduité par le moyen de cette promesse anticipée.

Le voeu rend les oeuvres faites en suite dicelui plus agréables à Dieu, fortifie le courage pour les faire, et ne donne pas seulement à Dieu les oeuvres, qui sont comme les fruits de notre bonne volonté, mais lui dédie encore la volonté même, qui est comme l'arbre de nos actions.

Par la simple chasteté nous prêtons notre corps à Dieu, retenant pourtant la liberté de le soumettre l'autre fois aux plaisirs sensuels; mais par le voeu de chasteté nous lui en faisons un don absolu et irrévocable, sans nous réserver aucun pouvoir de nous en dédire, nous rendant ainsi heureusement esclaves de Celui, la servitude duquel est meilleure que toute royauté.

Or, comme j'approuve infiniment les avis de ces deux grands personnages, aussi désirerais-je que les âmes, qui seront si heureuses que de les vouloir employer, le fassent prudemment, saintement et solidement, ayant bien examiné leurs courages, invoqué l'inspiration céleste et pris le conseil de quelque sage et dévot directeur, car ainsi tout se fera plus fructueusement.

2. Outre cela, il faut que ce renoncement de secondes noces se fasse purement et simplement pour, avec plus de pureté, contourner toutes ses affections en Dieu, et joindre de toutes parts son coeur avec celui de sa divine Majesté; car si le désir de laisser les enfants riches, ou quelque autre sorte de prétention mondaine arrête la veuve en viduité, elle en aura peut-être la louange, mais non pas certes devant Dieu, puisque devant Dieu, rien ne peut avoir une véritable louange que ce qui est fait pour Dieu.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 19 Jan - 19:17

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CHAPITRE XL

AVIS POUR LES VEUVES


3. Il faut de plus que la veuve, pour être vraiment veuve, soit séparée et volontairement destituée des contentements profanes. « La veuve qui vit en délices, dit saint Paul, est morte en vivant, »

Vouloir être veuve et se plaire néanmoins d'être muguetée, caressée, cajolée; se vouloir trouver aux bals, aux danses et aux festins; vouloir être parfumée, attifée, mignardée, c'est être une veuve vivante quant au corps, mais morte quant à l'âme.

Quimporte-t-il, je vous prie, que l'enseigne du logis d'Adonis et de l'amour profane soit faite d'aigrettes blanches perchées en guise de panaches, ou d'un crêpe étendu en guise de rets tout autour du visage?

ains souvent le noir est mis avec avantage de vanité sur le blanc, pour en rehausser la couleur.

La veuve, ayant fait essai de la façon avec laquelle les femmes peuvent plaire aux hommes, jette de plus dangereuses amorces dedans leurs esprits. La veuve donc qui vit en ces folles délices, vivante est morte, et n'est à proprement parler qu'une idole de viduité.

« Le temps de retrancher est venu, la voix de la tourterelle a été ouïe en notre terre », dit le Cantique. Le retranchement des superfluités mondaines est requis à quiconque veut vivre pieusement; mais il est surtout nécessaire à la vraie veuve qui, comme une chaste tourterelle, vient tout fraîchement de pleurer, gémir et lamenter la perte de son mari.

Quand Noémi revint de Moab en Bethléem, les femmes de la ville qui lavaient connue au commencement de son mariage, s'entredisaient l'une à lautre : « N'est-ce point ici Noémi? »

Mais elle répondit: « Ne m'appelez point, je vous prie, Noémi » car Noémi veut dire gracieuse et belle « ains appelez-moi Mara, car le Seigneur a rempli mon âme damertume »:

ce qu'elle disait, d'autant que son mari lui était mort. Ainsi la veuve dévote ne veut jamais être appelée et estimée ni belle ni gracieuse, se contentant d'être ce que Dieu veut qu'elle soit, c'est-à-dire humble et abjecte à ses yeux.

Les lampes desquelles l'huile est aromatique jettent une plus suave odeur quand on éteint leurs flammes: ainsi les veuves, desquelles l'amour a été pur en leur mariage, répandent un plus grand parfum de vertu de chasteté quand leur lumière, c'est-à-dire leur mari, est éteinte par la mort.

D'aimer le mari tandis qu'il est en vie, c'est chose assez triviale entre les femmes; mais l'aimer tant, qu'après la mort dicelui on n'en veuille point d'autre, c'est un rang d'amour qui n'appartient qu'aux vraies veuves.

Espérer en Dieu, tandis que le mari sert de support, ce n'est pas chose si rare; mais d'espérer en Dieu quand ou est destitué de cet appui, c'est chose digne de grande louange: c'est pourquoi on connaît plus aisément en la viduité, la perfection des vertus que l'on a eues au mariage.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 20 Jan - 18:33

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CHAPITRE XL

AVIS POUR LES VEUVES


La veuve laquelle a des enfants qui ont besoin de son adresse et conduite, et principalement en ce qui regarde leur âme et l'établissement de leur vie, ne peut ni ne doit en façon quelconque les abandonner; car lapôtre saint Paul dit clairement qu'elles sont obligées à ce soin-là, pour « rendre la pareille à leurs pères et mères », et d'autant encore que «si quelqu'un n'a soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il est pire qu'un infidèle. »

Mais si les enfants sont en état de n'avoir pas besoin d'être conduits, la veuve alors doit ramasser toutes ses affections et cogitations, pour les appliquer plus purement à son avancement en l'amour de Dieu.

Si quelque force forcée n'oblige la conscience de la vraie veuve aux embarrassements extérieurs, tels que sont les procès, je lui conseille de s'en abstenir du tout, et suivre la méthode de conduire ses affaires qui sera plus paisible et tranquille, quoiqu'il ne semblât pas que ce fût la plus fructueuse.

Car il faut que les fruits du tracas soient bien grands, pour être comparables au bien d'une sainte tranquillité; laissant à part que les procès et telles brouilleries dissipent le coeur et ouvrent souvent la porte aux ennemis de la chasteté, tandis que, pour complaire à ceux de la faveur desquels on a besoin, on se met en des contenances indévotes et désagréables à Dieu.

L'oraison soit le continuel exercice de la veuve; car ne devant plus avoir d'amour que pour Dieu, elle ne doit non plus presque avoir des paroles que pour Dieu.

Et comme le fer qui, étant empêché de suivre l'attraction de l'aimant à cause de la présence du diamant, sélance vers le même aimant soudain que le diamant est éloigné, ainsi le coeur de la veuve, qui ne pouvait bonnement s'élancer du tout en Dieu, ni suivre les attraits de son divin amour pendant la vie de son mari, doit soudain après le trépas dicelui courir ardemment à l'odeur des parfums célestes, comme disant, à limitation de l'Epouse sacrée:

« O Seigneur, maintenant que je suis toute mienne, recevez-moi pour toute vôtre; tirez-moi après vous; nous courrons à l'odeur de vos onguents. »

L'exercice des vertus propres à la sainte veuve sont la parfaite modestie, le renoncement aux honneurs, aux rangs, aux assemblées, aux titres et à telles sortes de vanités ; le service des pauvres et des malades, la consolation des affligés, l'introduction des filles à la vie dévote, et de se rendre un parfait exemplaire de toutes vertus aux jeunes femmes.

La netteté et la simplicité sont les deux ornements de leurs habits ; l'humilité et la charité, les deux ornements de leurs actions; l'honnêteté et débonnaireté, les deux ornements de leur langage; la modestie et la pudicité, l'ornement de leurs yeux; et Jésus-Christ crucifié, l'unique amour de leur coeur.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 21 Jan - 18:38

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CHAPITRE XL
AVIS POUR LES VEUVES


Bref, la vraie veuve est en l'Eglise une petite violette de mars, qui répand une suavité nonpareille par l'odeur de sa dévotion, et se tient presque toujours cachée sous les larges feuilles de son abjection, et par sa couleur moins éclatante témoigne la mortification; elle vient ès lieux frais et non cultivés, ne voulant être pressée de la conversation des mondains, pour mieux conserver la fraîcheur de son coeur contre toutes les chaleurs, que le désir des biens, des honneurs ou même des amours lui pourrait apporter. « Elle sera bienheureuse, dit le saint Apôtre, si elle persévère en cette sorte. »

J'aurais beaucoup d'autres choses à dire sur ce sujet; mais j'aurai tout dit, quand j'aurai dit que la veuve, jalouse de l'honneur de sa condition, lise attentivement les belles épîtres que le grand saint Jérôme écrit à Furia et à Salvia, et à toutes ces autres dames qui furent si heureuses que d'être filles spirituelles d'un si grand père, car il ne se peut rien ajouter à ce quil leur dit, sinon cet avertissement: que la vraie veuve ne doit jamais ni blâmer ni censurer celles qui passent aux secondes ou même troisièmes et quatrièmes noces; car en certains cas Dieu en dispose ainsi pour sa plus grande gloire.

Et faut toujours avoir devant les yeux cette doctrine des Anciens, que ni la viduité ni la virginité nont point de rang au ciel, que celui qui leur est assigné par l'humilité.

CHAPITRE XLI
UN MOT AUX VIERGES


O vierges, si vous prétendez au mariage temporel, gardez donc jalousement votre premier amour pour votre premier mari. Je pense que c'est une grande tromperie de présenter, en lieu d'un coeur entier et sincère, un coeur tout usé, frelaté et tracassé d'amour. Mais si votre bonheur vous appelle aux chastes et virginales noces spirituelles, et qu'à jamais vous veuillez conserver votre virginité, o Dieu, conservez votre amour le plus délicatement que vous pourrez pour cet Epoux divin qui, étant la pureté même, n'aime rien tant que la pureté, et à qui les prémices de toutes choses sont dues, mais principalement celles de l'amour. Les épîtres de saint Jérôme vous fourniront tous les avis qui vous sont nécessaires; et puisque votre condition vous oblige à l'obéissance, choisissez un guide, sous la conduite duquel vous puissiez plus saintement dédier votre coeur et votre corps à sa divine Majesté.

QUATRIÈME PARTIE DE L'INTRODUCTION
CONTENANT LES AVIS NÉCESSAIRES CONTRE LES TENTATIONS PLUS ORDINAIRES

CHAPITRE I
QU'IL NE FAUT POINT S'AMUSER AUX PAROLES DES ENFANTS DU MONDE


Tout aussitôt que les mondains s'apercevront que vous voulez suivre la vie dévote, ils décocheront sur vous mille traits de leur cajolerie et médisance : les plus malins calomnieront votre changement dhypocrisie, bigoterie et artifices; ils diront que le monde vous a fait mauvais visage, et qu'à son refus vous recourez à Dieu ; vos amis s'empresseront à vous faire un monde de remontrances, fort prudentes et charitables à leur avis :

« Vous tomberez, diront-ils, en quelque humeur mélancolique, vous perdrez crédit au monde, vous vous rendrez insupportable, vous envieillirez devant le temps, vos affaires domestiques en pâtiront ; il faut vivre au monde comme au monde; on peut bien faire son salut sans tant de mystères »; et mille telles bagatelles.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyLun 22 Jan - 17:25

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QUATRIÈME PARTIE DE L'INTRODUCTION

CONTENANT LES AVIS NÉCESSAIRES CONTRE LES TENTATIONS PLUS ORDINAIRES

CHAPITRE I

QU'IL NE FAUT POINT S'AMUSER AUX PAROLES DES ENFANTS DU MONDE


Ma Philothée, tout cela n'est qu'un sot et vain babil; ces gens-là n'ont nul soin ni de votre santé ni de vos affaires. « Si vous étiez du monde, dit le Sauveur, le monde aimerait ce qui est sien; mais parce que vous n'êtes pas du monde, partant il vous hait. »

Nous avons vu des gentilshommes et des dames passer la nuit entière, ains plusieurs nuits de suite, à jouer aux échecs et aux cartes. Y a-t-il une attention plus chagrine, plus mélancolique et plus sombre que celle-là, les mondains néanmoins ne disaient mot, les amis ne se mettaient point en peine; et pour la méditation d'une heure, ou pour nous voir lever un peu plus matin quà l'ordinaire pour nous préparer à la communion, chacun court au médecin, pour nous faire guérir de l'humeur hypocondriaque et de la jaunisse.

On passera trente nuits à danser: nul ne s'en plaint ; et pour la veille seule de la nuit de Noël, chacun tousse et crie au ventre le jour suivant. Qui ne voit que le monde est un juge inique, gracieux et favorable pour ses enfants, mais âpre et rigoureux aux enfants de Dieu?

Nous ne saurions être bien avec le monde, quen nous perdant avec lui. Il n'est pas possible que nous le contentions, car il est trop bizarre « Jean est venu, dit le Sauveur, ne mangeant ni buvant, et vous dites qu'il est endiablé; le Fils de lhomme est venu en mangeant et buvant, et vous dites qu'il est Samaritain. »

Il est vrai, Philothée; si nous nous relâchons par condescendance à rire, jouer, danser avec le monde, il s'en scandalisera; si nous ne le faisons pas, il nous accusera d'hypocrisie ou mélancolie ; si nous nous parons, il l'interprétera à quelque dessein; si nous nous démettons, ce sera pour lui vileté de coeur; nos gaîtés seront par lui nommées dissolutions, et nos mortifications tristesses; et nous regardant ainsi de mauvais oeil, jamais nous ne pouvons lui être agréables.

Il agrandit nos imperfections et publie que ce sont des péchés; de nos péchés véniels, il en fait des mortels; et nos péchés d'infirmité, il les convertit en péchés de malice. En lieu que, comme dit saint Paul, « la charité est bénigne », au contraire le monde est malin; au lieu que « la charité ne pense point de mal », au contraire le monde pense toujours mal ; et quand il ne peut accuser nos actions, ii accuse nos intentions.

Soit que les moutons aient des cornes ou qu'ils n'en aient point, qu'ils soient blancs ou qu'ils soient noirs, le loup ne laissera pas de les manger, s'il peut.

Quoi que nous fassions, le monde nous fera toujours la guerre: si nous sommes longuement devant le confesseur, il demandera que c'est que nous pouvons tant dire; si nous y sommes peu, il dira que nous ne disons pas tout.

Il épiera tous nos mouvements, et pour une seule petite parole de colère, il protestera que nous sommes insupportables; le soin de nos affaires lui semblera avarice, et notre douceur, niaiserie ; et quant aux enfants du monde, leurs colères sont générosités, leurs avarices, ménages; leurs privautés, entretiens honorables : les araignes gâtent toujours l'ouvrage des abeilles.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 23 Jan - 17:15

Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 5cf7c0ed0af9da14ed4da5c5a24bff2b

CHAPITRE I

QU'IL NE FAUT POINT S'AMUSER AUX PAROLES DES ENFANTS DU MONDE


Laissons cet aveugle, Philothée : qu'il crie tant quil voudra, comme un chat-huant, pour inquiéter les oiseaux du jour. Soyons fermes en nos desseins, invariables en nos résolutions; la persévérance fera bien voir si c'est à certes et tout de bon que nous sommes sacrifiés à Dieu et rangés à la vie dévote.

Les comètes et les planètes sont presque également lumineuses en apparence; mais les comètes disparaissent en peu de temps, n'étant que de certains feux passagers, et les planètes ont une clarté perpétuelle :

ainsi l'hypocrisie et la vraie vertu ont beaucoup de ressemblance en l'extérieur; mais on reconnaît aisément lune d'avec l'autre, parce que l'hypocrisie na point de durée et se dissipe comme la fumée en montant, mais la vraie vertu est toujours ferme et constante.

Ce ne nous est pas une petite. commodité pour bien assurer le commencement de notre dévotion, que d'en recevoir de l'opprobre et de la calomnie; car nous évitons par ce moyen le péril de la vanité et de l'orgueil, qui sont comme les sages-femmes d'Egypte, auxquelles le Pharaon infernal a ordonné de tuer les enfants mâles d'Israël, le jour même de leur naissance.

Nous sommes crucifiés au monde et le monde nous doit être crucifié; il nous tient pour fols: tenons-le pour insensé.

CHAPITRE II

QUIL FAUT AVOIR BON COURAGE


La lumière, quoique belle et désirable à nos yeux, les éblouit néanmoins, après qu'ils ont été en des longues ténèbres; et devant que l'on se voie apprivoisé avec les habitants de quelques pays, pour courtois et gracieux qu'ils soient, on s'y trouve aucunement étonné.

Il se pourra bien faire, ma chère Philothée, qu'à ce changement de vie plusieurs soulèvements se feront en votre intérieur, et que ce grand et général adieu que vous avez dit aux folies et niaiseries du monde vous donnera quelque ressentiment de tristesse et découragement.

Si cela vous arrive, ayez un peu de patience, je vous prie, car ce ne sera rien : ce n'est qu'un peu d'étonnement que la nouveauté vous apporte; passé cela, vous recevrez dix mille consolations.

Il vous fâchera peut-être d'abord de quitter la gloire que les fols et moqueurs vous donnaient en vos vanités; mais, o Dieu, voudriez-vous bien perdre l'éternelle, que Dieu vous donnera en vérité?

Les vains amusements et passe-temps, èsquels vous avez employé les années passées, se représenteront encore à votre coeur pour l'appâter et faire retourner de leur côté; mais auriez-vous bien le courage de renoncer à cette heureuse éternité pour des si trompeuses légèretés ?

Croyez-moi, si vous persévérez, vous ne tarderez pas de recevoir des douceurs cordiales si délicieuses et agréables, que vous confesserez que le monde n'a que du fiel en comparaison de ce miel, et qu'un seul jour de dévotion vaut mieux que mille années de la vie mondaine.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 24 Jan - 17:43

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CHAPITRE II

QUIL FAUT AVOIR BON COURAGE


Mais vous voyez que la montagne de la perfection chrétienne est extrêmement haute : «Eh! mon Dieu, ce dites-vous, comment pourrai-je monter? » Courage! Philothée, quand les petits mouchons des abeilles commencent à prendre forme, on les appelle nymphes: et lors, ils ne sauraient encore voler sur les fleurs, ni sur les monts, ni sur les collines voisines, pour amasser le miel, mais petit à petit, se nourrissant du miel que leurs mères ont préparé, ces petites nymphes prennent des ailes et se fortifient, en sorte que par après ils volent à la quête par tout le paysage.

Il est vrai, nous sommes encore de petits mouchons en la dévotion : nous ne saurions monter selon notre dessein, qui n'est rien moindre que d'atteindre à la cime de la perfection chrétienne; mais si commençons-nous à prendre forme par nos désirs et résolutions ; les ailes nous commencent à sortir: il faut donc espérer qu'un jour nous serons abeilles spirituelles et que nous volerons; et tandis, vivons du miel de tant d'enseignements que les anciens dévots nous ont laissés, et prions Dieu qu'il nous donne des plumes comme de colombe, afin que non seulement nous puissions voler au temps de la vie présente, mais aussi nous reposer en l'éternité de la future.

CHAPITRE III

DE LA NATURE DES TENTATIONS ET DE LA DIFFÉRENCE
QU'IL Y A ENTRE SENTIR LA TENTATION ET CONSENTIR A ICELLE


Imaginez-vous, Philothée, une jeune princesse extrêmement aimée de son époux; et quelque méchant, pour la débaucher et souiller son lit nuptial, lui envoie quelque infâme messager d'amour, pour traiter avec elle son malheureux dessein.

Premièrement, ce messager propose à cette princesse l'intention de son maître; secondement, la princesse agrée ou désagrée la proposition et l'ambassade; en troisième lieu, ou elle consent ou elle refuse. Ainsi Satan, le monde et la chair, voyant une âme épousée au Fils de Dieu, lui envoient des tentations et suggestions par lesquelles :

1. le péché lui est proposé; 2.. sur quoi, elle se plaît ou elle se déplaît; 3. enfin elle consent ou elle refuse; qui sont en somme les trois degrés pour descendre à l'iniquité : la tentation, la délectation et le consentement ; et bien que ces trois actions ne se connaissent pas si manifestement en toutes autres sortes de péchés, si est-ce qu'elles se connaissent palpablement aux grands et énormes péchés.

Quand la tentation, de quelque péché que ce soit, durerait toute notre vie, elle ne saurait nous rendre désagréables à la divine Majesté, pourvu qu'elle ne nous plaise pas et que nous n'y consentions pas; la raison est, parce qu'en la tentation nous n'agissons pas, mais nous souffrons; et puisque nous n'y prenons point plaisir, nous ne pouvons aussi en avoir aucune sorte de coulpe. Saint Paul souffrit longuement les tentations de la chair, et tant s'en faut que pour cela il fût désagréable à Dieu, qu'au contraire Dieu était glorifié par icelles; la bienheureuse Angèle de Foligny sentait des tentations charnelles si cruelles, qu'elle fait pitié quand elle les raconte; grandes furent aussi les tentations que souffrit saint François et saint Benoît, lorsque l'un se jeta dans les épines et l'autre dans la neige, pour les mitiger ; et néanmoins ils ne perdirent rien de la grâce de Dieu pour tout cela, ains l'augmentèrent de beaucoup.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 25 Jan - 23:59

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CHAPITRE III

DE LA NATURE DES TENTATIONS ET DE LA DIFFÉRENCE
QU'IL Y A ENTRE SENTIR LA TENTATION ET CONSENTIR A ICELLE


Il faut donc être fort courageuse, Philothée, emmi les tentations, et ne se tenir jamais pour vaincue pendant quelles vous déplairont, en bien observant cette différence qu'il y a entre sentir et consentir, qui est qu'on les peut sentir, encore qu'elles nous déplaisent, mais on ne peut consentir sans qu'elles nous plaisent, puisque le plaisir, pour l'ordinaire, sert de degré pour venir au consentement.

Que donc les ennemis de notre salut nous présentent tant qu'ils voudront d'amorces et d'appas, qu'ils demeurent toujours à la porte de notre coeur pour entrer, qu'ils nous fassent tant de propositions qu'ils voudront; mais tandis que nous aurons résolution de ne point nous plaire en tout cela, il n'est pas possible que nous offensions Dieu; non plus que le prince, époux de la princesse que j'ai représentée ne lui peut savoir mauvais gré du message qui lui est envoyé, si elle n'y a pris aucune sorte de plaisir.

Il y a néanmoins cette différence entre l'âme et cette princesse pour ce sujet, que la princesse, ayant ouï la proposition déshonnête, peut si bon lui semble, chasser le messager et ne le plus ouïr; mais il n'est pas toujours au pouvoir de l'âme de ne point sentir la tentation, bien qu'il soit toujours en son pouvoir de ne point y consentir; c'est pourquoi, encore que la tentation dure et persévère longtemps, elle ne peut nous nuire, tandis quelle nous est désagréable.

Mais quant à la délectation qui peut suivre la tentation, pour autant que nous avons deux parties en notre âme, l'une inférieure et l'autre supérieure, et que l'inférieure ne suit pas toujours la supérieure ains fait son cas à part, il arrive maintes fois que la partie inférieure se plaît en la tentation, sans le consentement, ains contre le gré de la supérieure:

c'est la dispute et la guerre que l'apôtre saint Paul décrit, quand il dit que « sa chair convoite contre son esprit », qu'il y a « une loi des membres et une loi de l'esprit », et semblables choses.

Avez-vous jamais vu, Philothée, un grand brasier de feu couvert de cendres ? Quand on vient dix ou douze heures après pour y chercher du feu, on n'en trouve qu'un peu au milieu du foyer, et encore on a peine de le trouver ; il y était néanmoins, puisqu'on l'y trouve, et avec icelui on peut rallumer tous les autres charbons déjà éteints.

C'en est de même de la charité, qui est notre vie spirituelle, parmi les grandes et violentes tentations : car la tentation jetant sa délectation en la partie inférieure, couvre, ce semble, toute l'âme de cendres, et réduit l'amour de Dieu au petit pied, car il ne paraît plus en nulle part sinon au milieu du coeur, au fin fond de l'esprit; encore semble-t-il quil n'y soit pas, et a-t-on peine de le trouver.

Il y est néanmoins en vérité, puisque, quoique tout soit en trouble en notre âme et en notre corps, nous avons la résolution de ne point consentir au péché ni à la tentation, et que la délectation qui plaît à notre homme extérieur déplaît à l'intérieur, et quoiqu'elle soit tout autour de notre volonté, si n'est-elle pas dans icelle: en quoi l'on voit que telle délectation est involontaire, et étant telle ne peut être péché.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 26 Jan - 17:06

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CHAPITRE IV

DEUX BEAUX EXEMPLES SUR CE SUJET


Il vous importe tant de bien entendre ceci, que je ne ferai nulle difficulté de métendre à l'expliquer. Le jeune homme, duquel parle saint Jérôme, qui couché et attaché avec des écharpes de soie bien délicatement sur un lit mollet, était provoqué par toutes sortes de vilains attouchements et attraits d'une impudique femme, qui était couchée avec lui exprès pour ébranler sa constance, ne devait-il pas sentir d'étranges accidents ? ses sens ne devaient-ils pas être saisis de la délectation, et son imagination extrêmement occupée de cette présence des objets voluptueux ?

Sans doute, et néanmoins parmi tant de troubles, emmi un si terrible orage de tentations et entre tant de voluptés qui sont tout autour de lui, il témoigne que son coeur n'est point vaincu et que sa volonté n'y consent nullement, puisque son esprit voyant tout rebellé contre lui, et n'ayant plus aucune des parties de son corps à son commandement sinon la langue, il se la coupa avec les dents et la cracha sur le visage de cette vilaine âme, qui tourmentait la sienne plus cruellement par la volupté, que les bourreaux n'eussent jamais su faire par les tourments; aussi le tyran, qui se défiait de la vaincre par les douleurs, pensait la surmonter par ces plaisirs.

L'histoire du combat de sainte Catherine de Sienne en un pareil sujet est du tout admirable: en voici le sommaire. Le malin esprit eut congé de Dieu d'assaillir la pudicité de cette sainte vierge, avec la plus grande rage qu'il pourrait, pourvu toutefois quil ne la touchât point.

Il fit donc toutes sortes dimpudiques suggestions à son coeur, et pour tant plus l'émouvoir, venant avec ses compagnons en forme dhommes et de femmes, il faisait mille et mille sortes de charnalités et lubricités à sa vue; ajoutant des paroles et semonces très déshonnêtes, et bien que toutes ces choses fussent extérieures, si est-ce que par le moyen des sens elles pénétraient bien avant dedans le coeur de la vierge, lequel, comme elle confessait elle-même, en était tout plein, ne lui restant plus que la fine pure volonté supérieure, qui ne fût agitée de cette tempête de vilenie et délectation charnelle.

Ce qui dura fort longuement, jusques à tant qu'un jour Notre Seigneur lui apparut, et elle lui dit: « Où étiez-vous, mon doux Seigneur, quand mon coeur était plein de tant de ténèbres et d'ordures? » A quoi il répondit

« J'étais dedans ton coeur, ma fille. » « Et comment, répliqua-t-elle, habitez-vous dedans mon coeur, dans lequel il y avait tant de vilenies ? habitez-vous donc en des lieux si déshonnêtes? » Et Notre Seigneur lui dit : « Dis-moi, ces tiennes sales cogitations de ton coeur te donnaient-elles plaisir ou tristesse, amertume ou délectation? » Et elle dit:

« Extrême amertume et tristesse. » Et lui répliqua: « Qui était celui qui mettait cette grande amertume et tristesse dedans ton coeur, sinon moi qui demeurais caché dedans le milieu de ton âme ?

Crois, ma fille, que si je n'eusse pas été présent, ces pensées, qui étaient autour de ta volonté et ne pouvaient l'expugner, l'eussent sans doute surmontée et seraient entrées dedans, eussent été reçues avec plaisir par ton libéral arbitre, et ainsi eussent donné la mort à ton âme; mais parce que j'étais dedans, je mettais ce déplaisir et cette résistance en ton coeur par laquelle il se refusait tant qu'il pouvait à la tentation, et ne pouvant pas tant qu'il voulait, il en sentait un plus grand déplaisir et une plus grande haine contre icelle et contre soi-même; et ainsi ces peines étaient un grand mérite et un grand accroissement de ta vertu et de ta force.»

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptySam 27 Jan - 19:20

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CHAPITRE IV

DEUX BEAUX EXEMPLES SUR CE SUJET


Voyez-vous, Philothée, comme ce feu était couvert de la cendre, et que la tentation et délectation était même entrée dedans le coeur et avait environné la volonté, laquelle seule, assistée de son Sauveur, résistait par des amertumes, des déplaisirs et détestations du mal qui lui était suggéré, refusant perpétuellement son consentement au péché qui l'environnait.

O Dieu, quelle détresse a une âme qui aime Dieu, de ne savoir seulement pas s'il est en elle ou non, et si l'amour divin, pour lequel elle combat, est du tout éteint en elle, ou non! Mais c'est la fine fleur de la perfection de l'amour céleste que de faire souffrir et combattre l'amant pour l'amour, sans savoir s'il a l'amour pour lequel et par lequel il combat.

CHAPITRE V

ENCOURAGEMENT A L'AME QUI EST ÈS TENTATIONS


Ma Philothée, ces grands assauts et ces tentations si puissantes ne sont jamais permises de Dieu que contre les âmes, lesquelles il veut élever à son pur et excellent amour ; mais il ne s'ensuit pas pourtant, qu'après cela elles soient assurées d'y parvenir, car il est arrivé maintes fois, que ceux qui avaient été constants en de si violentes attaques, ne correspondant pas par après fidèlement à la faveur divine, se sont trouvés vaincus en des bien petites tentations.

Ce que je dis, afin que, s'il vous arrive jamais d'être affligée de si grande tentation, vous sachiez que Dieu vous favorise d'une faveur extraordinaire, par laquelle il déclare qu'il vous veut agrandir devant sa face, et que néanmoins vous soyez toujours humble et craintive, ne vous assurant pas de pouvoir vaincre les menues tentations après avoir surmonté les grandes, sinon par une continuelle fidélité à l'endroit de sa Majesté.

Quelques tentations donc qui vous arrivent et quelque délectation qui s'ensuive, tandis que votre volonté refusera son consentement, non seulement à la tentation mais encore à la délectation, ne vous troublez nullement, car Dieu n'en est point offensé.

Quand un homme est pâmé, et qu'il ne rend plus aucun témoignage de vie, on lui met la main sur le coeur, et pour peu que l'on y sente de mouvement, on juge qu'il est en vie et que, par le moyen de quelque eau précieuse et de quelque épithème, on peut lui faire reprendre force et sentiment.

Ainsi arrive-t-il quelquefois que, par la violence des tentations, il semble que notre âme est tombée en une défaillance totale de ses forces, et que comme pâmée elle n'a plus ni vie spirituelle ni mouvement; mais si nous voulons connaître ce que c'en est, mettons la main sur le coeur :

considérons si le coeur et la volonté font leur devoir à refuser de consentir et suivre la tentation et délectation; car pendant que le mouvement du refus est dedans notre coeur, nous sommes assurés que la charité, vie de notre âme, est en nous, et que Jésus-Christ notre Sauveur se trouve dans notre âme, quoique caché et couvert; si que, moyennant l'exercice continuel de l'oraison, des sacrements et de la confiance en Dieu, nos forces reviendront en nous et nous vivrons d'une vie entière et délectable.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 28 Jan - 17:12

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CHAPITRE VI

COMME LA TENTATION ET DÉLECTATION PEUVENT ÊTRE PÉCHÉ


La princesse de laquelle nous avons parlé ne peut mais de la recherche déshonnête qui lui est faite, puisque, comme nous avons présupposé, elle lui arrive contre son gré; mais si au contraire elle avait par quelques attraits donné sujet à la recherche, ayant voulu donner de l'amour à celui qui la muguette, indubitablement elle serait coupable de la recherche même.

Et quoiquelle en fît la délicate, elle ne laisserait pas d'en mériter du blâme et de la punition. Ainsi arrive-t-il quelquefois, que la seule tentation nous met en péché, parce que nous sommes cause dicelle.

Par exemple, je sais que jouant j'entre volontiers en rage et blasphème, et que le jeu me sert de tentation à cela: je pèche toutes fois et quantes que je jouerai, et suis coupable de toutes les tentations qui m'arriveront au jeu.

De même, si je sais que quelque conversation m'apporte de la tentation et de la chute, et j'y vais volontairement, je suis indubitablement coupable de toutes les tentations que j'y recevrai.

Quand la délectation qui arrive de la tentation peut être évitée, c'est toujours péché de la recevoir, selon que le plaisir que l'on y prend et le consentement que l'on y donne est grand ou petit, de longue et de petite durée.

C'est toujours chose blâmable à la jeune princesse, de laquelle nous avons parlé, si non seulement elle écoute la proposition sale et déshonnête qui lui est faite, mais encore, après l'avoir ouïe, elle prend plaisir en icelle, entretenant son coeur avec contentement sur cet objet; car bien qu'elle ne veuille pas consentir à l'exécution réelle de ce qui lui est proposé, elle consent néanmoins à lapplication spirituelle de son coeur par le contentement qu'elle y prend, et c'est toujours chose déshonnête d'appliquer ou le coeur ou le corps à chose déshonnête; ains la déshonnêteté consiste tellement à l'application du coeur, que sans icelle l'application du corps ne peut être péché.

Quand donc vous serez tentée de quelque péché, considérez si vous avez donné volontairement sujet d'être tentée, et lors la tentation même vous met en état de péché, pour le hasard auquel vous vous êtes jetée. Et cela s'entend, si vous avez pu éviter commodément l'occasion, et que vous ayez prévu ou dû prévoir l'arrivée de la tentation, elle ne peut aucunement vous être imputée à péché.

Quand la délectation qui suit la tentation a pu être évitée, et que néanmoins on ne l'a pas évitée, il y a toujours quelque sorte de péché, selon que l'on y a peu ou prou arrêté, et selon la cause du plaisir que nous y avons pris.Une femme, laquelle n'ayant point donné de sujet d'être muguetée, prend néanmoins plaisir à l'être, ne laisse pas d'être blâmable, si le plaisir qu'elle y prend n'a point d'autre cause que la muguetterie.

Par exemple, si le galant qui lui veut donner de l'amour sonnait exquisement bien du luth et qu'elle prît plaisir, non pas à la recherche qui est faite de son amour, mais à l'harmonie et douceur du son du luth, il n'y aurait point de péché, bien qu'elle ne devrait pas continuer longuement en ce plaisir, de peur de faire passage dicelui à la délectation de la recherche.

De même donc, si quelqu'un me propose quelque stratagème plein d'invention et d'artifice pour me venger de mon ennemi, et que je ne prenne pas plaisir ni ne donne aucun consentement à la vengeance qui m'est proposée, mais seulement à la subtilité de l'invention de l'artifice, sans doute je ne pèche point, bien qu'il ne soit pas expédient que je m'amuse beaucoup à ce plaisir, de peur que petit à petit il ne me porte à quelque délectation de la vengeance même.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyLun 29 Jan - 18:03

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CHAPITRE VI

COMME LA TENTATION ET DÉLECTATION PEUVENT ÊTRE PÉCHÉ


On est quelquefois surpris de quelque chatouillement de délectation qui suit immédiatement la tentation, devant que bonnement on s'en soit pris garde; et cela ne peut être pour le plus qu'un bien léger péché véniel, lequel se rend plus grand si, après que l'on s'est aperçu du mal où l'on est, on demeure par négligence quelque temps à marchander avec la délectation, si l'on doit l'accepter ou la refuser ; et encore plus grand si, en s'en apercevant, on demeure en icelle quelque temps par vraie négligence, sans nulle sorte de propos de la rejeter.

Mais lorsque volontairement et de propos délibéré nous sommes résolus de nous plaire en telles délectations, ce propos même délibéré est un grand péché, si l'objet pour lequel nous avons délectation est notablement mauvais. C'est un grand vice à une femme de vouloir entretenir de mauvaises amours, quoiqu'elle ne veuille jamais s'adonner réellement à l'amoureux.

CHAPITRE VII

REMÈDES AUX GRANDES TENTATIONS


Sitôt que vous sentez en vous quelques tentations, faites comme les petits enfants, quand ils voient le loup ou l'ours en la campagne; car tout aussitôt, ils courent entre les bras de leur père et de leur mère, ou pour le moins les appellent à leur aide et secours. Recourez de même à Dieu, réclamant sa Miséricorde et son secours: c'est le remède que Notre Seigneur enseigne: « Priez, afin que vous nentriez point en tentation. »

Si vous voyez que néanmoins la tentation persévère ou qu'elle accroisse, courez en esprit embrasser la sainte Croix, comme si vous voyiez Jésus-Christ crucifié devant vous; protestez que vous ne consentirez point à la tentation et demandez-lui secours contre icelle, et continuez toujours à protester de ne vouloir point consentir, tandis que la tentation durera.

Mais en faisant ces protestations et ces refus de consentement, ne regardez point au visage de la tentation, ains seulement regardez Notre Seigneur; car si vous regardez la tentation, principalement quand elle est forte, elle pourrait ébranler votre courage.

Divertissez votre esprit par quelques occupations bonnes et louables; car ces occupations, entrant dedans votre coeur et prenant place, elles chasseront les tentations et suggestions malignes.

Le grand remède contre toutes tentations, grandes ou petites, c'est de déployer son coeur, et de communiquer les suggestions, ressentiments et affections que nous avons, à notre directeur; car notez que la première condition que le malin fait avec l'âme qu'il veut séduire, c'est du silence, comme font ceux qui veulent séduire les femmes et les filles, qui de prime abord défendent qu'elles ne communiquent point les propositions aux pères ni aux maris:

où au contraire Dieu, en ses inspirations, demande sur toutes choses que nous les fassions reconnaître par nos supérieurs et conducteurs.

Que si, après tout cela, la tentation s'opiniâtre à nous travailler et persécuter, nous n'avons rien à faire, sinon à nous opiniâtrer de notre côté en la protestation de ne vouloir point consentir; car, comme les filles ne peuvent être mariées, pendant qu'elles disent que non, ainsi l'âme, quoique troublée, ne peut jamais être offensée, pendant qu'elle dit que non.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 31 Jan - 1:42

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CHAPITRE VII

REMÈDES AUX GRANDES TENTATIONS


Ne disputez point avec votre ennemi et ne lui répondez jamais une seule parole, sinon celle que Notre Seigneur lui répondit, avec laquelle il le confondit: « Arrière, o Satan, tu adoreras le Seigneur ton Dieu et à lui seul serviras. »

Et comme la chaste femme ne doit répondre un seul mot, ni regarder en face le vilain poursuivant qui lui propose quelque déshonnêteté, mais le quittant tout court, doit à même instant retourner son coeur du côté de son époux, et rejurer la fidélité qu'elle lui a promise, sans s'amuser à barguigner, ainsi la dévote âme, se voyant assaillie de quelque tentation, ne doit nullement s'amuser à disputer ni répondre, mais tout simplement se retourner du côté de Jésus-Christ son époux, et lui protester derechef de sa fidélité, et de vouloir être à jamais uniquement toute sienne.

CHAPITRE VIII

QU'IL FAUT RÉSISTER AUX MENUES TENTATIONS


Quoiqu'il faille combattre les grandes tentations avec un courage invincible, et que la victoire que nous en rapportons nous soit extrêmement utile, si est-ce néanmoins quà l'aventure on fait plus de profit à bien combattre les petites; car, comme les grandes surpassent en qualité, les petites aussi surpassent si démesurément en nombre, que la victoire dicelles peut être comparable à celle des plus grandes.

Les loups et les ours sont sans doute plus dangereux que les mouches, mais si nous ne font-ils pas tant d'importunité et d'ennui, ni n'exercent pas tant notre patience. C'est chose bien aisée que de s'empêcher du meurtre, mais c'est chose difficile d'éviter les menues colères, desquelles les occasions se présentent à tout moment.

C'est chose bien aisée à un homme ou à une femme de s'empêcher de l'adultère, mais ce n'est pas chose si facile de s'empêcher des oeillades, de donner ou recevoir de l'amour, de procurer des grâces et menues faveurs, de dire et recevoir des paroles de cajolerie.

Il est bien aisé de ne point donner de corrival au mari ni de corrivale à la femme, quant au corps, mais il n'est pas si aisé de n'en point donner quant au coeur; bien aisé, de ne point souiller le lit du mariage, mais bien malaisé de ne point intéresser l'amour du mariage; bien aisé, de ne point dérober le bien dautrui, mais malaisé de ne point le mugueter et convoiter; bien aisé, de ne point dire de faux témoignage en jugement, mais malaisé de ne point mentir en conversation; bien aisé, de ne point s'enivrer, mais malaisé d'être sobre; bien aisé, de ne point désirer la mort d'autrui, mais malaisé de ne point désirer son incommodité; bien aisé, de ne le point diffamer, mais malaisé de ne le point mépriser.

Bref, ces menues tentations de colères, de soupçons, de jalousie, d'envie, d'amourettes, de folâtrerie, de vanités, de duplicités, d'afféterie, d'artifices, de cogitations déshonnêtes, ce sont les continuels exercices de ceux mêmes qui sont plus dévots et résolus: c'est pourquoi, ma chère Philothée, il faut qu'avec grand soin et diligence nous nous préparions à ce combat; et soyez assurée qu'autant de victoires que nous rapportons contre ces petits ennemis, autant de pierres précieuses seront mises en la couronne de gloire, que Dieu nous prépare en son paradis. C'est pourquoi je dis, qu'attendant de bien et vaillamment combattre les grandes tentations, si elles viennent, il nous faut bien et dignement défendre de ces menues et faibles attaques.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMer 31 Jan - 18:06

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CHAPITRE IX

COMME IL FAUT REMÉDIER AUX MENUES TENTATIONS


Or donc, quant à ces menues tentations de vanité, de soupçon, de chagrin, de jalousie, d'envie, d'amourettes, et semblables tricheries qui, comme mouches et moucherons, viennent passer devant nos yeux, et tantôt nous piquer sur la joue, tantôt sur le nez, parce qu'il est impossible d'être tout à fait exempt de leur importunité, la meilleure résistance qu'on leur puisse faire, c'est de ne s'en point tourmenter ; car tout cela ne peut nuire, quoiqu'il puisse faire de l'ennui, pourvu que l'on soit bien résolu de vouloir servir Dieu.

Méprisez donc ces menues attaques et ne daignez pas seulement penser à ce qu'elles veulent dire, mais laissez-les bourdonner autour de vos oreilles tant qu'elles voudront, et courir çà et là autour de vous, comme l'on fait des mouches; et quand elles viendront vous piquer, et que vous les verrez aucunement s'arrêter en votre coeur, ne faites autre chose que de tout simplement les ôter, non point combattant contre elles, ni leur répondant, mais faisant des actions contraires, quelles qu'elles soient, et spécialement de l'amour de Dieu.

Car si vous me croyez, vous ne vous opiniâtrerez pas à vouloir opposer la vertu contraire, à la tentation que vous sentez, parce que ce serait quasi vouloir disputer avec elle. Mais après avoir fait une action de cette vertu directement contraire, si vous avez eu le loisir de reconnaître la qualité de la tentation, vous ferez un simple retour de votre coeur, du côté de Jésus-Christ crucifié, et par une action d'amour en son endroit, vous lui baiserez les sacrés pieds.

C'est le meilleur moyen de vaincre l'ennemi, tant ès petites quès grandes tentations; car l'amour de Dieu contenant en soi toutes les perfections de toutes les vertus, et plus excellemment que les vertus mêmes, il est aussi un plus souverain remède contre tous vices ; et votre esprit s'accoutumant en toutes tentations de recourir à ce rendez-vous général, ne sera point obligé de regarder et examiner quelles tentations il a; mais simplement se sentant troublé, il s'accoisera en ce grand remède, lequel outre cela est si épouvantable au malin esprit, que quand il voit que ses tentations nous provoquent à ce divin amour, il cesse de nous en faire.

Et voilà quant aux menues et fréquentes tentations, avec lesquelles qui voudrait s'amuser par le menu, il se morfondrait et ne ferait rien.

CHAPITRE X

COMME IL FAUT FORTIFIER SON COEUR CONTRE LES TENTATIONS


Considérez de temps en temps quelles passions dominent le plus en votre âme; les ayant découvertes, prenez une façon de vivre qui leur soit toute contraire, en pensées, en paroles et en oeuvres. Par exemple, si vous vous sentez inclinée à la passion de la vanité, faites souvent des pensées de la misère de cette vie humaine; combien ces vanités seront ennuyeuses à la conscience, au jour de la mort; combien elles sont indignes dun coeur généreux; que ce ne sont que badineries et amusements de petits enfants, et semblables choses.

Parlez souvent contre la vanité; et encore qu'il vous semble que ce soit à contrecoeur, ne laissez pas de la bien mépriser, car par ce moyen vous vous engagerez même de réputation au parti contraire; et à force de dire contre quelque chose, nous nous émouvons à la haïr, bien qu'au commencement nous lui eussions de l'affection.

Faites des oeuvres d'abjection et d'humilité le plus que vous pourrez, encore qu'il vous semble que ce soit à regret; car par ce moyen vous vous habituez à l'humilité et affaiblissez votre vanité, en sorte que quand la tentation viendra, votre inclination ne la pourra pas tant favoriser, et vous aurez plus de force pour la combattre.

Source : Livres-mystiques.com

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyJeu 1 Fév - 17:13

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CHAPITRE X

COMME IL FAUT FORTIFIER SON COEUR CONTRE LES TENTATIONS


Si vous êtes inclinée à l'avarice, pensez souvent à la folie de ce péché qui nous rend esclaves de ce qui n'est créé que pour nous servir; qu'à la mort aussi bien faudra-t-il tout quitter, et le laisser entre les mains de tel qui le dissipera, ou auquel cela servira de ruine et de damnation, et semblables pensées.

Parlez fort contre lavarice, louez fort le mépris du inonde, violentez-vous à faire souvent des aumônes et des charités, et à laisser écouler quelques occasions d'assembler.

Si vous êtes sujette à vouloir donner ou recevoir de l'amour, pensez souvent combien cet amusement est dangereux, tant pour vous que pour les autres ; combien c'est une chose indigne de profaner et employer à passe-temps la plus noble affection qui soit en notre âme; combien cela est sujet au blâme d'une extrême légèreté d'esprit.

Parlez souvent en faveur de la pureté et simplicité de coeur, et faites aussi le plus qu'il vous sera possible des actions conformes à cela, évitant toutes afféteries et muguetteries.

En somme, en temps de paix, c'est-à-dire lorsque les tentations du péché, auquel vous êtes sujette, ne vous presseront pas, faites force actions de la vertu contraire, et si les occasions ne se présentent, allez au-devant d'elles pour les rencontrer; car par ce moyen vous renforcerez votre coeur contre la tentation future.

CHAPITRE XI

DE L'INQUIÉTUDE


L'inquiétude n'est pas une simple tentation, mais une source de laquelle et par laquelle plusieurs tentations arrivent : j'en dirai donc quelque chose.

La tristesse n'est autre chose que la douleur d'esprit que nous avons du mal, qui est en nous contre notre gré, soit que le mal soit extérieur, comme pauvreté, maladie, mépris, soit qu'il soit intérieur, comme ignorance, sécheresse, répugnance, tentation.

Quand donc l'âme sent qu'elle a quelque mal, elle se déplaît de l'avoir, et voilà la tristesse; et tout incontinent, elle désire d'en être quitte et davoir les moyens de s'en défaire; et jusques ici elle a raison, car naturellement chacun désire le bien, et fuit ce qu'il pense être mal.

Si l'âme cherche les moyens d'être délivrée de son mal pour l'amour de Dieu, elle les cherchera avec patience, douceur, humilité et tranquillité, attendant sa délivrance plus de la bonté et providence de Dieu que de sa peine, industrie ou diligence; si elle cherche sa délivrance pour l'amour-propre, elle s'empressera et s'échauffera à la quête des moyens, comme si ce bien dépendait plus d'elle que de Dieu : je ne dis pas qu'elle pense cela, mais je dis qu'elle s'empresse comme si elle le pensait.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 2 Fév - 18:33

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CHAPITRE XI

DE L'INQUIÉTUDE


Que si elle ne rencontre pas soudain ce qu'elle désire, elle entre en des grandes inquiétudes et impatiences, lesquelles nôtant pas le mal précédent, ains au contraire l'empirant, l'âme entre en une angoisse et détresse démesurée, avec une défaillance de courage et de force telle, qu'il lui semble que son mal nait plus de remède. Vous voyez donc que la tristesse, laquelle au commencement est juste, engendre l'inquiétude; et l'inquiétude engendre par après un surcroît de tristesse qui est extrêmement dangereux.

L'inquiétude est le plus grand mal qui arrive en l'âme, excepté le péché; car, comme les séditions et troubles intérieurs d'une république la ruinent entièrement, et l'empêchent qu'elle ne puisse résister à l'étranger, ainsi notre coeur étant troublé et inquiété en soi-même, perd la force de maintenir les vertus qu'il avait acquises, et quant et quant le moyen de résister aux tentations de l'ennemi, lequel fait alors toutes sortes d'efforts pour pêcher, comme l'on dit, en eau trouble.

L'inquiétude provient d'un désir déréglé d'être délivré du mal que l'on sent, ou d'acquérir le bien que l'on espère; et néanmoins il n'y a rien qui empire plus le mal et qui éloigne plus le bien, que l'inquiétude et empressement. Les oiseaux demeurent pris dedans les filets et lacs, parce que s'y trouvant engagés ils se débattent et remuent déréglément pour en sortir, ce que faisant ils s'enveloppent toujours tant plus.

Quand donc vous serez pressée du désir d'être délivrée de quelque mal ou de parvenir à quelque bien, avant toute chose mettez votre esprit en repos et tranquillité, faites rasseoir votre jugement et votre volonté; et puis, tout bellement et doucement, pourchassez l'issue de votre désir, prenant par ordre les moyens qui seront convenables ; et quand je dis tout bellement, je ne veux pas dire négligemment, mais sans empressement, trouble et inquiétude; autrement en lieu d'avoir l'effet de votre désir, vous gâterez tout et vous embarrasserez plus fort.

« Mon âme est toujours en mes mains, o Seigneur, et je n'ai point oublié votre loi », disait David. Examinez plus d'une fois le jour, mais au moins le soir et le matin, si vous avez votre âme en vos mains, ou si quelque passion et inquiétude vous la point ravie; considérez si vous-avez votre coeur à votre commandement, ou bien s'il est point échappé de vos mains, pour s'engager à quelque affection déréglée d'amour, de haine, d'envie, de convoitise, de crainte, d'ennui, de joie.

Que s'il est égaré, avant toutes choses, cherchez-le et le ramenez tout belle-ment en la présence de Dieu, remettant vos affections et désirs sous l'obéissance et conduite de sa divine volonté. Car, comme ceux qui craignent de perdre quelque chose qui leur est précieuse, la tiennent bien serrée en leur main, ainsi, à l'imitation de ce grand roi, nous devons toujours dire: « O mon Dieu, mon âme est au hasard ; c'est pourquoi je la porte toujours en mes mains, et en cette sorte, je n'ai point oublié votre sainte loi. »

Ne permettez pas à vos désirs, pour petits qu'ils soient et de petite importance, qu'ils vous inquiètent; car après les petits, les grands et plus importants trouveront votre coeur plus disposé au trouble et dérèglement. Quand vous sentirez arriver l'inquiétude, recommandez-vous à Dieu et résolvez-vous de ne rien faire du tout de ce que votre désir requiert de vous,que l'inquiétude ne soit totalement passée, sinon que ce fût chose qui ne se pût différer; et alors il faut, avec un doux et tranquille effort, retenir le courant de votre désir, l'attrempant et modérant tant qu'il vous sera possible, et sur cela, faire la chose non selon votre désir, mais selon la raison.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyDim 4 Fév - 1:06

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CHAPITRE XI

DE L'INQUIÉTUDE


Si vous pouvez découvrir votre inquiétude à celui qui conduit votre âme, ou au moins à quelque confident et dévot ami, ne doutez point que tout aussitôt vous ne soyez accoisée; car la communication des douleurs de coeur fait le même effet en l'âge, que la saignée fait au corps de celui qui est en fièvre continue : c'est le remède des remèdes.

Aussi le roi saint Louis donna cet avis à son fils: « Si tu as en ton coeur aucun malaise, dis-le incontinent à ton confesseur ou à aucune bonne personne, et ains pourras ton mal légèrement porter, par le réconfort quil te donnera. »

CHAPITRE XII

DE LA TRISTESSE


« La tristesse qui est selon Dieu, dit saint Paul, opère la pénitence pour le salut; la tristesse du monde opère la mort. » La tristesse donc peut être bonne et mauvaise, selon les diverses productions qu'elle fait en nous.

Il est vrai qu'elle en fait plus de mauvaises que de bonnes, car elle n'en fait que deux bonnes, à savoir: m
Miséricorde et pénitence; et il y en a six mauvaises, à savoir: angoisse, paresse, indignation, jalousie, envie et impatience; qui a fait dire au Sage:

« La tristesse en tue beaucoup, et n'y a point de profit en icelle », parce que, pour deux bons ruisseaux qui proviennent de la source de tristesse, il y en a six qui sont bien mauvais.

L'ennemi se sert de la tristesse pour exercer ses tentations à l'endroit des bons; car, comme il tâche de faire réjouir les mauvais en leur péché, aussi tâche-t-il d'attrister les bons en leurs bonnes oeuvres; et comme il ne peut procurer le mal qu'en le faisant trouver agréable, aussi ne peut-il détourner du bien, qu'en le faisant trouver désagréable.

Le malin se plaît en la tristesse et mélancolie, parce qu'il est triste et mélancolique et le sera éternellement: dont il voudrait que chacun fût comme lui.

La mauvaise tristesse trouble lâme, la met en inquiétude, donne des craintes déréglées, dégoûte de l'oraison, assoupit et accable le cerveau, prive l'âme de conseil, de résolution, de jugement et de courage, et abat les forces: bref, elle est comme un dur hiver qui fauche toute la beauté de la terre et engourdit tous les animaux; car elle ôte toute suavité de l'âme, et la rend presque percluse et impuissante en toutes ses facultés.

Si jamais il vous arrivait, Philothée, d'être atteinte de cette mauvaise tristesse, pratiquez les !

Remèdes suivants : « Quelqu'un est-il triste, dit saint Jacques, qu'il prie » : la prière est un souverain remède, car elle élève l'esprit en Dieu, qui est notre unique joie et consolation; mais en priant, usez d'affections et paroles, soit intérieures, soit extérieures, qui tendent à la confiance et amour de Dieu, comme:

« O Dieu de Miséricorde! mon très bon Dieu! mon Sauveur débonnaire! Dieu de mon coeur! ma joie, mon espérance, mon cher époux, le bien-aimé de mon âme! » et semblables.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyLun 5 Fév - 19:29

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CHAPITRE XII

DE LA TRISTESSE


La discipline modérée est bonne contre la tristesse, parce que cette volontaire affliction extérieure impètre la consolation intérieure, et l'âme, sentant des douleurs de dehors, se divertit de celles qui sont au dedans. La fréquentation de la sainte Communion est excellente; car ce pain céleste affermit le coeur et réjouit l'esprit.

Découvrez tous les ressentiments, affections et suggestions qui proviennent de votre tristesse à votre conducteur et confesseur, humblement et fidèlement; cherchez les conversations des personnes spirituelles, et les hantez le plus que vous pourrez pendant ce temps-là. Et en fin finale, résignez-vous entre les mains de Dieu, vous préparant à souffrir cette ennuyeuse tristesse patiemment, comme juste punition de vos vaines allégresses; et ne doutez nullement que Dieu, après vous avoir éprouvée, ne vous délivre de ce mal.

CHAPITRE XIII

DES CONSOLATIONS SPIRITUELLES ET SENSIBLES ET COMME IL SE FAUT COMPORTER EN ICELLES


Dieu continue l'être de ce grand monde en une perpétuelle vicissitude, par laquelle le jour se change toujours en nuit, le printemps en été, l'été en automne, l'automne en hiver et l'hiver en printemps, et l'un des jours ne ressemble jamais parfaitement l'autre: on en voit de nubileux, de pluvieux, de secs, de venteux, variété qui donne une grande beauté à cet univers.

Il en est de même de l'homme, qui est, selon le dire des Anciens, un abrégé du monde; car jamais il n'est en un même état, et sa vie écoule sur cette terre comme les eaux, flottant et ondoyant en une perpétuelle diversité de mouvements, qui tantôt l'élèvent aux espérances, tantôt l'abaissent par la crainte, tantôt le plient à droite par la consolation, tantôt à gauche par l'affliction, et jamais une seule de ses journées, ni même de ses heures, n'est entièrement pareille à lautre.

C'est un grand avertissement que celui-ci : il nous faut tâcher d'avoir une continuelle et inviolable égalité de coeur, en une si grande inégalité d'accidents, et quoique toutes choses se tournent et varient diversement autour de nous, il nous faut demeurer constamment immobiles à toujours regarder, tendre et prétendre à notre Dieu.

Que le navire prenne telle route qu'on voudra, qu'il cingle au ponant ou levant, au midi ou septentrion, et quelque vent que ce soit qui le porte, jamais pourtant son aiguille marine ne regardera que sa belle étoile et le pôle.

Que tout se renverse sans dessus dessous, je ne dis pas seulement autour de nous, mais je dis en goût ; c'est-à-dire que notre âme soit triste, joyeuse, en douceur, en amertume, en paix, en trouble, en clarté, en ténèbres, en tentations, en repos, en goût, en dégoût, en sécheresse, en tendreté; que le soleil la brûle ou que la rosée la rafraîchisse, ah! si faut-il pourtant quà jamais et toujours la pointe de notre coeur, notre esprit, notre volonté supérieure, qui est notre boussole, regarde incessamment et tende perpétuellement à l'amour de Dieu son Créateur, son Sauveur, son unique et souverain bien.

« Ou que nous vivions ou que nous mourions, dit l'Apôtre, si sommes-nous à Dieu... Qui nous séparera de l'amour et charité de Dieu ? » Non, jamais rien ne nous séparera de cet amour: ni la tribulation, ni langoisse, ni la mort, ni la vie, ni la douleur présente, ni la crainte des accidents futurs, ni les artifices des malins esprits, ni la hauteur des consolations, ni la profondité des afflictions, ni la tendreté, ni la sécheresse ne nous doit jamais séparer de cette sainte charité, qui est fondée en Jésus-Christ.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyMar 6 Fév - 17:26

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CHAPITRE XIII
DES CONSOLATIONS SPIRITUELLES ET SENSIBLES
ET COMME IL SE FAUT COMPORTER EN ICELLES


Cette résolution si absolue de ne jamais abandonner Dieu ni quitter son doux amour, sert de contrepoids à nos âmes pour les tenir en la sainte égalité, parmi l'inégalité de divers mouvements, que la condition de cette vie lui apporte.

Car, comme les avettes, se voyant surprises du vent en la campagne, embrassent des pierres pour se pouvoir balancer en l'air et n'être pas si aisément transportées à la merci de l'orage, ainsi notre âme ayant vivement embrassé par résolution le précieux amour de son Dieu, demeure constante parmi l'inconstance et vicissitude des consolations et afflictions, tant spirituelles que temporelles, tant extérieures qu'intérieures.

Mais outre cette générale doctrine, nous avons besoin de quelques documents particuliers.

1. Je dis donc que la dévotion ne consiste pas en la douceur, suavité, consolation et tendreté sensible du coeur, qui nous provoque aux larmes et soupirs, et nous donne une certaine satisfaction agréable et savoureuse en quelques exercices spirituels.

Non, chère Philothée, la dévotion et cela ne sont pas une même chose; car il y a beaucoup d'âmes qui ont de ces tendretés et consolations, qui néanmoins ne laissent pas d'être fort vicieuses, et par conséquent n'ont aucun vrai amour de Dieu et, beaucoup moins, aucune vraie dévotion.

Saili poursuivant à mort le pauvre David, qui fuyait devant lui ès déserts dEngaddi, entra tout seul en une caverne, en laquelle David avec ses gens étaient cachés; David, qui en cette occasion l'eût pu mille fois tuer, lui donna la vie et ne voulut seulement pas lui faire peur, ans l'ayant laissé sortir à son aise l'appela par après, pour lui remontrer son innocence, et lui faire connaître quil avait été à sa merci.

Or, sur cela, quest-ce que ne fit pas Saül, pour témoigner que son coeur était amolli envers David? Il le nomma son enfant, il se mit à pleurer tout haut, à le louer, à confesser sa débonnaireté, à prier Dieu pour lui, à présager sa future grandeur et à lui recommander la postérité quil devait laisser après soi.

Quelle plus grande douceur et tendreté de coeur, pouvait-il faire paraître ? et pour tout cela, néanmoins, il n'avait point changé son âme, ne laissant pas de continuer sa persécution contre David, aussi cruellement qu'auparavant.

Ainsi se trouve-t-il des personnes, qui considérant la bonté de Dieu et la Passion du Sauveur sentent des grands attendrissements de coeur, qui leur font jeter des soupirs, des larmes, des prières et actions de grâces fort sensibles, si qu'on dirait quelles ont le coeur saisi dune bien grande dévotion.

Mais quand ce vient à l'essai, on trouve que comme les pluies passagères d'un été bien chaud, qui tombent en grosses gouttes sur la terre ne la pénètrent point et ne servent qu'à la production des champignons, ainsi ces larmes et tendretés, tombant sur un coeur vicieux et ne le pénétrant point, lui sont tout à fait inutiles :

car pour tout cela, les pauvres gens ne quitteraient pas un seul liard du bien mal acquis qu'ils possèdent, ne renonceraient pas une seule de leurs perverses affections, et ne voudraient pas avoir pris la moindre incommodité du monde, pour le service du Sauveur sur lequel ils ont pleuré; en sorte que les bons mouvements qu'ils ont eus, ne sont que des certains champignons spirituels, qui non seulement ne sont pas la vraie dévotion, mais bien souvent sont des grandes ruses de l'ennemi, qui, amusant les âmes à ces menues consolations, les fait demeurer contentes et satisfaites en cela, à ce qu'elles ne cherchent plus la vraie et solide dévotion, qui consiste en une volonté constante, résolue, prompte et active d'exécuter ce que l'on sait être agréable à Dieu.

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CHAPITRE XIII
DES CONSOLATIONS SPIRITUELLES ET SENSIBLES
ET COMME IL SE FAUT COMPORTER EN ICELLES


Un enfant pleurera tendrement, s'il voit donner un coup de lancette à sa mère qu'on saigne; mais si à même temps sa mère, pour la quelle il pleurait, lui demande une pomme ou un cornet de dragées quil tient en sa main, il ne le voudra nullement lâcher.

Telles sont la plupart de nos tendres dévotions: voyant donner un coup de lance qui transperce le coeur de Jésus-Christ crucifié, nous pleurons tendrement.

Hélas! Philothée, c'est bien fait de pleurer sur cette mort et passion douloureuse de notre Père et Rédempteur; mais pourquoi donc ne lui donnons-nous tout de bon la pomme que nous avons en nos mains et qu'il nous demande si instamment, à savoir notre coeur, unique pomme d'amour que ce cher Sauveur requiert de nous ?

Que ne lui résignons-nous tant de menues affections, délectations, complaisances, qu'il nous veut arracher des mains et ne peut, parce que c'est notre dragée, de laquelle nous sommes plus friands, que désireux de sa céleste grâce ?

Ah! ce sont des amitiés de petits enfants que cela, tendres, mais faibles, mais fantasques, mais sans effet. La dévotion donc ne gît pas en ces tendretés et sensibles affections, qui quelquefois procèdent de la nature, qui est ainsi molle et susceptible de l'impression qu'on lui veut donner, et quelquefois viennent de l'ennemi qui, pour nous amuser à cela, excite notre imagination à l'appréhension propre pour tels effets.

2. Ces tendretés et affectueuses douceurs sont néanmoins quelquefois très bonnes et utiles; car elles excitent l'appétit de l'âme, confortent l'esprit, et ajoutent à la promptitude de la dévotion une sainte gaîté et allégresse, qui rend nos actions belles et agréables, même en l'extérieur. C'est ce goût que l'on a ès choses divines, pour lequel David s'écriait:

« O Seigneur, que vos paroles sont douces à mon palais! elles sont plus douces que le miel à ma bouche. » Et certes, la moindre petite consolation de la dévotion, que nous recevons, vaut mieux de toute façon que les plus excellentes récréations du monde.

Les mamelles et le lait, cest-à-dire les faveurs du divin Epoux, sont meilleures à l'âme que le vin le plus précieux des plaisirs de la terre : qui en a goûté, tient tout le reste des autres consolations pour du fiel et de labsinthe. Et comme ceux qui ont l'herbe scitique en la bouche en reçoivent une si extrême douceur, qu'ils ne sentent ni faim ni soif, ainsi ceux à qui Dieu a donné cette manne céleste des suavités et consolations intérieures, ne peuvent désirer ni recevoir les consolations du monde, pour au moins y prendre goût et y amuser leurs affections.

Ce sont des petits avant-goût des suavités immortelles, que Dieu donne aux âmes qui le cherchent; ce sont des grains sucrés, qu'il donne à ses petits enfants pour les amorcer; ce sont des eaux cordiales, quil leur présente pour les conforter, et ce sont aussi quelquefois des arrhes des récompenses éternelles.

On dit qu'Alexandre le Grand, cinglant en haute mer, découvrit premièrement l'Arabie Heureuse, par le sentiment qu'il eut des suaves odeurs que le vent lui donnait; et sur cela, se donna du courage, et à tous ses compagnons: ainsi nous recevons souvent des douceurs et suavités en cette mer de la vie mortelle, qui sans doute nous font pressentir les délices de cette patrie céleste, à laquelle nous tendons et aspirons.

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MessageSujet: Re: Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales   Méditation avec L'introduction à la vie dévote de St François de Sales - Page 3 EmptyVen 9 Fév - 3:15

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CHAPITRE XIII

DES CONSOLATIONS SPIRITUELLES ET SENSIBLES
ET COMME IL SE FAUT COMPORTER EN ICELLES


3. Mais, ce me direz-vous, puisqu'il y a des consolations sensibles qui sont bonnes et viennent de Dieu et que néanmoins il y en a des inutiles, dangereuses, voire pernicieuses, qui viennent ou de la nature ou même de l'ennemi, comment pourrai-je discerner les unes des autres et connaître les mauvaises ou inutiles entre les bonnes ?

C'est une générale doctrine, très chère Philothée, pour les affections et passions de nos âmes, que nous les devons connaître par leurs fruits. Nos coeurs sont des arbres, les affections et passions sont leurs branches, et leurs oeuvres ou actions sont les fruits.

Le coeur est bon, qui a de bonnes affections, et les affections et passions sont bonnes, qui produisent en nous des bons effets et saintes actions.

Si les douceurs, tendretés et consolations nous rendent plus humbles, patients, traitables, charitables et compatissants à l'endroit du prochain, plus fervents à mortifier nos concupiscences et mauvaises inclinations, plus constants en nos exercices, plus maniables et souples à ceux à qui nous devons obéir, plus simples en notre vie, sans doute, Philothée, qu'elles sont de Dieu; mais si ces douceurs n'ont de la douceur que pour nous, qu'elles nous rendent curieux, aigres, pointilleux, impatients, opiniâtres, fiers, présomptueux, durs à l'endroit du prochain, et que, pensant déjà être des petits saints, nous ne voulons plus être sujets à la direction ni à la correction, indubitablement ce sont des consolations fausses et pernicieuses. « Un bon arbre ne produit que des bons fruits. »

4. Quand nous aurons de ces douleurs et consolations: 1. Il nous faut beaucoup humilier devant Dieu ; gardons-nous bien de dire pour ces douceurs: « Oh! que je suis bon! » Non, Philothée, ce sont des biens qui ne nous rendent pas meilleurs, car, comme j'ai dit, la dévotion ne consiste pas en cela; mais disons: « Oh! que Dieu est bon à ceux qui espèrent en lui, à l'âme qui le recherche! »

Qui a le sucre en bouche ne peut pas dire que sa bouche soit douce, mais oui bien que le sucre est doux; ainsi, encore que cette douceur spirituelle est fort bonne, et Dieu qui nous la donne est très bon, il ne sensuit pas que celui qui la reçoit soit bon.

2. Connaissons que nous sommes encore de petits enfants qui avons besoin de lait, et que ces grains sucrés nous sont donnés parce que nous avons encore l'esprit tendre et délicat, qui a besoin d'amorces et d'appas pour être attiré à l'amour de Dieu.

3. Mais après cela, parlant généralement et pour l'ordinaire, recevons humblement ces grâces et faveurs et les estimons extrêmement grandes, non tant parce qu'elles le sont en elles-mêmes, comme parce que c'est la main de Dieu qui nous les met au coeur; comme ferait une mère, qui pour amadouer son enfant, lui mettrait elle-même les grains de dragée en bouche, l'un après lautre, car si l'enfant avait de l'esprit, il priserait plus la douceur de la mignardise et caresse que sa mère lui fait, que la douceur de la dragée même.

Et ainsi, c'est beaucoup, Philothée, d'avoir les douceurs ; mais c'est la douceur des douceurs de considérer que Dieu, de sa main amoureuse et maternelle, les nous met en la bouche, au coeur, en l'âme, en l'esprit.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE XIII

DES CONSOLATIONS SPIRITUELLES ET SENSIBLES
ET COMME IL SE FAUT COMPORTER EN ICELLES


4. Les ayant reçues ainsi humblement, employons-les soigneusement, selon lintention de Celui qui les nous donne. Pourquoi pensons-nous que Dieu nous donne ces douceurs ? pour nous rendre doux envers un chacun et amoureux envers lui. La mère donne la dragée à l'enfant, afin qu'il la baise: baisons donc ce Sauveur qui nous donne tant de douceur.

Or, baiser le Sauveur, c'est lui obéir, garder ses commandements, faire ses volontés, suivre ses désirs : bref, l'embrasser tendrement avec obéissance et fidélité. Quand donc nous aurons reçu quelque consolation spirituelle, il faut ce jour-là se rendre plus diligents à bien faire et à nous humilier.

5. Il faut, outre tout cela, renoncer de temps en temps à telles douceurs, tendretés et consolations, séparant notre coeur dicelles et protestant, qu'encore que nous les acceptions humblement et les aimions, parce que Dieu nous les envoie et quelles nous provoquent à son amour, ce ne sont néanmoins pas elles que nous cherchons, mais Dieu et son saint amour : non la consolation, mais le Consolateur ; non la douceur, mais le doux Sauveur; non la tendreté, mais Celui qui est la suavité du ciel et de la terre ; et en cette affection nous nous devons disposer à demeurer fermes au saint amour de Dieu, quoique de notre vie nous ne dussions jamais avoir aucune consolation, et de vouloir dire également sur le mont de Calvaire, comme sur celui de Thabor: « O Seigneur, il m'est bon d'être avec vous », ou que vous soyez en croix, ou que vous soyez en gloire.

6. Finalement je vous avertis, que s'il vous arrivait quelque notable abondance de telles consolations, tendretés, larmes et douceurs, ou quelque chose d'extraordinaire en icelles, vous en confériez fidèlement avec votre conducteur, afin d'apprendre comme il s'y faut modérer et comporter, car il est écrit « As-tu trouvé le miel ? manges-en ce qui suffit. »

CHAPITRE XIV
DES SÉCHERESSES ET STÉRILITÉS SPIRITUELLES

Vous ferez donc ainsi que je vous viens de dire, très chère Philothée, quand vous avez des consolations ; mais ce beau temps si agréable ne durera pas toujours, ans il adviendra que quelquefois vous serez tellement privée et destituée du sentiment de la dévotion, qu'il vous sera avis que votre âme soit une terre déserte, infructueuse, stérile, en la quelle il n'y ait ni sentier ni chemin pour trouver Dieu, ni aucune eau de grâce qui la puisse arroser, à cause des sécheresses qui, ce semble, la réduiront totalement en friche.

Hélas ! que l'âme qui est en cet état est digne de compassion, et surtout quand ce mal est véhément t car alors, à l'imitation de David, elle se repaît de larmes jour et nuit, tandis que par mille suggestions l'ennemi, pour la désespérer, se moque d'elle et lui dit: « Ah ! pauvrette, où est ton Dieu ? par quel chemin le pourras-tu trouver ? qui te pourra jamais rendre la joie de sa sainte grâce? » Que ferez-vous donc en ce temps-là, Philothée? Prenez garde doù le mal vous arrive : nous sommes souvent nous-mêmes la cause de nos stérilités et sécheresses.

1. Comme une mère refuse le sucre à son enfant qui est sujet aux vers, ainsi Dieu nous ôte les consolations, quand nous y prenons quelque vaine complaisance et que nous sommes sujets aux vers de l'outrecuidance: « Ii m'est bon, o mon Dieu, que vous m'humiliiez; oui, car avant que je fusse humiliée, je vous avais offensé.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE XIV

DES SÉCHERESSES ET STÉRILITÉS SPIRITUELLES


2. Quand nous négligeons de recueillir les suavités et délices de l'amour de Dieu, lorsqu'il en est temps, il les écarte de nous en punition de notre paresse : l'Israélite, qui n'amassait la manne de bon matin, ne le pouvait plus faire après le soleil levé, car elle se trouvait toute fondue.

3. Nous sommes quelquefois couchés dans un lit des contentements sensuels et consolations périssables, comme était l'Epouse sacrée ès Cantiques l'Epoux de nos âmes à la porte de notre coeur nous inspire de nous remettre à nos exercices spirituels; mais nous marchandons avec lui, d'autant qu'il nous fâche de quitter ces vains amusements et de nous séparer de ces faux contentements ; c'est pourquoi il passe outre et nous laisse croupir, puis, quand nous le voulons chercher, nous avons beaucoup de peine à le trouver: aussi l'avons-nous bien mérité, puisque nous avons été si infidèles et déloyaux à son amour, que d'en avoir refusé l'exercice pour suivre celui des choses du monde. Ah! vous avez donc de la farine d'Egypte :

vous n'aurez donc point de la manne du ciel. Les abeilles haïssent toutes les odeurs artificielles ; et les suavités du Saint-Esprit sont incompatibles avec les délices artificieuses du monde.

4. La duplicité et finesse d'esprit exercée ès confessions et communications spirituelles, que l'on fait avec son conducteur, attire les sécheresses et stérilités: car puisque vous mentez au Saint-Esprit, ce n'est pas merveille s'il vous refuse sa consolation ; vous ne voulez pas être simple et naïve comme un petit enfant, vous n'aurez donc pas la dragée des petits enfants.

5. Vous vous êtes bien soûlée des contentements mondains, ce n'est pas merveille si les délices spirituelles vous sont à dégoût: les colombes jà soûles, dit l'ancien proverbe, trouvent amères les cerises. « Il a rempli de biens, dit Notre Dame, les affamés ; et les riches, il les a laissés vides »: ceux qui sont riches des plaisirs mondains ne sont pas capables des spirituels.

6. Avez-vous bien conservé les fruits des consolations reçues ? vous en aurez donc des nouvelles, « car à celui qui a, on lui en donnera davantage; et à celui qui n'a pas ce qu'on lui a donné, mais qui la perdu par sa faute, on lui ôtera même ce qu'il n'a pas »; c'est-à-dire on le privera des grâces, qui lui étaient préparées. Il est vrai, la pluie vivifie les plantes qui ont de la verdeur; mais à celles qui ne l'ont point, elle leur ôte encore la vie qu'elles n'ont point, car elles en pourrissent tout à fait.

Pour plusieurs telles causes, nous perdons les consolations dévotieuses et tombons en sécheresse et stérilité desprit: examinons donc notre conscience, si nous remarquerons en nous quelques semblables défauts. Mais notez, Philothée, quil ne faut pas faire cet examen avec inquiétude et trop de curiosité; ainsi après avoir fidèlement considéré nos déportements pour ce regard, si nous trouvons la cause du mal en nous, il en faut remercier Dieu ; car le mal est à moitié guéri, quand on a découvert sa cause.

Si, au contraire, vous ne voyez rien en particulier qui vous semble avoir causé cette sécheresse, ne vous amusez point à une plus curieuse recherche, mais avec toute simplicité, sans plus examiner aucune particularité, faites ce que je vous dirai:...

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CHAPITRE XIV

DES SÉCHERESSES ET STÉRILITÉS SPIRITUELLES


1. Humiliez-vous grandement devant Dieu, en la connaissance de votre néant et misère :

« Hélas! qu'est-ce que de moi, quand je suis à moi-même? non autre chose, o Seigneur, sinon une terre sèche, laquelle crevassée de toutes parts, témoigne la soif qu'elle a de la pluie du ciel ; et cependant le vent la dissipe et réduit en poussière. »

2. Invoquez Dieu et lui demandez son allégresse:

«Rendez-moi, o Seigneur, l'allégresse de votre salut. Mon Père, s'il est possible, transportez ce calice de moi. Ote-toi d'ici, o bise infructueuse qui dessèches mon âme; et venez, o gracieux vent des consolations, et soufflez dans mon jardin;, et ses siennes affections répandront l'odeur de suavité. »

3. Allez à votre confesseur; ouvrez-lui bien votre coeur; faites-lui bien voir tous les replis de votre âme ; prenez les avis qu'il vous donnera, avec grande simplicité et humilité: car Dieu qui aime infiniment l'obéissance, rend souvent utiles les conseils que l'on prend d'autrui, et surtout des conducteurs des âmes, encore que d'ailleurs il n'y eût pas grande apparence ; comme il rendit profitables à Naaman les eaux du Jourdain, desquelles Elisée, sans aucune apparence de raison humaine, lui avait ordonné l'usage.

4. Mais après tout cela, rien n'est si utile, rien si fructueux en telles sécheresses et stérilités, que de ne point s'affectionner et attacher au désir d'en être délivré.

Je ne dis pas qu'on ne doive faire des simples souhaits de la délivrance; mais je dis qu'on ne s'y doit pas affectionner, ans se remettre à la pure merci de la spéciale providence de Dieu, afin que tant qu'il lui plaira, il se serve de nous entre ces épines et parmi ces déserts.

Disons donc à Dieu en ce temps-là: « O Père, s'il est possible, transportez de moi ce calice » ; mais ajoutons de grand courage :

« Toutefois, non ma volonté, mais la vôtre soit faite »; et arrêtons-nous à cela avec le plus de repos que nous pourrons; car Dieu, nous voyant en cette sainte indifférence, nous consolera de plusieurs grâces et faveurs; comme, quand il vit Abraham résolu de se priver de son enfant Isaac, il se contenta de le voir indifférent en cette pure résignation, le consolant d'une vision très agréable et par des très douces bénédictions.

Nous devons donc en toutes sortes d'afflictions, tant corporelles que spirituelles, et ès distractions ou soustractions de la dévotion sensible qui nous arrivent, dire de tout notre coeur et avec une profonde soumission:

« Le Seigneur m'a donné des consolations; le Seigneur me les a ôtées : son saint Nom soit béni ; car persévérant en cette humilité, il nous rendra ses délicieuses faveurs, comme il fit à Job qui usa constamment de pareilles paroles en toutes ses désolations.

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